Des dons de voyance ? Il se foutait d'elle ou pas ? Sous le coup de la surprise, ses yeux s'écarquillèrent et elle se tourna immédiatement vers lui, choquée. Puis l'éclat de rire du brun fit s'envoler toutes les questions qu'elle se posait. Elle avait toujours été naïve et crédule et avait donc tout de suite jugée que, s'il le disait, s'était surement vrai. Grand mal lui en pris. De nouveau boudeuse, elle grogna mille et une menace d'une future revanche dans sa barbe. Comment avait-il pu lui faire ça ? Mais avant qu'elle n'ait pu faire quoique ce soit, son ami repris la parole. Elle se figea en entendant ses propos. Comment pouvait-il affirmer tranquillement -et y croire- qu'elle était la seule à le suivre ? Elle leva les yeux au ciel en pensant qu'il ne devait pas se rendre compte qu'il était au centre des discussions de certaines filles de l'école. Comme elle aurait aimé que les garçons parlent d'elles en termes aussi élogieux, soupira-t-elle. Mais ceci était une autre histoire et, bien que cela lui aurait été agréable, elle devait admettre qu'il y avait beaucoup d'autres choses qui lui feraient plaisir. Puis elle reporta son attention sur son camarade et se redressa pour lui taper doucement l'arrière de la tête.

"Arrête de faire ton imbécile, le gronda-t-elle. Si tu savais le nombre de filles qui me harcèlent de questions sur toi ! Môssieur fait son petit effet à ses Demoiselles..."

Puis la seconde partie de la phrase d'Edwin lui revint en mémoire. Comment ça, elle respirait fort ? Il n'avait qu'à lui dire qu'elle ronflait, aussi ! Vexée, elle plissa les yeux pour lui faire part de son mécontentement quand à cette remarque.

"En parlant de drague... Savais-tu que cela ne se faisait pas de dire à une jeune et jolie fille qu'elle "respire fort", questionna-t-elle d'une voie dangereusement basse. Espèce de Casanova de bas étage !"

Avisant qu'il prenait sa guitare, elle se rallongea dans l'herbe, soudainement calmée. C'était un fait et elle ne pouvait le nier, Avril adorait quand Edwin se mettait à jouer. Il fallait dire que le jeune homme avait un sacré talent pour la guitare et que se laisser aller au soleil, bercée par le son de l'instrument était une activité plus que tentante. Elle ferma donc les yeux et profita de la musique. Un doux sourire étira ses lèvres quand elle reconnue sa chanson préférée. Le brun la connaissait bien.

"J'adore cette musique, soupira-t-elle en guise de remerciement une fois qu'il eut terminé le morceau, les yeux toujours fermés."

Avril sentit un corps s'asseoir tout près d'elle et, ne voulant pas se laisser attendrir par son ami, tourna la tête dans la direction opposée. Un petit rictus amusé joua sur ses lèvres quand elle entendit la première approche d'Edwin. Un compliment ne suffira pas à l'adoucir et le brun devait le savoir. Comme si elle était le genre de filles qu'une parole en l'air pouvait calmer ou charmer. Elle ne bougea pas d'un pouce et laissa au silence le soin de répondre à sa place. Néanmoins, elle sursauta légèrement quand un bras musclé vint entourer ses épaules. Elle se débattit pour lui faire lâcher prise mais fut vite forcée d'admettre que le Gryffondor avait plus de force qu'elle. Abandonnant cette petite lutte, elle se figea. Cette défaite physique ne fit que raviver sa colère.

Edwin reprit la parole et son affirmation lui fit lever les yeux au ciel. Comme si les filles qui lui couraient après attendaient d'être au toilette pour discuter de ce genre de choses. Il était vraiment naïf pour penser ainsi. Cela aussi l'agaçait, ces petites rumeurs qui trainaient depuis déjà un moment sur eux. Elle réussissait généralement à faire abstraction mais, à la longue, ces insinuations l'épuisaient. Elle faillit ouvrir la bouche mais se ravisa au dernier moment. Ce n'était pas l'objet de cette dispute. Pourtant ces yeux se plissèrent un peu plus et la tension dans son dos s'accentua quand il lança une énième plaisanterie. Le seul qui pouvait la supporter ? Vraiment ? La pensée lui fit mal. Elle savait qu'elle n'avait pas un caractère facile, que les garçons préféraient les filles plus féminine ou plus douce et calme mais elle n'y pouvait rien. Elle n'avait pas choisie d'être énergique, optimiste, bavarde et un peu folle sur les bords. Bien sur, elle avait pas mal d'amis, que ce soit des filles ou des jeunes hommes mais elle était l'amie, rien de plus. Elle attirait les membres du sexe opposé grâce à son physique mais, quand ils apprenaient à la connaitre, il ne la considérait plus comme une petite amie potentielle et, bien qu'elle laisse paraitre le contraire, cela la blessait un peu plus à chaque fois.

Les supplications qui suivirent la sortirent de sa soudaine tristesse. Elle les écouta d'une oreille distraite et ne répondit pas immédiatement. Bien sur qu'elle savait qu'il plaisantait mais il faudrait qu'il comprenne qu'il y avait des sujets qui la touchaient plus que d'autre et que ce n'était pas parce qu'elle souriait quasiment tout le temps qu'elle était plus forte que d'autres. Cependant il ne s'était toujours pas excusé... Elle allait ouvrir la bouche quand, du coin de l’œil, elle perçut un mouvement. Elle tourna la tête et découvrit qu'une guêpe tournait près d'eux. Elle n'eut pas le temps de calmer la frayeur qui s'emparait d'elle que l'insecte vint bourdonner dans son oreille. Un cri perçant lui échappa et, sans réfléchir, elle se blottit contre Edwin en fermant les yeux. Elle n'y pouvait rien, elle avait une véritable horreur des insectes et particulièrement des guêpes. Tremblante, elle rentra la tête dans ses épaule et agrippa la robe de sorcier de son compagnon tout en priant pour que l'insecte parte vite.

Une chose était sûre, la blonde n'avait pas prévu que sa réaction aurait de telles conséquences et quand bien même, elle n'aurait pu s'en empêcher. Cette peur était bien trop irrationnelle et encrée en elle pour s'en défaire. Elle garda les yeux fermés tout le long de leur chute et ne les rouvrit que quand elle fut certaine qu'ils ne risquaient plus rien. Aussitôt elle se rendit compte qu'Edwin l'avait protégée. La façon dont il la serrait et surtout la manière dont il l'avait forcée à rentrer la tête le prouvait. Cette simple réalité suffit à la troubler. Perdue dans ces pensées, elle ne prit pas la peine de lui répondre. Pourquoi avait-il fait ça ? Bien sûr, les deux Gryffons étaient amis mais... Rien dans l'attitude de la blonde ne laissait supposer qu'elle était une de ses demoiselles fragiles en quêtes de défense et, surtout, rien ne laissait croire qu'elle l'aurait accepté. Elle tenait à son indépendance et ça tout le monde le savait et le comprenait. Jamais personne n'avait eut de tels gestes envers elle, pas même son père. Son père... C'était peut être ça le problème, au fond. Petite, elle cherchait constamment son attention, son amour et sa protection cependant elle avait vite compris qu'elle n'obtiendrait rien de tout ça de cet homme. Aussitôt faite à cette idée, elle n'avait eut de cesse de devenir indépendante et surtout de ne plus avoir besoin de rien venant de lui. A huit ans, la petite Boyd cuisinait, aidait sa mère à la boutique et à la maison et s'occupait de ses devoirs seule. Elle n'en retirait aucune fierté mais c'était nécessaire.

Soudainement mal à l'aise dans ces bras bien trop étouffants et bienfaiteurs à son goût, elle gigota. Ce ne fut qu'à cet instant qu'elle comprit que son ami lui adressait la parole. Un sourire fleurit sur ses lèvres quand il s'excusa -enfin !- mais une main caressant tendrement ces cheveux l'empêcha de répondre. Ça aussi, c'était nouveau pour elle. Sa mère avait bien sur déjà eut ce genre de marques de tendresse envers sa fille favorite -et unique, il fallait le préciser- mais jamais personne d'autres. Avec ses amis elle se contentait de rire, discuter et plaisanter et elle n'avait pas pour habitude d'être prise dans les bras d'une de ces personnes. Cela semblait presque déplacé : c'était elle qui consolait les gens, les prenait dans ses bras et leur changeait les idées. Ses quelques flirts n'avaient jamais eut ces cajoleries non plus : de la passion oui mais de la douceur jamais. Elle se permit d'en profiter une minute avant de tenter de se dégager de cette étreinte, bien trop gênée. Elle mit une autre minute à forcer pour que son ami accepte de la lâcher et s'assit. Elle prit immédiatement la parole pour masquer son trouble et faire comme si rien ne s'était passé.

"Je suppose que je peux accepter des excuses aussi bien présentées, essaya-t-elle de plaisanter. Tu es loin d'être un idiot et en tant que mec, et donc d’humanoïde dénué de toute délicatesse, tu ne pouvais pas deviner quels sujets me fâcheraient ! Allez, oublié c'est pes..."

Sa phrase s'interrompit dans un nouvel hurlement quand deux troisième années qui, visiblement, jugeaient la température propice à une bataille d'eau passèrent à côté d'eux. Le brun devait avoir quelques problèmes pour viser ou alors son camarade était bon pour esquiver, elle ne voulait pas le savoir, mais le résultat était là : elle était trempée de la tête aux pieds ! D'un ton étonnement sérieux et menaçant pour ceux qui la connaissaient, elle fit la leçon aux deux énergumènes qui, intimidés par la sixième année, n'en menaient pas large. Elle tourna son regard vers son camarade, se fichant bien des moqueries qu'il pouvait avoir sur le bout de la langue. Sa robe de sorcière lui collait à la peau et épousait ses formes ce qui la fit soupirer. La sensation glacée était tout sauf agréable.

"Je suis toute mouillée..."

Sa voix qu'elle avait voulu basse, agacée mais aussi timide était en effet basse mais plutôt chaude et un poil...provocatrice. Quand elle se rendit compte de cela, elle ne laissa rien paraitre et ne changea en rien sa position à genoux qui s'accordait parfaitement à sa tirade. Quitte à avoir l'air tentatrice, autant laisser Edwin croire qu'elle l'avait voulu. Elle n'imaginait pas les blagues qu'elle aurait du affronter si jamais elle avait agi en vierge effarouchée. Ne restait plus qu'à attendre pour voir si opter pour cette attitude de séductrice était plus bénéfique...