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blue eyes in the haze (selene ☉ daisy)
Selene O. Paulet

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Message(#) Sujet: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyMar 11 Juil - 0:37






(selene ☉ daisy)
blue eyes in the haze

Treize inspirations entrecoupées de treize expirations, c’était tout ce qui séparait sa chambre du bureau de Père, tout ce que cela prenait pour traverser le long couloir couvert d’un parquet sombre. Des secondes dérisoires qui ne la préparaient jamais à faire face à ces pupilles accusatrices qui la dévoraient toute entière dès qu’elle passait le pas de la porte. Dans une chorégraphie apprise par cœur et répétée tout au long de l’été, Selene frappait un coup, un seul, son poing replié, inoffensif, quatre secondes s’écoulaient, jamais une de plus, jamais une de moins, puis retentissait sa sentence. « Entre. » Comme à chaque fois, il était vêtu d’un complet sombre sur lequel aucun pli n’était permis, son visage taillé dans la pierre penché sur des parchemins couverts d’encre. Au-dessus de son épaule droite, un buste de marbre dont les orbites blancs pointés en direction de Selene lui intimaient le silence et l’immobilité la plus totale. Ils se ressemblaient, comme deux reflets mis au monde de la même façon. Leurs traits dénués de toute émotion avaient été cisaillés par un couteau acéré, leur gorge avait été façonnée par un burin brutal, toute douceur avait été limée de leurs pommettes d’un mouvement identique. Selene s’imaginait un sculpteur virevolter avec violence autour de sa création, tantôt la peau laiteuse comme la pierre, tantôt la chair pâle comme celle de Père, tirant de ce matériau inflexible une créature qui l’était plus encore. Cela pouvait lui prendre plusieurs minutes avant qu’il ne lui fasse la grâce de l’entretenir de la raison pour laquelle elle était convoquée ici, aussi Selene attendait-elle, invisible, étudiant les recoins de cet antre qui lui était si hostile. La table encadrée de deux chaises sur laquelle trônait un échiquier luxueux attirait régulièrement ses pensées qui dessinaient le fantôme de Père penché sur les pièces noires et blanches, ses doigts impitoyables décidant de la stratégie à adopter. Où se trouvait-elle, dans les plans de cette toute-puissance paternelle ? Pouvait-elle espérer être plus qu’un pion ? Certainement pas une Reine, en tout cas. Au fond, cela changeait-il quoi que ce soit ? À la fin de la partie, il était le vainqueur. Souvent, il ne levait même pas les yeux de son ouvrage, parfaitement capable d’asséner ses volontés sans considérer l’existence de celle qui les recevait. Aujourd’hui pourtant, la pointe de sa plume s’enfonça dans le pot d’encre, maintenue en équilibre par les rebords de ce dernier et les pieds de la chaise crissèrent alors qu’ils se relevaient, forcément les prunelles claires de Selene à se relever. Les siennes — insondables, cruelles — la clouèrent sur place à la recherche d’une remarque à lui formuler. Sa tenue était telle qu’il l’avait choisie — une robe estivale et des sandales de cuir — et celle que l’on avait changée en poupée le temps de cette décision était arrivée à l’heure dite — pas une seconde en avance ni une en retard car il détestait cela. « Ne me fais pas honte. » Sa poigne la menotta à lui alors qu’ils se glissaient dans l’âtre de la grande cheminée capable d’accueillir deux personnes. La poudre verte virevolta à leurs pieds et la voix de Père résonna, l’enveloppa, l’arracha à cette cage appelée maison, la propulsant loin de Londres en direction d’un événement caritatif.

De quelle charité pouvait donc bien faire preuve un être aussi dur que lui ? C’était la première fois que Selene quittait le foyer en compagnie de Père et la transfiguration qu'elle contempla lui donna le tournis. Il n’était que sourires et poignées de mains polies, ses traits pourtant inflexibles s’animant à chaque fois qu’un nom franchissait ses lèvres. Il était éblouissant dans son costume impeccable, ses cheveux bruns encadrant un visage qui ne souffrait aucun défaut, entraînant sa fille dans son sillage, sans même s’assurer qu’elle le suivait bel et bien. C’était inutile, elle était incapable de détacher ses yeux de cette métamorphose terrifiante qui s’était opérée en une fraction de seconde. Il était le centre d’un tableau idéal qui faisait fi de toutes les ombres qu’elle lui connaissait. La douceur et la souplesse d’un pinceau ne lui allaient pas, il était fait pour la brutalité d’un marteau et du burin, alors pourquoi était-elle incapable de déceler les défauts de la pantomime à laquelle il se livrait ? Hébétée, elle salua les visages inconnus qui gravitaient autour de son père, retranchée dans le silence une fois qu’ils oubliaient son existence. Ne pas lui faire honte. Elle estima s’en sortir honorablement puisque pas une seule fois ses pupilles réprobatrices n’avaient déposé sur elle la menace d’une réprimande. Pantin dénué de volonté propre, elle allait là où son pas assuré l’obligeait, attendant un ordre qui la délivrerait de cette farce à laquelle il se livrait. Il ne pouvait tout de même pas vouloir qu’elle reste plantée sur ses talons, ombre translucide qu’il éclipsait sans le moindre effort. Son salut se manifesta sous la forme d’une chevelure blonde qui s’approchait de l’une des tables nappées de blanc faisant office de buffet. « Tiens, c’est la fille de Gibson. Elle est à Poudlard, elle-aussi, tu dois la connaître. Va lui parler, ça te rafraîchira peut-être la mémoire. » Le masque tomba le temps de prononcer ces quelques mots, la noirceur reprenant sa place aux coins de ces yeux perçants, le sourire abandonné au profit d’un rictus qui ne démontrait que de la désapprobation. Ce n’était pas faute d’avoir usé de ces précieux carnets pour tisser le doux mensonge de quelques souvenirs retrouvés, juste un peu, de quoi le contenter suffisamment pour que la colère tempétueuse laisse place à la déception assassine. Ce n’était pas assez, ce n’était jamais assez. L’avait-ce seulement été un jour ? À la lecture de ce que son ancienne elle avait consigné sur toutes ces pages, la Selene dont les pensées s’étaient noyées dans ce lac, il y a plusieurs semaines de cela, en doutait. « Entendu, Père. » Il avait déjà détourné son attention, pétri de la certitude que sa fille ne pouvait songer à lui désobéir. Il n’avait pas tort : elle suivait ses ordres aveuglément, sans autre écart que ces pieuses tromperies. Il l’avait sommée de faire de cette amnésie un mauvais souvenir, de ne pas avoir gâché ces quinze dernières années, elle se soumettait à ses volontés, à la hauteur de ses piètres moyens.

Momentanément libéré de sa cage dorée, le petit oisillon au vol mal assuré s’éloigna de son geôlier de quelques battements d’ailes. Connaissait-elle vraiment cette fille ? Tout ce qu’elle avait en sa possession, c’étaient des prénoms associés à des histoires consciencieusement consignées. Des lui et des elle qui avaient parsemé ses journées, de mille et une façons, des noms qui s’étaient retrouvés en tête de listes représentatives du vain effort de Selene de se réapproprier les traces de son histoire. Il n’y avait aucune image associée à ces pensées manuscrites, alors tout ce qu’elle était capable de faire, c’était naviguer à l’aveuglette sur les eaux de son passé. « Bonjour. Mon père voulait que je vienne te saluer. » La justification s’empressa de se frayer un chemin sur ses lèvres alors que le regard confus de l’autre fille se posait sur elle. Probablement qu’il s’était trompé et qu’elles n’étaient rien de plus que deux camarades qui foulaient le sol de la même école, année après année. Scrutant les groupes amassés ici dont les badinages créaient cette mélodie voilée, Selene retrouva facilement la trace de son père, plongé dans une discussion animée avec un autre homme. Mère était probablement quelque part, elle aussi. Elle se la figurait habillée d’un sourire accueillant, guidant les invités de cette réception à la place qui était la leur, car tout était parfaitement millimétré dans cet événement qui avaient les apparences d’une pièce improvisée. Ou bien peut-être que le comité organisateur, dont elle faisait partie, s’était retranché dans ses quartiers, épuisé d’en avoir tant fait, savourant quelque alcool qui leur donnerait la force de poursuivre les festivités. Des problèmes d’adultes qui n’effleuraient pas les deux jeunes filles, rares adolescentes parmi ces personnes qui les dépassaient toutes, en stature ou en années. « Les vacances sont passées à une vitesse… J’ai l’impression que la rentrée est demain, pas toi ? » Elle n’avait pas côtoyé grand monde cet été, trop occupée à faire diminuer la pile de livres et de devoirs qui s’accumulait sur son bureau, toujours plus haute, toujours plus dense. De quoi étaient-elles censées parler ? Pas de son amnésie, Père n’apprécierait pas qu’elle brandisse le sujet de la plus grande honte qu’elle lui avait infligée alors qu’il lui avait spécifiquement interdit de le couvrir d’embarras. La seule chose les reliant à l’heure actuelle, c’était ce château lointain qui avait abrité de nombreux souvenirs qu’elle avait tous perdus, abandonnés dans ces eaux glacées.

@L. Daisy Gibson
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Dernière édition par Selene O. Paulet le Sam 5 Aoû - 22:55, édité 3 fois
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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyMar 11 Juil - 11:00


blue eyes in the haze
”Des boucles ou une tresse ?” “Des boucles” répondit-elle, décidée, en scrutant son reflet dans l’immense miroir de sa chambre. On aurait dit une jolie poupée, toute apprêtée comme elle l’était et pourtant si nonchalante, chiffonnée par terre, à peine retenue par un large canapé archaïque pour son temps. Une jolie poupée dont les traits étaient tout aussi figés. Ce n’était pas de l’inquiétude, pas du tout, elle ne ressentait pas la moindre forme d’appréhension, connaissant déjà le scénario qu’on attendait d’elle pour jouer ce rôle-là à la perfection. C’était au contraire une concentration accrue, exigeante, qui la poussait à vérifier dans les moindres détails la finalité de son costume. Elle vérifiait ainsi pour la centième fois que le trait de son eye-liner était droit, symétrique, que ses joues rosies de blush étaient aussi lisses que de la nacre, que sa robe rose était de la bonne nuance poudrée. Dans son dos, Papa leva sa baguette dans une curieuse arabesque avant de la pointer droit sur sa chevelure. Celle-ci se souleva doucement et, sous leurs deux regards appliqués, se mit à onduler mèche après mèche pour finalement retomber en une longue crinière bouclée. Daisy tapa dans ses mains d’excitation, Papa esquissa un rictus satisfait. “C’est parfait ! On peut y aller.” La jeune fille se releva en plissant quelques froissures imaginaires de sa robe, avant de tourner sur elle-même dans un regain d’enthousiasme. La représentation serait splendide, Papa serait fier d’elle, et ce regard qu’il lui portait perdurerait encore pendant plusieurs jours, juste de quoi conserver de lui une image rayonnante pour pourfendre les lourds nuages de l’automne qui s’annonceraient prochainement. Daisy attrapa son bras qu’il ne lui avait pas tendu, choisissant par elle-même de se raccrocher à ce cavalier vêtu de son plus beau costume, et ils quittèrent sa chambre d’un pas princier pour gagner la haute cheminée du salon. “Attends.” Papa s’immobilisa juste avant de glisser sa jambe dans l’âtre, arquant un sourcil de surprise quand Daisy porta les doigts à sa cravate qu’elle renoua soigneusement du bout de ses doigts. “Voilà. Comme ça, toi aussi, tu es parfait.” Elle lui esquissa un large sourire, quelque part entre de la joie et de l’admiration, entre de l’amour et de l’émerveillement, avant de le suivre dans la cheminée. Il déposa un baiser sur son crâne puis jeta de la poudre de cheminette en annonçant le lieu de leur visite. Une bourgade perdue dans le Royaume-Uni, pour un événement caritatif dont le code vestimentaire n’avait rien de charitable, en compagnie d’hommes et de femmes aussi pimpants que l’éclair qui zébra le regard de Daisy sous les lèvres de son prince charmant.

Il faisait beau. Si à Dublin le ciel avait commencé à s’assombrir, ici, le soleil resplendissait presque aussi fort que dans les tropiques. Daisy eut une pensée pour Dash, laissé sous l’imminence de la pluie, lui qui avait tant adoré le roulement des vagues de l’océan et dont la peau avait presque fini par s’acclimater à la sécheresse locale. C’est qu’il aurait adoré cet endroit - car en dehors du beau temps, la localité était pleine de charme. Un jardin, ou un parc à en juger la superficie du gazon parfaitement taillé, couvert de fleurs plus vives les unes que les autres, d’où émergeaient de hautes toiles blanches. En dessous avaient été dressées de longues tablées parmi lesquelles fourmillaient plein d’anonymes, aux tenues plus éclatantes encore que les pétales gorgés d’eau. Le jardinier méritait probablement une augmentation. L’ouvrier sans visage remplaça ainsi le souvenir de Dash dans son esprit et Daisy put avancer au bras de Papa en retrouvant un sourire immaculé. “Nous aussi, on pourrait avoir un jardin comme ça” décréta-t-elle alors qu’ils approchaient d’un premier cercle social. “Tu n’aimes plus nos hortensias ?” s’étonna son père. “Si, bien sûr” répondit-elle aussitôt avec le regard de qui ne voulait surtout aucune méprise. “C’est juste qu’ici, c’est encore plus coloré. Ils ont plein de variétés de fleurs…” “Mais tant que j’ai ma pâquerette avec moi, je me fiche bien des fleurs.” Papa lui fit un clin d'œil entendu et Daisy posa affectueusement sa tête sur son épaule avant de relever la tête bien droite face aux convives qu’ils venaient de rejoindre. A dire la vérité, il faisait assez chaud et elle aurait préféré continuer à reposer son crâne sur cette épaule familière, mais le spectacle allait commencer, et il n’était pas question de faillir à la réputation de Papa qui avait si longtemps souffert. “Gibson !” s’exclama un premier inconnu ; et sa femme zieuta Papa d’une façon qui déplut suffisamment à Daisy pour glacer son sourire. Papa défit son bras du sien et entreprit de serrer des mains avant de présenter sa charmante jeune fille qui adressa à tous une petite révérence afin de s’épargner joues mal rasées et haleines fétides. “Quelle éducation” nota la dame dont le regard était resté un peu trop longtemps sur le pantalon de Papa. Daisy eut droit à deux compliments, le premier sur sa tenue, le second sur sa chevelure. Elle était déçue, car une fois, elle en avait reçu cinq d’affilée ; mais l'événement venait de commencer, elle aurait sûrement l’occasion de battre son record. Aussi garda-t-elle précautionneusement chacune de ses considérations pour elle-même, leur préférant des hochements de tête quadrillés et des rires millimétrés. De fait, la représentation lui parut presque trop facile.

Ils saluèrent encore deux nouveaux cercles avant de s’approcher des hautes tentes, où l’atmosphère s’alourdit. Peut-être parce qu’ils étaient désormais à l’ombre, les esprits semblèrent effectivement plus gris, les sourires, plus crispés. Même le visage de Papa se referma, et il ne s’agissait pas de concentration. Il ressemblait à ce Papa qui rentrait du travail le soir, après une longue journée qui tirait ses nerfs. Elle voulut lui demander si tout allait bien, sentant dans son ventre peser un poids à la seule idée qu’il réponde par la négative, quand il pressa son avant-bras en se penchant vers elle. Daisy retint son souffle afin de ne pas manquer le moindre mot de l’ordre qui allait s’en suivre. “Je vais avoir besoin d’un moment.” Oui, bien entendu, évidemment - alors elle acquiesça avec zèle et s’éloigna aussitôt, non sans jeter un regard par-dessus son épaule comme pour s’assurer qu’il restait bien dans son champ de vision. Et de fait, il avança vers deux hommes tout aussi inconnus que les autres, seulement plus petits, seulement plus rabougris. Avaient-ils trop pris le soleil, raison pour laquelle ils s’étaient cachés sous l’orage des toiles ? La vie semblait les avoir vidés de leur eau. Peut-être que eux aussi, méritaient un meilleur jardinier. “Mon pauvre Papa” soupira-t-elle avant de rejoindre la longue table où avait été disposé le buffet. Elle n’avait pas faim, mais de son expérience, il s’agissait du meilleur endroit où s’isoler en toute discrétion. Personne pour remarquer cette jeune fille esseulée, personne pour croire qu’elle s’ennuyait. Aussi attrapa-t-elle une assiette de porcelaine, toisant les différents mets d’un œil méfiant. Rien ne lui donnait envie. “Bonjour.” Daisy tourna son visage vers cette voix curieusement proche et étrangement familière avant d’écarquiller les yeux. Selene. Elle ne s’était pas attendue à la voir, ni ici, ni maintenant, dans la mesure où elle avait souvent brillé par son absence lors des différentes cérémonies tenues jusqu’à présent. Et puis… Ce visage lui rappelait davantage les murs de son dortoir que les grands espaces mondains. C’était comme s’il détonnait, à présent, presque autant que son cœur qui s’empressa d’embarras. “Bonjour” répondit-elle dans un écho tout aussi froid. Papa n’aimait pas qu’elle discute avec elle, et il l’aimerait sûrement encore moins en pleine réception. “Mon père voulait que je vienne te saluer” précisa alors la Serdaigle. Daisy hocha la tête, ne sachant que faire de cette information, elle qui en avait déjà tant à gérer en ces quelques secondes suspendues où seuls leurs yeux semblaient encore exister sous les grondements de la tente.

Elle avait en vérité deux options : la congédier tout de suite ou prétendre que tout allait bien. La première était la plus sûre, mais d’un autre côté, qu’aurait-elle fait ensuite ? Remplir une assiette à laquelle elle ne toucherait pas, pour errer parmi les convives sans but ? Car dans le fond, Selene constituait la seule invitée dont les traits avaient un sens. La seconde option était plus périlleuse, car Papa pouvait tout aussi bien la voir puis la disputer pour cette rencontre qui lui déplaisait. Jetant un regard autour d’elles, Daisy identifia très vite la silhouette de Papa, juste à côté de celle du père de Selene. N’aurait-il pas été inconvenant de se débarrasser d’elle alors que leurs pères étaient eux-mêmes en plein échange, et que celui de Selene avait clairement formulé qu’elle devait venir lui parler ? Retrouvant les iris de sa camarade, Daisy sembla se détendre un instant - c’est que la solution à retenir était aussi celle qu’elle préférait. “Et comment il va ?” demanda-t-elle sur le ton de la conversation en attrapant une cuillère de tomates confites dans le plat devant elle. Elle se penchait ensuite vers des œufs mimosas quand Selene poursuivit sur sa lancée, d’une voix particulièrement monocorde. “Les vacances sont passées à une vitesse… J’ai l’impression que la rentrée est demain, pas toi ?” Daisy hocha à nouveau la tête, posant délicatement un œuf dans son assiette. “Carrément. D’avoir participé au voyage scolaire, j’ai pas vraiment eu le temps d’en profiter… J’ai l’impression que je viens tout juste de rentrer.” Elle esquissa un sourire à cette pensée. Dans le fond, ce voyage avait été une réussite, en témoignaient son teint de pêche et les souvenirs salins de ses baignades avec Dash. Simplement, cette joie avait un coût : celui d’avoir manqué Papa pendant un mois complet, là où il était déjà absent neuf mois dans l’année… Et la perspective de la rentrée dans quelques jours lui fit comme un épais nuage dans le ciel pourtant immaculé de cette journée estivale. Elle aimait sa vie au château, mais elle lui préférait quand même sa vie au pavillon. “T’as fait quoi de tes vacances, toi ?” s’enquit-elle en se tournant enfin vers elle, les deux mains retenant une assiette ridiculement vide. Une cuillère de tomates confites, un oeuf mimosa. Juste de quoi prétendre qu’elle était en bonne santé sans prendre le risque de toucher à quoi que ce soit contenant de la farine. Dash roulerait sûrement des yeux en voyant ses portions, mais Dash n’était pas là ; elle était livrée à elle-même dans ce jardin plus beau que le sien, à quelques pas d’un Papa accaparé par l’un de ses responsables, à quelques centimètres d’une amie qui n’en était plus vraiment une. Petite, ce constat lui aurait sûrement tiré une triste moue, mais ce jour-ci, Daisy parvint à se consoler. C’était pour Papa. C’était forcément pour le mieux.
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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyMer 12 Juil - 4:09






(selene ☉ daisy)
blue eyes in the haze

Poussée par la main autoritaire, Selene contourna quelques silhouettes qui ne lui prêtèrent aucune attention. Mettre de la distance entre elle et Père n’allait pas de pair avec s’éloigner de ses attentes pesantes. Au contraire, à chaque pas qu’elle faisait loin de lui, elles semblaient accabler plus lourdement encore ses frêles épaules. Le sentiment qu’il lui était impossible d’échapper à son œil implacable se nicha au creux de ses entrailles, les nouant d’une main experte, semant une amertume qu’elle aurait souhaité pouvoir vomir immédiatement. Seulement, le gazon parfaitement taillé ne pouvait souffrir tel outrage et sa liberté factice ne l’autorisait en rien à commettre une telle maladresse. Après tout, les menottes invisibles avaient beau lui brûler les poignets, il aurait été dommage de ne pas profiter de cet air épuré des reproches informulées. Ainsi, Selene brava la distance qui la séparait de cette fille à la peau pâle et aux boucles blondes, tapissant de tout ce qui pouvait faire succomber l’amère sensation qui peinait à disparaître — curiosité, sens du devoir, envie de socialiser, n’importe quelle feinte capable de dénouer ses doigts crispés et de plaquer sur ses joues légèrement rosées un intérêt un peu trop froid pour être éloquent. Selene n’avait pas prêté attention aux détails lorsque son père l’avait jeté en direction de la fille de Gibson — trop heureuse de pouvoir se soustraire à son influence, trop sotte de penser que cela serait aussi simple — mais le tableau qui se dessinait sous ses yeux intrigués était fait d’un splendide tissu nacré qui drapait une peau de porcelaine rehaussée d’iris au bleu écarquillé. Une princesse, c’est le premier mot qui lui vint à l’esprit. Ce n’était pas comme si elle était capable de se remémorer une seule figure royale, mais le mot était porteur d’un concept qui seyait parfaitement à cette fille. Une brève salutation vint briser l’inertie de son approche et sa langue fourcha, délivrant une raison à sa présence ici, ignorant les sourires qui voulaient se frayer leur propre chemin. Ce joli portrait féminin lui donnait envie de plaisanter, de partager quelque connivence, d’échanger une œillade entendue avant de se perdre dans une occupation désinvolte, tout autant qu’il réveillait ces doigts aiguisés venus retravailler son for intérieur évaporé. Quelles émotions incongrues. Était-ce parce qu’elles se ressemblaient autant qu’elles contrastaient que Selene vibrait de sentiments forts et contradictoires ? Ces mèches qui reflétaient le soleil, ces prunelles qui rappelaient les eaux calmes d’une mer translucide, cette peau lisse et ces lèvres charnues, en partie différenciée par des tenues qui les projetaient chacune à des recoins opposés.

Avait-elle le droit de se préoccuper de ses états d’âme alors que Père lui avait expressément donné l’ordre de converser avec elle ? Non, assurément. Et si la réalité se soumettait aux plus violents désirs paternels et que cette fille devenait le remède de son amnésie, cela valait bien la peine d’essayer, de repousser ces drôles de sentiments qui faisaient tomber les coins de ses lèvres en une moue quelconque, empêchant l’ombre d’un sourire d’y fleurir. Oscillant entre deux extrêmes, Selene se glissa dans son rôle, prenant la suite de sa camarade en se saisissant d’une assiette. Cela lui occupait les mains et lui donnait la sensation d’être moins un peu moins gauche, en plus de la légitimer dans la tâche qu’on venait de lui confier. « Il va bien. Il est toujours très occupé. » se risqua-t-elle à répondre alors que son regard glissait jusqu’à sa silhouette hypnotisante. En pleine conversation, il ne leva pas une seule fois les yeux dans sa direction et Selene ne pût déterminer si cela la rassurait ou l’effrayait. Un œuf découpé en deux et garni d’une mousse blanche vint assassiner la pureté immaculée de son assiette, bien vite rejoint par des tomates finement coupées. Elle tâtonnait pour découvrir quels étaient ses goûts et décelait ici une opportunité d’éveiller son palais à de nouveaux souvenirs. Reportant son attention sur la fille, elle décida qu’elles n’étaient probablement pas deux complètes étrangères puisqu’elle ne lui avait pas demandé son nom, ni qui était son père, s’enquérant plus de l’état de ce dernier. De fait, si elles étaient toutes les deux ici, les talons enfoncés dans une herbe chatoyante, ce n’était peut-être pas la première fois qu’elle se retrouvait à échanger quelques banalités au-dessus d’un buffet garni. Pour autant, le ton restait monocorde, les émotions absentes, alors Selene ne glissa pas le curseur plus haut que connaissances. « C’est le cas ? Tu viens tout juste de rentrer ? » Quelques pages de ses carnets évoquaient ces voyages scolaires, chimère lointaine à laquelle Selene n’avait jamais eu accès, aussi était-elle curieuse en son for intérieur d’en entendre parler. Pourtant, la question sonna presque désintéressée. Quelle était la destination de cette année ? L’Écosse, non, une école de magie lointaine, ou peut-être une île, elle mélangeait les étés, perdues entre toutes ces lignes que son écriture penchée avait tracées et qui se ressemblaient comme deux gouttes d’encre maintenant qu’elle ne pouvait plus les relire.

Selene ajouta une touche de couleur avec une tranche de saumon puis un parfum gourmand avec un feuilleté qui compléta la nature morte qui se dessinait dans son assiette. Elles se firent face, deux reflets disposés dans la même position, leurs doigts fins serrés autour de leur assiette. Après que l’une se soit enquis des vacances de l’autre, il était logique que la danse s’inverse et que la question lui revienne mais Selene la repoussa d’un geste du menton, son visage virevoltant à droite, à gauche, ses yeux fouillant les alentours. « Je ne dirais pas non à une table pour m’asseoir. » Et rendre cette assiette un peu moins encombrante. Sa chasse fut fructueuse puisqu’elle avisa une petite table ronde nappée du même blanc que les buffets rectangulaires, non loin de celui proche duquel elles se tenaient. Doucement, elle fit un pas dans cette direction, espérant qu’elle serait suivie et, constatant que son pas était accompagné de celui de cette fille, elle s’empara d’une fourchette parfaitement lustrée avant de cheminer jusqu’aux deux chaises placées l’une en face de l’autre. « J’ai passé quelques jours avec mes cousins puis j’ai étudié pour rattraper mon retard. » récita-t-elle finalement quand il ne fut plus possible de repousser poliment le temps de formuler une réponse. Tandis qu’elles s’avançaient vers cet ilôt esseulé, sa camarade ne put voir ses yeux qui brillèrent brièvement de non-dits abrupts et, alors qu’elle tirait légèrement la chaise pour pouvoir s’y installer, la froide politesse avait repris sa place.

@L. Daisy Gibson
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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyJeu 27 Juil - 16:24


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Daisy adorait être le centre de l’attention tout en détestant profondément ces regards braqués sur elle. Un paradoxe de plus dans un tempérament contrasté. Délicate princesse de nacre, redoutable enfant capricieuse, à la fois assoiffée de compliments et pleine de ces faux semblants desquels elle venait de trouver un échappatoire. C’est que dans le fond, Daisy adorait être le centre de l’attention, mais seulement de celle de Papa. Il avait de grands yeux qui la voyaient toute entière, de ses apparats rosés à l’obscurité de ses secrets. Et il n’y avait de sens à être interpellée qu’à son bras, parce qu’elle était alors confortée par le seul en mesure de la saisir. On pouvait penser ce qu’on voulait d’elle, la vérité était sous ses doigts, repliée dans un large bras assez ferme pour soutenir chacun de ses mensonges. Papa lui donnait une cohérence. A présent qu’il échangeait avec le patriarche Paulet, Daisy ne se sentait plus que cette petite poupée de chiffon, privée de rôle, vide d’intérêt. Celui que lui porta Selene la dérangea, rien que l’ombre d’une seconde charnière où elle n’était pas sûre de vouloir de cet échange diplomatiquement condamnable ; puis Daisy réalisa qu’une poupée de chiffon ne pouvait de toute évidence pas commettre d’impair. D’autant que Selene avait été missionnée par son père, haut fonctionnaire respecté de Papa, et qu’elle lui proposait en outre, dans cette assiette qu’elle venait d’attraper à son tour, un reflet tranquille à l’abri de regards bien plus voraces que l’indifférence de ses prunelles bleutées. “Il va bien. Il est toujours très occupé” répondit-elle en glissant ses yeux sur un point derrière le dos de Daisy, échappant ainsi à son regard. Celle-ci acquiesça sans le moindre intérêt, obéissant sagement aux règles des circonstances sociales, et observant sans vraiment la regarder sa camarade piocher parmi les mêmes mets que les siens. Puis Selene lui parla de la rentrée et Daisy lui évoqua les vacances, qui avaient volé tout son précieux temps au cours de l’été. A peine de retour, valises éventrées dans sa chambre, elle devait déjà anticiper ses affaires en vue de son départ prochain pour Poudlard. C’était déprimant, cette impression d’être tout juste de retour et de ne pas avoir profité du mois d’août. “C’est le cas ? Tu viens tout juste de rentrer ?” l’interrogea alors sa camarade. Une seconde d’incompréhension passa sur son visage, interdit, tandis que Selene se servait une tranche de saumon. “Je suis rentrée il y a deux semaines, oui, puisque le voyage a eu lieu de la mi-juillet à la mi-août” rappela-t-elle finalement sur le ton de l’évidence. Son interlocutrice ajouta à côté du poisson un feuilleté que Daisy toisa quelques instants, comme il se serait agi d’un ennemi bien plus inquiétant que la demande de sa camarade qui était au fait des dates du voyage scolaire. C’est que l’un lui rappelait d’insidieux maux de ventre et l’autre, rien de plus qu’une probable fatigue amplifiée par la chaleur de cette belle journée.

Comme par confirmation de son état, Selene suggéra d’aller chercher une table afin de s’asseoir, chassant au passage la réponse qu’elle lui devait au sujet de ses propres vacances. “Je te suis” confirma-t-elle passivement alors que Selene semblait inspecter les lieux de son regard. Daisy lui emboîta ainsi le pas en direction d’une table esseulée, à l’écart des autres convives et de leurs coupes constamment remplies à ras bord par les bouteilles de champagne qui voletaient çà et là. “J’ai passé quelques jours avec mes cousins puis j’ai étudié pour rattraper mon retard” reprit-elle en chemin. “Hm ?” Daisy reporta son attention papillonnante sur son interlocutrice avant d’entendre à retardement l’explication donnée, laquelle lui arracha une moue de surprise. “Rattraper ton retard ?” répéta-t-elle, craignant d’avoir simplement mal entendu cette réponse qu’elle n’attendait plus. “Je me souviens pas t’avoir déjà vue en retard dans tes études” reprit-elle dans un sourire amusé. C’est que Selene était au contraire toujours en avance. Studieuse, appliquée, elle avait toujours mis un point d’honneur à préparer ses devoirs avant l’échéance due, là où Daisy s’efforçait de ne pas perdre une cadence tout juste en mesure d’être à l’heure. Si elle avait un quelconque retard à rattraper, c’était sur les dernières histoires qui couraient à Poudlard, suite à ce voyage scolaire où quelques rumeurs supplémentaires avaient traîné jusqu’à ses oreilles… Daisy songea à les lui partager, pour le seul plaisir de discuter avec une amie, quand son sourire précédant s’évanouit à la pensée que Papa pouvait encore la voir ; et il était bien capable de deviner la sincérité de ses mimiques. Elle ne faisait rien de mal à fréquenter une camarade qui avait expressément été chargée de la rejoindre ; mais si elle montrait la moindre authenticité, que se dirait son pauvre Papa ! Qu’elle appréciait une fille qu’elle aurait au contraire dû détester, comme lui ? Selene tira une première chaise pour y prendre place et Daisy attrapa naturellement celle installée en face. Avant de s’y asseoir, la Serdaigle prit soin de bien replier sa robe sous ses jambes, puis elle rejeta ses longs cheveux en arrière et ajusta les manches à volants de sa tenue, soucieuse de renvoyer une image à la hauteur de son éducation ; quand bien même personne ne les regardait réellement, ces deux adolescentes, facettes d’une même pièce avec leurs reflets dorés et leurs yeux glacés. Elles devaient détonner autant qu’elles devaient se fondre dans le décor, bien plus jeunes que la moyenne d’âge, bien plus jolies, aussi, et pourtant si dociles qu’on aurait pu les oublier à cette table comme deux jouets délaissés par des enfants qui savaient se divertir sans elles. “Bon appétit” annonça poliment Daisy en attrapant ses couverts. Mais la vérité, c’est que le sien n’était jamais bon. Aussi préféra-t-elle jouer du bout de son couteau avec un morceau de tomate, comme s'apprêtant à lui faire subir une opération minutieuse.

C’est que le temps promettait d’être long et qu’il valait mieux s’occuper l’esprit. Jetant un oeil à sa gauche, elle devina la jolie barbe de Papa flanquée d’un sourire qui signalait qu’il était encore en plein jeu de charme avec Paulet - il n’avait pas fini de s’amuser, ah ça non, alors elle devrait prendre son mal en patience et prétendre qu’elle s’amusait, elle aussi ; mais pas trop non plus, au risque de se divertir pour de vrai et de faire quelque chose de mal avec cette fille pourtant pas si mauvaise. Daisy porta à nouveau le regard sur son assiette avant de relever discrètement les yeux sur Selene, prenant le temps de l’étudier pour la première fois depuis qu’elle s’était adressée la parole quelques minutes plus tôt. Elle disait que son père était fatigué, mais elle ne semblait pas en meilleure forme pour autant. Rares étaient les jours où ses traits semblaient aussi figés, presque secs. Était-elle au bord d’une quelconque rupture ? Mais Daisy n’avait jamais vu cette fille éclater, tout simplement parce qu’elle éclatait avant tout d’esprit et que celui-ci était trop solidement attaché derrière un minois insondable pour être menaçant. C'était curieux, d’ailleurs, ces traits fermés. Elle n’était pas franchement plus expressive, contrainte de lui offrir cette neutralité pour mieux échapper à la subjectivité de Papa, mais il lui semblait que Selene ne se contraignait en rien, plus éthérée que d’ordinaire, comme si son esprit lui-même avait cessé de briller. Elle en posait même des questions idiotes... Reportant son attention sur le morceau de tomate qu’elle continuait de disséquer du bout de sa lame, Daisy en conclut simplement que le temps avait fini par faire son œuvre. Selene semblait elle aussi s’éloigner, prenant de toute évidence ses distances avec elle ; ce qui était un mal pour un bien, et donc un bien tout court. Et pourtant, cette pensée lui donna la sensation d’un pincement au cœur, lui faisant quand même un petit peu mal dans tout ce bien. “Et ta mère, elle est là aussi, aujourd’hui ?” Juste pour faire la conversation. Simplement pour combler le silence. A peine pour oublier cette  étrange douleur.
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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyJeu 3 Aoû - 19:14






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Chaque question pouvait être l’impair fatal, celui qui révélerait la supercherie qu’elle s’efforçait de rendre crédible aux yeux des autres, dans le seul but d’éviter la noirceur de ceux de son père. Pourtant, il fallait bien faire la conversation, s’intéresser à son interlocutrice, reflet princier de sa propre silhouette blonde, et s’enquérir de choses et d’autres pour que le silence n’investisse pas les recoins de leur tête à tête et ne les laisse, ces poupées retenues par des fils invisibles, désarticulées et muettes. Derrière les mots de sa camarade, Selene devina une évidence déposée avec un brin de hauteur, comme s’il s’agissait là d’un savoir connu de tous. Sûrement était-ce le cas, pour n’importe qui n’ayant pas une mémoire vierge comme la sienne, ou du moins était-ce une connaissance naturelle pour une personne ayant eu la chance de participer à ce voyage. « C’était sympa ? Je me demande toujours à quoi elles ressemblent, ces vacances organisées par l’école. Qu’est-ce que vous avez fait ? » questionna-t-elle avec un doux sourire intéressé. Ces carnets ne dépeignaient que la mélancolie de ne jamais faire partie de cette masse de jeunes sorciers qui partaient pendant un mois entier. Elle ne savait donc rien de ce qu’ils racontaient, une fois de retour, la peau marquée par l’été et les yeux pétillants de souvenirs. Aussi, derrière ces questions polies, se mêlaient les convenances et les rêveries lancées à la poursuite de ce qui pourrait la sortir de ces ternes dernières semaines. Malheureusement, les lèvres rosées de la jeune fille à ses côtés lui retournèrent la question, l’interrogeant sur son été, ramenant les nuances de son amnésie à la lisière de sa conscience. Être prudente, faire attention… Ne surtout pas lui faire honte.

Avec un regard hésitant en direction de son père, Selene proposa de trouver une table pour s’asseoir, autant par nécessité de poser cette assiette colorée de quelques mets, que par besoin de chercher quelle formulation retourner à sa camarade pour dépeindre ses vacances sous un jour meilleur qu’il ne l’était réellement. Était-ce qui l’attendait à Poudlard ? Devoir serpenter entre les vérités pour ne pas exposer la gêne causée au Paulet ? Elle n’était pas certaine de faire long feu : quelqu’un se rendrait compte, forcément, que quelque chose ne tournait pas rond, n’est-ce pas ? Comme soufflée par le vent de ses pensées, l’image des centaines de pages noircies par son intimité s’imposa. Des noms désormais familiers roulaient dans son esprit mais aucun n’était porteur de la confiance nécessaire pour affirmer qu’elle avait quelqu’un, entre les murs de cette école lointaine, qui se souciait assez d’elle pour remarquer les incohérences de son comportement. Cela l’attristait plus qu’elle n’était en mesure de le comprendre. Il y avait bien cette Daisy, omniprésente, mais elles s’étaient vraisemblablement éloignées et Selene en avait souffert. Un bref espoir aussitôt étouffé. Revenant à sa camarade présente, elle lui présenta une version édulcorée d’une réalité bien moins charmante. L’étonnement perceptible de la jeune fille l’amena à couler un regard rapide en direction de son paternel. S’il pouvait l’entendre, qu’en dirait-il ? Probablement que son regard sévère jugerait ces inepties impertinentes et qu’il soufflerait quelque remarque acerbe sur les notes qui n’étaient pas à la hauteur de ses attentes. Sans parler de cette noirceur qui habillerait aussitôt ses traits lorsqu’il penserait à toutes les notions que sa fille ne maîtrisait plus et qui lui serait, sans le moindre doute, préjudiciable cette prochaine année. « C’est que tu n’as jamais vu mes notes, alors. » répondit-elle avec une légèreté feinte, la gorge nouée, ravalant ces maigres souvenirs et cette angoisse teintée de colère afin de faire un peu de place à ce repas qui l’observait au milieu de la porcelaine ivoirine. Les mots n'étaient pas accusateurs, n'est-ce pas ? Ce n'était rien qu'une constatation, une vérité soulignée pour expliquer cette surprise.

« Bon appétit. » fit-elle sur le même ton, attrapant le couvert d’argent pour le planter dans une tomate et la porter entre ses lèvres, savourant, analysant, contemplant le goût qu’elle avait et jugeant que ça n’était pas mauvais. Quand elle releva ses yeux clairs en direction de sa camarade, celle-ci observait son assiette, assassinant avec indolence une tomate juteuse. N’avait-elle donc pas faim ? Selene se sustentait plus par convenance que par réelle envie, le poid sur ses épaules lui coupait l’appétit, au moins autant que cette grosseur dans sa gorge et cette lourdeur dans la poitrine. Il en était peut-être de même pour cet étrange reflet, si similaire et pourtant tellement différent. Pouvait-elle lui proposer quelque chose, n’importe quoi, pour alléger un peu ces traits tirés ? Non, elle n’en savait pas assez, sur elle-même autant que sur celle qui lui faisait face. Elles n’étaient vraisemblablement pas proches, de toute façon, échangeant des banalités comme autant d’oeillades lointaines et désintéressées. Se souvenait-elle seulement de comment on faisait, pour tendre la main et attraper celle de ceux qui en avaient besoin ? Ça lui paraissait naturel, comme de respirer ou de marcher, et, en même temps, elle n’osait rien, parce que son père n’était pas loin, parce que la cage dorée l’empêchait de s’envoler. Alors, impuissante, spectatrice d’une pièce dont elle ne faisait pas partie, elle fit mine de ne rien constater, de ne pas deviner qu’il y avait des émotions, derrière ce masque d’indifférence, et hocha la tête avec le même flegme à la question de la jolie princesse de porcelaine. « Elle fait partie du cercle philanthropique qui organise l’événement, alors elle doit être quelque part à saluer des invités ou à régler un quelconque problème dont on ne saura jamais rien. » Elle était douée, pour cacher la poussière sous le tapis et la piétiner avec un sourire distingué. « Et la tienne ? Ton père est là aussi ? Comment vont-ils ? » ajouta-t-elle, se rendant compte qu’elle ne lui avait rien demandé sur ses parents alors qu’elle même s’était enquis de l’état des siens. Une politesse pour une autre, de quoi alimenter une conversation qui, si elle n’était pas tout à fait pénible, n’était ni intime, ni confortable. De quoi ravaler cette inquiétude, celle qui se demandait si toutes se ressembleraient. Le monde était bien différent dans les romans qu’elle parcourait une fois ses devoirs terminés et ses carnets épluchés.

@L. Daisy Gibson
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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptySam 5 Aoû - 4:09


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La foule virevoltait comme autant d’hirondelles au printemps, colorée, guillerette et pétillante à l’instar des bulles dans leurs coupes de cristal. C’était l’image qu’essayait d’imprégner Daisy en balayant les convives de son regard ; des oiseaux battant des ailes autour d’un jardin bariolé. Mais la vérité, c’est que malgré elle, la foule virevoltait davantage comme des moustiques après la pluie. Déjà, il faisait une chaleur insupportable, et le gazon probablement arrosé au petit matin émanait des remontées moites à l’odeur de terre. Et puis, toutes ces conversations mélangées desquelles ne se distinguait aucune cohérence, passant de la tenue de Madame Danbury à la promotion de Monsieur Kettles, résonnait en parasites près des oreilles. Bzzzz, un compliment, bzzzz, une opinion politique. C’était épuisant, tout ce charabia, tous ces étalages de vie qui cherchaient seulement à se renflouer d’un peu de sang. Car il fallait se rendre à l’évidence : si le décor était splendide, bucolique comme dans les contes de fée que Daisy adulait, les intentions y étaient moins pures, relevant plus de l’étalage de fortune et de la recherche de validation que d’une réelle volonté caritative. C’était bien pour cela qu’elle avait tenu à revêtir la plus jolie robe. Après tout, les pauvres (ou les nécessiteux comme préférait les appeler Papa dans toute l’éloquence charismatique dont il était pourvu) se moqueraient bien de la nuance poudrée du rose de sa tulle. Elle n’avait été pointilleuse que pour les riches, ces moustiques qui devaient piquer au bon endroit au bout moment pour ramasser le plus de monnaie d’échange à redistribuer à leur descendance. Curieux, cependant, qu’il n’y ait pas cette fameuse descendance avec elles. Selene et Daisy semblaient effectivement être les deux seules adolescentes de cet évènement, bravant les températures et l’humidité du jardin pour se mêler aux insectes et en partager leur bourdonnement. Elles tournoyaient ainsi autour du buffet, butinant ça et là quelques mets entreposés dans leurs élégantes assiettes de porcelaine, faisant mine d’avoir faim pour imiter la gourmandise de ces suceurs de sang. “C’était sympa ? Je me demande toujours à quoi elles ressemblent, ces vacances organisées par l’école. Qu’est-ce que vous avez fait ?” s’enquit Selene dans toute la spontanéité de sa curiosité. Daisy esquissa un sourire sincère, se retrouvant derrière ces interrogations qu’elle avait si souvent émises à Dashiell à ses retours de vacances. Pour la première fois, elle était apte à y répondre - et elle avait la ferme intention d’être exhaustive, comme elle l’espérait quand elle ne pouvait que rêvasser ce que son meilleur ami avait vécu. “C’est chouette, oui” répondit-elle aussitôt avec entrain. “On est partis sur une île perdue dans l’océan indien. Il y avait plein d’activités manuelles à faire, comme la pêche, la cueillette, des travaux… Ça, c’était pénible, mais le soir venu, on pouvait se baigner librement dans les vagues. On en a profité tous les jours avec Dash. C’était vraiment chouette” souffla-t-elle en guise de conclusion, répétant ainsi le terme employé par son meilleur ami lorsqu’ils flottaient au crépuscule. Peut-être avait-elle trop parlé, mais elle ressentait une telle douceur à ce souvenir qu’elle avait bien le droit de la faire durer un peu, cette bulle qui s’envola aussitôt, balayée par les battements d’ailes saccadés des moustiques autour d’elles.

Pour s’éloigner de l’agitation, mais aussi pour se rapprocher du semblant de complicité qu’elles avaient un jour entretenue, les deux jeunes filles gagnèrent une table à quelques pas de distance, à portée de vue de leur pères qui semblaient s’éterniser en une conversation assez sérieuse pour capter toute leur attention, assez légère pour leur offrir quelques rictus. Ils semblaient vraiment complices, eux. “C’est que tu n’as jamais vu mes notes, alors” rétorqua Selene qui justifiait ainsi son besoin d’étudier au cours des vacances. La Serdaigle fronça des sourcils, encore plus confuse qu’elle ne l’avait été en apprenant la labeur de son été. “Mais si, just…” Mais déjà, Daisy se tut, ces quelques bribes de mots emportées par le brouhaha autour d’elles. L’ombre impersonnelle sur le visage de sa camarade et surtout cette insistance en dépit des faits ne valait pas son propre entêtement. Selene était convaincue de son retard malgré l’excellence de ses notes, alors soit, qu’elle s’enferme dans sa chambre pour ces derniers jours d’août et qu’elle la laisse pour sa part dans les rêveries des plages tutoyées ces dernières semaines. Un bon appétit de circonstances trancha la futilité de leurs échanges alors qu’elles plantaient chacune un couteau dans une tomate. Daisy préféra jouer avec la chaire plutôt que de la porter à ses lèvres, passant une main pensive sur le tissu qui couvrait son ventre. Un petit silence s’installa, rafraîchissant comme la brise qui s’engouffra sous la tente. Une mèche de cheveux glissa sur son visage et Daisy la rangea nonchalamment derrière son oreille avant de reprendre la dissection méticuleuse de sa tomate. Etrangement, elle ne se sentait pas mal à l’aise, au contraire, cette petite parenthèse lui fit du bien. Ses rapports avec Selene étaient flous, coincés entre ce qu’ils avaient été et ce qu’ils devraient être, mais elles avaient partagé suffisamment de nuits, suffisamment de secrets pour tolérer cette entrevue tranquille à l’abri des adultes. Elles s’étaient éloignées, mais se contentaient quand même de la proximité de l’autre. Daisy lui jeta un œil curieux, réalisant de fait que Selene ne lui avait jamais semblé aussi indifférente à cette singulière relation qui les unissait, quand elle la questionna sur sa mère, à la recherche d’un sujet de conversation à défaut d’une main tendue. Sa camarade hocha la tête, désinvolte. “Elle fait partie du cercle philanthropique qui organise l’événement, alors elle doit être quelque part à saluer des invités ou à régler un quelconque problème dont on ne saura jamais rien.” “Oh, je vois” s’entendit-elle répondre. Non, elle ne voyait pas du tout, dans la mesure où elle n’était vraiment pas sûre de comprendre ce à quoi elle s’employait, cette mère occupée, mais ça ne la regardait guère et de toute manière, Selene elle-même disait que personne n’en saurait jamais rien.

Alors, Daisy abandonna ce sujet mort-né et planta sa fourchette dans le cadavre de sa tomate, enfin prête à la manger. Après tout, la conversation avançait, fluide, sans trop de gêne ni d’embarras, et il faisait bon, à cette table où circulait un peu d’air ; il lui sembla que son estomac s’était allégé de toute once de malaise. “Et la tienne ?” Mais déjà, Daisy suspendit son geste, son morceau de tomate à quelques centimètres de sa bouche, pour reporter immédiatement toute son attention sur Selene. “Ton père est là aussi ? Comment vont-ils ?” Sa fourchette retomba aussitôt dans son assiette dans un tintement de couvert désagréablement bruyant. “Je peux savoir ce qu’il te prend?” répliqua-t-elle en cherchant dans les yeux de sa camarade une réponse qui ne vint hélas pas, cachée dans la neutralité de prunelles glaciales. “Tu te moques de moi, c’est ça ?” Évidemment. Selene connaissait très bien son histoire familiale pour la lui avoir raconté en détails au détour de quelques nuits blanchies par leurs confidences. Alors, si elle s’intéressait à sa mère, ça ne pouvait qu’être de moquerie, sachant très bien combien elle y serait sensible… Comment pouvait-elle se permettre cette mauvaise blague ? Etait-ce sa manière de lui faire payer la distance qu’elle avait imposée entre elles, en l’attaquant en pleine réception pour essayer de la déstabiliser en public ? C’était mesquin, bas, et brutal. Prise au dépourvu, Daisy cilla un long moment sur le visage de la jeune fille, comme sonnée par la violence de ce coup qui fit reluire dans ses yeux une singulière émotion. “C’est toi qui es venue me chercher, Selene, je t’ai pas forcée à venir me parler” rappela-t-elle en posant ses mains sur la table pour se retenir à quelque chose avant de glisser dans son emportement. “Si t’avais plus envie de me voir, il te suffisait de me le dire… Et puis tu sais quoi, je m’en fiche” reprit-elle précipitamment en attrapant un verre d’eau d’un geste nerveux qui laissait entrevoir combien elle ne s’en fichait pas tout à fait.“Non, ma mère n’a pas organisé d'évènement caritatif et ne se promène pas pour saluer les invités comme la tienne, mais ça me va très bien comme ça, parce qu’au moins, moi, j’ai un père qui m’aime” conclut-elle sèchement dans toute son immaturité avant de boire une longue gorgée pour étouffer sa colère. Et sur ces mots, elle reposa son verre pour tourner la tête à la recherche du regard aimant de Papa. Tout absorbé à sa conversation avec le patriarche Paulet, il ne devina pas son imploration silencieuse de la rejoindre, ni même ses prunelles auxquelles il n’était pas le moins du monde attentif. Qu’importe. Elle règlerait ce conflit par elle-même, comme la jeune fille prometteuse qu’elle se devait d’être… Alors, Daisy retrouva les yeux de sa camarade, qu’elle toisa un long moment pour se faire menaçante quand elle ne paraissait en vérité que blessée. N’importe qui d’autre aurait déjà fini pendu par les pieds ; mais Selene ? Si les iris froides qu’elle avait observées jusqu’à présent lui semblaient étonnantes, la nonchalance de sa moquerie lui parut encore plus incompréhensible. Ce n’était pas vraiment elle. Alors, par le Génie d'Aladdin, qu’est-ce qu’il lui prenait ?
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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptySam 5 Aoû - 22:53






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Sous la chaleur de cette journée d’été, la glace qui enveloppait les deux poupées blondes aux prunelles bleues fondait doucement. Les salutations froides transformées en préoccupations tièdes devenaient une interrogation sincère et une réponse enjouée. «C’est chouette, oui. On est partis sur une île perdue dans l’océan indien. Il y avait plein d’activités manuelles à faire, comme la pêche, la cueillette, des travaux… Ça, c’était pénible, mais le soir venu, on pouvait se baigner librement dans les vagues. On en a profité tous les jours avec Dash. C’était vraiment chouette. » L’entrain de sa camarade était plaisant à contempler, surtout après le désintéressement mutuel qu’elles s’étaient offertes en gage de paix, surtout parce qu’il nourrissait sa curiosité. Une île perdue dans un océan lointain, des activités qui divergeaient complètement des occupations dont on l’avait assommée tout l’été, un paradis de liberté et de découvertes auquel Selene n’avait pas accès. L’envie la grignotait de l’intérieur, laissant un vide béant au niveau de son estomac, sensation désagréable qu’elle peinait à ravaler. C’était tout de même étrange — mais tellement agréable — ce changement qui s’était opéré au son des notes de piano qui s’étaient engouffrées dans leurs échanges. Do, ré, la, cette inconnue lui paraissait inaccessible, rompue aux paroles polies qu’on se renvoie en espérant que le moment se termine au plus vite, do, ré, do, ses traits se troublaient, devenaient plus amicaux, son sourire plus spontané, bavardant comme on le ferait avec une amie qui saurait de quel Dash il s’agissait. Le savait-elle ? Son esprit piqué cherchait à se souvenir, tirant sur un mince filin qui disparaissait dans les méandres de sa mémoire altérée. Dash, Dash, Dash. Pourquoi est-ce que cette sonorité sonnait comme quelque chose de familier ? « Une île au milieu de l’océan ? Waouh, ça a l’air incroyable. Vous dormiez où ? Qu’est-ce que t’as préféré, dans tout ça ? » fit-elle avec un entrain miroir à celui qui faisait bondir les mots hors des lèvres rosées de sa camarade. Selene rêvait peut-être mais elle avait l’impression que le piano, de l’autre côté de la pelouse, faisait écho aux battements de son cœur, soulignant la légèreté qui s’était débarrassée des silences déstabilisants, la complicité qui se distillait derrière un sourire ou au creux de confidences sans conséquences.

Quelque part, non loin du pianiste qui faisait danser ses doigts sur les marches noires et blanches, un archet s’éleva pour mieux glisser sur les cordes d’un violon, soulignant allègrement cette douce mélodie qui accompagna les pas des deux jeunes filles vers une table située à l’écart. Un élan musical derrière lequel Selene se cacha pour mieux remâcher son propre été avant de le présenter sous son meilleur jour à celle qui s’installa en face d’elle. Une île contre un appartement londonien, des activités en plein air contre des devoirs à ne plus savoir qu’en faire, des soirées à se baigner contre une noyade qui avait tout renversé… Le tableau de ces dernières semaines ne faisait pas envie, même pour un collectionneur négligent. Quelle beauté pouvait-on déceler derrière sa silhouette penchée sur son bureau, l’encre tâchant ses doigts de notions qu’elle devait réapprendre, sans aucun souvenir dans lequel se perdre délicieusement pour faire passer le temps plus vite ? Il était ardu de se rendre compte d’à quel point les heures étaient tristes quand la mémoire n’avait rien dans quoi se plonger. Selene le savait, désormais, et cette connaissance qu’elle n’avait pas cherchée la poussait aujourd’hui à tout graver dans son esprit, aussi profondément que possible, afin d’être certaine d’avoir toujours de quoi se dorloter. La mention de ses notes clôtura une conversation bien moins guillerette que la précédente. Puis le silence revint, la gêne aussi, emportant avec eux le semblant de complicité qui avait brillé en cet après-midi à tel point illuminé par un soleil éclatant que toutes les couleurs en semblaient avalées, ternies. Comme une vague venue lui lécher les pieds avant de se retirer loin, bien loin, ne laissant qu’une morsure froide sur ses chevilles frêles.

Elles se souhaitèrent un bon appétit de circonstance avant de plonger chacune de son côté dans des pensées qui leurs étaient propres. Selene en profita pour étudier d’un peu plus près les jolis traits de sa camarade, décelant un tiraillement derrière son teint aussi frais que la rosée du matin. Elle aurait aimé dire ou faire quelque chose susceptible d’alléger ce poids qui creusait ses pommettes mais elle se retint et se préoccupa plutôt du contenu de son assiette. L’envie grignota un autre bout de son for intérieur, laissant la marque de ses crocs non loin de son cœur. Peut-être qu’elles étaient des connaissances, à Poudlard, se croisant de temps en temps au détour d’un couloir, mais elles ne semblaient être rien de plus. Alors pourquoi ce désir croissant de se rapprocher, de faire renaître un sourire sincère, de renouer une autre discussion aussi naturelle que la première ? C’était un besoin qu’elle ne maîtrisait pas, sorti de nulle part, poussé par un passé dont elle ne se rappelait rien. Son palais assailli par la fraîcheur de la tomate et l’arrière-goût de basilic, elle releva bien vite la tête lorsque la voix de sa camarade brisa la douce brise silencieuse qui les enveloppait. Ainsi, on parlait des parents parce qu’on était incapables de parler de soi-même, de s’ouvrir et de se dévoiler ? Selene avala le légume qui n’en était pas un, espion infiltré parmi une autre espèce, lui trouvant un arrière-goût amer auquel elle ne s’attendait pas. Les bonnes manières la poussèrent à lui retourner la question, sans se douter de la tempête qu’elle allait déclencher.

Les vagues qui s’étaient retirées restèrent immobiles une demi-seconde, jusqu’à ce que le tintement de la fourchette contre la porcelaine ne donne le signal. « Je peux savoir ce qu’il te prend ? Tu te moques de moi, c’est ça ? » Elles se déchaînèrent alors, frappant de plein fouet une Selene déstabilisée, mettant dans l’impact tout l’élan qu’elles venaient de prendre. « J-Je… N-non… » bégaya-t-elle, désorientée par cette soudaine apprêté vindicative dans les mots tranchants de celle qui lui faisait face. Qu’avait-elle bien pu dire pour réveiller un tel ressentiment ? Elle n’avait fait que lui demander des nouvelles de sa mère puis de son père… Au loin, le violon et le piano déployaient un rythme accéléré, lancés chacun dans une direction qui leur était propre. La partition originale devait rendre le tout harmonieux mais, aux oreilles de Selene qui détachaient l’un de l’autre, ce n’était que discordance. Ses prunelles s’emplirent de confusion alors qu’elles fouillaient désespérément le visage encadré de mèches blondes à la recherche d’une explication. Ce joli visage au port princier — quoique bien agité, présentement — et ces lèvres qui déversaient un fiel mordant, ces pupilles bleutées, si semblables aux siennes, ces mèches blondes, aussi blondes que celles qui coulaient le long de ses épaules. Une ressemblance certaine qui n’était pas sans lui rappeler celle notée par la Selene du passé quand elle parlait de Daisy. La belle Daisy, qui n’aimait guère que l’on mentionne cette mère qu’elle méprisait, la gentille Daisy qui s’était éloignée du jour au lendemain, la charmante Daisy qui avait des amis, plein d’amis, et son meilleur ami Dashiell. Dashiell, Dash, Dash… La confusion se transforma en une compréhension presque horrifiée, mais il était trop tard. Et elle s’en voulait, d’avoir abordé un sujet si touchant pour son ancienne amie, en même temps qu’elle la détestait de l’avait abandonnée et de lui retourner toutes  ces vilaines choses en ce jour ensoleillé. Daisy, cette chère Daisy, si proche de son papa aux allures de prince charmant. « … parce qu’au moins, moi, j’ai un père qui m’aime. » Daisy à qui elle avait confié chaque aspect de sa vie, chacune de ses pensées, certaines de les déposer entre de bonnes mains, des mains aux doigts fins, des ongles tranchants qui prenaient un malin plaisir à la griffer. « Alors c’est toi, Daisy. » souffla-t-elle, le menton tremblant, les lèvres désertées de toute couleur. Elle mettait enfin un visage sur un prénom, une voix sur des émotions, une silhouette pour accompagner toutes ces lignes tracées à l’encre de sa peine. Jusque là, elle espérait un peu, rien qu’un peu, que la Selene du passé se trompait, exagérait la désertion de son amie, qu’elle avait encore une personne dont elle était proche à Poudlard. Des espoirs qui venaient de se briser en mille morceaux coupants, clignotants dans leur chute comme autant d’étoiles mortes. Sur le tissu floral qui recouvrait ses cuisses, ses poings se serrèrent. Elle avait envie de s’excuser, de dissiper le malentendu et qu’elles puissent tout oublier pour reprendre leur joyeuse conversation de tout à l’heure… au moins autant qu’elle avait envie de lui rendre la peine dont elle avait été la lectrice, cette peine déposée dans ces petits carnets, une mélancolie qui ne voulait pas passer. « En fait, c’est mon père qui voulait que je vienne te parler. » rectifia-t-elle, sur la défensive. « Il pensait qu’on se connaissait et que ça pourrait ramener des souvenirs. Parce que, tu vois… » Son regard s’envola du côté de son père. Elle hésitait. En même temps, mieux valait éviter un incident diplomatique et apporter des explications avant que Daisy n’aille se plaindre, non ? Quelques battements de cils et elle repose ses deux billes céruléennes sur sa camarade, essayant de masquer cette mise à nue derrière un flegme qu’elle maîtrisait bien mal. Ce n’était plus son menton, qui tremblotant, mais ses lèvres qui se travestirent, récitant le discours de médecins plus âgés et plus intelligents qu’elle pour cacher le reste. « J’ai été victime d’un arrêt cardio-vasculaire qui a causé une amnésie rétrograde. En gros, ma mémoire a effacé toutes les choses qui n’étaient pas importantes. » La mesquinerie avait forcé le passage, à l’ombre d’un grand rideau sombre qui claquait dans la poitrine de Selene. « Je ne me souviens de rien. Je ne cherchais pas à me moquer de toi. » souligna-t-elle finalement, des fois que ces jérémiades enfantines atteignent les oreilles paternelles. Mieux valait clarifier ses propos précédents. En revanche, les excuses lui piquaient la langue et refusaient de sortir telles quelles, alors elle les ravala. Encore ce goût amer.

@L. Daisy Gibson
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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyDim 6 Aoû - 9:02


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Ici, elles avaient tout. De jolies robes qu’elles ne reporteraient probablement jamais une fois la réception terminée, du maquillage soigné sur le bout de leurs cils de poupées, de la nourriture, aussi, en abondance, joliment rassemblée pour mieux souligner la valeur de chaque bouchée. Elles avaient l’ombre de la tente, elles avaient un fond de musique du pianiste qui venait de prendre place, elles ne manquaient de rien ; tant et si bien que l’ennui semblait se servir avec elles, ombre derrière leurs épaules qui guettait les tomates au basilic et les œufs mimosa. Alors, quand Selene l’interrogea sur ses vacances, Daisy s’alluma d’une lueur d’enthousiasme. Là-bas, elle n’avait rien. Que des vêtements assez légers pour tenir la moiteur de l’océan, aucun maquillage pour laisser sa peau de porcelaine respirer, de la nourriture, un peu, mais pas à son goût ; simple, lourde, écoeurante. Elle n’avait pas un coin d’ombre pour supporter la violence du soleil qui griffait son teint, et la seule musique dont elle se souvenait était celle du roulement des vagues, au matin, au midi, au soir. Elle manquait alors de tout, à commencer de Papa, mais aussi de son confort habituel ; et pourtant, pas une seule minute Daisy ne s’était ennuyée. Oh, certes, elle avait été tenue de participer à des activités manuelles qu’elle détestait, et elle avait été contrainte de partager sa chambre avec une fille qui n’était même pas vraiment son amie ; elle avait été traînée sur ce maudit bateau de pêche qui lui avait retourné l’estomac et elle s’était cassée un ongle, la portant contre son gré à devoir raccourcir tous les autres… Mais elle n’avait pas eu une seule seconde pour regretter ce voyage, parce que partout où elle allait, le regard de Dash lui rappelait combien elle était chanceuse. Un sourire pensif releva ses lèvres au souvenir de leurs baignades au crépuscule, quand ils s’amusaient des vagues, quand ils riaient au soleil qui plongeait ensuite avec eux dans l’horizon. Ce qu’elle avait ressenti n’avait rien de la langueur habituelle de ses étés. C’était plus frais, malgré la chaleur tropicale, c’était plus pétillant, comme les tourbillons où ils avaient nagé. “Une île au milieu de l’océan ?” répéta Selene avec engouement. Daisy hocha la tête en étirant son sourire. “Waouh, ça a l’air incroyable. Vous dormiez où ? Qu’est-ce que t’as préféré, dans tout ça ?” “Les baignades” répondit-elle aussitôt, sans l’ombre d’un doute. “La mer était bonne, même la nuit.” Rien à voir avec les côtes d’Irlande, qu’elle ne pouvait généralement qu’admirer de haut au risque de disparaître dans le froid. “On partageait des huttes. Mais ça va, j’étais avec Azure” reprit-elle plus modérément. Car elle aurait préféré disposer d’une chambre à part où se retirer, surtout le jour où des voix avaient serpenté jusqu’à ses oreilles, la rattrapant malgré des milliers de kilomètres de distance… Mais en fin de compte, la compagnie du concierge s’était révélée curieusement agréable et puis, Azure s’était montrée beaucoup plus prévenante qu’elle ne l’aurait cru.

Si Papa n’avait pas été là, dans un coin de son regard, résolument, cette réception aurait pu se révéler bien plus douce que prévu. Après tout, les prunelles de Selene devant elle n’étaient pas aussi âpres que l’avaient laissé entendre les suspicions de Papa, et d’ailleurs, toutes ces dernières années, elle avait été d’une excellente compagnie… Les nuits les plus noires avaient toujours été percées de la lumière de sa confiance. En restait-il quelque chose, à l’ombre de cette tente ? Daisy aurait aimé le croire, mais elle n’était pas assez naïve pour cette illusion-là. Jamais les yeux de la jeune fille n’avaient été aussi insondables, comme couverts de lourds nuages - sans que Daisy sache s’ils s’apprêtaient à pleuvoir, ou à gronder. C’est que Selene n’avait jamais été franchement expressive, en tous cas, pas suffisamment pour laisser place à une quelconque tempête. Peut-être que la brise qui s’engouffra entre elles, remuant robes et chevelures, aurait pu l’avertir sur ce qui se tramait sur la chaise juste en face de la sienne. Car de fait, accompagnant vent et violoniste, Selene lâcha finalement ce qu’elle semblait retenir depuis qu’elle l’avait rejointe à ce buffet. Une probable rancœur, une évidente colère, juste assez pour se moquer d’elle ouvertement en l’interrogeant sur sa mère ; d’abord en demandant en retour si la sienne était également présente ici, ensuite en l’associant à son père pour demander comment ils se portaient. L’explosion fut violente, assez pour sonner la Serdaigle qui accusa le coup en laissant tomber sa fourchette dans son assiette. A l’incompréhension succéda une douleur, sourde, celle de réaliser que ce semblant d’amitié ressuscité entre elles à mesure qu’elles échangeaient à l’abri de la société n’était en vérité qu’un cadavre pour cacher les intentions purulentes de Selene, aussi grouillantes que tous ces moustiques autour d’elle. Ainsi donc faisait-elle aussi partie de ces parasites, à chercher une aubaine pour la piquer, pour assouvir sa soif ? Mais pour quelle raison, au juste ? Parce qu’elle s’était éloignée d’elle, à contrecœur ? Papa avait raison. Cette fille n’était pas fréquentable, et Daisy se mordit les joues de le comprendre à retardement, car elle se serait alors éloignée d’elle de sa plus ferme volonté au lieu de ressentir ce ridicule pincement au cœur. Quelle idiote, elle savait pourtant bien que Papa avait toujours raison ! “J-Je… N-non…” bredouilla sa camarade à ses invectives. Alors quoi, elle était mal à l’aise, à présent ? Peut-être pensait-elle qu’elle n’aurait pas les nerfs de la confronter directement. Mais ne savait-elle pas que s’il y avait un sujet, un seul sujet sur lequel Daisy ne laissait rien passer, c’était bien celui de sa sorcière de mère ? Elle rappela alors qu’à défaut d’avoir cette génitrice aimante et présente, elle bénéficiait au moins d’un père qui l’aimait, elle. Les mots lui avaient échappé, mais à présent qu’ils claquèrent entre elles, Daisy ne ressentit pas le moindre remord. Ils avaient été emportés par la bourrasque qu’avait déchaînée Selene - c’était de sa faute, rien que de sa faute.

“Alors c’est toi, Daisy.” La réplique de la jeune fille la désarçonna, aussi facilement qu’en ces quatre mots, aussi aisément que lorsqu’elle avait mentionné sa mère, quelques secondes plus tôt. “Qu’est-ce que tu racontes ?” rétorqua-t-elle, les sourcils encore plus froncés sur son joli front. Quoi, se surprenait-elle de l’entendre répondre, croyait-elle vraiment qu’elle allait lui laisser passer la désobligeance de son commentaire ? Mais Selene ne semblait pas prête à une nouvelle moquerie, loin de là. Ses lèvres tremblaient, et son visage avait pâli, malgré le bronzage de l’été. Les petits poings de Daisy se serrèrent davantage sur la nappe de la table entre elles, comme pour mieux se retenir à ce joli décor bucolique avant de sombrer dans les contours rougeoyants de son emportement. C’est qu’il y avait du monde sous cette tente, c’est qu’il y avait Monsieur Paulet dans son dos, c’est qu’il y avait Papa à quelques pas. “En fait, c’est mon père qui voulait que je vienne te parler” précisa alors Selene. “Il pensait qu’on se connaissait et que ça pourrait ramener des souvenirs. Parce que, tu vois…” Ses yeux échappèrent au sien pour se flanquer sur ce qu’elle devinait être leur pères. Mais Daisy continuait de scruter son regard, se sentant de plus en plus glisser ; car cette nappe brodée ne suffisait guère plus à la raccrocher dans le réel tant cette conversation n’avait pas de sens. “Parce que quoi ?” s’entendit-elle pester, ne tenant plus l’hésitation de Selene. Elle lui devait des explications, au-delà des excuses, mais celles-ci tardèrent, jouant avec l’impatience de la jeune fille. Et comme elle aurait également titillé celle de Selene, cette dernière porta à nouveau ses yeux dans les siens. Ce n’était pas qu’un nuage qui passait dans ses prunelles bleutées ; c’était un véritable brouillard, qui lui ôta le souffle l’espace d’une épaisse seconde. “J’ai été victime d’un arrêt cardio-vasculaire qui a causé une amnésie rétrograde.” Une mimique d’incompréhension zébra le visage de Daisy, mais déjà, Selene poursuivit : “En gros, ma mémoire a effacé toutes les choses qui n’étaient pas importantes.” “Sérieusement ?” Cette exclamation n’avait pas été plus forte qu’un souffle, dans un murmure plus spontané qu’appelant une réelle réponse. Bien sûr, qu’elle était sérieuse, il suffisait de considérer encore une fois les limbes qui se dessinaient dans ses yeux, cette expression générale d’indifférence, cette attitude désintéressée qui traînait une voix anonyme. Rien de tout ceci n’était feint, car même si Selene était intelligente, elle n’avait jamais été bonne comédienne… Et pourquoi l’aurait-elle été ? Daisy fronça à nouveau les sourcils avant de se reculer contre le dossier de sa chaise, comme pour prendre du recul sur cette situation absurde. “Je ne me souviens de rien. Je ne cherchais pas à me moquer de toi” enchérit la jeune fille d’un ton sans appel comme pour couper court à tout soupçon de doute.

“Admettons” répondit finalement Daisy après quelques instants en croisant les bras sur sa poitrine, le regard soudain dur par delà la table encore couverte de jolis mets qu’elle n’avait guère plus l’intention de toucher. “Tu ne te souviens donc de rien, ou seulement pas des choses sans importance ?” demanda-t-elle, cherchant à entrevoir un semblant de réponse dans toutes les questions qui tombèrent soudain sur ses épaules affaissées. “Tu dis que tu ne savais pas qui j’étais avant de me parler… Mais tu t’es quand même rappelé mon nom. Alors c’est quoi, exactement, que t’as oublié ?” Elle pouvait bien croire ses aveux, encore fallait-il qu’elle soit un peu plus explicite, parce que si même la chaleur de ce jardin et la teneur de cette conversation sans queue ni tête lui donnaient envie d’être suffisamment désabusée pour gober n’importe quelle énormité pourvu que cette réception s’achève au plus vite, elle n’était pas assez crédule pour envisager que Selene ait une mémoire vide… Ou qu’elle soit suffisamment anecdotique dans sa vie pour en avoir été écartée au premier arrêt cardio-quelque chose causant une amnésie-machin. “Mais qu’est-ce qu’il t’est arrivé, Selene ?” lâcha-t-elle alors en se redressant sur sa chaise pour poser ses coudes sur la table. Ce n’était pas très courtois, lui aurait fait remarquer Papa - mais que sa camarade de chambre exhibe une amnésie soudaine et toute relative n’était guère plus poli, lui aurait-elle répondu. Elle se demandait d’ailleurs si Papa était au courant, si c’était de ça dont ils discutaient depuis tout à l’heure avec le patriarche Paulet… Et si c’était également pour ce motif que ce dernier l’avait incitée à venir lui parler, histoire qu’elle se réapproprie cet entourage oublié ? Elle ne savait pas quand avait eu lieu le voyage scolaire. Elle se pensait mauvaise à l’école. Tout semblait faire sens, brutalement, à l’ombre pourtant d’une obscurité encore opaque. Daisy posa son visage sur ses poings, prête à écouter ce que lui débiterait la jeune fille. Elle aurait peut-être dû s’en moquer, après tout, elle venait de l’insulter et… Non. Selene, aussi remontée soit-elle, ne lui aurait jamais porté ce coup bas ; elle en était convaincue en dépit de toute sa colère. Elle n’avait évoqué sa mère que parce qu’elle avait oublié la sensibilité d’un tel sujet. Alors, elle ne pouvait pas s’en moquer. C’était trop aberrant, trop énorme pour être ignoré. Et même si elles s’étaient perdues de vue (autant que l’on puisse perdre de vue celle qui partageait sa chambre neuf mois dans l’année), l’immensité de cette annonce débordait de trop pour ne pas capter son regard tout attentif. Papa serait probablement ravi d’apprendre qu’elle avait perdu un pan de sa mémoire, peut-être même l’était-il déjà, justifiant la fierté de ses rictus avec Paulet ; et peut-être que Daisy aurait dû se réjouir, elle aussi, de ce nouveau départ qui lui permettait de poursuivre sous les commandements de son père sans la moindre culpabilité. Mais en vérité, elle ne ressentait pour le moment qu’un étrange vertige sous la falaise de la distance qui la séparait dorénavant de Selene. Toute une vie d’écart, pour elle qui reprenait à zéro comme si elle n’avait pas gravi les mêmes épreuves à ses côtés.
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Selene O. Paulet

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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyLun 7 Aoû - 18:53






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blue eyes in the haze

À l’ombre de la tente, l'évocation d’un paradis lointain suffit à chasser le flegme teinté d’indifférence qui menait, jusque-là, leur conversation. Une plage de sable remplaça la pelouse grasse, la chaleur humide se fit plus sèche, les parlotes bourdonnantes s’effacèrent pour laisser place au bruit des vagues, tandis que l’une entraînait la seconde dans un pan de ses vacances à l’autre bout du monde. Peut-être que la Grande-Bretagne était l’unique responsable de leurs fastidieux premiers échanges car; une fois mention faite de cette île, les sourires plein d’entrain chassèrent le reste, allant jusqu’à souffler quelques paillettes d’émerveillement dans leurs prunelles. À l’aune de ses pauvres référentiels, l’exotisme de l’été de sa camarade n’en était que plus excitant, poussant ses questions à se déverser avec une spontanéité qui lui faisait du bien. Selene avait envie de passer le reste de cet après-midi à tout entendre de ce séjour incroyable, à se perdre dans les descriptions des lieux, des activités, de tout ce qui avait constitué les journées de cette belle saison, à savoir ce qu’elle avait préféré de tout ceci, comme pour le vivre par procuration, ne serait-ce qu’un tout petit peu. « Les baignades. La mer était bonne, même la nuit. » Les petits riens ne tenaient définitivement pas à grand-chose. « Ça devait être sympa. » souffla-t-elle, tant bien que mal, un étau lui comprimant la poitrine. Sous les lueurs étrangères d’étoiles qui brillaient dans un ciel inaccessible, allaient et venaient des vagues bordées d’écumes au sein desquelles il faisait bon se baigner. Sous un ciel nuageux, symbole national de la patrie dans laquelle elles se situaient malgré leurs rêveries, sur un lac aux eaux glacées, hésitait une frêle embarcation de laquelle elle était tombée. Un monde les séparait de nouveau. Selene était de retour dans sa chambre décolorée et sa camarade était dans cette hutte qu’elle partageait avec cette fille — ou peut-être était-ce un garçon — dont elle ne savait rien. La langueur d’une déception l’enveloppa, née d’une réminiscence qui lui échappait aussi facilement que l’eau coulait entre les doigts. C’était peut-être parce qu’elles se ressemblaient que Selene voulait à tout prix se sentir proche de celle qui lui faisait face. Mieux valait abandonner cet espoir stupide, car hormis de belles boucles blondes et un joli minois percé de prunelles semblables, tout paraissait bien différent et leur complicité naissait aussi rapidement qu’elle mourrait, abandonnée aux pieds de leur petite table ronde, cachée par les pans de la nappe immaculée.

D’un geste de la main machinal, Selene chassa un moustique dont le bzz importun soulignait l’irritation provoquée par ces souvenirs inaccessibles. Il y avait quelque chose qui transcendait la mémoire, quelque chose qui relevait de la force de l’habitude, peut-être, ou d’une couche de son esprit plus profonde et qui restait intouchée. Un quelque chose qui lui nouait l’estomac alors que le silence enveloppait derechef leur tablée et qu’elle se sentait impuissante, observant sa camarade à la dérobée, comme le ferait une voleuse interdite d’entrer. Les mets disposés dans son assiette avaient perdu de leurs couleurs en même temps que Selene avait perdu de son appétit. Ce devait être à cause de la chaleur étouffante que la tente peinait à repousser, parce qu’à qui la faute sinon ? Comment aurait-elle pu prédire que sa politesse se retournerait contre elle et déclencherait une tempête telle qu’elle aurait bien eu besoin de quelque chose à quoi se raccrocher pour pouvoir l’affronter ? Repoussant ses couverts inutiles, elle essuya fébrilement ses doigts sur le contour d’une serviette qui se confondait avec le tissu de la nappe. Le visage de poupée de sa camarade maintenant déformé par la colère s’agitait sous la violence des propos qu’elle lui balançait sans une once de pitié. Là où toutes les platitudes échangées sur toutes les gammes possibles n’avaient jamais rien réveillé, ce débordement brutal tira si fort sur les fils de son esprit entremêlés qu’ils se dénouement comme par magie, s’agençant pour former une broderie pleine de sens. Deux fils bleus entrelacés, l’un éclatant et l’autre terne, qui se séparaient brusquement, le premier s’éloignant, suivi de loin par le deuxième qui espérait encore une explication, un revirement de situation. Toutes ces pages écrites par le passé virevoltaient dans ses pensées, ravivant la peine instillée dans la rondeur des voyelles et dans l’allongement des consonnes. Confusion et compréhension se mélangeaient, ne formant plus qu’un, un tout douloureux qui prononça pour la première fois le prénom de sa camarade. Deux petits syllabes qui portaient tant de choses. Et son cœur qui battait la chamade, et son regard qui fuyait vers d’autres horizons pour se soustraire à l’immense déception qu’elle ressentait. « Qu’est-ce que tu racontes ? » Elle l’entendit à peine. Parce qu’elle avait espéré, à chaque fois qu’elle plongeait dans l’un ou l’autre de ses carnets, espéré très fort qu’elle se fourvoyait sur la perte de sa seule véritable amie et qu’il y avait quelque chose de plus derrière tout ça. Mais maintenant qu’elle la rencontrait de nouveau, pour la première fois, constatant de ses propres yeux une distance qui ne se réduisait jamais complètement, et toute cette méchanceté qu’elle était capable de déverser sans sourciller, elle savait que l’encre n’avait pas menti.

Un battement de cils malheureux ramena son regard là où se trouvait son père. Silhouette de haute stature qui ne souffrait pas qu’on le contredise ou lui désobéisse. Ne me fais pas honte. Sa voix résonnait avec la même force que s’il venait de lui asséner ce coup et non pas comme si du temps s’était écoulé depuis leur départ de Londres. Si Selene s’excusait auprès de Daisy, laissant la situation ainsi, elle ne pouvait prédire quelle réaction cela causerait. Et si elle n’était pas habituée de ces endroits où grouillaient les adultes et les alliances, elle devinait néanmoins qu’un esclandre adolescent ne ferait pas la fierté du patriarche Paulet. Ravalant, en vain, la boule qui grossissait dans sa gorge, elle termina de livrer des explications, sans pouvoir s’empêcher de distiller quelque vilenie bien méritée. « Sérieusement ? » L’exclamation de Daisy lui fit l’effet d’une gifle alors qu’elle n’avait pas été plus audible qu’un chuchotement dont le secret ne dépassait pas leur tête-à-tête. Derrière le point d’interrogation apparaissait un doute qui n’avait jamais effleuré Selene. Ce qu’elle vivait depuis son réveil à Sainte-Mangouste était réel : les souvenirs disparus, la mémoire vide, la lecture des carnets dont les échos ne se réverbéraient jamais. Sous l’injonction paternelle, elle s’était employée à faire de son mieux pour retrouver sa mémoire disparue — un échec, jusqu’à présent, même si l’existence de ces journaux intimes lui conférait une rambarde sur laquelle s’appuyer — et ne pas lui causer du tort en veillant à ne pas répandre la nouvelle de son amnésie comme une immense blague dont ses relations à lui pourraient souffrir. Elle se figurait que, lorsqu’elle en parlerait — si d’aventure elle en parlait un jour —, les autres se montreraient curieux, inquisiteurs, moqueurs peut-être. Elle n’avait pas tenu compte de l’absurdité de la chose pour un œil extérieur et ne s’était pas un instant imaginé que le doute pourrait pointer le bout de son nez, comme il le faisait en fronçant les sourcils de sa camarade. C’était inattendu. Bien en peine d’improviser, Selene se contenta de réasséner la vérité. Elle ne se souvenait de rien, elle ne se moquait de personne. Encore que Père ne serait peut-être pas d’accord avec cette dernière allégation puisqu’il vivait comme un affront ce qu’il considérait comme une régression.

« Admettons. Tu ne te souviens donc de rien, ou seulement pas des choses sans importance ? » Un petit sourire triste dansa un instant sur les lèvres de Selene. Elle aurait tellement aimé clâmer haut et fort que seules les choses sans importance s’étaient effacées de sa mémoire, sous-entendre que Daisy n’était finalement rien et qu’un banal accident, pas si banal que ça, était suffisant pour la faire disparaître de son esprit. Qu’il était facile de l’oublier, aussi facile qu’il l’avait été, pour elle, de la laisser de côté, du jour au lendemain, sans le moindre pardon ou la plus petite explication. Non, elle en était incapable. « De rien. Je me souviens de rien. » articula-t-elle difficilement, peinant à dépasser les multiples barrières que représentaient sa poitrine compressée, sa gorge nouée, ses lèvres pâles qui débordaient d’amertume. « Pour ce que ça change. C’est probablement qu’il n’y avait rien d’important, là-dedans. » Daisy ne laissa même pas une seconde s’écouler, enchaînant avec ses questions comme une juge face à son accusée. « Tu dis que tu ne savais pas qui j’étais avant de me parler… Mais tu t’es quand même rappelé mon nom. Alors c’est quoi, exactement, que t’as oublié ? » De quel droit cherchait-elle à obtenir des réponses ? Après tout, elle-même n’en avait jamais fourni à la Selene du passé, de ça, celle du présent était certaine, car toutes les pages du dernier petit carnet étaient ponctuées d’interrogations jetées dans le vide. Néanmoins, Selene oscillait, elle hésitait entre ne rien lui dire ou tout lui jeter à la figure. D’un côté, se taire risquait de pousser cet échange jusqu’aux pères qui conversaient non loin de là, et sous un jour qui lui réserverait une punition certaine. En même temps, le mutisme était peut-être la meilleure vengeance possible face à son ancienne amie. S’éloigner sans se retourner et la laisser avec toutes ces questions perdues dans le vide… L’idée de la laisser baigner dans l’incertitude était une douce tentation qui lui écorchait le cœur. Est-ce que cela servirait vraiment à quelque chose ? Elle l’avait aperçue, cette complicité, elle n’était pas tout à fait morte et enterrée… De l’autre côté, que perdait-elle à lui expliquer ? Un espoir sot voulait croire qu’il y avait une chance que cette discussion leur permette de renouer les liens distendus de leur ancienne amitié. Une hésitation née d’un instinct de survie se demandait si elle devait confier à Daisy l’existence de ces journaux intimes, ceux-là mêmes qu’elle cachait dans sa chambre, qui lui servaient à entretenir les espoirs parentaux et à tirer son épingle d’un jeu dont elle n’était qu’une pièce ? Il aurait été dramatique que la jeune fille cafte tout au patriarche Paulet tant ce dernier pouvait se montrer imprévisible dans son inflexibilité. Ses yeux papillonèrent à la recherche d’un mensonge, d’un voile qui pourrait déguiser la vérité tout en restant plausible, mais rien ne lui vint. De toute façon, est-ce que Daisy ne l’avait pas vu maintes et maintes fois, le soir venu, griffonner le résumé de ses journées, assise en tailleur dans un lit aux contours flous ? « Je te l’ai dit, j’ai tout oublié. Il y a des choses qui me reviennent naturellement, comme… » Elle chercha un exemple à donner. « comme savoir comment tenir une fourchette ou quel nom donner aux couverts. Pour le reste… » Et elle mima, d’un claquement de doigt, l’extinction de ce reste en question. « J’ai trouvé mon journal intime de l’année dernière, il y a quelques jours de ça. En le lisant, j’ai pu mémoriser des choses. Comme ton prénom. » Demi-mensonge, demi-vérité, ça lui paraissait l’option la plus sûre à privilégier.

Daisy quitta alors sa position renfermée, se jetant en avant pour réduire la distance qui les séparait, ses coudes posés sur la table et son visage sur ses poings refermés. « Mais qu’est-ce qu’il t’est arrivé, Selene ? » Selene tressaillit. Qu’est-ce qui se cachait derrière sa curiosité ? Une avidité déplacée ou une sollicitude sincère ? Mais quelle sincérité pouvait-il y avoir quand on ignorait du jour au lendemain une amie proche. « Pas la peine de faire semblant de t’y intéresser. » rétorqua-t-elle finalement, avec moins d’acidité qu’elle l’avait espéré. Au contraire, sa voix paraissait peinée, tirant sur une tristesse enfouie dont elle ne se souvenait même pas tout à fait. Il y avait des sentiments que les mots peinaient à retranscrire et malgré l’assiduité avec laquelle elle avait consigné ses pensées, elle ne s’était jamais vraiment heurté à ce qu’une année d’abandon et de chagrin amical représentait. Jusqu’à cet instant.

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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyJeu 24 Aoû - 16:18


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“Ça devait être sympa.” Comment la conversation avait-elle pu glisser de cette rêverie acidulée au désarroi cru que Daisy ne parvenait pas à avaler ? Pourtant, rien dans la tente n’avait laissé présager une telle amertume. Oh certes, il faisait toujours aussi lourd, peut-être même qu’un nuage chargé de pluie passait par là-haut pour ainsi écraser l’atmosphère, mais les mets dans leurs assiettes de porcelaine étaient intacts, sa tomate à peine disséquée d’un couteau habilement maîtrisé, et leurs verres de cristal étaient toujours remplis d’eau fraîche, une carafe enchantée ayant virevolté jusqu’à leur table pour désaltérer ces jeunes convives. Papa conversait toujours avec Paulet, et son sourire faisait entendre que tout allait pour le mieux, que sa réputation n’était pas entachée comme elle avait pu l’être par le passé. Et c’était précisément pour ça que Daisy s’abstint de cracher ce venin qui commençait à assécher sa gorge - parce que Papa souriait et que tout allait pour le mieux, que ce n’était pas le moment de gâcher sa réussite, une nouvelle fois. Les doigts crispés sur la table, manquant d’écailler son joli vernis de nacre qu’elle avait pris soin de rafraîchir avant de venir ici, elle attendit des explications de la jeune fille pour s’être ainsi ouvertement moquée d’elle en citant sa mère, cette sorcière qui n’en était pas une mais qui empoisonnait quand même sa vie. Et quelle meilleure explication qu’une amnésie ? Le mot tomba entre elles, sur cette table si précieusement décorée, brusquant l’ordre de la vaisselle. Le visage de Daisy craquela lui aussi sous le coup de massue de cette annonce. Était-ce seulement plausible, ne se fichait-elle pas encore d’elle en prenant un prétexte aussi grossier que celui d’un accident ayant occulté sa mémoire ? Pour une raison qui lui échappa, Daisy choisit de croire Selene et les accents glacés de ses yeux. Nouvelle naïveté de sa part, semblait-il, mais surtout gage d’une confiance passée qui n’était pas tout à fait morte, parce que ces liens-là ne peuvent pas simplement être enterrés sans mourir d’une cause naturelle. Daisy avait forcé les funérailles de leur amitié et se retrouvait désormais, impuissante, devant cette tombe rouverte. Selene n’était plus vraiment Selene, si elle avait tout oublié comme elle l’affirmait - alors, devait-elle essayer de lui tendre la main ou refermer cette porte qui n’aurait jamais dû se rouvrir ? Décontenancée, elle l’interrogea sur les contours de cette amnésie comme pour mieux préciser ce qui, par définition, n’était qu’un flou difforme. “De rien. Je me souviens de rien” admit péniblement la jeune fille qui semblait visiblement manquer d’air dans la pesanteur qui s’était abattue entre elles. Daisy s’aperçut qu’elle respirait difficilement, elle aussi, trop raccrochée à ces lèvres qui n’avaient désormais plus rien à raconter. “Pour ce que ça change. C’est probablement qu’il n’y avait rien d’important, là-dedans” ajouta-t-elle, confirmant ses songes.

Daisy conserva un instant de silence, confuse comme si le brouillard de l’esprit de Selene venait de l’envelopper, elle aussi. Peut-être même s’était-il répandu tout autour d’elles, cachant les autres convives pour ne plus rien laisser d’autre que cette table où elles se toisaient avec méfiance, l’une blessée, l’autre effarée, toutes les deux impuissantes dans cette opacité où il n’y avait plus de direction à suivre. Daisy chercha aussitôt une issue, lançant de nouvelles questions comme pour trouver le fil à remonter, sans même réaliser qu’il lui aurait suffi de quitter cette chaise pour retrouver le confort de la familiarité. Mais cela revenait à délaisser ce fantôme, à refermer cette sépulture, à faire un deuil qu’elle n’avait pas vraiment choisi… Il le lui faudrait, tôt ou tard, ordre de Papa. Mais si elle pouvait faire en sorte que ce soit plus tard que tôt, si elle pouvait essayer de définir un contour à ce spectre pour ne pas se noyer dans un nuage à chaque fois qu’elle croiserait le regard de sa colocataire, elle respecterait quand même sa parole, sans rien faire de mal. Ce n’était qu’une question de temps avant qu’elle ne s’en aille pour de bon ; rien qu’une question de temps… “Je te l’ai dit, j’ai tout oublié. Il y a des choses qui me reviennent naturellement, comme…” Selene sembla chercher ses mots et l’espace d’une seconde, la jeune fille se demanda si c’était parce qu’elle avait oublié certains mots, aussi ; mais comme pour la contredire, elle reprit aussitôt, “comme savoir comment tenir une fourchette ou quel nom donner aux couverts. Pour le reste…” La fin de se phrase éclata dans un claquement de doigts qui manqua de la faire sursauter, ainsi suspendue à ses paroles. “C’est trop bizarre” souffla-t-elle en guise de réponse. Il n’y avait pas de jugement, rien d’autre qu’une incompréhension aussi épaisse que le vide qui avait aspiré ses souvenirs. Comment pouvait-on tout oublier de la sorte ? Selene estimait que c’était parce qu’il n’y avait rien d’important, mais sa vie n’avait pas été aussi ennuyante qu’elle semblait le croire. Pour y avoir assisté aux premières loges toutes ces nuits où elle avait accepté de lui dérouler l’histoire de sa vie, Daisy savait que certaines journées, certains éclats de rire, certaines tristesses l’avaient marquée, assez pour lui être avoués, à elle. C’était étrange, d’être soudain la seule à se souvenir de ces évènements qu’elle n’avait pourtant pas vécus. C’était comme si elle possédait quelques trésors qui ne lui appartenaient pas et qu’elle ne pouvait pas rendre - elle se sentait illégitime, et curieusement, encore plus coupable. “J’ai trouvé mon journal intime de l’année dernière, il y a quelques jours de ça” reprit la Serdaigle, interrompant ses pensées. “En le lisant, j’ai pu mémoriser des choses. Comme ton prénom.” Daisy entrouvrit les lèvres, interdite. “D’accord, mais…” Les mots se bousculèrent, empressés d’échapper à son trouble en trouvant les réponses qu’ils réclamaient. “Mais comment tu m’as reconnue ?” Elle ne s’était rappelée d’elle que sur le tard, à en juger l’éclair qui avait zébré ses yeux en l’appelant par son prénom. Quelque chose avait dû lui faire comprendre son identité, mais quoi ? Était-ce un relent de souvenir enfoui, était-ce une simple déduction ? Ça n’avait sûrement pas d’importance et pourtant, Daisy préférait la première hypothèse - parce que c’était celle de l’espoir et qu’elle voulait qu’il y en ait, de l’espoir, pour cette amie perdue.

A force d’interrogations, la Serdaigle s’était redressée en posant ses coudes sur la table, comme attirée par ce mystère. Il était effrayant, mais fascinant tout à la fois : comment pouvait-on tout perdre de la sorte et pourquoi était-ce arrivé à Selene, pourquoi ne l’avait-elle pas prévenue d’ailleurs et pourquoi son père se présentait-il à cette réception sans avertir ses pairs ? Si c’était elle qui avait perdu la mémoire, elle ne doutait pas que Papa en aurait informé le monde entier pour la protéger des interrogations des autres… Enfin, c’est ce qu’il lui semblait, parce que Papa l’aimait et qu’il aurait donc naturellement agi dans son intérêt. Chaque réflexion lui valait de nouvelles questions, si bien que sa tête s’alourdit et qu’elle finit par la poser sur ses poings avant de se laisser emporter par cette nébuleuse de plus en plus sombre à mesure que Selene y apportait la lueur de ses réponses. “Pas la peine de faire semblant de t’y intéresser” répliqua-t-elle finalement à sa dernière demande, la plus importante de toutes. Daisy encaissa le coup sans broncher, bien moins sensible à cette attaque qu’à celle, involontaire, sur sa mère. Elle ne voyait pas l’offense, dans la mesure où elle était authentique dans sa démarche : elle restait là par envie, l’intérêt eût été, au contraire, de s’en aller… Mais sûrement Selene ne le comprenait-elle pas, ne connaissant plus celle qu’elle était en dehors des extraits narrés par son journal intime. “Je fais pas semblant” répondit-elle alors avec sérieux, le visage insondable. “Ça m'intéresse vraiment, parce que…” Parce qu’elle tenait à elle. “Parce que, je sais pas si tu l’as écrit dans ton journal, mais on est colocataires, à Poudlard, alors forcément, on connaît, enfin, on connaissait un peu nos vies.” Le passé roulait difficilement sur sa langue, lui valant une moue pincée. “Alors, tu veux bien me dire ce qu’il t’est arrivé pour avoir cette amnésie ?” C’était une invitation, et non un ordre. Libre à elle d’y répondre, après tout, elle n’allait pas la contraindre à se confier quand elles n’étaient justement plus censées s’échanger de secrets… Mais Daisy était là, attentive, calme, prête à l’écouter elle et tous les secrets qu’elle aurait eu envie de lui chuchoter - incapable d’être froide face à cette fille qui était pourtant glaciale, figée par un cerveau qui n’avait plus de raison de s’échauffer maintenant qu’il avait tout perdu. La pression était étouffante, désormais, l’orage s’annonçait, ou au contraire le nuage s’était-il éloigné, laissant le soleil brûler l’air de cette journée. Difficile à savoir, toute dédiée au seul regard de Selene devant elle, à ce brouillard qui les isolait du reste d’un monde qui continuait pourtant à tourner. Daisy voulait bien arrêter de tourner, en cet instant, si cela aurait pu permettre à Selene de retrouver son rythme. Mais sûrement espérait-elle à nouveau en vain, se raccrochant à quelque chose qui n’avait plus le droit d’être et qui, de toute évidence, ne pourrait plus être.
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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyVen 25 Aoû - 22:43






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Les lèvres de Selene peinaient à donner vie aux mots qui dansaient, dans son esprit, au rythme de ses hésitations. Ils n’étaient rien de plus que des pensées désincarnées qu’ils devaient déjà se heurter à des nœuds qui cherchaient à les pendre, des étaux qui tentaient de les écraser, des émotions qui menaçaient de les noyer, tout ça dans le seul but de parvenir, hors d’haleine, sur sa langue asséchée par la rudesse de cette confrontation imprévue. Péniblement, les précisions trouvèrent une voix — faible, éraillée, mais une voix tout de même — qui s’efforça de tisser les contours de sa réalité. Ses souvenirs qui n’étaient plus, l’importance qui n’avait probablement jamais été, ces habitudes qui n’en seraient plus. Les notes mélodieuses du piano et du violon furent étouffées par le son de sa propre voix ; les silhouettes qui allaient et venaient dans le jardin disparurent, emportées par un brouillard épais qui alourdissait l’atmosphère de leur petite table, transformant la douce scène champêtre en une nature morte figée pour l’éternité. « C’est trop bizarre. » Un souffle qui fit frissonner Selene. Ses repères se résumaient à une étroite fenêtre dont les carreaux embués donnaient sur une arrière-cour minuscule, aux murs si haut que l’autre côté lui était inaccessible, à la porte en bois sombre à double-tour si bien fermée qu’il lui était impossible de l’ouvrir. Comme une princesse captive d’une tour depuis toujours, c’était à ça que se résumait son monde. Fatalité, injustice, hasard, aubaine, son opinion sur cette prison changeait selon les jours et les émotions. Devait-elle rajouter bizarre à la liste de ses qualificatifs ? D’un haussement d’épaules, elle repoussa la décision à plus tard, laissant retomber les deux petites syllabes dont elle ne savait que faire dans la masse cotonneuse qui l’enveloppait.

Au royaume des souvenirs, Selene était bien pauvre. Tout ce qu’elle possédait, c’était quatre petits carnets bien cachés, recueils de sa mémoire telle qu’elle avait un jour existé. Ils étaient les seuls garants de ce qu’elle avait pensé, ressenti, vécu… les seuls témoins de qui elle avait été, mais aussi des personnes qu’elle avait côtoyées. Au milieu de tous les autres, comment ne pas retenir ce nom qui revenait, encore et encore, si souvent qu’il se dessinait de lui-même derrière ses paupières fermées ? Évidemment qu’elle avait été curieuse de comprendre pourquoi le prénom de Daisy s’accompagnait d’autant de déception, s’empressant de remonter le fil des années pour tenter d’en attraper la raison. Ses lectures terminées, elle s’était retrouvée au pied d’un mur géant, peint de tout un tas d’incompréhensions. Elle savait désormais bien des choses sur cette amie, elle goûtait à l’amertume de la distance qu’elle avait instaurée, mais les pourquoi restaient sans réponse, mystères irrésolus qui soulevaient tout un tas de questions. Pour l’instant, c’était encore Selene qui répondait à celles de Daisy, mais maintenant que ses prunelles blessées pouvaient associer ce joli visage de poupée à des pages et des pages d’un passé oublié, ses propres questionnements revenaient lui pincer le cœur. « D’accord, mais… comment tu m’as reconnue ? » La tension qui maintenait ses poings fermement serrés sur ses genoux recouverts de fleurs se propagea jusque dans ses épaules. C’était douloureux d’admettre que, même amnésique, Selene s’était accrochée à cette amitié chimérique, espérant au fond d’elle s’être trompée et que Daisy était toujours la même amie décrite dans les premiers carnets. C’était souligner une importance dont elle-même était dépourvue, chaque mot creusant un peu plus le fossé qui les séparait. « Une simple déduction. » Force était de constater qu’elle avait vu juste et ce n’était pas tout à fait pour lui plaire. Parce que si tous les détails qui l’avaient mise sur la bonne voie étaient réels, le reste devait l’être aussi. « J’avais écrit qu’on se ressemblait, physiquement, un peu. Qu’on avait parlé de nos parents, aussi, et tu t’es mise en colère quand j’ai posé des question sur ta mère, et tu as dis… tu as parlé de mon père. Je crois que ce sont toutes ces petites choses qui ont fini par s’emboîter. » énuméra-t-elle en essayant de gommer toutes les émotions qui tentaient de se glisser entre les mots pour faire fléchir ses intonations, haussant les épaules pour minimiser la valeur de cette attention portée aux détails, à ces détails, précisément.

Plus les questions fusaient, plus Daisy l’interrogeait, plus elle se penchait sur cette table qui les séparait, plus Selene avait envie de la repousser, de la rejeter tout au fond de son siège, de l’autre côté d’une barrière imaginaire que son esprit dressait pour se défendre. Elle était trop proche, ses yeux trop avide de percer le brouillard de sa mémoire, son intérêt trop présent, trop puissant. Pourquoi faisait-elle semblant de prendre à cœur son état alors qu’elle l’avait délaissée depuis des mois ? Qu’est-ce qui lui donnait le droit de se glisser dans un rôle qu’elle avait elle-même abandonné et de mettre sur pied cette pantomime qui jouait douloureusement avec les sentiments de Selene ? C’était cruel, mais, aussi cruelle soit-elle, la voix de Selene se nouait plus de regrets que de reproches. « Je fais pas semblant. » Une grimace agita ses traits en entendant un tel mensonge. Elle semblait pourtant sincère, alors qu’est-ce qui sonnait faux ? « Ça m'intéresse vraiment, parce que… Parce que, je sais pas si tu l’as écrit dans ton journal, mais on est colocataires, à Poudlard, alors forcément, on connaît, enfin, on connaissait un peu nos vies. » Un hoquet incrédule fit disparaître sa moue plissée alors qu’elle se sentait vaciller, suspendue sur un fil si mince qu’elle pouvait chavirer à tout instant, hésitant entre s’y raccrocher de toutes ses forces ou basculer dans le vide, les yeux fermés, les bras tendus. Je ne sais pas si tu l’as écrit dans ton journal... Devait-elle tout lui révéler de ce qu’elle avait écrit tout ce temps, lu récemment ? Mais comment pouvait-elle ne pas être au courant, c’était elle, après tout, la protagoniste principale de cette fable ridicule, alors à quoi jouait-elle ? Les mots acerbes qui lui brûlaient la langue, devait-elle les laisser exploser comme autant de vagues violentes, ou bien devait-elle faire semblant, jouer de ce faux intérêt que lui présentait Daisy, se glisser dans ce rôle écœurant dont le costume lui grattait chaque centimètre carré de peau ? « Alors, tu veux bien me dire ce qu’il t’est arrivé pour avoir cette amnésie ? » Oh, alors c’était ça, son jeu. Elle caressait ce lien prétendu pour obtenir les informations que sa curiosité lorgnait, tirant sur une ficelle pour obtenir le mouvement désiré.

Selene dénoua difficilement ses doigts, lâchant le tissu froissé de sa robe pour croiser ses bras sur la table, plus proche que jamais de la nonchalance qui se dégageait de la posture de Daisy. Tout le reste s’était effacé, même la présence constante de Père n’était plus qu’une ombre lointaine, derrière le brouillard épais qui les isolait de la réception mondaine qui se poursuivait. Accrochée aux iris de Daisy, bleues comme le ciel de ce jour-là, calmes comme les eaux du lac, elle avait l’impression qu’elle aurait pu se noyer une seconde fois. « Je l’ai écrit, oui, qu’on est colocataires. J’ai même écrit qu’on était amies, puis que tu ne l’étais plus. » Elle était blessée et elle était triste, perdue entre trop d’informations et trop peu en même temps. Son ton accusateur était plus voilé qu’elle ne l’aurait souhaité, laissant deviner toutes les émotions qui traînaient au fond de sa voix. « Mais nulle part je n’ai écrit pourquoi, et j’ai que ça en tête, des pourquoi. » Il lui restait le mince espoir que la réalité soit différente de son écriture penchée mais il était le premier à ne pas vraiment croire en lui-même. La chaleur de cette colère qu’elle couvait en elle — mélange d’incompréhension et d’impuissance — avait fait fondre l’indifférence de ses traits. Couplée à la lourde moiteur de l’après-midi qui s’étirait, Selene se sentait étouffer, malgré le vent qui faisait claquer les pans immaculés de la tente, malgré l’air extérieur qui jouait dans ses mèches blondes, malgré le tissu léger de sa robe qui laissait toute la latitude à sa poitrine de s’affaisser à un rythme dissonant. « Si je te demande pourquoi, tu me répondras ? »

Comme si cet élan amer avait, à lui seul, fatigué un corps plus habitué à l’apathie, Selene retomba contre le dossier de sa chaise, ses mains lissant machinalement le tissu que ses poings avaient malmené avant de s’emparer de son verre. L’eau fraîche qu’elle fit glisser entre ses lèvres assécha un peu plus sa bouche. Bouleversée jusqu’à en modifier l’ordre naturel des choses, elle se sentait épuisée. Daisy n’était plus de l’autre côté de la table mais loin, très loin, inatteignable… ou bien était-ce Selene qui se renfermait et se mettait hors de portée de ce qui pouvait la blesser ? « On m’a dit que j’étais chez mes cousins, qu’on avait pris une barque pour aller au milieu du lac. Je ne sais pas nager, ou alors l’eau était trop froide… » Son esprit ne se souvenait pas, mais elle était convaincue que son corps n’avait pas oublié, lui. Rien que d’en parler, sa poitrine lui faisait mal, chaque goulée d’air était douloureuse, son nez la brûlait et sa vision se troublait, comme si un voile aqueux la séparait du reste. « Un accident idiot. » souffla-t-elle finalement, arrachant son regard au vide dans lequel il était tentant de s’abîmer pour observer les réactions de Daisy, pour espérer quelque chose qu’il était difficile de s’avouer.

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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptyDim 10 Sep - 11:59


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Tandis que l’orage s’immisçait dans leur conversation, les poussières de leur amitié se mirent à virevolter dans l’air, salissant leurs jolis mets que Daisy ne considérait même plus, toute occupée à étudier minutieusement les traits de cette ancienne amie comme pour mieux en comprendre la composition. En vain, bien sûr, Selene tenait un regard insondable, pierres bleutées au milieu d’un visage encore plus figé. Était-ce un masque, était-ce de l’apathie - était-ce l’amnésie, même ? Elle avait perdu tous souvenirs, il ne lui restait plus rien. Quelle réaction pouvait bien fissurer sa peau quand elle n’avait pas de mémoire pour entailler ses émotions ? Daisy continuait de guetter son visage, espérant à mesure que tout espoir s’effaçait y entrevoir un indice sur ce qu’elle pouvait bien penser, cette fille sans passé. Cette considération la fit blêmir un instant, réalisant de fait que ce n’était pas vraiment Selene qu’elle avait là devant elle, de l’autre côté d’une table aussi apprêtée que leurs silhouettes de poupées, mais une copie, l’originale s’étant brisée au cours de l’été. Pouvait-elle continuer de croire qu’elle la connaissait un peu, cette inconnue à qui elle demandait des explications ? Elle ne lui devait rien, puisque tout avait été effacé. Et si elle avait cru garder avec elle des bribes de souvenirs qui ne lui appartenaient pas, elle prit conscience dans une vertigineuse pensée qu’elle tenait-là la mémoire d’une personne qui ne serait plus, remplacée par une jeune fille qui ne demandait visiblement plus qu’à être. “Une simple déduction.” Evidemment, elle ne pouvait que déduire pour appréhender cet univers tout entier qu’elle ne connaissait pas. Les commissures de Daisy se pincèrent d’un chagrin qu’elle ne parvenait plus à contenir, avançant de désillusion en désillusion là où pourtant, elle tenait l’opportunité rêvée de reprendre à zéro cette relation maladroitement bâtie. Elle aurait eu envie de figurer parmi les réminiscences de cette Selene, s’il lui en restait quelques-unes. Parce qu’elle, pour sa part, et en dépit de tous ses efforts les plus soignés, n’était pas encore parvenue à la décrocher du mur de ses pensées. “J’avais écrit qu’on se ressemblait, physiquement, un peu. Qu’on avait parlé de nos parents, aussi, et tu t’es mise en colère quand j’ai posé des question sur ta mère, et tu as dis… tu as parlé de mon père. Je crois que ce sont toutes ces petites choses qui ont fini par s’emboîter.” Daisy acquiesça, non pas parce que le raisonnement était cohérent, mais parce qu’elle était réceptive à toutes ces informations, affamée de la moindre réponse que lui apporterait la jeune fille. Son assiette, pour sa part, n’existait plus dans les débris apportés par cette lourde tempête.

Peut-être même la porcelaine de leur assiette éclata-t-elle sous la pression, ce qui aurait justifié la soudaine attitude de Selene. En effet, dans l’amertume de qui est blessé, elle s’étonna de son intérêt qu’elle pensa feint, avant de répondre sévèrement à une énième interrogation. “Je l’ai écrit, oui, qu’on est colocataires. J’ai même écrit qu’on était amies, puis que tu ne l’étais plus.” Daisy détourna le regard pour guetter un paysage qu’elle ne voyait pourtant plus dans l’opacité de leur brouillard. Néanmoins, cette épaisseur enfumée valait mieux que les nuages qui s’amoncelaient désormais dans leur regard ; l’une d’une colère qui menaçait de s’abattre en éclairs, l’autre d’une tristesse prête à pleuvoir sur ses joues. Elle ne s’était pas attendue à ce qu’une phrase si simple claque avec autant de ferveur entre elles - elles étaient amies, puis elles ne l’étaient plus. C’était comme revivre une seconde fois cette année où elle avait imposé une distance entre elles, retraverser la même incompréhension docile, obéissant à un ordre qu’elle n’était pas capable de remettre en cause. Ce n’était pas parce qu’elle avait obtempéré qu’elle avait trouvé ça facile, au contraire, il était étonnement compliqué de se conformer aux ordres quand on n’en maîtrisait pas l’essence. Ça revenait à agir contre son propre gré sans la moindre raison - ça revenait à s’oublier soi-même. Et si elle n’était pas en mesure de comprendre ce que vivait Selene, qui avait omis son passé, elle n’en ressentait pas moins le même égarement, de s’être ainsi oubliée en chemin. “Mais nulle part je n’ai écrit pourquoi, et j’ai que ça en tête, des pourquoi.” Moi aussi. Mais Daisy continuait de scruter un point invisible à sa gauche, les poids du jupon d’une Madame qui pouffait un peu trop aux blagues d’un Monsieur, un point abstrait dans la brume qui les serrait de plus en plus fort. “Si je te demande pourquoi, tu me répondras ?” La question s’envola pour disparaître au large qui n’existait plus, pressées l’une contre l’autre dans une intimité étouffante, qui donnait envie de recracher tous ses plus lourds secrets. Mais parce que Papa ne veut pas que je sois ton amie. A nouveau, sa phrase resta bloquée derrière ses lèvres scellées alors même qu’elle avait envie de hurler. Elle ne voulait pas être victime de son tourbillon, parce qu’elle n’avait rien décidé, elle, rien du tout, et que si ce n’était pas pour les beaux yeux de Papa, elles seraient encore les meilleures copines du monde et sa mémoire ne serait déjà plus vide, débordante de souvenirs qu’elle aurait pris des nuits entières à lui raconter.

Ses prunelles revinrent d’elles-mêmes aux iris d’une Selene tout autant suspendue à ses lèvres. Les deux jeunes filles se toisèrent, non, s’observèrent un long moment, toutes les deux à l’affût de réponses manquantes dans une énigme qui pesait sur leur cœur, toutes les deux à court de mots pour décrire ce qui n’avait de toute évidence pas d’histoire. “Parce que c’est comme ça” répondit-elle finalement après une interminable suspension, d’une voix plus blanche encore que son teint. “Y a pas de raison, c’est juste comme ça, on s’est éloignées avec le temps.” Sans même avoir touché à son repas, Daisy eut envie de vomir. Ce n’était pas un vrai mensonge dans la mesure où le temps avait effectivement fait son œuvre - mais ce n’était pas non plus l'entière vérité, car jamais les jours ou les semaines n’auraient pu avoir si facilement raison de leur connivence. Les pluies de printemps n’auraient pas pu laver ces confidences faites sur l’oreiller, les bourrasques d’automne n’auraient pas pu défaire ces jolies tresses qu’elles s’appliquaient à nouer dans leur chevelure. Tout ça, Daisy le savait pertinemment - mais Selene, qu’aurait-elle pu trouver à y redire ? Elle n’avait plus aucune trace de ce lien à peine tissé dans un journal intime sans la moindre toile. Rien que des nœuds, ici et là, qu’elle peinait à dérouler à en juger la soudaine fatigue qui la tira en arrière. Daisy pour sa part resta droite, incapable de s’éloigner physiquement de cette ancienne amie avec laquelle elle était déjà bien trop distante. “On m’a dit que j’étais chez mes cousins, qu’on avait pris une barque pour aller au milieu du lac. Je ne sais pas nager, ou alors l’eau était trop froide…” Affreusement distante. De fait, à ce timide aveu de ce qui avait causé son amnésie, Daisy eut envie de plonger en avant, comme elle aurait pu rattraper Selene avant qu’elle ne chavire dans ce lac. Au lieu de quoi, elle resta figée, ses yeux s’embuant de ce brouillard qui n’avait de cesse de s’opacifier en dépit de la limpidité des faits. Une noyade. Sa camarade de chambre, amie des premières années, s’était noyée cet été sans qu’elle n’en sache rien. La terre entière était-elle au courant, ne daignait-on l’avertir qu’en dernière pour mieux signaler l’insignifiance de ce qu’elle représentait pour elle désormais ? Pas un murmure, pas un regard, rien ne laissait présager une quelconque connaissance de ce qui avait ravagé, non, tué cette jeune fille. Parce qu’il fallait bien être morte pour reprendre une page blanche en guise d’existence. “Un accident idiot” conclut-elle dans un souffle. “Je suis désolée Selene, tellement désolée” susurra-t-elle alors tout aussi bas. De ce qui lui était arrivé, complètement injuste, de ne pas avoir su plus tôt, aussi, et de ne plus être là pour elle, à présent. Elle avait envie de l’aider, même si c’était trop tard, car elle avait les moyens d’au moins broder avec elle les images d’avant, pour essayer de lui faire comprendre où elle en était ; oui, elle pourrait accompagner cette nouvelle Selene vers l’avant à défaut de revenir en arrière. Mais elle en était formellement interdite, et ce n’était vraiment pas facile d’être sage, d’être obéissante, oui, Papa aurait dû voir ces jolies larmes qu’elle retenait dans ses grands yeux rien que pour lui faire plaisir, il aurait vu combien brillait son amour pour lui. “J’espère que tes souvenirs sont quand même là, quelque part, et sinon, que tu en vivras des nouveaux encore plus beaux” glissa-t-elle en guise de consolation à défaut de pouvoir y changer quoi que ce soit. Plein de beaux souvenirs, oui ; mais sans elle, quand bien même le trouble de ses yeux aurait voulu y réclamer une place à part entière.
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Message(#) Sujet: Re: blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) blue eyes in the haze (selene ☉ daisy) EmptySam 16 Sep - 18:25






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La chaleur étouffante rendait chaque respiration plus difficile que la précédente, l'air devenu trop épais s'empêtrait dans ses poumons et contribuait à gonfler sa poitrine de sentiments brouillons alors que son cœur se trouvait déjà à l'étroit ; le tissu de sa robe, pourtant si léger, en la comprimant si férocement contribuait à cette sensation de suffocation. Penchée dans la direction d'une Daisy que la fièvre de cet après-midi faisait ployer, Selene était lancée dans une quête des plus vaines, sur les traces d'une amitié qui n'existait plus que dans des carnets bien dissimulés. Les beaux yeux bleus évitaient les siens, le doux visage de princesse fuyait son reflet et Selene se demandait si la jolie poupée n'allait pas tout simplement imploser. Il lui fallait des justifications à ses questions qui n'avaient , jusqu'alors, jamais quitté ses lèvres closes. Les pourquoi dansaient entre les deux fleurs égarées dans ce champ plein de ronces mais ne trouvait nulle réponse, rien d'autre que l'attention fuyante de celle qui la dévorait des yeux quelques secondes plus tôt. Plus rien n'existait que les traits délicats de cette Daisy qu'elle venait de rencontrer pour la deuxième fois ; ni la présence toute-puissante de Père, ni les violons dont les envolées tragiques illustraient à la perfection cette dynamique étrange, ni les dizaines d'invités qui se pressaient sur le gazon, inconscients du drame qui se jouait autour d'une nappe immaculée. Les prunelles de Daisy retrouvèrent le chemin de celles de Selene et cette dernière se surprit à respirer de nouveau. « Parce que c’est comme ça. » La voix de Daisy brisa un long silence qui les avait pressées encore plus fermement l'une contre l'autre, et Selene étouffa, tout son air aspiré par ces mots qui en disaient long sans en dire assez, par cette explication qui n'en était pas une, par le conte que tissaient les lèvres rosées de Daisy mais qui n'avait ni prince charmant, ni princesse gracieuse, ni fin heureuse. « Y a pas de raison, c’est juste comme ça, on s’est éloignées avec le temps. » Sans souvenir de ce lac qui l'avait aspirée toute entière, l'abîmant plus que de raison, Selene ne pouvait certifier que c'était ça qu'on ressentait, quand on se noyait, mais cette sensation qui lui lacérait la gorge et lui brûlait les poumons lui paraissait être une bonne comparaison. Une infinie tristesse remplaça l'air qui lui manquait et lui dévora le cœur. Elle avait mal partout, jusque dans ses lèvres qui tremblaient sous le coup porté, et cette souffrance qui débordait déposa brutalement deux petites syllabes au centre de leur connivence brisée. « Menteuse. » Sa voix étranglée vola en éclat au milieu de ce petit mot qui en disait beaucoup et, ses lèvres disparues en une mince ligne blanche qui barrait son visage blessé, Selene se redressa, s'éloignant autant que faire se peut de cette inconnue dont l'absence lui pesait pourtant cruellement.

Tout ce qu'elle souhaitait désormais c'était de rentrer dans sa cage dorée, refermer la porte de sa chambre aux murs si blancs qu'on pouvait facilement les confondre avec ceux d'un hôpital, et laisser exploser cette tempête de sentiments qui ne savait plus où se diriger. Frustration, tristesse, colère, angoisse, toutes se mélangeaient en un feu liquide qui brûlait tout sur son passage, ne laissant qu'une enveloppe vide, une coquille fatiguée de lutter, désespérée de se retrouver. Comme si cela pouvait encore faire la différence, Selene abandonna quelques bribes d'un récit tragi-comique, celui de son accident qui avait chamboulé son été. Un accident idiot qui avait noyé les attentes paternelles en même temps que sa vie toute entière ; mais que valait cette dernière, dans le fond ? Personne ne s'était seulement inquiété pour elle et tout ce qui l'avait accompagnée alors qu'elle faisait ses premiers pas maladroits dans un monde qu'il fallait redécouvrir étaient les prunelles sombres de Père et celles, fuyantes, de Mère. À qui se raccrocher ? À qui hurler cette douloureuse incompréhension quand il n'y avait personne pour l'écouter ? Ses yeux perdus dans un brouillard qui avait tendance à la happer toute entière ne voyaient plus ni Daisy, ni le reste de ce tableau champêtre qu'elle avait envie d'arracher de son cadre, sans en avoir la force. Elle s'épuisait déjà pour réussir à mettre un pas devant l'autre afin de ne pas lui faire honte, il ne lui restait rien pour elle. « Je suis désolée Selene, tellement désolée. » Il ne lui restait rien pour retenir les larmes qui envahirent ses yeux, brouillant un peu plus ce qu'elle était déjà incapable de voir. La sincère sollicitude de Daisy qui perçait pour la première fois son masque d'indifférence et ces larmes si semblables aux siennes qui brillaient aussi violemment que des diamants dans ces yeux aussi bleus que les siens. « Menteuse. » murmura-t-elle dans un souffle qui se perdit quelque part au-dessus de leur tête, d'une voix pleinement brisée cette fois. Le même mot, répété une deuxième fois, mais débarrassé de toute son ardeur, comme si Selene savait bien, au fond, qu'elle disait la vérité. Incapable de l'accepter, ses pieds sortirent de sous la table, prêts à prendre la fuite. Il n'y avait pas le moindre sens à tirer de cette pureté qui tranchait violemment avec la distance imposée, alors à quoi bon ? Daisy jouait un jeu dont elle seule connaissait les règles et Selene ne pouvait rien y faire. « J’espère que tes souvenirs sont quand même là, quelque part, et sinon, que tu en vivras des nouveaux encore plus beaux. » Un sanglot travesti en un rire qui n'en était pas vraiment un lui échappa. Aurait-elle été moins engloutie dans une tristesse sans fond que Selene aurait osé formuler son envie que Daisy en fasse partie, au lieu de quoi elle se contenta de planter ses prunelles dans les siennes, dans un long échange dont le silence avala tout le sens. Peut-être parviendraient-elles à le retrouver, un jour, un autre qui n'était pas celui-ci, quand enfin leurs mains tendues le seraient assez pour accrocher les doigts de l'autre au lieu de les repousser. Selene renifla et ravala les dernières émotions qui n'étaient pas déjà retombées, épais tapis trempé par la tempête qui s'éloignait. De l'autre côté du champ, le piano guilleret avait fait taire les violons impétueux et le voile blanc qui enveloppait les deux jeunes filles s'était levé, dans un mouvement opposé à celui de la fermeture d'une pièce de théâtre, mais avec une intention similaire. Selene croisa alors le regard noir de Père qui l'appelait à elle, ordre qui ne souffrirait pas qu'on le fasse attendre, et elle obtempéra, les fils qui la maintenaient aux prises des volontés d'un autre l'arrachant à cette douloureuse présence qu'était celle d'une Daisy absente.

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