« Et c'est comme ça que j'ai su, parce que les gens sont toujours en train de leur donner de l'eau ou du lait, mais en fait les rennes, ils préfèrent le jus de pomme pétillant. Personne me croit quand je le dis mais pourtant c'est vrai, j'te promets ! Et les bébés lamas, tu crois qu'ils aiment quoi ? »

La pauvre Gryffondor qui devait supporter les paroles incessantes de Candlynn soupira avec lassitude alors qu'elle haussait les épaules. Elle avait été prise pour cible au beau milieu d'un couloir et ses tentatives pour s'échapper avaient toutes été vaines. Ce n'était pas de la faute de la Serdaigle après tout, si Bailee avait mystérieusement disparu en lâchant un vague « je reviens » lorsque le garçon de Poufsouffle avait atterri dans leur champ de vision ! Elle se retrouvait toute seule, or être toute seule, c'était vraiment nul. Cette pauvre fille, elle ne la connaissait ni d'Eve ni d'Adam mais elle avait un élastique avec des grelots dans les cheveux qui tintaient quand elle marchait, alors ça lui avait donné envie d'aller lui parler. Cela faisait bientôt dix minutes qu'elle enchaînait les phrases sans laisser à sa camarade le temps de placer le moindre mot, elle se fichait pas mal de parler toute seule de toute façon, tant qu'il y avait quelqu'un pour l'écouter, ou au moins pour faire semblant de le faire. Elle avait tout de même appris qu'elle était en quatrième année et qu'elle s'appelait Hannah. C'était largement suffisant pour la voir comme son amie désormais, ce que la dite-Hannah devait bien entendu déjà regretter. L'heure de pause qui se dessinait s'annonçait merveilleuse malgré l'absence de sa meilleure amie. Elle avait une nouvelle copine, et elle allait pouvoir lui raconter sa vie, de l'état lamentable de sa chambre, au génie qui lui servait de frère en passant par la mort d'Erskine, la défunte plante de l'année dernière. Elle en avait des choses à lui dire, à cette rouge et or, et elle n'allait pas se faire prier pour le faire ! Manque de chance, le visage de la jeune fille s'illumina en voyant apparaître la salle d'Histoire de la Magie à quelques pas de là. C'était probablement la première fois que quelqu'un était content d'avoir ce cours-là dans sa journée... Elle prit congé d'une voix pressée et fila rejoindre ses camarades avant même que Candy n'ait eu le temps de lui dire au revoir. Les amies de la lâcheuse se mirent à ricaner en la voyant passer, comme si elles avaient déjà eu vent de son côté à moitié cinglé. C'était possible bien sûr, les nouvelles allaient vite dans l'école et si généralement les autres élèves étaient toujours très gentils avec elle, elle n'avait pas toujours la chance de tomber sur des gens sympathiques, elle en avait eu la preuve au bal de fin d'année de l'année dernière.

Enfin... Maintenant, il lui fallait retrouver quelqu'un avec qui discuter jusqu'à la fin de la pause... Sauf si Bailee réapparaissait d'ici-là. La Serdaigle se stoppa nette, obligeant les autres usagers du couloir à l'éviter en râlant, jeta un coup d'oeil autour d'elle à la recherche de sa meilleure amie, mais en vain... Elle n'était pas plus là que dans le couloir d'avant. Elle la retrouverait en Potions, ça ne faisait rien... Loin de se démonter, la gamine prit le chemin des cuisines, qu'elle connaissait désormais. Elle y passait autant de temps que dans sa salle commune tant elle avait toujours faim. Elle n'avait jamais vraiment su si elle avait le droit ou non d'y aller mais personne ne lui avait jamais rien dit, pas même les préfets de sa maison à qui elle avait dû dire, par mégarde, une ou deux fois qu'elle allait chercher un truc à manger, parce que les elfes cuisinaient trop bien. N'importe quoi, pourvu que ça soit comestible. Le trajet qui la séparait des fourneaux fut effacer en un rien de temps et la nature morte qui servait d'entrée chatouillée avant même qu'elle n'ait pu remarquer qu'il y avait quelqu'un, et ce fut toute fière que la jeune Zuckowski ressortit avec une dizaine de cookies, une pomme, et deux pains au chocolat. Certes, avoir le ventre plein était le plus important, mais il fallait maintenant savoir quoi faire pour passer le temps, ce qui n'était pas gagné. Elle n'avait pas envie d'aller dans le parc, même si elle y avait rencontré une gentille fille la dernière fois, et elle n'avait pas envie d'aller à la bibliothèque parce qu'elle s'y ennuyait. Sa salle commune n'avait d'intérêt que s'il y avait quelqu'un pour lui tenir compagnie, ce qui ne serait certainement pas le cas puisque les Serdaigle étaient en général à la bibliothèque... Son regard se posa sur les immenses portes de la Grande Salle alors qu'elle remontait les marches qui menaient au hall, un cookie entre les dents tandis qu'elle rangeait tant bien que mal le reste de ses provisions dans son sac. Oui, pourquoi pas... C'était toujours mieux que rien. Et puis, de ce qu'elle voyait d'ici, il y avait l'air d'y avoir du monde. Enfin, rien qu'un peu en tout cas. Suffisamment pour trouver quelqu'un avec qui discuter ! Elle remonta son sac que son épaule, tira un peu sur son pull et entra d'un pas décidé dans la pièce. Il ne lui fallut pas bien longtemps pour remarquer Slevin, assis à la table des Aigles, visiblement occupé à elle ne savait trop quoi. Elle regarda autour d'elle, il n'y avait personne qui semblait décider à aller le déranger, et Bailee n'avait toujours pas pointé le bout de son nez. Elle acheva son cookie en vitesse, retira les miettes qui étaient tombées sur ses vêtements et tâcha même d'arranger ses tresses, sans grand succès. Elle regretta de ne pas connaître de sortilège nettoyant vu les tâches de peinture qui décoraient ses mains. Sa mère avait toujours dit que les garçons aimaient bien les filles coquettes et apprêtées, toujours tirées à quatre épingles. Elle ne savait pas trop si c'était vrai, mais dans le doute... Enfin, pour cette fois comme pour toutes celles d'avant, c'était raté. Elle n'était même pas en jupe ! Pour une fois, elle aurait vraiment aimé ressembler à sa meilleure amie. Elle était toujours jolie, et puis elle sentait bon un parfum de fille, et même si ses rubans faisaient un peu nunuche, elle était très bien. Ce qui n'était malheureusement pas son cas... Si elle n'avait pas les cheveux longs, un peu trop longs d'ailleurs, on pourrait la prendre sans mal pour un garçon. Enfin bon, elle ne pouvait rien y faire. Et puis, peut-être qu'il l'aimait bien quand même ? Il ne s'était jamais moqué et n'avait jamais été méchant avec elle. Elle finit par se convaincre que ressembler à une vraie fille ne servait à rien, qu'il finirait bien par la remarquer quand même un jour puisqu'elle faisait son possible pour être toujours sur son chemin, et prit la direction de la table. Elle se laissa tomber lourdement sur le banc face au jeune homme et lui sourit grandement.

« Bonjour ! Tu vas bien ? Tu fais quoi ? Ca fait longtemps que je t'ai pas vu, tu m'évitais ? » demanda t-elle d'un ton joyeux avant de poser les yeux sur le parchemin qui s'étendait devant le Serdaigle. « Oh, t'écrivais ? Je te dérange pas ? T'écrivais quoi ? »

L'idée qu'en effet il puisse avoir envie de la voir déguerpir ne fit que lui traverser l'esprit, on ne venait pas dans la Grande Salle pour être tranquille. Il y avait tout plein d'endroits pour l'être dans le château, mais certainement pas celui-là ! Elle sourit de plus belle et posa son sac à ses pieds dans un bruit de ferraille auquel elle ne prêta pas attention. Enfin de compte, peut-être que sa pause allait être bien quand même malgré l'abandon de Bailee, et de la Gryffondor et son manque plus que présent de compagnie... Elle n'aurait pas pu espérer mieux ! Elle en oublia même les appels à l'aide de son estomac qui n'avait avalé qu'un seul gâteau, bien trop occupée à contempler son interlocuteur sans ciller, avec un sourire un peu stupide qui ne changeait pas trop de d'habitude. Elle avait de la chance d'être à Serdaigle quand même, il y avait plein de gens gentils même si elle en connaissait la plupart que de vue. Bailee, Slevin, Hecate, Jan-Hendrik... Ce n'était pas le cas à Serpentard, ni à Poufsouffle puisqu'elle ne connaissait absolument personne de là-bas... A Gryffondor, il y avait des gens gentils aussi, mais moins... Non, il n'y avait pas à dire, c'était la meilleure maison du monde.

« T'as vu, j'ai fait des mèches bleues dans mes cheveux pour aller avec mon uniforme, t'aimes bien ? On trouve des sorts bizarres quand même, je pensais pas qu'on pouvait le faire sans aller chez le coiffeur... Mes parents ont pas voulu que j'y aille pour mon anniversaire, ça va leur faire un choc quand ils vont me voir, j'ai hâte ! Ca va être trop drôle ! »

«  - Salut l'oisillon ! » 

Son sourire s'agrandit en entendant le jeune homme lui répondre autant grâce au ton agréable qu'il avait employé qu'au surnom qu'il venait de lui donner. Elle avait bien fait de ne pas avoir peur de le déranger en fait ! Elle avait presque l'impression qu'il était content de la voir, comme si elle faisait partie de ses amies ou des gens qu'il appréciait dans l'école. Candlynn ne se souvenait pas l'avoir entendu s'adresser à elle d'une autre manière rien qu'une fois, ni de lui avoir dit la moindre chose blessante. Parfois, elle avait tendance à se laisser aller à penser qu'il pourrait remplacer Jeremiah pour le temps qu'elle passait au château, et puis elle finissait par culpabiliser et s'en voulait d'avoir eu la stupidité de sous-entendre que son frère était remplaçable. Comment le pourrait-il ? Même si Slevin était, de loin, le garçon le plus gentil, le plus chouette, le plus beau, et tout et tout, de Poudlard, il n'arrivait tout de même pas à la cheville de l'aîné des Zuckowski, personne dans le monde n'y parvenait de toute façon. C'était là le seul problème à avoir un grand frère aussi parfait que lui, toute comparaison tombait inévitablement à l'eau et la totalité des garçons du monde ne pouvait que rester dans son ombre. Ce serait difficile pour faire sa vie plus tard, si toutefois elle se risquait à prendre le large un jour ce qui n'était fort heureusement pas au programme. Comment pourrait-elle se contenter d'un garçon sympathique quand elle avait côtoyé la perfection pendant sa vie toute entière ? Impossible. Chercher ne servirait à rien... Enfin, elle n'en était pas encore là, et puis quand bien même cela aurait été le cas, il n'y aurait pas eu grand monde d'autre que le Serdaigle dans sa ligne de mire. Sauf qu'il lui faudrait se dépêcher un petit peu puisqu'il était déjà en sixième année, ce qui signifiait qu'il partirait à la fin de l'année prochaine, limitant ainsi sa marge de manoeuvre...

« Je vais très bien ma foi et toi ? T'évitais dis-tu ? Jamais de la vie, cela ne me viendrais même pas à l'esprit, j'étais juste occupé, voilà tout. Et toi que faisais-tu ? »

La jeune fille gloussa lorsqu'il admit ne jamais avoir eu envie de l'éviter, elle ne prit pas la peine de chercher plus loin, s'il le disait c'était que c'était vrai. Ca faisait au moins deux personnes qui ne l'évitaient pas dans l'école, c'était bien ! Ca faisait un peu plus que ça si on comptait les gens qui prétendaient ne pas le faire et qui changeaient de couloir quand ils la voyaient arriver, espérant sûrement qu'elle ne remarquerait rien, mais ils semblaient oublier que son apparente naïveté ne cachait pas de problème de vue. Elle ne s'en était jamais formalisée, préférant se rassurer en se disant que sa meilleure amie était encore plus mieux qu'elle l'imaginait puisqu'elle restait avec elle tout le temps sans jamais se plaindre alors que les autres, parfois, choisissaient de faire un détour plutôt que d'avoir à lui adresser la parole. Quand elle avait fait part de cette réflexion à Jeremiah, celui-ci avait malhabilement évité tout commentaire sur le sujet. Candy ne comprenait pas ce qu'il avait contre Bailee. D'accord, parfois elle était un petit peu capricieuse. D'accord, parfois elle n'était pas très agréable. D'accord, parfois elle se mettait en colère pour pas grand chose. D'accord, parfois elle avait tendance à vouloir tout diriger. D'accord, parfois elle se permettait de la gronder comme si elle était sa mère. D'accord, parfois elle semblait pas beaucoup apprécier qu'on s'approcher d'elle, comme si elle lui appartenait... Mais est-ce que c'était une raison suffisante pour pas l'aimer ? Certainement pas ! Elle en avait donc conclu que son frère était jaloux de l'attention qu'elle lui portait et de la place que sa meilleure amie avait pris dans sa vie, mais au fond c'était de sa faute à lui ! C'était lui qui avait comploté avec leur parents par deux fois pour la mettre de force dans le train, lui qui se liguait contre elle après avoir fait mine d'être son plus fidèle allié dans toutes les batailles qu'ils avaient pu mener, lui qui avait feint se ranger de son côté durant les grandes vacances avant de la trahir une nouvelle fois. Elle ne pouvait pas lutter contre ce qu'il voulait, lui, et n'avait pas la moindre envie de rester toute seule pendant des mois simplement pour ne pas que Monsieur se sente délaissé. S'il l'avait gardée près de lui dès le début, il n'en serait pas là.

« Tu ne me déranges jamais voyons, j'étais en pleine révolution Gobeline sur tu veux tout savoir, alors un peu de distraction ne peut pas me faire de mal et toi que fais tu là ? Tu n'es pas avec ta copine ? »

La Révolution Gobeline ? Elle en avait entendu parler une fois, en écoutant les conversations d'élèves plus âgés alors qu'elle attendait patiemment de pouvoir rentrer en cours d'Histoire mais elle ne s'était pas posée plus de questions sur le sujet. Ca avait l'air ennuyeux à souhait. Si elle aimait un peu bien les cours d'Histoire, elle trouvait ça dommage que ce soit si long et que parfois, la voix de leur professeur ait tendance à les bercer, les laissant s'aventurer dangereusement sur le chemin de la sieste, alors qu'il était le premier à les réveiller sèchement lorsque ça arrivait. Aussi, son esprit finissait par vagabonder loin, et elle par dessiner sur son parchemin, et lui par lui donner une heure de colle lorsqu'elle récidivait un peu trop souvent. Enfin, depuis le début de l'année, elle parvenait plutôt bien à se maîtriser. Si elle voulait pouvoir passer les vacances de Noël chez les Browning, mieux valait se tenir à carreau et ne pas donner à ses parents de raison de la punir. Elle faisait de vrais efforts qui finiraient, elle l'espérait, par être remarqués, autant par ses géniteurs que par la Serdaigle. Elle était prête à faire beaucoup pour qu'elle comprenne que même si elle avait toujours envie de prendre la fuite elle comptait vraiment pour elle et qu'elle n'avait absolument pas de la laisser tomber. Elle ne savait pas si elle l'avait vraiment intégré après leur dispute dans le train, donc dans le doute, autant prévoir la piqûre de rappel. Ce serait dommage qu'elle s'imagine avoir la pire meilleure amie du monde. L'était-elle ? Pouvait-elle vraiment l'être ? Elle n'en avait jamais eu l'impression mais on était à l'abri de rien après tout. Elle n'avait jamais eu de meilleure amie avant, alors elle n'était pas vraiment au point... Elle avait pu tout faire de travers depuis le début, et Bailee, bien trop gentille pour la vexer, n'avait rien dit de peur de lui faire de la peine. Euh... Oui, non, ça ne collait pas trop au personnage quand même. Elle ne comptait plus le nombre de fois où elle avait boudé pour presque rien alors si elle avait fait une grosse erreur, elle ne l'aurait sûrement pas laissé passer sans rien dire.

« Je vais bien aussi, mais je suis un peu triste quand même. Les arbres ils ont froid, et pour rien en plus parce qu'il ne neige pas encore... J'ai prêté mes écharpes à quelques-uns mais j'en ai pas assez pour tous alors ils font finir par être malade. Tu crois que si j'écris un message sur le panneau d'affichage, y'a des gens qui m'aideront ? Hailey, elle m'a prise pour une folle je crois... » soupira t-elle alors qu'elle se mettait à faire des dessins abstraits sur la table du bout des doigts. « Bailee ? Non... On était ensemble dans le couloir et puis elle a dit qu'elle revenait mais j'avais pas envie de l'attendre dans le couloir alors j'ai été voir une Gryffondor avec un élastique avec un grelot, j'ai le même à la maison, mais elle a fini par retrouver ses amies alors j'ai été dans les cuisines chercher un truc à manger... Et me voilà. J'avais pas prévu de te trouver là, mais je suis contente ! Tu veux un cookie ? Je crois qu'elle aime bien Kaïn, tu le connais ? Il est à Poufsouffle en troisième année. Ils font genre ils s'aiment pas et tout, mais elle change quand il est pas loin. Je sais pas si j'avais le droit de le dire... Je crois que j'avais même pas le droit de le savoir en fait. Tant pis... De toute façon, c'est pas toi qui ira le répéter, hein ? J'aimais mieux quand il existait pas quand même. Tu crois qu'elle finira par plus m'aimer du tout et le préférer lui ? Ce serait nul... »

Elle ne sembla pas réaliser qu'elle se trouvait au beau milieu de la Grande Salle et qu'il y avait généralement des oreilles indiscrètes qui y traînaient en permanence, ni même que le pauvre Slevin n'avait sûrement pas envie de servir de psy à une gamine de douze ans alors qu'il avait des devoirs à terminer et qu'il ne lui avait absolument pas poser de question qui puisse nécessité un tel monologue. Son sourire s'était un peu perdu sur la fin mais elle finit par hausser les épaules, comme pour s'assurer que tout ça n'était rien et qu'elle n'avait aucune raison de s'attarder dessus, le retrouvant sans le moindre mal, comme si tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Elle fit même l'effort de se taire un instant, essayant vainement de lire à l'envers ce qu'il y avait d'inscrit sur le parchemin du jeune homme en face d'elle, se rappelant par la même occasion qu'elle avait pas mal de devoirs en attente et qu'à ce train-là, elle n'aurait jamais terminé les deux rouleaux qu'elle devait faire en métamorphose, ni les exercices en Sortilèges, ni la lecture du chapitre 4 de DCFM, pas même les trois cartes du ciel d'Astronomie... Elle commencerait sûrement par là de toute façon, dessiner des étoiles et des planètes, c'était amusant. Elle aimait bien chercher les constellations qu'elle ne connaissait pas encore très bien... Son père avait commencé très tôt à lui apprendre, bien avant que ça ne soit au programme de sa scolarité, lorsqu'ils faisaient des pauses de nuit au milieu de nulle part. A Oldham, on voyait bien moins les étoiles, c'était dommage, elles étaient très jolies. C'était triste de se dire qu'il y en avait peut-être qui étaient déjà mortes alors qu'elles brillaient si fort au dessus de leur tête... Personne ne s'en souciait jamais, elles ne pouvaient même pas espérer un enterrement digne de ce nom, déjà parce qu'il n'y avait pas de terre dans l'espace, et aussi parce que les autres étoiles ne pouvaient pas bouger pour le faire... C'était un peu pourri la vie d'une étoile quand même.

« Ton anniversaire ? C'était quand ? Ça te fais quel âge maintenant ? C'est … très joli en tout cas, même si en effet je ne suis pas sûr que tes parents apprécient... Se sont des sorciers eux aussi ?»

Candlynn ressentit une certaine fierté quand il lui dit que ses cheveux étaient jolis ainsi. En plus, le compliment venant de lui, elle ne pouvait que flotter un peu sur un nuage au pays des petits poneys. Il venait de lui dire qu'elle était jolie ! D'accord, ce n'était pas tout à fait ça mais quelle différence ! S'il n'avait pas été juste en face d'elle, elle se serait très certainement permise de faire le sautillement de la joie mais là, ça n'était pas possible. Elle n'avait pas vraiment envie qu'il finisse par la prendre pour une gamine. Pour un peu que ça ne soit pas déjà le cas, bien entendu, mais elle continuait d'espérer un peu qu'il puisse la considérer autrement. Elle ne savait pas vraiment comment mais ça n'avait pas beaucoup d'importance. Normalement, c'était Bailee la fille jolie d'elles deux, elle s'en était toujours accommodée, trouvant un peu ridicules ces idiotes qui avaient peur de marcher dans la boue ou de grimper aux arbres simplement parce que ça pouvait être un peu salissant, mais pour une fois, ce n'était pas Bailee, c'était elle. Elle. Ca n'allait pas changer le cours de sa vie, c'était certain, elle n'allait pas décider soudainement de se mettre en robe et de porter des chaussures vernies mais ça lui faisait plus plaisir qu'elle ne l'aurait imaginé malgré tout.

« C'était le 24 Août, j'ai eu douze ans. Et un boursoufflet bleu comme cadeau, il s'appelle Kolia. Il sert un peu à rien mais j'l'aime bien. Tu voudras que je te le montre pendant qu'il est encore vivant ? Non, c'est des moldus, mon frère il aurait été à Poudlard aussi sans quoi... Mais non... Je suis sûre qu'il aurait été à Serdaigle aussi ! Ils comprennent pas trop ma vie ici... Je fais des tours de magie, et j'vais en colle parce que j'écoute pas, c'est un peu leur résumé. J'pense que c'est pareil pour tous les parents qui sont pas sorciers, non ? Les tiens le sont ? Ca a fait un choc à tout le monde quand j'ai reçu ma lettre, on pensait que c'était une blague pas drôle. On était même pas à la maison, en plus. J'aurais jamais pensé qu'on pouvait me retrouver dans un village paumé en Inde, mais si. Je sais toujours pas comment ils ont fait pour savoir qu'on était là-bas mais ils sont trop doués ! »

« Je te conseils plutôt d'aller voir le professeur de botanique, il te dira si les arbres risquent vraiment de tomber malade ou non et ce qu'il faut faire pour l'empêcher si c'est le cas. Si ton idée lui plaît, il pourra lui même proposer cette « activité de groupe » ... »

Demander au professeur de Botanique ? Mais c'était pas bête du tout ça ! Elle l'aimait bien en plus. Il y avait fort à parier qu'il serait d'accord avec elle, et peut-être même content que quelqu'un se préoccupe de la santé des arbres ! Elle avait été bête de ne pas y penser avant ! Heureusement, elle avait eu la chance de croiser Slevin, et le bon sens de lui en parler. Peut-être qu'il était de bons conseils tout le temps, et qu'au lieu de se prendre la tête sur des questions stupides auxquelles elle ne trouvait jamais aucune réponse, elle devrait venir lui en parler. Il l'aiderait à y voir plus clair et à trouver des idées trop biens pour régler tout ça ! D'un autre côté, c'était un peu prévisible quand même, il s'agissait de Slevin, pas de n'importe quel imbécile de l'école, s'il y en avait bien un qui pouvait l'aider c'était lui. Comment avait-elle pu passer à côté de ça jusqu'ici ? Il fallait vraiment être trop bête ! Bon, visiblement elle l'était... Elle ne s'était jamais cru particulièrement intelligente mais pour zapper un truc aussi visible que ça, tout de même... Elle se désespérait toute seule. Vraiment... Son sourire s'était néanmoins élargi à l'idée qu'il y avait peut-être quelqu'un dans ce château prêt à prendre le sort de ces pauvres arbres au sérieux. Ils allaient finir par avoir chaud tout l'hiver, quitte à demander aux elfes de leur tricoter des manteaux. Des manteaux... Mais oui ! C'était ça qu'il leur fallait, un manteau avec plein de manches pour toutes leurs branches ! C'était sûr qu'une écharpe ne pouvait pas leur suffire vu comment ils étaient grands. Ce serait trop bien ! Tous les arbres dans le parc allaient avoir des manteaux, ou des gros pulls, faits exprès pour eux et en plus d'avoir chaud, ils seraient trop beaux, et trop fiers d'être ainsi habillés pour l'hiver !

« Trop bonne idée ! J'irai dès tout à l'heure ! Si on a besoin de monde, tu voudras bien venir nous aider ? Ce serait quand même grâce à toi si ça se fait. Et après j'irai voir les elfes, peut-être qu'ils voudront bien leur faire des manteaux. Je sais pas tricoter, sans quoi j'les aurais fait mais bon... J'apprendrai pendant les grandes vacances comme ça j'pourrais le faire l'hiver prochain ! »

Encore fallait-il qu'elle reste chez sa grand-mère suffisamment longtemps pour qu'elle puisse lui apprendre mais elle ne se faisait pas trop de soucis. Au pire, il y aurait bien quelqu'un là où elle irait qui saurait le faire et qui accepterait de lui apprendre. Il devait y avoir plein de gens dans le monde qui savaient tricoter, ce serait quand même bête de tomber au seul endroit où il n'y en avait pas. Mais non, ça n'arriverait pas. Elle apprendrait à Jeremiah après, comme ça il pourrait lui envoyer des pulls pour arbre par la poste et ainsi l'aider dans son combat contre le froid. Peut-être même qu'un jour ça deviendrait une association mondiale et que tous les arbres du monde auraient des vêtements chauds pour les derniers mois de l'année. Ce serait tellement bien ! Les arbres aussi seraient enfin heureux et tout et tout. Ils y avaient le droit, comme tout le monde. Déjà qu'ils avaient une vie pas toujours super alors si en plus on leur enlevait le droit de pas avoir froid, les pauvres n'avaient plus qu'à se pendre. Restait encore à trouver un endroit où accrocher la corde... Bien sûr, si le jeune homme ne voulait pas se donner la peine de lui filer un coup de main, elle ne lui en voudrait pas, il avait déjà eu une super idée en lui conseillant de se rendre auprès du Professeur de Botanique, elle ne pouvait pas lui demander en plus de s'occuper des arbres avec elle. Et puis, il fallait être réaliste, il avait sûrement d'autres trucs à faire. Comme il venait de l'accepter, elle lui tendit un cookie et en prit un aussi, croquant dedans sans attendre une seconde de plus, écoutant cependant Slevin avec attention.

« Kaïn ? Non désolé je ne le connais pas, mais tu sais je ne fais pas trop attention aux gens qui m'entourent en général. Tu sais on aime pas ses amis de la même façon qu'on aime un garçon ou une fille, les liens amicaux durs plus longtemps, crois moi … Et toi dis moi, il y a un garçon dans ta vie ? »

La jeune fille resta silencieuse un moment, fixant son interlocuteur sans vraiment savoir comment réagir. Sa question ne la gênait pas le moins du monde, loin de là, mais le reste de sa réponse n'en faisait pas de même. Comment ça ''pas de la même façon''...? Et Bailee, elle devait la mettre où dans tout ça ? Parce que c'était pas une juste une fille, mais c'était pas juste une amie non plus, c'était sa meilleure amie pour la vie c'était encore différent. Le silence qu'elle continuait de garder aurait pu lui paraître inquiétant si seulement elle avait pris la peine d'y réfléchir un instant. Si être amoureuse faisait passer Bailee au stade ''d'amie'' et bien elle n'était vraiment pas pressée de l'être. Il ne manquerait plus que ça ! Elle était tellement mieux que toutes les autres amies qu'elle pouvait avoir que c'était stupide d'imaginer un seul instant qu'elle puisse la mettre dans le même panier qu'elles simplement parce que c'était une ''amie''. Il faudrait trouver un autre nom qui contienne pas ce mot pour éviter tout problème alors ? Oui, sûrement... Elle ne savait pas encore lequel mais elle finirait bien par trouver. Il était hors de question qu'il faille l'aimer comme les autres parce que c'était logique. De toute façon, la logique, c'était mal, elle n'aimait pas ça et ça faisait souvent admettre des choses débiles. Elle finit par se reprendre après d'interminables secondes passées les yeux rivés sur le jeune homme sans vraiment le voir. Il lui avait posé une question, et c'était mal poli de ne pas y répondre. Elle hocha la tête tout en haussant légèrement les épaules. Elle savait pas trop, en fait.

« Plus ou moins... Je l'aime pas vraiment vraiment, je crois, mais j'l'aime plus que les autres garçons quand même. J'aimerais bien qu'on passe plus de temps ensemble et tout, mais c'est pas trop possible en fait. Alors j'ai demandé au Père Noël s'il pouvait organiser un dîner, juste pour lui et moi, pour qu'on se connaisse un peu mieux, tout ça, mais j'avais pas pensé que le Père Noël il faisait pas trop ça en général... Il va pas pouvoir faire grand chose pour moi, hein...? C'est dommage... J'aurais bien aimé quand même. En même temps, j'sais pas trop c'qu'il pense de moi alors... Pas le Père Noël, hein, lui j'sais qu'il m'aime bien... J'dois sûrement être qu'une gamine. Mais bon... D'un côté, j'pense que c'est mieux, tu vois, parce que je suis pas sûre que Bailee elle aurait bien aimé que je passe moins de temps avec elle, et puis j'aurais pas trop envie non plus... En plus, je crois qu'ils s'aiment pas trop trop. Mais j'ai l'impression qu'elle aime pas beaucoup de monde alors ça limite un peu quand même... »

Elle gardait un sourire lointain et innocent, comme si elle parlait du premier crétin venu et non de Slevin lui-même, ne rougissant pas le moins du monde, ne prenant même pas la peine de bafouiller. Après tout, un miracle pouvait toujours arriver, le Père Noël pouvait lui écrire en lui apprenant qu'il était en relation avec les Elfes de Maison et qu'une super soirée l'attendait dans elle ne savait quelle salle du château, et que comme par magie, il avait accepté d'y aller. Bah oui, parce qu'elle n'avait pas vraiment envie de le forcer quand même. Et puis il avait peut-être une copine quelque part dans le château ou en dehors et tout et tout. Il lui semblait qu'elle ne l'avait jamais vu traîner avec une fille dans la salle commune de Serdaigle mais il pouvait très bien sortir avec une fille d'une autre maison, rien ne l'en empêchait après tout... Elle n'osait pourtant pas y croire vraiment, de peur que ça se fasse pour de vrai et que Bailee le vive très mal. Elle ne voulait pas être une mauvaise meilleure amie et à la laisser tomber. Et puis, elles étaient bien toutes les deux, non ? Elle n'avait pas l'impression d'avoir besoin de qui que ce soit d'autre dans sa vie, et puis si elle devait faire un classement, elle aimait beaucoup plus la jeune Browning que le Serdaigle, après de là à savoir si c'était de la même façon ou non, elle n'y avait jamais réfléchi. C'était une drôle d'histoire, ça, tout de même... Elle se retint de lui retourner la question, sa curiosité voulait savoir mais elle, pas tellement. Elle aimait bien rêvasser parfois, aussi savoir qu'il avait une copine limiterait largement les possibilités de rêvasseries et ce serait dommage. Elle sourit de plus belle lorsqu'il accepta de rencontrer Kolia, à l'occasion.

« Mon père oui, ma mère est une moldue, alors pour eux ça n'a pas été une grande surprise quand j'ai reçu ma lettre mais plutôt une fierté » 

Il y avait beaucoup de gens qui avaient su qu'ils allaient recevoir leur lettre. Alors c'était sûr, ils devaient être contents de la tenir enfin entre leurs mains et tellement heureux lorsqu'ils montaient dans le train. Ca aurait pu être son cas, mais non... Elle ne s'en plaignait pas, elle n'aurait pas eu la vie qu'elle avait eu toute son enfance sans quoi. Elle aurait sûrement compté les jours avant la séparation et n'aurait donc pas pu profiter comme il se devait des moments avec son frère et ses parents. C'était mieux comme ça. Et puis, au moins, elle aurait le choix plus tard. Bon, d'accord, ça n'était pas tant ''le monde magique'' ou ''le monde moldu'' mais plus ''Bailee'' ou ''Jeremiah'', ce qui rendait le choix plus difficile encore mais sur le principe, elle l'avait quand même. Ce qui n'était du coup pas le cas de tout le monde...

« Est-ce que le ministre il t'a déjà écrit ? Il paraît qu'il a écrit à Meredith, elle est à Gryffondor. Elle l'a dit quand on l'a vu, elle a dit que c'était une lettre protégée et tout alors que c'était pour ça que son sortilège il fonctionnait pas. Ou un truc comme ça... C'était l'année dernière alors j'ai un peu oublié quand même. Je pense qu'il écrit qu'aux gens qui ont été contents de recevoir leur lettre, c'est pour ça qu'il m'a jamais rien envoyé. J'aimerais bien savoir ce qu'il lui a dit quand même. »

« Cela aurait été avec plaisir, mais tu sais, entre mes cours, les entraînements de Quidditch, mes devoirs et le reste, je n’ai plus beaucoup de temps à moi …» 

La Serdaigle hocha la tête, un peu déçue. Elle comprenait, bien sûr, et ne s'était même pas réellement attendue à ce que Slevin accepte de lui donner un coup de main mais au fond, elle gardait le mince espoir qu'il lui vienne en aide. C'était raté. Dommage... Elle ne se laissa pas abattre bien longtemps pour autant. Elle les sauverait du froid, ces pauvres arbres, il n'y avait pas de raison, même toute seule s'il le fallait ! Elle avait lu dans un livre en cherchant des informations sur les lamas qu'il y avait un sortilège qui permettait de multiplier les objets – oui, ses recherches s'étaient un peu égarées – alors peut-être qu'en multipliant ses écharpes, elle pourrait en attacher une autour du tronc de chaque arbre sans avoir besoin de personne ! Ce serait bien ça quand même ! Elle essayerait, ce soir en rentrant dans son dortoir, de multiplier des trucs. Son oreiller, ses chaussettes diplodocus, son crayon bleu, son pull Batman... D'abord que des trucs qu'elle aimait bien pour s'entraîner puis plein plein plein de fois son écharpe et le tour serait joué ! Son esprit délaissa les arbres pour se reconcentrer sur la phrase que venait de prononcer le jeune homme. Quelque chose venait de faire Tilt! là dedans... Il avait bel et bien parlé des entraînements de Quidditch, non ? Son sourire s'agrandit une nouvelle fois. Il faisait partie de l'équipe, lui aussi ! Elle n'avait pas fait attention lorsqu'elle s'était inscrite en tant que remplaçante, elle voulait surtout voir si on acceptait aussi les deuxième année et si elle avait une chance de grimper sur un balai pour autre chose que les cours, mais c'était merveilleux tout de même ! Si elle avait su... C'était la seule chose qu'elle faisait sans sa meilleure amie, qui semblait avoir un vrai problème avec le Quidditch puisqu'elle n'allait jamais voir les matchs et tout, et pour une fois, elle avait l'impression de bien faire. Elle, elle aimait bien aller voir les matchs l'année précédente même si elle avait eu du mal à comprendre les règles et qui jouait où, l'ambiance lui rappelait les matchs universitaires de lacrosse ou de hockey sur gazon qu'elle allait souvent voir avec son frère avant...

« Tu fais partie de l'équipe ? Tu joues à quel poste ? On va pouvoir se voir souvent maintenant alors, c'est trop bien ! Bien sûr, je suis que remplaçante mais je dois aller aux entraînements aussi et tout et tout ! Ca va être trop bien ! J'aurais bien voulu l'année dernière déjà mais les première année étaient pas acceptés et puis de toute façon je connaissais pas les règles et je comprenais pas grand chose à ce qui se passait mais maintenant ça va mieux. Heureusement d'ailleurs ! »

Elle craignait un peu que les batteurs doivent tirer sur les autres joueurs même pendant les entraînements mais elle ne se risqua pas à passer pour une idiote trouillarde en posant la question. Même si c'était le cas, personne n'était jamais mort d'un coup de cognard, ou en tout cas elle n'avait rien lu à ce sujet quand elle cherchait les règles à la bibliothèque. Elle était toute heureuse de pouvoir partager quelque chose avec son interlocuteur, une vraie chose, sans l'avoir fait exprès, sans l'avoir préméditée, juste parce qu'ils avaient un truc en commun. Il était sans aucun doute bien plus doué et expérimenté qu'elle en la matière mais ça ne faisait rien, peut-être qu'il s'improviserait professeur particulier pour l'aider à progresser plus rapidement ou quelque chose dans le genre. C'était possible après tout, et elle se laissait aller à rêvasser que ça puisse devenir réalité. Ils se verraient en dehors des entraînements pour qu'il lui montre telle ou telle technique à connaître, pour lui expliquer comment bien viser les anneaux ou éviter les attaques des batteurs, bref n'importe quoi qui puisse avoir un rapport avec le Quidditch mais qui ne nécessitait pas forcément sept ou quatorze personnes. Plus ça allait, plus il égayait sa journée. Elle avait vraiment eu de la chance de tomber sur lui en allant dans la Grande Salle ! Et de la chance aussi qu'il n'y ait pas sa meilleure amie avec elle, elle n'aurait sûrement pas accepté d'aller discuter bien sagement avec lui sans chercher à mettre le feu aux poudres comme elle en avait l'habitude avec certaines personnes...

« Mais pourquoi tu ne vas pas lui parler à ce garçon ? Tu n’es pas timide, tu devrais bien arriver à trouver une occasion de lui glisser un mot ou deux, histoire d’entamer la discussion. S’il est poli, il prendra un instant pour t’écouter, et s’il t’apprécie, il prendra même le temps de te répondre … » 

Etait-il en train de dire qu'il l'appréciait, alors ? Parce qu'il avait toujours pris le temps de l'écouter et de lui répondre, même de lui venir en aide quand elle en avait besoin, comme là avec ses arbres par exemple, il s'était toujours montré patient et amical, il ne lui avait jamais rien dit de méchant ou de blessant, ne s'était jamais moqué d'elle, ne l'avait jamais prise pour une idiote, ne l'avait jamais vraiment traitée comme un bébé non plus... Ce n'était donc pas simplement parce qu'il était gentil...? C'était parce qu'il l'appréciait... Il l'appréciait. Cette phrase résonna en écho dans sa tête, ce qui lui tira un sourire un peu rêveur comme on eut toutes les jeunes adolescentes au moins une fois. Il l'aimait bien... Si elle s'était attendue à ça... Toujours sans rougir, elle planta son regard clair dans le sien, gardant toujours aux lèvres son éternel sourire un peu surpris.

« Alors tu m'apprécies pour de vrai ? » demanda t-elle d'un ton de défi et de prudence, qui montrait sans mal le chaos qui régnait alors dans sa tête. « Quand je te parle, tu m'écoutes tout le temps, et tu me réponds tout le temps aussi, et t'as pas encore pris la fuite depuis que je suis arrivée et tout... Ou alors ça marche pour tout le monde mais pas pour toi ? Y'a plein de gens qui généralisent tout sans jamais se compter dedans, et c'est nul ça, parce que je sais plus moi après... T'as une amoureuse ? »

Candy finit tout de même par baisser les yeux, un peu moins à l'aise que d'ordinaire quoi que toujours loin de l'état fébrile et inquiet qu'on aurait pu attendre d'une demoiselle dans une telle situation, et se mit à faire un petit tas avec les miettes de cookies qu'elle avait fait tomber sur la table. Elle ne se sentait pas particulièrement gênée et n'avait pas non plus envie de disparaître sous terre pour échapper au regard du jeune homme, elle était juste un peu moins enfantine que d'ordinaire, rien de bien dramatique en soit. Elle ne put toutefois qu'être rassurée de voir la conversation continuer. Il aurait très bien pu se lever en retenant un rire moqueur et la planter là pour aller raconter cette histoire à un copain avec lequel il rigolerait bien... Elle ne savait pas bien si ça ressemblait à Slevin de faire un truc comme ça mais elle croisait les doigts pour que ça ne soit pas le cas. La jeune Zuckowski finit par retrouver toute sa légendaire assurance et releva la tête, prête à reprendre comme si de rien n'était, comme s'il n'y avait jamais eu de parenthèses dans leur conversation, comme si elle n'avait pas été un peu trop loin dans ses confessions. Parce qu'il fallait reconnaître que ça s'en rapprochait drôlement même si elle ne s'était pas clairement exprimée, il fallait être drôlement stupide pour ne pas faire le rapprochement...

« Tu sais je ne connais pas cette Meredith dont tu parles mais ce qui est sûr c’est que ce n’est certainement pas pour cette raison qu’elle la reçu. Le Ministre est un homme important et fort occupé, s’il a écrit à cette fille c’est pour une raison plus importante » 

Pourquoi il lui aurait écrit alors ? Elle avait fait des choses mal dans sa vie ? Ou alors elle faisait partie de sa famille ? Elle avait l'air gentille alors ça devait être ça. Bien sûr, elle avait pas voulu le dire pour pas que qui que ce soit en chercher à profiter de son amitié pour atteindre Monsieur le Ministre. C'était intelligent de sa part quand même ! Ou alors c'était parce que c'était un grand légume et qu'il tenait lui même à vérifier son intégration dans l'école. Normalement, le Ministère n'intervenait pas dans les affaires de Poudlard mais peut-être avait-il fait une exception pour cette fois... Ou alors c'était un grand légume de la famille du Ministre et c'était pour ça qui lui écrivait ! C'était bien plus clair désormais, ça lui apparaissait même comme une évidence. Qu'elle avait été bête de ne pas y penser plutôt, ça se voyait comme un cookie dans un plat, impossible de passer à côté et pourtant...

« Elle doit faire partie de sa famille alors... Et comme c'est un grand légume et bah il est inquiet pour elle, c'est normal. Je serais inquiète moi aussi, à sa place. Pendant une seconde, j'ai cru que j'aimais bien une dangereuse criminelle, tu te rends compte ! Parce que j'l'aime un peu bien Meredith quand même, elle est gentille. J'l'ai vue qu'une fois mais c'est pas grave, elle était gentille quand même... »

« Oui, depuis deux ou trois ans déjà mais l'année dernière je n'étais pas très présent alors ils m'ont viré. Je suis poursuiveur, et toi ? »

Ils avaient le droit de virer les gens parce qu'ils ne participaient pas beaucoup alors ? Mais ils avaient tous plus ou moins une vie en dehors, non ? De ce qu'elle en avait compris l'année dernière, il y en avait tout de même un ou deux qui ne semblaient même pas prendre le temps d'aller en cours, préférant passer leur temps sur leur balais. Ce qu'elle comprenait plus que bien mais ce n'était pas pas le cas de tout le monde. Les chefs d'équipe devaient bien en avoir conscience puisque s'ils avaient choisi c'était qu'ils n'étaient pas seulement bon là dedans mais un peu dans tout et que c'était pour le professeur un moyen de les féliciter. En tout cas, c'était comme ça lorsqu'elle allait à l'école moldue. Elle avait eu le droit, quelques fois, d'être chef de son équipe de balle au prisonnier, et puis elle avait dû changer d'école avant de voir si ça pouvait se reproduire ou pas. La logique voudrait que oui, à moins que ça ne soit qu'un cadeau de bienvenue et d'au revoir en même temps... Elle ne saurait jamais. Parce qu'elle ne retournerait jamais à l'école moldue. Elle avait fini par se faire à l'idée qu'elle ne sortirait d'ici qu'à la fin de sa septième année, à presque dix-huit ans et qu'elle ne connaîtrait jamais plus la moindre autre école. C'était dommage quand on y pensait... Elle avait tant aimé sa vie nomade et anormale de ce qu'en disaient les autres et voilà qu'elle était obligée d'y renoncer pour une autre qu'on avait choisi pour elle et dont sa famille ne pouvait même pas faire partie. Qui, à douze ans, souhaitait voir ses proches disparaître de son existence comme c'était son cas ? Pas elle en tout cas, mais personne ne lui avait demandé son avis. C'était comme ça et pas autrement, que ça lui plaise ou non... Triste histoire.

« Je suis poursuiveur aussi. On dit poursuiveur ou poursuiveuse pour une fille ? J'aurais bien voulu essayer de frapper des cognards, mais bon, je savais pas très bien viser au baseball alors comme ça à l'air d'être un peu pareil bah j'ai laissé tomber... J'espère que je serais un peu douée quand même. Bon, y'a peu de chance que je joue de toute façon, aucune même, alors ça va, j'aurais le temps de m'améliorer. Ca aurait été bien que Bailee vienne aussi, j'aurais eu tous les gens que j'aime bien avec moi en même temps. Mais je crois que c'est pas compatible avec ses robes de filles. »

Elle ne se souvenait pas avoir vu un jour sa meilleure amie enfiler autre chose qu'une jupe pour aller avec son uniforme, alors qu'elle-même n'avait pas réussi à se faire à l'idée d'en mettre une un jour. Il y en avait bien une qui traînait dans son armoire, avec la robe de bal que ses parents l'avaient forcée à choisir avant la rentrée, mais elle n'avait pas l'intention de lui faire découvrir le château, bien plus à l'aise en pantalon pour grimper partout et courir dans les couloirs. Elle était bien loin de toutes les filles ultra-féminines du château, ça c'était certain. Elle ne s'était jamais maquillée de sa courte vie, n'avait jamais pris la peine de se mettre du vernis à ongles et préférait attacher ses cheveux plutôt que d'avoir à les coiffer. Le temps qu'elle ne passait pas à se transformer en lolita, elle le passait à se faire une corne de licorne ou une barbe en mousse de shampoing sous la douche et ça lui allait merveilleusement bien. De toute façon, avoir l'air d'une fille n'était pas super pratique. Il n'y avait qu'à voir les pauvres filles perchées sur dix centimètres manquer de se casser la figure à chaque obstacle sur leur chemin. Est-ce que Bailee ferait partie de celles-ci dans quelques années ? Elle n'espérait pas. Elles auraient tellement peu de choses en commun à ce moment-là qu'elles n'auraient plus de raisons de rester amies... Mais à côté de ça, elle était vraiment jolie, sa meilleure amie, alors elle pourrait très certainement rivaliser avec les jolies filles de Poudlard. Ca oui alors... Elle aurait plein d'amoureux, elle en changerait tous les deux jours, et se moquerait d'eux avec elle dès qu'elles se retrouveraient. Si elle parvenait encore à trouver assez de temps pour lui parler... Malheureusement ce n'était pas certain, ça. Elle n'avait absolument pas envie d'être oubliée, évincée par des crétins qui ne chercheraient pas à la connaître, juste à s'afficher ses côtés pour frimer auprès de leurs copains. Il y en avait plein qui faisaient ça. Elle les avait vu, dans les couloirs, faire les fiers en racontant qui était leur conquête. Elle n'était vraiment pas pressée de la voir prendre la place de ses potiches. Elle valait mieux que ça Bailee, vraiment mieux que ça !

« Heu … non je t'apprécie vraiment, tu es une jeune fille sympathique et pleine de vie, c'est agréable de discuter un moment avec toi … même si ce n'est pas toujours évident de te suivre tellement tu es capable de débiter beaucoup de choses à la minute. Est-ce que j'ai une amoureuse ? Heu … non pas vraiment, disons que j'ai des amies avec qui … je passe du bon temps, mais sans plus. »

Un sourire radieux se dessina sur les lèvres de la jeune Serdaigle. Il venait de dire qu'il l'appréciait vraiment ! Qu'il l'appréciait vraiment elle... Slevin l'appréciait. Wow ! Elle n'aurait jamais pu en espérer autant, s'attendant à la limite qu'il esquive la question tant bien que mal ou qu'il fasse carrément comme si elle n'avait rien dire mais certainement pas qu'il avoue l'apprécier... La suite la perturba légèrement mais elle n'en fit rien paraître, se contentant de hocher la tête avec une certaine absence. C'était normal de passer du bon temps avec ses amis. Ils étaient là pour ça, non ? Elle passait du bon temps aussi, avec ses amis. Elle riait beaucoup, parlait de tout et n'importe quoi et tout et tout, comme on faisait avec ses amis quoi. Est-ce que c'était censé remplacer un amoureux ? Oui...? C'était pour ça qu'elle préférait passer son temps avec Bailee qu'un hypothétique amoureux ? Elle n'avait jamais entendu dire ça mais si c'était vrai, dans le fond, ça l'arrangeait parce que ça voulait dire que peut-être que sa meilleure amie en ferait de même, préférant passer du temps avec elle qu'avec un probable amoureux. Ce serait tellement bien si elles restaient ensemble, rien qu'elles deux pour toujours. Oh, bien sûr, rien ne disait que c'était possible mais elle avait vraiment envie d'y croire. C'était sa première meilleure amie de toute sa vie et elle aurait vraiment bien aimé la garder auprès d'elle jusqu'à la fin de celle-ci. Sans jamais que le moins garçon ne vienne s'en mêler. Jeremiah ne comptait bien sûr pas comme un garçon, c'était son frère c'était pas pareil. Son frère n'était pas vraiment un garçon pour elle, tout comme elle ne devait pas vraiment être une fille pour lui. Ni pour lui ni pour personne en fait... Est-ce que son frère n'était un garçon pour personne alors ? Non... Elle avait bien vu des filles se retourner sur lui lorsqu'ils se baladaient. Lui feignait de ne pas les voir, mais elle n'était pas complètement aveugle quand même ! Heureusement, ils ne restaient pas suffisamment longtemps au même endroit pour qu'il ait le temps de sympathiser avec les filles qu'il croisait. Elle était bien contente qu'il continue de voyager avec leurs parents, en fait. C'était son frère à elle et à personne d'autre.

« Tu trouves que je parle beaucoup ? Ma mère dit que je devrais me taire parfois, mais j'y arrive pas. J'ai trop peur que les mots ils décident de ne plus jamais revenir dans ma bouche si je les laisse pas sortir quand ils en ont envie. Alors j'les laisse faire. Moi ça me dérange pas trop, y'a toujours un truc pour m'écouter. C'est pas toujours les gens, en fait, mais les escaliers, les tableaux, les arbres et tout, ils m'écoutent. Les fantômes un peu parfois aussi. Mais pas trop la fille des toilettes, quand j'y vais, elle pleure et elle me crie dessus alors j'm'en vais. Une fois j'ai voulu savoir ce qu'elle avait mais elle m'a aspergée d'eau avant de la laisser couler par terre... Peeves m'écoute lui. J'l'aime bien. »

Souvent en échange de coups de main, certes, mais il l'écoutait quand même et aux yeux de la jeune fille, c'était le principal. Elle avait été en retenue, une fois, à cause de lui. Parce qu'elle avait mis un fil entre deux murs pour faire tomber le concierge qui arrivait en courant, sauf qu'il ne lui avait pas dit que c'était pour ça alors elle l'avait fait bien gentiment sans trop chercher à connaître le but de l'opération. Elle n'avait jamais cherché d'ennui à Jefferson, ni à personne d'autre, mais parfois on les lui faisait chercher à son insu et ça marchait merveilleusement bien puisque dans le petit monde de Candy, les gens étaient bien trop gentils pour lui attirer des problèmes, à elle, alors qu'elle ne leur avait absolument rien fait. Mais comme quoi, parfois... Ca ne lui avait en tout cas pas servi de leçon puisqu'elle avait parfois l'habitude d'aller raconter sa vie au même concierge pour l'occuper pendant que l'esprit frappeur mettait le bazar un peu plus loin. Il avait sûrement fini par remarquer que les deux étaient de mèche puisqu'il faisait demi-tour lorsqu'il la voyait arriver droit sur lui. A moins que ce soit parce qu'il commençait à en avoir marre de l'écouter débiter des idioties plus grosses qu'elle avec un sérieux à faire peur...? C'était possible aussi...

« Heu …. Grand Légume ? Je comprend pas le rapport entre un légume et notre Ministre, désolé. En tout cas je ne pense pas que Poudlard accepterait d'héberger une criminelle au château donc je pense que tu peux partir du principe qu'elle ne l'est pas … »

Alors lui non plus ne voyait pas ce que c'était qu'un Grand Légume...? Pourtant ça existait bien, elle n'était pas folle ! On avait même insinué qu'elle en était un lors du bal de fin d'année. Bien sûr, ce n'était pas vrai mais ça ne faisait rien, on le lui avait dit quand même. Comme si elle ressemblait à un légume, sérieusement... Elle soupira un peu tristement en cherchant comment expliquer autrement la situation lorsque Slevin lui fit remarquer que si c'était une criminelle, elle ne serait certainement pas au château. Candlynn ouvrit grand la bouche de surprise et d'étonnement. Alors comme ça, il savait pas ? Le pauvre, il ne semblait pas au courant de grand chose en fait...

« Bah si. Regarde, y'a toujours Naïa alors qu'elle a essayé de tuer des gens l'année dernière ! J'étais pas au bal d'Halloween mais tout le monde l'a dit alors je veux bien les croire moi. Et elle est encore au château. Elle est même dans notre salle commune alors...,Meredith c'est peut-être pareil. Essayer de tuer des gens c'est être criminelle. » expliqua t-elle avec une once d'incompréhension. « Je sais pas trop ce que c'est qu'un Grand Légume mais y'a des gens au bal de fin d'année qui ont dit que j'en étais un, ou un truc comme ça. Ils ont utilisé d'autres mots mais je m'en souviens pas. J'devais rejoindre les gens de mon espèce et tout... Sauf que j'suis une fille, pas un Légume. Bailee a dit que Meredith était une Grande Asperge. Elle a pas de chance quand même... Tu crois que les gens essayent de la manger parfois ? »

« Heu … je ne sais pas, je crois qu'on peut dire poursuiveuse. Et en effet il y a tout un équipement à revêtir pour jouer au Quidditch et la robe n'est pas la tenue de rigueur »

Candlynn hocha la tête d'un air entendu, comme s'il n'y avait là qu'une évidence indéniable. On ne jouait pas au Quidditch avec une robe de fille, c'était pas possible, c'était pas de sa faute, ni de celle de Bailee mais c'était comme ça. Peut-être même qu'il y avait une loi qui disait qu'on pouvait pas et que c'était pour ça qu'on le faisait pas... A moins que ce soit juste parce que c'était pas pratique...? C'était peut-être juste parce que c'était pas pratique. On devait se prendre les pieds dans le tissus et ça pouvait être utilisé comme épuisette pour attraper les balle en plein vol sans utiliser ses mains, c'était pas très règlementaire ça ! Encore heureux qu'on avait pas le droit ! Et puis, ils étaient drôlement beaux les uniformes de Quidditch ! Surtout celui de Serdaigle, il était tout bleu. Pas juste un peu bleu comme les uniformes d'école, non, tout bleu tout bleu et comme le bleu c'était vraiment joli et bah les uniformes l'étaient aussi. Bien sûr, elle n'avait pas choisi de s'inscrire dans l'équipe simplement pour porter un truc joli mais ça avait un peu jouer en faveur du Quidditch. Comme les gamines, elle était dans sa période 'J'aime une couleur alors j'en mets partout' et en ce moment c'était le bleu. Son boursouflet était bleu, une partie de ses cheveux avait viré au bleu, elle essayait de ne mettre que des chaussettes bleues, privilégiait les pulls bleus – dont celui avec Batman, bien entendu, parce qu'il était très certainement son pull préféré, déjà parce qu'il y avait Robin dessus et que Robin avait vraiment la classe, il aurait dû être Président du Monde s'il n'avait pas été que le meilleur copain de Batman, et puis aussi parce qu'il n'y avait pas d'autres filles qui avaient le même – elle faisait tout son possible pour rester dans le bleu chemin, ce qui marchait particulièrement bien jusque là.

« Parler beaucoup est un doux euphémisme en se qui te concerne, je n'ai jamais vue une personne balancer autant de mots à la seconde, tu es pire qu'une machine. »

Elle ne savait pas trop ce que ça voulait dire 'euphémisme'' mais elle décida qu'elle aimait bien ce mot, parce qu'il sonnait bien et qu'il donnait sûrement l'air intelligent quand on le disait. Elle l'avait déjà entendu une fois ou deux mais elle n'y avait pas fait plus attention que ça, mais là, de se le voir adresser directement lui donnait un impact supplémentaire. Elle ne pouvait pas l'esquiver et faire comme si elle ne l'avait jamais rencontré. Il était là, et elle était obligée de l'accepter, même si elle ne le connaissait pas encore très bien. Elle finirait bien par faire plus ample connaissance avec lui et connaître enfin sa définition. Elle aimait bien les mots nouveaux, en général, elle essayait de les réutiliser dans les lettres qu'elle écrivait à ses parents. Sa mère était souvent contente de voir qu'elle évoluait malgré tout, même si ce n'était pas forcément toujours très flagrant. Comme elle s'était occupée de toutes la scolarité de sa fille jusqu'à son entrée à Poudlard, elle appréciait toujours de voir ses progrès dans les domaines qu'elle comprenait. Et qui se raréfiaient avec le temps passé au château... La Serdaigle allait pour lui demander si les machines avaient pour habitude de parler, parce qu'elle n'en avait jamais entendu une seule lorsqu'une première année passa derrière Slevin avec une petite peluche en forme de canard accrochée à son sac, et cela suffit à provoquer un drame. Une absence un peu plus présente que les autres et une chanson ancrée dans sa tête, et la voilà partie à danser avec entrain un remix étrange de la Danse des canards. Une danse réalisée avec tellement d'enthousiasme qu'on s'attendait finalement à entendre des coin-coins, qui heureusement ne vinrent jamais. Une fois son numéro terminé, la jeune fille – étrangement fière d'elle – remarqua qu'il y avait pratiquement toutes les paires d'yeux de la Grande Salle braquées sur elle, la fixant avec un mélange de surprise et de moquerie. Si elle était habituée à être ridicule, elle ne l'était pas en revanche à s'en apercevoir. Il fallait trouver une excuse, n'importe quoi, un truc qui lui permettrait d'expliquer cet intermède sportif sans aggraver la situation. Elle n'était pourtant pas menteuse, ce qui ne lui facilitait pas la tâche...

« Désolée, c'est à cause des spasmes que j'ai des fois à mes bras... » expliqua t-elle d'une voix aussi convaincue que convaincante tant à Slevin qu'au reste de la Grande Salle, dont le regard restait braqué sur elle, alors qu'elle ne faisait en réalité que répéter ce qu'elle avait entendu dans une salle d'attente, une fois, alors qu'elle accompagnait son frère chez le médecin, c'était maintenant qu'il lui faudrait broder un peu autour de cette excuse bancale. « On a trouvé que ça pour que ça passe plus vite, sans quoi, je peux en avoir pour très très très très très très longtemps. Comme je bouge vite mes bras bah mes muscles ils se détendent et ça s'en va. T'as vu, là en deux minutes c'était fini, mais c'est pas comme ça si le fait pas... Ca a duré deux heures une fois... Alors maintenant j'évite d'attendre que ça passe tout seul, parce que ça passe pas vite, et que c'est fatiguant. Et puis, j'trouve ça drôle comme technique, mon frère dit que ça me ressemble. Je sais pas trop à quoi il a pensé quand il a dit ça... J'ai eu des médicaments pour plus que ça arrive, mais ça a pas marché, je crois que ça va rester pour toute la vie. Ca pourrait être plus grave quand même, hein ? »

Ce n'était pas brillant, mais elle n'était pas vraiment capable de faire mieux, alors elle s'en contenta mais préféra mettre toutes les chances de son côté en essayant de noyer le poisson pendant qu'il avait la tête sous l'eau.

« T'as dit que les machines elles parlaient, mais elles parlent toutes ? Parce que j'en ai jamais entendu parler, moi... J'aimerais bien pourtant ! »

Tout sourire et l'air innocent, Candlynn reprit donc la conversation là où elle en était en espérant que personne ne relèverait rien et que tout continuerait le plus normalement du monde. Elle ne pouvait être sûre de rien, après tout c'était la première fois qu'elle remarquait qu'elle avait peut-être eu l'air stupide et que les autres l'avaient peut-être remarqué. Peut-être... Elle espérait que ça n'arriverait plus jamais. En général, ça lui passait largement au dessus, elle se fichait éperdument de ce que les gens pouvaient bien penser d'elle, mais il s'agissait de Slevin alors elle n'avait pas spécialement envie de passer pour une échappée de Saint-Mangouste. Il ne voudrait plus jamais lui parler après, ni même lui tenir compagnie cinq minutes comme c'était le cas maintenant, même si elle l'avait plus forcé qu'autre chose en s'asseyant face à lui sans lui demander son avis. C'était Slevin de toute façon, il ne pouvait qu'être d'accord !

« Ah oui c'est vrai, le fameux bal d'Halloween où Naïa et un de ses amis ont fait la fête à trois personnes … c'est bien vrai. Je n'étais pas là non plus, mais j'en ai beaucoup entendu parlé. Ils ont payé pour ça, le Ministère est intervenu tu sais, ils ont été à la limite du renvoie, ils ont été puni et je ne pense pas qu'ils auront de nouveau confiance en Naïa à l'avenir. »

Ah ! Lui-même avouait qu'il y avait des gens dangereux à Poudlard, alors pourquoi pas Meredith ? Si ça se trouve, elle avait essayé de tuer des légumovores, pour protéger sa famille et ses amis légumes. Si c'était ça, elle aurait pas dû avoir de problèmes parce que c'est normal de vouloir éviter à ses proches de finir dans l'estomac des gens. Bailee était venue à son secours, à elle, lorsqu'elle s'était faite attaquer par le Monstre-Pelle, l'année dernière, dans le parc. Elle l'avait vite fait fuir, et même si elle avait crié après, elle lui avait quand même sauvé la vie. Elle s'en rappellerait pour toujours même si elle avait tendance à ne pas le rappeler à sa meilleure amie de peur qu'elle se remette à crier pour rien. Elle allait bien après tout... Mais au moins, ça lui avait fait passer l'envie d'aller dans la Forêt Interdite partir à la recherche des Monstres Dévoreurs de Cerveaux pour en faire une représentation à Jeremiah. Si Bailee n'avait pas été là, elle aurait été les voir et elle serait devenue une coquille vide depuis le temps, sans cerveau, sans rien, juste un corps sans rien dedans.

« Elle a peut-être fait des trucs mal aussi, on sait pas, on la connait pas bien... Tu crois qu'elle voudra me tuer parce que je t'en ai parlé ? J'ai pas envie de mourir, moi, j'suis trop jeune quand même. On meurt quand on est vieux, pas quand on a douze ans ! J'ai même pas encore eu treize ans... Ce serait trop triste. »

Candy soupira, attristée à la simple idée qu'il puisse lui arriver quelque chose avant d'être vieille. Elle n'avait jamais vraiment eu conscience du danger et prenait des risques sans daigner les remarquer mais là qu'il était possible que, comme dans les films, quelqu'un cherche à la tuer parce qu'elle avait parlé, elle voyait tout de suite l'ampleur du problème. Elle s'imaginait déjà recevoir des lettres anonymes dont chaque caractère aurait été découpé dans la Gazette, des photos d'elle dans tout le château prises à son insu sur lesquelles serait écrit en gros et en rouge 'I'm watching you', sonnant comme la promesse d'une surveillance constante et d'une absence totale de sécurité, où qu'elle aille. Oui, la jeune Zuckowski avait tendance à regarder un peu trop la télévision ou à écouter un peu trop les informations...

« Quand à cette histoire de grand légume, ce n'est qu'une image Candlynn, rien de plus. En gros ils tentent de te rabaisser afin de se sentir supérieur, rien de plus. »

La bouche de la Serdaigle fit un 'O' propre et net alors qu'elle ouvrait de grand yeux, soudainement prise d'un élan d'intelligence sorti d'on ne savait où. Enfin... C'était Candlynn tout de même, mieux valait rester prudent et limiter les faux espoirs. Elle battit des mains avec une certaine hystérie alors qu'elle grimpait à genoux sur le banc sans s'en rendre compte. Elle était déjà un peu trop grande pour son âge, là elle dépassait carrément les plus âgés qui passaient à côté d'elle sans le vouloir particulièrement. Elle venait de comprendre ! Après des mois et des mois, elle venait de comprendre !

« Aaaaaaaaaaah ! Mais c'est ça alors ! Mais... Les légumes, ils sont pas tous inférieurs... Regarde les tomates, elles poussent en hauteur ! C'est un légume, une tomate ? Tu crois qu'ils se sentent même supérieurs aux fruits alors qu'ils poussent super haut dans les arbres ? »

Spoiler:

« Des spasmes ? Tu es obligée de faire la danse des canards pour te débarrasser de spasmes ? Maintenant que je te vois faire des gestes assez étranges, je me demande si Juliet ne serait pas atteint de spasmes elle aussi. Je sais pas si tu te souviens de ses derniers exploits lors du match contre Pouf/Serp', mais elle avait vraiment du mal à viser ses adversaires, on aurait dit qu'elle ne savait plus se servir de sa batte, alors qu'en tant normal elle n'est franchement pas mauvaise à ce poste, elle m'a sauvé la mise plus d'une fois … Cela dit si on part sur la nullité de nos joueurs de Quidditch, on pourrait aussi se demander si Wallace n'en n'est pas atteint lui aussi de spasmes parce que la dernière fois que je l'ai vu jouer, il n'avait pas l'air d'avoir compris comment garder le souafle dans ses mains … Mais bon la présence de sa copine en face n'a pas dû aider le pauvre … »

Candlynn hocha distraitement la tête. Des spasmes... Où est-ce qu'elle avait bien pu aller chercher un truc comme ça ? Enfin, même s'il ne l'avait pas vraiment cru, il avait eu la décence de ne pas trop le lui faire savoir, et elle le remerciait intérieurement d'être passé à autre chose. La pauvre Hecate quand même... Elle ne la connaissait pas beaucoup, de vue juste, parce que c'était leur Préfète alors c'était un peu normal de la connaître... D'un autre côté, c'était vrai qu'elle avait pas très bien joué lors de ce match, elle n'avait pas bien compris ce qu'il s'était passé parce que d'habitude elle était douée quand même, elle se souvenait qu'elle l'avait vu jouer plus d'une fois avant de pouvoir aller dans l'équipe également. Quant à Elian, elle pensait juste que c'était pas facile de réussir des passes et des tirs en même temps qu'on volait et qu'il y avait des gens qui passaient tout partout. Elle avait essayé, elle savait bien ce qu'elle disait. Par contre, elle ne savait pas qui était la copine du Préfet. Une fille de l'autre équipe, mais y'en avait plein quand même.

« Oui, ça a commencé quand j'ai commencé à nourrir les arbres... Parce que, avant d'être une sorcière, j'étais nourrisseuse d'arbres tu sais ? Dans certains pays, ils sont considérés comme un lien entre les dieux et la Terre alors on leur offre des choses à manger, des fruits et des légumes en fait... Parce que ça laisse rien dans le sol après. Pour le Quidditch, je sais pas trop... Tu crois qu'ils ont été payés par l'autre équipe ? C'est possible ça, non ? Je crois que j'ai entendu des trucs comme ça dans les couloirs... Je sais plus si c'est sur eux ou pas... »

Elle s'étira sans la moindre élégance avant de reposer son regard sur Slevin. C'était quand même gentil de sa part de rester avec elle aussi longtemps, à discuter tout ça tout cas. Il devait sûrement avoir mieux à faire, mais lui, comme Khalis, et comme Jeremiah lorsqu'elle était chez elle, étaient toujours prêts à mettre leurs occupations de côté pour lui tenir compagnie quand elle le leur demandait alors qu'à côté de ça, eux, ils ne venaient jamais rien lui demander... C'était pas très équitable mais elle n'allait certainement pas s'en plaindre, ça lui permettait d'avoir sa vie à elle sans être obligée de se demander ce qu'elle devrait faire pour Bidule ou Truc. Juste Bailee, mais elle n'était pas là... Elle ne savait même pas où elle était, ni même ce qu'elle faisait. Peut-être qu'elle la cherchait ? Qui aurait l'idée de venir la chercher dans la Grande Salle ? Il faudrait qu'elle aille faire un tour dans le château dans l'espoir de la retrouver, elle lui manquait un bébé peu quand même, ce n'était pas habituel pour elle d'être aussi longtemps éloignée de sa meilleure amie.

« Oui certaines machines moldus parlent en effet, en général ça permet aux personnes non voyantes ou mal voyantes de pouvoir se débrouiller par elles même ou alors c'est plus vendeur je ne sais pas trop, je ne me suis jamais vraiment poser la question. »

Elle poussa un grand et interminable ''aaaah'' qui venait prouver l'éclair d'intelligence qui venait de la foudroyer. Elle n'avait pas pensé aux machines moldues de ce genre-là, pourtant elle les connaissait bien, elle trouvait ça drôle d'appuyer sur le bouton pour que le truc fasse driiiiiing triling avant d'annoncer la couleur du feu avant de traverser. Sa mère soupirait toujours un peu quand elle le faisait parce qu'elle trouvait que le bruit était insupportable, ce qui n'était pas vraiment faux mais au fond c'était pas gênant, elle aimait bien appuyer dessus quand même. Elle ne savait pas que Slevin les connaissait, ces machines-là. D'ailleurs, elle ne savait même pas si ses parents étaient des moldus ou des sorciers, ou moite-moite... Elle n'était même pas sûre de le savoir un jour, ou si elle l'avait su, ça ne l'avait pas marqué.

« Rouge piéton, driiiiing triliiiing ! » rit-elle, imitant la madame du truc avec une voix aigüe et un peu androïde. « J'l'aime bien c'te machine-là, moi ! »

Elle rit une nouvelle fois et devant les regards désespérés voire moqueurs des autres élèves, elle préféra se calmer puisque si elle se fichait pas mal de ce qu'on pouvait bien penser d'elle, elle n'avait pas spécialement envie de faire fuir le pauvre Serdaigle. Elle lui avait un peu imposé sa présence alors autant essayer d'être gentille par la suite...

« Franchement je n'en sais rien, d'abord elle ne sait pas que tu m'en as parlé donc je ne vois pas pourquoi elle tenterait de te tuer à cause de ça. Et puis franchement en y réfléchissant bien, des gens déséquilibrés dans son genre, il y en a pleins à Poudlard et des gens que tu ne soupçonnerais même pas. Regardes, à ce qu'il paraît l'incendie qui aurait détruit l'université de Londres serait l'oeuvre de la Blunt, tu sais celle qui sort avec ce raté de Quick. Certains l'auraient vu ranger sa baguette juste après qu'il se soit déclenché, si ça ce n'est pas louche. Ou tu as encore Mayfair et une autre poufsouffle … heu … Elwana jesaisplus quoi, qui aurait été surprise à la bibliothèque en train de vouloir éradiquer les né moldus de l'école … et Scipion serait le premier visé. Mais bon en même temps ce ne sont que des rumeurs on ne sait pas vraiment si c'est vrai regarde la préfète des Serpentard, Livy Melrose qui serait selon les rumeurs celle qui aurait placé la cagoule de Mangemort devant sa salle commune pour faire une farce … une simple farce qui a dû obligé la direction de fermer leur salle commune pour les répartir ailleurs … »

La jeune fille cligna des yeux, noyée dans le flot de paroles qu'il venait de lui balancer au visage sans même lui lancer la moindre bouée de sauvetage. Elle ne comprenait pas tout, ni pourquoi il lui disait tout ça, ni le réel rapport avec la conversation qu'ils avaient eu jusque là. Elle ne sut même pas quoi répondre, se contentant de le fixer en essayant de choper quelques brides de phrases, ici ou là, comme elle le pouvait mais ça ne marchait pas super bien, malheureusement... Elle finit par laisser tomber et attendit simplement la suite. En fait, c'était enquiquinant quelqu'un qui parlait beaucoup !

« Qu'est-ce que tu fais perché là haut ? Tu peux m'expliquer ce que tu as aujourd'hui ? La tomate est un fruit qui est considéré comme un légume, mais ça reste un fruit … Quand a savoir si les légumes se sentent supérieurs aux fruits c'est … absurde, jusqu'à preuve du contraire ils ne parlent pas alors je doute qu'ils se posent ce genre de question … »

Elle se rassit correctement et croisa silencieusement les mains sur la table, pas franchement ravie par la réponse de Slevin. Elle soupira et attrapa la lanière de son sac qu'elle tira pour le faire grimper sur ses genoux, posant ses bras sur le cuir.

« C'est pas parce que les choses parlent pas qu'elles ne pensent pas. Tant qu'on les a pas cueillis, ils sont vivants et s'ils sont vivants ils ressentent des trucs et tout. Je suis sûre qu'ils ont un avis sur la question mais personne n'a jamais pris la peine de leur demander, c'est triste. Juste triste. »

Spoiler:

« C'est amusant que tu me parles de ça, ça me rappelle une anecdote. Un jour, quand j'étais chez un de mes oncles en Irlande, on est parti camper dans les bois, prêt de chez lui, avec mes cousins et on a rencontré une créature énorme, qui faisait des bruits effrayants. On était, mes cousins et moi, terrifiés sous notre tente, on priait pour que l'animal s'en aille, mais il ne voulait pas partir et à un moment donné je me suis souvenu qu'il devait être attiré par l'odeur de notre nourriture alors j'ai pris mon courage à deux mains et je suis sortie de la tente pour jeter notre nourriture plus loin. Je ne pourrais pas te dire ce que c'était, mais ça faisait bien six pieds de long, au moins ! »

Les yeux de la jeune fille s'ouvrirent grands sous le coup de la surprise tandis qu'un long ''ooooh'' d'intérêt sorti d'entre ses lèvres. Un truc qui faisait presque deux mètres de long attiré par la nourriture, ça devait faire peur ! Il avait de la chance d'avoir vécu un truc pareil, ce n'était pas donné à tout le monde ! Il y avait plein de gens qui ne vivaient rien d'extraordinaire de toute leur vie et qui se contentaient simplement de faire des choses affreusement normales tout au long de leur existence. Heureusement, ça n'avait jamais été son cas à elle, et visiblement Slevin y avait également échappé. Mais elle avait une cousine, en Pologne, qui avait une vie toute plate, dans laquelle il ne se passait jamais rien... Ca jouait un peu sur le caractère de la dite-cousine puisqu'elle était finalement ennuyeuse à mourir. Elle ne faisait jamais rien de drôle, et à part glandouiller devant la télé une fois que ses devoirs étaient fait, elle ne faisait absolument rien. Mais elle faisait des cookies trop bon. C'était elle qui lui avait appris comment faire une bûche de Noël aux cookies. Rien que pour ça, elle l'aimait un peu bien. Elle s'appelle Leska, n'était pas très jolie, elle avait d'ailleurs une couleur de cheveux bizarre, avec Jeremiah, ils avaient cru qu'elle s'était fait une coloration ratée, mais non, c'était ses vrais cheveux... Elle avait à peu près son âge, elle était plus vieille de moins d'un an, et passait sa vie à manger également. Malheureusement, elle ne parlait pas un mot d'anglais, alors même si la jeune Serdaigle faisait des efforts pour parler au mieux la langue de son père, ce n'était pas aisé de faire sa connaissance...

« Ca me fait penser au monstre avec des pattes en forme de pelle qui m'a attaquée dans le parc ! J'aurais pu mourir, tu te rends compte ? Mais Bailee elle est arrivée et elle m'a sauvée la vie. Du coup, on a pas été voir les monstres dévoreurs de cerveaux qui vivent dans la forêt. »

Le monstre en question n'était en réalité qu'un niffleur mais elle n'avait jamais pris la peine de le savoir, préférant s'imaginer qu'elle avait échappé au pire alors que le véritable pire possible aurait été de se faire mordiller le poignet pour se faire piquer sa gourmette... Mais sa version était plus fantastique, alors elle préférait garder celle-là. Il y avait de fortes chances pour que le jeune homme ne la croit pas, mais au fond, quelle importance ? Y avait-il rien qu'une personne qui la croyait en permanence ? Pourtant, elle ne mentait pas vraiment, elle se contentait de relater les choses comme elle les voyait, elle, et généralement sa vision du monde n'était pas la même que celle du reste de l'humanité. Ce n'était pas franchement de sa faute pourtant. Elle n'avait strictement rien fait qui vaille de passer pour une folle, et pourtant, rare étaient les élèves qui ne pouffaient pas en la voyant passer, notamment quand Kolia, son boursoufflet bleu, dormait paisiblement dans le nid qu'elle lui faisait avec ses tresses, au sommet de sa tête. Ce n'était pas le cas aujourd'hui, Slevin devant avoir une bonne étoile qui veillait sur lui...

« Tu savais qu'en République Tchèque par exemple elles ne font pas ce bruit ? En fait elles ne t'annoncent pas la couleur du feu, elle sonne juste et après tu as un compte à rebours qui démarre et si à zéro tu n'es pas de l'autre côté, tu te fais écraser. Je le sais parce qu'une fois j'ai voulu traverser à Prague et j'ai pas fais attention aux chiffres ou plutôt je me demandais ce qu'ils signifiaient et quand c'est arrivé à zéro je me suis dis qu'il manquerait plus pour que ce soit une bombe … mais c'était limite pire. Je me suis retrouvé au milieu des trois voies, à éviter les voitures pour ne pas me faire écraser. Je me suis mis entre deux vois et je faisais un pas en avant et en arrière à chaque fois qu'une voiture arrivée sur l'une des deux voies. C'était sportif, crois moi! »

Elle ne put s'empêcher de rire en l'entendant avant de secouer distraitement la tête. Il semblait oublier qu'elle avait mis les pieds dans approximativement tous les pays connus, et que l'Europe de l'Est était de loin sa partie préférée du globe. Certainement pas pur narcissisme. Elle venait de là, et plutôt deux fois qu'une puisque son père était polonais et qu'elle-même affichait fièrement une ville bulgare pour lieu de naissance. D'ailleurs, Sliven avait un nom étrangement proche de celui de son interlocuteur. Un signe, peut-être ? Autant dire qu'elle avait déjà été une fois, ou peut-être deux, en République Tchèque. Elle se souvenait y être passée lorsqu'ils avaient rejoint la Pologne la dernière fois qu'ils s'y étaient rendu, et elle n'avait jamais risqué de mourir en traversant une rue, tout comme les piétons n'avaient pas fini sous les roues de leur camping-car.

« T'as dû y aller quand y'avait un dysfonctionnement du truc, non ? J'me souviens pas avoir vu des gens presque mourir là-bas... En Inde ouais, mais pas là-bas... »

Elle était étonnamment sérieuse, chose rare pour la jeune fille. Il fallait peut-être écrire pour leur dire que les feux ne marchaient plus bien et risquaient de tuer des dizaines de personnes, si ce n'était plus ? Elle ne pourrait pas vivre avec un tel poids sur la conscience mais n'était pas non plus certaine que les autorités écouteraient une seule personne, encore moins si la personne en question n'avait même pas encore treize ans. On la prendrait pour une gamine un peu dérangée qui cherchait simplement à attirer l'attention sur elle alors que dans le fond, la seule chose qu'elle voulait c'était aider les gens, voire à la limite sauver une partie de l'humanité mais vraiment s'il n'y avait pas le choix... Elle n'avait aucune envie d'endosser le costume de Wonder Woman alors qu'elle n'était encore qu'une enfant... Wonder Candy attendrait, pour l'instant elle était bien trop jeune pour une telle mission. L'humanité commprendrait.

« Ca me fais penser qu'un jour j'ai vu Nessy …. tu sais, le monstre du Loch Ness. Et bien un soir que je me promenais au bord du lac, j'ai vu Nessy sortir des profondeur de l'eau … une chic créature, je suis sûre qu'elle te plairait. Mais je crois qu'elle s'ennuie un peu, il y a certes beaucoup de gens qui viennent la voir, mais en général c'est des moldus et elle n'a pas le droit de se montrer aux moldus. Bon évidemment elle l'a déjà fais quelques fois, mais faut la comprendre, les voir tous là, à l'attendre alors qu'elle n'a pas le droit de se montrer c'est frustrant … Le ministère la tient à l'oeil, elle doit faire un rapport régulièrement aux services des créatures magiques. Elle m'a fait faire une balade sur son dos au milieu du lac, c'était trop énorme ! »

La cloche avait sonné au beau milieu de l'histoire de Slevin, aussi Candlynn n'avait-elle pas bougé, préférant de loin écouter la fin que d'arriver à l'heure en cours. Elle n'était pas à deux minutes. Elle ne savait plus bien où elle devait se rendre, ni pour quelle matière mais ça ne faisait rien, elle avait largement le temps. Il était monté sur le dos du monstre du Loch Ness quand même ! Il en avait de la chance ! Elle aimerait bien, elle, faire un truc comme ça un jour même si ça devait faire un peu peur...

« Tu m'emmèneras le faire un jour, dis ? Hein, dis oui ! » le supplia t-elle en souriant alors qu'elle se levait lentement de son banc en remettant correctement son sac sur son épaule. « J'ai cours, j'dois partir... Tu m'gardes une place au dîner, j'suis sûre qu't'as encore plein de trucs trop intéressants à me raconter ! A ce soiiir ! »

Ce fut sur ces paroles empruntes de bonne humeur que la Serdaigle sortit de la Grande Salle en sautillant, espérant que les aventures du reste de sa journée seraient au moins aussi intéressantes que cette conversation...