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L'incursion.
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Message(#) Sujet: L'incursion. L'incursion. EmptyMer 27 Avr - 2:53

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Il est tard et tout est calme ici.
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Message(#) Sujet: Re: L'incursion. L'incursion. EmptyJeu 28 Avr - 10:34

L'incursion. Dark-academia

Incursion
Il s’était encore fait avoir. A force de zèle et de concentration, Charles n’avait évidemment pas vu le temps passer - à une allure scandaleuse soit dit en passant - si bien que lorsqu’il émergea de ses exercices d’astronomie, le soleil avait déjà disparu en contrebas. Il avait manqué le dîner, soit, mais il était toujours temps de se dépêcher pour ne pas rater le couvre-feu. Se relevant d’un bond à ce constat, Charles ferma d’un geste sec ses ouvrages avant de rassembler ses parchemins dans une chemise cartonnée qu’il fourra aussitôt dans son sac à dos. La bibliothèque était pratiquement déserte, principalement peuplée ça et là d’ermites studieux comme lui. Sans un mot pour ces âmes encore aspirées dans leur tourbillon du travail, il quitta la salle son sac sur l’épaule pour rejoindre les couloirs déjà obscurcis par le crépuscule tombant. Il était rare de se promener aussi esseulé dans le château, d’ordinaire théâtre à des milliers de flux adolescents. Les escaliers tournaient moins, certainement fatigués de leur journée de caprices. Les bougies s’étouffaient, menaçant de s’éteindre au moindre courant d’air. Les tableaux retournaient à leur cadre, toisant ce jeune Poufsouffle qui se précipitait vers les étages inférieurs pour rejoindre au plus vite sa salle commune. Il y avait quelque chose de très esthétique dans cette atmosphère, il fallait le reconnaître. Poudlard pouvait se montrer très élégante, quelque part entre le patrimoine historique et le musée d’art, quand aucun écervelé ne s’y promenait, quand aucun monstre n’y rampait. Hélas, il n’était pas question de s’attarder, car en parlant de monstre, il n’était guère exclu qu’un élève de la brigade ne surgisse des boyaux des couloirs pour le punir de son retard. Du retard… Un mot étranger à sa propre conscience qui, d’ordinaire, ne perdait jamais le fil du temps à ce point. Quelle singulière sensation, que de s’être laissé emporter de la sorte. Certainement qu’à force de rebondissements, entre l’explosion, les interrogatoires, et surtout la récente mise en danger de Sidney, son cerveau avait décidé de lâcher prise sur ses exigences habituelles. Dans les temps de crise, le retard ne revêtait plus l’importance des temps d’ennui durant lesquels la ponctualité était le seul métronome.

Ainsi raisonnait-il, déjà parvenu au premier étage sans rencontrer personne, quand Charles tourna à droite pour s’enfoncer par un raccourci qui le guiderait en quelques bonds au rez-de-chaussée. La pénombre s’y était épaissie, aucune bougie n’étant plus allumée. Le garçon pressa le pas lorsqu’une voix surgit dans l’espace. “Viens.” Son cœur bondit, ses pieds s'interrompirent. On aurait dit un susurrement caverneux, dont l’origine demeurait cependant impossible à discerner au regard de sa sonorité incongrue qui ne semblait même pas vibrer dans l’air. “Viens et…” Charles resta figé, le nez en l’air, à l'affût. Il n’avait jamais rien entendu de tel. Ce n’était définitivement pas un élément extérieur, impossible, la voix était parfaitement répartie entre ses oreilles, mieux, elle semblait provenir du fond de ses pensées. Peut-être aurait-il dû prendre ses jambes à son cou à cette découverte, fuir dans un sprint pour échapper à la folie douce qui semblait s’immiscer en lui. Au lieu de quoi, Charles se surprit à avancer vers le fond du couloir, dans un cœur nébuleux où la nuit ne laissait plus rien entrevoir. Difficile de comprendre comment il se laissa ainsi guider sans aucune inquiétude, à vrai dire, le garçon lui-même ne parviendrait jamais à saisir son imprudence. Était-ce une vile curiosité ? Ou plutôt l’intonation enjôleuse de cette voix ? De ses souvenirs, quoiqu’assez flous, résultait curieusement une vive émotion de triomphe. Une sensation addictive d’exultation et de dégoût, pas envers lui-même, mais envers le monde. Charles se sentit, pour l’une des rares fois de sa vie, glorieux, superbe, puissant. Obsédé par la force de cette impression, cette délicieuse impression, il poursuivit ainsi son chemin sans aucune peur en dépit des supplications étouffées de sa conscience. A quoi bon raisonner, quand il était traversé d’un sentiment aussi brut ? C’était son instinct, qui le guidait dans l’opacité. Aussi finit-il dévoré par l’aveuglément du couloir, disparaissant lentement dans le noir.
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Message(#) Sujet: Re: L'incursion. L'incursion. EmptyMer 4 Mai - 18:15


Oubliée la chaleur rassurantes des âtres et le son feutré des pas sur la moquette, les bruits étouffés par les murs bien isolés des salles communes, le brouhaha rassurant et lointain d’élèves encore debout et le balancier des pendules et le hululement des chouettes et le chuchotement des tableaux.

Poudlard ce soir, n’a jamais été aussi noire.

Et sur les parois du couloir, les tableaux désertés donnent une impression d’abandon et de solitude extrême. Les feux sont éteints, les animaux à l’étable, les soleils couchés, le thé desservi. Sur les tables basses des demeures cosy ne restent que des chandeliers fondus et des napperons abandonnés et dans la multitudes de scènes bucoliques le vent lui-même semble s’être arrêté de souffler.

Avance encore, au fond, tout au fond.

Il y à la un portrait, dans le bout de cette impasse, un portrait qui respire, qui grince des dents sur un siège étrange encerclé de grandes roues noires pour se déplacer malgré des jambes paralysées. Le portrait est lui aussi, de noir vêtu, ombre comme les ombre, mais droit et ses mains pâles posées sur des accoudoirs qui s’entrouvrent comme des gueules mâchonnantes.

Son visage est masqué d’une parure en bois gravée de symboles païens.

« Bonsoir. »

Dit-il.

Sa voix est profonde, elle semble venir de tout au fond de lui, comme on résonne depuis un puits.

« Merci d’être venu. »

Ses paroles ont des élans de gloire ancienne et oubliée, sonnent comme des percussions cotonneuses, rien qui ne vienne briser la tranquillité désertique du couloir, assez pour raisonner en toi comme une fanfare.

« Nous avons tous des secrets, Charles, dis moi le tiens et je te dirai le mien. »

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Message(#) Sujet: Re: L'incursion. L'incursion. EmptySam 28 Mai - 12:48

L'incursion. Dark-academia

Incursion
Les héros des films n’étaient pas naïfs. Ils avaient vaincu d’innombrables ennemis à la seule force de leur astuce, disposant d’assez d’estime pour avoir confiance en eux et ainsi déjouer les plans les plus vicieux et manipulateurs. Batman, Marvel, Hercule Poirot, tous ces personnages fictifs qui avaient su se construire une vie assez retentissante pour être écrite, jouée, filmée, à la lumière de leurs ennemis qui disparaissaient à chaque fin de séquence. Ils leur survivaient, grâce à d’admirables talents d’agilité ou d’assertions, grâce à leur amour-propre. Charles était persuadé que la vie n’était qu’une question de confiance en soi. Il y avait ceux qui réussissaient, mieux, ceux qui étaient sertis de gloire, drapés d’un amour-propre assez noble pour ne pas se filer sous les coups durs, et il y avait ceux qui échouaient, pire, ceux qui se couvraient de misère, tapis sous une honte de paillasse qui s’envolait au moindre inconvénient. Les héros et les ombres, les maîtres et les disciples, les personnages bibliques et lui. Si jusqu’à présent, Charles s’était consolé en s’accordant au moins la prudence comme gage de la vivacité de son esprit, dans la mesure où il se savait suffisamment réfléchi pour ne pas patauger dans la même fébrilité que ceux qui mordaient aisément à l’hameçon, l’épisode de cette sinistre soirée chamboula sa maigre certitude qui le laissa nu de détresse. Avançant lentement jusqu’au recoin happé d’obscurité où on lui susurrait de venir, dans une caresse glorifiante qui enjôlait le perdant qu’il était, le Poufsouffle fit fi des signaux les plus élémentaires. L’isolement du couloir, le sommeil des peintures, le silence assourdissant de l’étage. Il parvint ainsi jusqu’à une impasse où reposait un large portrait qui l’immobilisa à quelques mètres de distance. Un homme, ou une femme, ou une créature mythologique, assise sur un fauteuil roulant et anonymisée d’un masque gravé d’étranges inscriptions, semblait le toiser de toute sa splendeur. Cela n’avait aucun sens - pourquoi Charles s’en était-il approché, pour quel motif demeurait-il planté là à fixer cette ombre, comment celle-ci dégageait autant d’éclat malgré le long voile qui la couvrait ? C’était à ces questionnements que les héros auraient réagi ; Spiderman aurait jeté sa toile pour figer le portrait, Hulk aurait déchiré le tableau, Poirot aurait alerté les autorités. Charles, quant à lui, ne parvenait plus à maîtriser aucun muscle de son corps, à commencer par sa nuque tirée en arrière pour ne surtout pas détacher son regard du masque qui semblait aspirer sa conscience.

Ce fut après quelques secondes de toisement d’un côté et d’admiration de l’autre que le portrait brisa la solennité de l’instant. Sa voix était rocailleuse, profonde, réverbérée d’un écho qui résonna jusque dans les entrailles du garçon, si bien que son remerciement l’emplit d’euphorie, comme si un dieu l’avait reconnu. Cette seule pensée aurait dû une nouvelle fois l’alerter - s’il n’était plus foncièrement croyant, Charles savait au fond de lui qu’il n’existait pas non plus une multitude d’entités comme il était en train de le croire. Après son corps, il ne contrôlait plus ses songes, captivés par l’aura de l’inconnu, se persuadant de choses absurdes qui s’ancraient comme autant de certitudes millénaires. Il était l’élu, il avait été choisi par une force mystique qui lui réclamait la réussite d’une prestigieuse quête. Cette confiance ainsi accordée était viscérale, guidant son souffle saccadé d’un profond honneur. "Nous avons tous des secrets, Charles, dis moi le tiens et je te dirai le mien." Charles pencha le visage, honteux comme il l’avait rarement été. La perspective de connaître un secret aussi méritant que celui détenu par une chimère divine, qui résidait probablement dans les plus intimes recoins célestes de leur monde, l’accablait du violent désir de répondre - mais qu’avait-il à donner à ce seigneur d'outre tombe ? Ses modestes secrets ne faisaient pas le poids. Non, sa vie était trop pitoyable pour être digne d'assouvir la curiosité du portrait. Relevant un regard de chien battu sur son interlocuteur, Charles joignit les mains pour jouer nerveusement avec ses doigts. “J-j’ai peur de n’avoir rien de suffisant à vous offrir… Ma mère est morte quand j’avais dix ans. Mon père ne m’adresse plus vraiment la parole depuis. Je déteste cette école, je n’ai jamais voulu y aller. Je suis hypocondriaque et je ne peux pas me passer de ces gants” fit-il en tendant des mains tremblantes. “Si je touche quelque chose directement avec mes doigts, avec ma peau, j’ai l’impression que des milliers de bactéries me rongent, c’est insupportable” souffla-t-il en baissant à nouveau le visage. “J’ai jamais eu de relation amoureuse” ajouta-t-il alors, se pressant sur un autre sujet non pas par pudeur, mais pas volonté de satisfaire le dieu, “même si je trouve certaines filles mignonnes. Je ne sais pas. Je suis bloqué. Je….” Sa voix murut. Il avait beau creuser, il ne savait quoi ajouter. Il était un mauvais élu, incapable d’être à la hauteur de la tâche confiée. Pourvu qu’on le retienne malgré tout, pourvu que cette sensation de chaleur perdure encore un peu.
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Message(#) Sujet: Re: L'incursion. L'incursion. EmptySam 28 Mai - 20:04


Le silence que t'offre le couloir et le portrait a la solennité des cérémonies religieuses et des terreurs nocturnes. A travers les boiseries du masque païen, le regard du sorcier se devine, perçant et scrutateur.

Intéressé.

Intéressé comme jamais tu n'as intéressé.

Comme tu n'as jamais intéressé tes amis.
Tes parents.

Intéressé par ce que tu dissimules au plus profond de toi, prêt à tout entendre, à tout déguster, comme le plus succulent des aliments, la plus délicieuse des confidences.

Sans vulgarité.
Sans voracité.
Avec le paternalisme froid des monarques.
Et l'intérêt sincère de ceux qui te veulent du bien.

...

Quand tu cesses de parler, lentement, le sorcier s'appuie sur son fauteuil. Les accoudoirs semblent grincer des dents alors qu'il se penche vers toi. Il ne peut t'atteindre, ce n'est qu'un tableau.

A moins qu'il n'y ait jamais eu de tableau.
Que ce ne soit un trou dans le mur.

Et qu'il soit juste en face de toi.

« Je comprends. »

Dit-il.
Ces simples mots semblent très pleins de sens.

« J'ai été comme toi, moi aussi. »

Il ne dit rien, il semble tout dire.
Est-ce de la magie pour que ces paroles sans reliefs t'aillent ainsi droit au cœur ?

« Solitaire. Effrayé. Agressé. »

« Fragile comme du verre. Fébrile comme une feuille. »

« Incapable de sentiments. »

Il n'a pas la chaleur réconfortante des paroles amicales qui rassurent et consolent.
Il apporte des solutions.
Il a la froideur d'un technicien.
L'assurance d'un prince.

« Rien qui ne se transforme en force. »
« Rien qui ne se dompte et ne s'apprivoise. »

Il y a un silence sentencieux.

« Pose ta main sur ma toile, et je te montrerai. »
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Message(#) Sujet: Re: L'incursion. L'incursion. EmptyMar 14 Juin - 10:02

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Incursion
Précisément parce qu’il n’avait rien des héros de littérature, de cinéma, de son esprit, Charles se laissa berner par la voix suave qui résonnait entre les parois de son crâne. Rien à voir avec sa conscience. Celle-ci était infiniment plus ferme, plus assurée, plus crédible. Que valaient ses peurs et ses incertitudes quand une intonation aussi impartiale brûlait jusqu’à ses plus profondes résolutions ? Que valait son instinct quand même la logique la plus élémentaire lui échappait ? Un héros aurait discerné le danger, mieux, il l’aurait deviné aussitôt que son pied avait foulé le premier étage. Pas comme Charles, qui, même une fois prosterné devant le risque, continuait de le fixer de grands yeux avides. Plus qu’un dessin incongru, plus qu’une créature mythologique, il avait face à lui l’orgueil paternel, qu’il devinait reluire dans d’indéchiffrables prunelles. Ce n’était pas qu’un portrait, c’était toute la représentation d’une figure autoritaire et bienveillante qu’il devait honorer pour en sentir la chaleur. Quoi de mieux que cette caresse dans la fadeur de son quotidien ? La nuit était tombée, le froid courait dans les couloirs déserts, Sidney allait partir, sa vie ici n’avait aucun sens, pas plus qu’hier, certainement moins que demain. Alors pourquoi, comment refuser cette main tendue ? Il n’avait déjà presque pas la force de parler maintenant qu’une telle résonance de gloire lui avait adressé la parole. Ses propres mots lui semblèrent creux, peut-être même plus que d’ordinaire maintenant que la toile devant lui semblait progressivement s’épaissir en faveur d’une corpulence humaine. Son cœur s’emballa davantage. Était-il sûr de faire face à un tableau, ou celui-ci ne s’était-il pas plutôt matérialisé au gré de ses aveux ? Il n’avait rien à admettre et pourtant, il parut que ses paroles contentèrent la chimère. Elle le comprenait. Un timide sourire franchit les lèvres du jeune garçon avant de s’évanouir aussitôt sous la solennité de l’instant. Il n’avait pas à sourire, à ressentir quelque chose d’aussi vulgaire que de la satisfaction. Il faisait face à quelque chose d’infiniment plus vaste et, à défaut d’être à la hauteur, il pouvait au moins se montrer sérieux et assidu à la tâche. Sans même comprendre ce que cela signifiait dans la mesure où il ne savait toujours pas ce qu’il faisait là, il hocha la tête à chaque parole du portrait, buvant ses dires comme les premiers disciples avaient accueilli les doctrines du Prophète. “Solitaire. Effrayé. Agressé. Fragile comme du verre. Fébrile comme une feuille. Incapable de sentiments.” Ce n’était pas tout à fait cela et en même temps, c’était exactement ce qu’il ressentait. Charles ne se pensait pas incapable de sentiments, il savait en ressentir et dans le fond, il en souffrait même trop. En revanche, il les retenait fort en lui pour ne pas s’accrocher à quoi que ce soit de réel ou de tangible, quelque chose qui risquait de lui échapper et d’ainsi le briser, comme du verre, de le faire trembler, comme une feuille. “Rien qui ne se transforme en force. Rien qui ne se dompte et ne s'apprivoise.” Le jeune homme entrouvrit les lèvres, assoiffé de réponses lui qui venait pourtant d’être assouvi d’espoir. “Vous croyez que c’est possible ?” chuchota-t-il, fiévreux. “Vous pensez que je peux devenir plus fort ?” Il eut une pensée pour Saint-Pierre. Était-ce ce sentiment de superbe et en même temps d’humilité, de certitude et d’euphorie, comme une vile solitude qui prenait abruptement fin pour une profondeur de force et de détermination, qui avait ainsi pris possession de l’apôtre au contact du Christ ? Comment avait-il pu se permettre une comparaison si profane avec des croyances polythéistes… Le masque du portrait figurait certes des inscriptions païennes, mais à n’en pas douter, c’était la voix d’un Saint qui résonnait.

Aussi n’eut-il aucun doute en posant ses doigts sur la toile devant lui. Il aurait pu, il aurait dû demander ce que comptait lui montrer son interlocuteur. Il aurait dû avoir cette présence d’esprit ; il se noyait peut-être de chagrin, mais par fierté, au moins par décence lui incombait une réflexion. Quel imbécile. Dans un moment de fragilité exacerbée par la solennité du portrait, il avait sauté à pied joint dans le piège tendu. Il n’était même pas un héros manqué, il était ce personnage secondaire, ce figurant qui n’était pas nommé, qui demeurait anonyme par la foule, écrasé par la masse et par un manque de personnalité. Il était l’oublié des scénaristes, le personnage sur qui jamais personne ne se pencherait dans la multitude de pertinence de caractères forts et probants, prometteurs et brillants. Peut-être avait-il été condamné par son nom de famille - on ne s’appelait pas honnête sans payer les conséquences d’une telle naïveté. Toujours est-il que dans les tréfonds de la misère qu’il s’inspirait, Charles laissa aller ses doigts gantés sur le tableau, les lèvres scellées comme pour mieux retenir sa respiration. Il s’attendait à être aspiré dans un autre univers, un monde infiniment plus juste, où il aurait enfin le nom d’un protagoniste avec un destin rebondissant. Il s’attendait à tomber dans un lac d’eau pure pour un baptême avec l’au-delà. Il s’attendait même à mourir, pour être tout à fait franc. Laisser ici son corps et permettre à son âme de glisser vers le paradis. La question du Saint aurait alors eu encore plus de sens, un Jugement Dernier pour soupeser ses actions et déterminer la nature de sa sentence. De quoi était-il mort, alors ? De froid ? Non, l’air n’était pas si glacial, même dans un recoin oublié du château. D’un arrêt cardiaque ? Il ne s’était aperçu d’aucun symptôme et puis, il lui paraissait être en relative bonne santé. Il ne faisait pas de sport, mais il n’avait jamais souffert d’aucune pathologie. D’un accident cardio-vasculaire ? Il était statistiquement peu probable qu’il soit foudroyé de la sorte à son âge… A moins qu’il n’ait été assassiné d’un sort particulièrement précis par un étudiant derrière son dos. Ce fut finalement la fin la plus plausible qui s’écrit dans son cerveau alors qu’il se sentait basculer par le contact contre la toile. Quoiqu’il en soit, il lui semblait être en paix. Il ne regrettait rien. Des adieux avec ses rares proches auraient été les bienvenus, mais il savait que ce luxe était rare. Et puis, on l’oublierait vite, tout comme il se moquait de trépasser de la sorte. A vrai dire, s’il avait su qu’il avait fallu si peu pour disparaître, il aurait peut-être profité davantage - un peu plus de certitude, un peu moins d’hésitation. Mais non, il n’était plus question de penser à tout cela. On l’attendait de l’autre côté. Ce représentant de Dieu. Sa mère, aussi. Une suite à ce long prologue qu’avait été sa vie. Dommage qu’il sente de telles pulsations dans son torse. Il avait espéré être au moins déchargé du fardeau de sentir un tel tambourinement dans ses tympans.
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