Noël n’était déjà plus qu’un lointain souvenir, les vacances d’hiver ayant pris fin hier matin dans un crachotement de fumée qui annonçait le départ du Poudlard Express et la rentrée s’était profilée, immuable. Adieu, les décorations lumineuses, adieu, les teintes vertes et rouges qui lui plaisaient tant, adieu les cantiques qu’elle chantonnait sans même s’en rendre compte, adieu, cette ambiance si festive qui était sa préférée de tous les temps. Il était l’heure de revenir à des considérations plus triviales. Et si Rosalie avait bien hâte d’une chose, c’était de se lancer corps et âme dans les deux enquêtes qu’il fallait poursuivre : débusquer l’auteur du Croâsseur et, plus important, trouver qui osait prendre l’apparence de sa meilleure amie. Maintenant qu’ils possédaient enfin la liste des participants au voyage scolaire, il était temps d’approfondir les recherches et de réduire les potentiels coupables à quelques noms qu’ils pourraient interroger, comme dans les films policiers. Dès la fin de cette semaine, elle allait prendre Haley et Artemis à part pour qu’ils se penchent sur la question, en espérant qu’ils ne crouleraient pas sous une tonne de devoirs d’ici là, sinon, elle était bonne pour une case bibliothèque avant tout. C’était plutôt mal parti, d’ailleurs. Entre le cours du professeur Thorstein qui avait encore traumatisé toute la classe — l’enseignante semblait être plus monstrueuse encore après cette période de repos hivernal — et celui de Soins aux Créatures Magiques, la liste des devoirs venait déjà de s’allonger. Pour aujourd’hui, il ne restait plus que le cours de Divination mais Rosalie n’avait pas envie d’y penser. Machinalement, elle frotta son oreille, comme pour faire disparaître le léger acouphène, puis retourna à son bol de soupe avec un appétit vorace. Son déjeuner terminé, elle se hâta de retrouver Michaela dont elle croisait le regard impatient depuis plusieurs minutes déjà. Autant ne pas repousser leur divin projet plus longtemps.

Bras dessus, bras dessous, elles prirent le chemin du terrain de Quidditch. On n’était que lundi après-midi et les Bonne année continuaient d’être lancés à droite et à gauche dans les couloirs par toutes les personnes qui se croisaient pour la première fois — ou non, d’ailleurs — depuis la reprise des cours. Un mot sur le panneau d’affichage informait les sixième et septième années que le cours de Vol de cet après-midi était annulé. Parfait pour ce qu’elles avaient de prévu, qu’importe les températures super froides. Il n’y avait qu’à apercevoir le coin du lac gelé pour comprendre chaque élève qui préférait profiter d’un instant douillet au coin d’une cheminée. « Hé, on ira faire du patin s’il est toujours gelé samedi ? » proposa la blonde à la rouquine en pointant l’horizon du doigt. Elle en oubliait la nécessité de réviser et de prendre de l’avance pour les cours avec une facilité déconcertante. C’était pourtant l’une de ses bonnes résolutions de l’année, résolutions qu’elle avait énumérées avec un sérieux royal à ses deux meilleurs amis dans le train la veille : « Être plus assidue pour les devoirs, tourner définitivement la page avec Blaze, même si c’était déjà le cas, arrêter les histoires avec les garçons, ils sont tous nuls de toute façon, trouver qui est l’Usurpateur et continuer de manger énormément de bonbons ! » D’accord, certaines d’entre elles ne faisaient peut-être pas bon ménage — notamment l’assiduité et la promesse de mener une enquête qui s’annonçait complexe à bien et qui la déconcentrerait, à coup sûr, de ses cours — et d’autres n’étaient même pas de vraies résolutions mais qu’importe, voici les siennes.

C’était peu après avoir énoncé ses vœux pour l’année à venir que Rosalie s’était plongée dans Sorcière Hebdo. Trois double-pages étaient consacrées à des figures aériennes faciles à réaliser avec ses amies pour impressionner les garçons. Bon, ça, on s’en fichait complètement, mais la Gryffondor avait étudié d’un œil intéressé les acrobaties présentées. Il lui fallait simplement quelqu’un avec qui essayer vu que le tout était à réaliser en binôme. Ni une, ni deux, elle avait proposé l’idée à Michaela le soir venu, dans le confort de leur dortoir. Malgré le fait qu’elles aient fêté le Nouvel An ensemble — Rosa en avait profité pour offrir à sa copine son cadeau de Noël : une écharpe immense, dans les tons cuivrés, tricotée par sa Mamie. Certes, c’était de la laine, et qui disait laine disait mouton, mais la blonde avait tenu à rassurer sa camarade : Mari était le mouton le plus choyé de toute l'Écosse, il faisait presque partie de la famille et avait le droit à tous les restes après les repas de famille. — c’était comme si elles ne s’étaient pas vues de toutes les vacances et qu’elles avaient une ou deux éternités à rattraper en papotant. Et ça continuait en marchant. « Non mais Thorstein on dirait qu’elle a mangé un lion, c’est pas possible d’être aussi énervée dès le matin, tu crois qu’elle se drogue ? Ou alors elle va faire un ulcère, ma Mamie elle dit ça souvent quand il y a un client pas content au salon-de-thé, genre “Olalala, il va nous faire un ulcère celui-là s’il continue”. Ce serait bien, ça voudrait dire plus de cours de Défense ou alors une remplaçante et, franchement, ça peut pas être pire qu’elle. » À ces mots, malgré tout, Rosalie jeta un rapide coup d'œil autour d’elle. Des fois que. La tyrannique Thorstein serait bien capable d'avoir des oreilles dans les murs lui rapportant tout ce que ses élèves pouvaient dire de mauvais sur elle.

Bref, en deux mots, les voilà qui arrivaient à destination et récupéraient un balai chacune avant de se placer au centre du terrain, prêtes à braver le froid pour devenir aussi stylées que les filles présentées sur le magazine. « Bon, alors ! » s’exclama Rosalie en essayant de faire tenir le journal à plat avec son sac et celui de Mika. « On commence par laquelle ? » La difficulté allait croissant au fur et à mesure des figures, la logique aurait donc voulu qu’elles commencent par la première, mais qui avait déjà qualifié Michaela et Rosalie de personnes rationnelles ? « Il y a celle-là, où on est debout sur un balai, et on doit tendre nos mains pour se toucher et se maintenir comme ça. Ou alors celle-ci, où l’une se met à genoux sur les deux balais et puis l’autre lui monte sur le dos, » fit-elle en pointant tour à tour chacune des positions qu’elle décrivait. « Tu veux un bonbon ? » lui proposa-t-elle en tirant un petit sachet de sa poche avant qu’elles ne se lancent enfin.

@Michaela O'Delee

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Quoi que l’une propose à l’autre — de l’idée la plus farfelue en passant par les programmes les plus tordus — il semblait que les deux Gryffondor parvenaient toujours à trouver un consensus. Ce qui tenait du miracle quand on prenait en compte les premiers élans de leur relation. Michaela avait toujours ce don de l’agacer prodigieusement dès lors qu’elle lui demandait de ranger ses affaires — elle, elle trouvait son bordel merveilleusement organisé et ne voyait vraiment pas où était le soucis — et probablement que Rosalie l’exaspérait toujours autant par certains aspects, mais où cela prenait parfois des proportions de plusieurs jours au début de leur cohabitation, les choses se réglaient maintenant d’un regard vers le ciel, des affaires incriminées repoussées sous le lit pour disparaître de la vue de tout le monde, d’un échange de bonbons et d’un retour à la normal. Le tout en quelques minutes, quelques heures si vraiment le crime était grave. Pour les belles taches de rousseur de sa copine, Rosa avait même été jusqu’à accepter de garder un œil sur son demi-frère pendant le bal d’hiver, afin d’être sûre qu’il passe une bonne soirée. Im-pen-sable. Et pourtant bien réel. Derrière l'apparent reproche que lui adressa sa camarade quand la Préfète termina enfin son repas, il y avait un sourire qui en disait bien plus long sur le fond de sa pensée. Par principe, la blonde roula tout de même un peu des yeux, histoire de montrer qu’elle n’avait pas mis tant de temps que ça. C’était pas sa faute si son ventre criait famine ! « Je te signale que pour ce qu’on va faire, il fallait prendre des forces. » Certes, mais peut-être que se préparer à des acrobaties aériennes la panse pleine n’était pas l’idée du siècle. Une habitude, avec Rosalie, qui cumulait les mauvaises idées comme la petite souris collectait les dents de lait. À la différence qu’elle gagnait bien moins d’argent.

La Grande Salle ne fut bientôt plus qu’un lointain souvenir remplacé par les températures hivernales du mois de janvier. Son bras se resserra autour de celui de sa copine, comme pour mieux profiter de sa chaleur à elle. Au loin, le lac gelé appelait à abolir tout un tas de bonnes résolutions prises seulement quelques jours plus tôt. « Ça va, le patinage c’est un sport rigolo. Est-ce que c’est vraiment du sport, même ? Un peu comme le Quidditch, on est loin de la course à pied ou de la boxe. » Loin de tout ce qu’elle n’aimait pas faire, donc. Voler sur un balai était-ce vraiment du sport ? Certes, les adolescents se dépensaient, mais Rosalie voyait plutôt ça comme quelque chose de super cool et de franchement marrant. Bien plus que comme du sport. Si elle était téméraire et franchement encline à grimper aux arbres, glisser sur un lac gelé, courir dans les champs en se prenant pour le personnage principal de telle ou telle histoire, le vrai sport c’était très peu pour elle. « T’as d’autres résolutions ? » demanda-t-elle à la rouquine, l'œil curieux et amusé. Mika ne se fit pas prier pour lui répondre et énuméra ce qui ressemblait fort à de vraies bonnes résolutions. « C’est ultra sérieux tout ça. Et super triste, surtout pour les bonbons. » Comment pouvait-on arrêter de manger des bonbons pendant cinq jours d’affilée ? Im-pen-sable. Puisqu’elles en étaient à parler de leurs résolutions, Rosalie partagea les siennes avec Mika — elle allait le lui demander, de toute façon, alors elle ne faisait que prendre les devants — en omettant la partie sur l’Usurpateur et en la transformant en résoudre plus d’enquêtes. Non pas qu’elle ne lui fasse pas confiance — en plus, la rouquine était une grande enquêtrice, elle-aussi, et une révolutionnaire de talent —, bien au contraire, mais c’était le secret de Hazel, pas le sien. Et même si elle ne pensait pas que Mika soit l’Usurpateur, on ne savait jamais.

Abandonnant les belles choses, elles poursuivirent avec la terrible Thorstein dont elles avaient encore subi la mauvaise humeur durant le cours de Défense. Une habitude dure à prendre et Rosalie était tout simplement persuadée que jamais elle ne se ferait à ce cauchemar éveillé. Vivement la fin de l’année pour passer en sixième et abandonner ces matières superflues. « Oh non, parle pas de malheur. » gémit la blonde alors que l’image terrifiante d’une Thorstein mi-zombie, mi-femme, totalement en colère s’imposait à son esprit beaucoup trop imaginatif. « D’ailleurs, t’as des nouvelles de Thomas, vous allez vous revoir ? » lui demanda-t-elle en lui glissant un regard lourd de sous-entendus. C’était son cavalier pour le bal et, le soir-même, alors que Rosalie déprimait sous sa couette et se demandait s’il ne fallait pas mieux mettre fin à ses jours que continuer de subir une existence dans laquelle Maxwell le Beau Gosse l’avait plantée et Blaze Mansfield délaissée pour Skyler Mills, elle n’avait cessé de chanter ses louanges. Comme il était gentil et drôle et tout et tout. Tout ça avait fort l’air du début d’une histoire d’amour et Rosalie était prête à jouer les entremetteuses. En plus, en février, c’était la Saint-Valentin, il y avait forcément quelque chose à faire. Exagérait-elle ? Non, c’était im-pen-sable.

Enfin, les deux copines arrivèrent sur le terrain de Quidditch. Vide, tranquille, c’était parfait. Elles passèrent par les vestiaires pour récupérer deux balais et puis Rosalie étala le magazine qui allait leur servir de référence — de très sérieuse référence — à même le sol, l’ouvrant sur la première double-page qui présentait deux filles en train de faire des figurines de différentes complexités. Ça allait de la plus simple à la presque mortelle. Après quelques secondes de réflexion intense et d’importance capitale, Rosa pointa du doigt deux propositions et Michaela trancha. Ce serait celle debout, parfait. Laissant le magazine où il était, la Préfète décida qu’il lui fallait reprendre un peu des forces avant de se lancer dans l’action et ouvrit son sachet de bonbons pour piocher dedans et en proposer un à Michaela. Qui refusa, sous prétexte que c’était pas le week-end. « Terrible. » souffla la blonde, complètement bouleversée par la simple idée de tenir une telle résolution. C’est sûrement parce qu’elle était à ce point préoccupée qu’elle ne parvint pas à se mettre debout sur son balai au premier essai, s’étalant quasi en même temps que la rouquine dans l’herbe froide, explosant de rire à l’unisson. Bon, ça commençait bien, cette histoire. Tandis que Mika se relevait déjà, la Préfète l’observa et le fou rire la gagna quand son balai l’envoya une nouvelle fois par terre. Des larmes au coin des yeux, elle se décida à retenter sa chance… et ce fut un nouvel échec. Encore une fois, elle glissa, son pied droit dérapant sur le bois trop fin et le manche du balai lui frappant l’entrejambe suffisamment fort pour lui tirer une grimace de douleur. Non loin de là, sa copine s’évertuait à retenter l’exercice. Un coup d'œil à Michaela et… oh, elle réussissait à tenir, on dirait. Ni une, ni deux, Rosa se releva et se concentra pour en faire de même. Elles étaient à ça de réussir, c’était magnifique. Sa camarade la pressa, arguant qu’elle n’allait pas tenir longtemps. « Oui ben c’est pas facile, j’arrive. » grommela la concernée, le nez plissé par la concentration. Et, une seconde plus tard, elle était debout. Pas franchement à l’aise, mais debout. Ses yeux dorés quittèrent ses pieds pour se lever prudemment jusqu’à la rouquine dont le corps entier tremblait sans pour autant bouger d’un poil. Tendant lentement le bras, elle essaya d’attraper la main de sa comparse. Encore un centimètre… et voilà, ses doigts s’enroulèrent autour des siens, tandis qu’un immense sourire venait égayer son visage. Rien de mal ne pouvait arriver, n’est-ce pas ? Une catastrophe était im-pen-sable.

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Ces vacances d’hiver avaient été propices à prendre bien des résolutions que jamais Rosalie ne tiendrait, dont celle de laisser tomber les garçons. Ils étaient tous trop nuls, on ne pouvait pas compter sur eux — sauf Artemis mais lui, c’était pas pareil — et ils ne savaient faire qu’une seule chose : vous briser le cœur. Ainsi soit-il. La blonde finirait probablement nonne, seule avec son chat, au fin fond de la campagne écossaise. Déprimant. Pour ne pas perdre son joli sourire, il lui fallait donc placer son intérêt dans d’autres choses et elle décida, en écoutant sa copine parler, que les histoires des autres étaient le meilleur choix à faire. De la passion, des rebondissements, des mystères et des dénouements, mais sans que la Préfète n’en souffre. Oui, c’était vraiment une très bonne idée. Les traits de Thomas, le garçon avec lequel Mika était allée au bal, s’imposèrent donc à son esprit triste de ne plus avoir aucune histoire d’amour à se mettre sous la dent, et Rosa l’interrogea sur leurs rapports actuels, ses yeux brillants d’une lueur qui ne cachait pas ce qu’elle pensait de tout ça. Un sourire se glissa sur les lèvres de la rouquine alors qu’elle se montrait particulièrement énigmatique. De quoi rendre Rosalie plus curieuse encore. Une exclamation ravie fila entre les lèvres de cette dernière quand elle entendit sa copine avouer leur correspondance. « Mais nooooon. Ouuuuh, c’est sûr que vous allez vous revoir. Je parie un sachet de bonbons entier ! » La blonde frappa ses mains l’une contre l’autre, ravie de cette information. Elle allait suivre cette histoire de très prêt ! Bon, Thomas était un bébé, ou presque, mais vu comment les plus grands étaient tous des goujats sans nom, pourquoi pas après tout ?

Les deux Gryffondor laissèrent les histoires d’amour sur le bord du terrain de Quidditch. Un balai chacune et elles se penchèrent ensuite sur le magazine qui offrait une multitude d’illustrations de figures à reproduire. Rosa feuilleta rapidement les quelques pages, intéressée par certaines plus que par d’autres, laissant Michaela trancher après ce premier choix qui lui coûtait déjà beaucoup. Trop dur de se décider quand autant de chemin s’offraient à elles. Heureusement que la rouquine était plus tranchée que la blonde. C’est la première qui s’élança, courageuse et téméraire, rapidement suivie par la seconde. Et patatra, une salade de jambes et de bras ne fit plus qu’un avec le gazon, quelques éclats de rire s’élevant de tout cela. Mika se releva prestement, sous le regard rapidement hilare de la Préfète, gagnée par un fou rire qui explosa quand sa copine se ramassa de nouveau. « Ouuuuh hahaha j-j’y peux rien, tu-tu te serais vu-ue. » Essuyant une larme qui avait perlé au coin de l'œil, elle se releva et se précipita pour ne pas faire trop attendre Michaela qui commençait à s’impatienter. Bon, c’était plus facile à dire qu’à faire mais elle y parvint finalement, dans une stabilité toute relative.

Leurs doigts s’entremêlèrent et un immense sourire étira les lèvres rosées de l’adolescente, reflet presque parfait de celui qui barrait le visage de sa copine. Très fière de cette victoire, Rosalie ne se préoccupait pas vraiment de savoir ce qu’il fallait faire ensuite. De toute façon… Elle n’en eut pas le temps. Le temps se suspendit pendant une seconde, un instant pour que leurs regards se croisent et qu’elles comprennent sans un mot que la gravité était en train de faire son œuvre. Derechef, elles se retrouvèrent par terre, avec bien peu de classe et vraiment aucune grâce. Les genoux de Rosalie rencontrèrent le sol gelé avec fracas, lui arrachant une grimace de douleur. Ouille. Ça faisait mal ça. La blonde se releva, frottant la peau là où elle pressentait qu’elle aurait de jolies égratignures, si ce n’était un méga bleu bien violacé. Attrapant son sachet de bonbons, elle en piocha un et se mit à le mâchonner pensivement, tendant le petit paquet à sa camarade sans vraiment y réfléchir, dans une habitude parfaitement acquise avec le temps. « Hm, ch’ai pas. » articula-t-elle difficilement, les dents collées par la gélatine. Heureusement qu’elle avait une technique parfaite pour choisir ! « Plouf plouf ce sera toi… » Son doigts effectua quelques allers-retours avant de se poser sur celle où l’une se mettait à quatre pattes sur les deux balais, l’autre lui montait sur le dos, bras tendus vers le ciel, et elles devaient s’élever à un mètre ou deux du sol. Fa-cile. « Donc c’est celle-ci, ça te va ? » demanda quand même Rosa, avant d’ajouter avec un grand sourire : « Tu connais Pierre, Papier, Ciseaux ? On fait en un coup, celle qui gagne grimpe sur le dos de l’autre ! » Bras tendu vers Mika, Rosalie plaça sa main gauche à plat et la droite repliée en un poing par-dessus. « Pierre, Feuille, Ciseaux ! » s’exclama-t-elle avant de faire le signe…

1 - 2 - De la pierre
3 - 4 - De la feuille
5 - 6 - Des ciseaux

Face à elle…

1 - 2 - Une pierre
3 - 4 - Une feuille
5 - 6 - Des ciseaux

« Ah, ciseaux toutes les deux. Deuxième tour, alors. Pierre, Feuille, Ciseaux ! » Les lèvres pincées, le bout de la langue sorti, Rosalie était en pleine concentration, comme si sa vie en dépendait. Sa vie, peut-être pas. L'état de ses genoux, en revanche...

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Michaela pouvait bien raconter ce qu’elle voulait, atténuer l’importance de ce qu’elle venait de lui raconter, trouver mille excuses pour faire comme si de rien n’était : Rosalie savait. C’était le début d’une grande histoire d’amour, un point c’est tout. La jolie Gryffondor qui fait mine d’être détachée et le nouveau venu dans l’école qui ne se rend pas encore compte qu’il lui plaît beaucoup. Non mais ça commençait toujours comme ça, dans tous les films. Et peut-être bien qu’on était dans la vraie vie, mais il fallait des histoires vraies pour inspirer la fiction, aussi la blonde était-elle certaine que ça n’était que le début d’une grande et belle histoire. Rien de moins. « Non mais les BUSEs ça empêche pas d’aller passer du bon temps avec qui que ce soit. L’angoisse, sinon. Cherche pas des excuses, je suis sûre de moi. » fit-elle en se tapotant le nez, comme pour prouver qu’elle savait précisément ce qu’elle disait. « Après, si tu veux en savoir plus, je peux toujours essayer de voir l’avenir, ça confirmera ce que je te raconte, à trois cent pour cent. » Impossible, mais un petit mensonge n’avait jamais tué personne. De toute façon, les sourires des deux Gryffondor parlaient pour elles : l’une comme l’autre s’enthousiasmaient de ce début d’histoire.

Une fois les nouvelles croustillantes partagées, enjolivées, commentées et prophétisées, les deux copines se concentrèrent un peu sur le magazine déployé sous leurs yeux. C’est qu’elles n’étaient pas là pour rigoler ! Le sujet du jour était des plus sérieux : devenir de grandes acrobates. Pleines de bonne volonté mais dénuées de talent et d’équilibre, les premières tentatives des deux adolescentes se soldèrent par des chutes et des grands éclats de rire incontrôlables. La première fois avait été un échec cuisant, la seconde était une réussite presque parfaite, il fallait que la troisième soit encore mieux ! Sûrement qu’elles auraient quelques bleus demain et des courbatures dans des muscles inconnus, mais pour l’instant, elles s’amusaient bien. Un bonbon pour se donner de la force, un plouf plouf pour décider de la suite, et le doigt de Rosalie pointa une nouvelle figure. Ce serait-elle ! Une les genoux sur les deux balais, l’autre debout sur son dos, bras tendus vers le ciel, le tout à une distance absolument pas dangereuse du sol : facile.

Avec un grand sourire, Rosa proposa une nouvelle méthode des plus fiables pour déterminer qui ferait quoi : pierre, papier, ciseaux. Ignorant les airs offusqués de la rouquine — on savait jamais, à Poudlard, des fois les choses les plus évidentes étaient totalement inconnues de certaines personnes, même si Mika était super forte et l’une des meilleures de cette école, ça coûtait rien de demander — elle plaça son poing fermé devant elle et accompagna son geste des fameux mots. D’abord, Mika fit ciseaux, juste comme elle ! Et ensuite, elle referma le poing pour faire une pierre, décidément ! « Mais quoi ?? C’est toi qui me copie, là. » gloussa-t-elle avant de se concentrer, essayant de deviner comment Michaela pouvait réfléchir à une stratégie, tentant de percer ses pensées… et échouant lamentablement. « Raaaah non j’ai perduuuu. » lâcha-t-elle d’un ton plaintif alors que la gagnante lui tapotait sur le bras. Elle méritait bien un bonbon, pour sa peine. Mâchonnant la gélatine, elle récupéra les deux balais et les observa d’un œil circonspect. D’un coup, ça semblait moins facile que prévu… Non mais c’était dans la tête, tout ça.

Le nez plissé, la lèvre inférieure mordue par ses dents blanches, la blonde se concentra. Les balais au sol, un genou, puis l’autre, et enfin, s’élever, un tout petit peu, pour vérifier la stabilité… Bam, elle tomba. « J’y étais presque ! » Une deuxième fois. « Rah, presque ! » Une troisième fois. « Cette fois c’est la bo… » Son air devenait plus déterminé à chaque tentative. Le cinquième essai hésita un instant, elle tangua, fortement, à quelques centimètres au-dessus du sol, mais ses doigts se resserrèrent autour des balais et elle contracta tous les muscles de son corps, même les inconnus, et… elle ne tomba pas ! « Viiiite à toi, monte !! » lança-t-elle, le ton enjoué. Ça allait être din-gue ! Dommage que personne ne puisse les prendre en photo.

@Michaela O'Delee

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