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@Erin B. Sørensen

Maxton n’était pas réellement un garçon chouineur. Habituellement, le reste du monde le désintéressait tellement qu’il aurait été bien incapable d’en retirer une émotion autre que de l’ennui. Un vague contrariété peut-être. Mais là, les dernières 72h avaient été plus proches de l’apocalypse qu’autre chose. Bluebell et Finnbjörn avaient failli s’entretuer. En soi, tant que c’était sa sœur qui avait le dessus, cela lui convenait, mais il l’avait sentie réellement affectée. A partir de là, cela l’avait agacé pour elle et il n’avait plus eu comme seule ambition de pourrir la vie de Finnbjörn et de son abrutie de petite amie.

Malheureusement, cette saine activité avait cédé devant une nouvelle émotion plus forte que les précédentes, l’inquiétude. S’il avait d’abord déploré l’absence d’Erin, il avait commencé à être sérieusement angoissé pour elle quand elle n’était pas revenue. Il n’avait pas été le seul. A chacune des minutes qui s’égrainait, Finnbjörn semblait plus fantomatique, et Hannibal plus tendu. Ca avait bien été le seul moment où il avait ressenti une forme de compassion pour Finn. Si cela avait été Blue, il aurait tout détruit sur son passage, incapable de contrôler ses nerfs. Une fois que tout aurait été réduit en cendres, il aurait été capable de retourner le monde pour la retrouver. Il n’aurait pas pu faire autrement que fouiller chaque parcelle du globe jusqu’à épuisement juste pour avoir l’impression qu’il avait essayé. Il n’aurait jamais pu se le pardonner sinon.

Ce cauchemar avait duré trois putains de jours. A la fin, il en venait presque à comprendre Yaxley qui tentait de prononcer le moins de mots possibles pour ne pas risquer un faux pas. L’ambiance était trop lourde pour avoir envie de desserrer les dents. Puis miraculeusement, alors qu’on y croyait presque plus, on les avait retrouvés. Comme si ce cauchemar ne s’était jamais produit, Erin et Junior étaient avec eux en Norvège. En piteux état, certes, mais il était là et c’était tout ce qui comptait.

Leur retour remontait à la veille et depuis Maxton n’avait pas eu réellement l’occasion de voir Erin. Il y avait d’autres choses plus urgentes à faire, ce qui se comprenait. Mais au milieu de la matinée, il avait craqué et s’était aventuré dans le dédale de la demeure des Sørensen pour y trouver la chambre de son amie. Juste pour aller prendre de ses nouvelles, rien de plus. Mais vérifier de ses propres yeux qu’elle allait bien. Il avait fini par retrouver son chemin et s’était glissé dans la chambre d’Erin, non sans avoir pris le soin de frapper avant à la porte. Il laissa d’ailleurs celle-ci soigneusement entrouverte au cas où son geste serait mal interprété. Il aurait plus manqué qu’un énième drame adolescent pour l’achever.

Erin se tenait dans son lit, toute aussi royale qu’à son habitude. Evidemment elle avait les traits tirés et marqués, mais elle n’en était pas moins jolie. Y avait-il la moindre chose qui pouvait amoindrir son charme flamboyant ? Difficile à dire.

Imperceptiblement, Maxton se détendit et un sourire en coin apparut sur ses lèvres.

- Erin. Tu es partie au bout du monde pour nous fausser compagnie, dis moi.

Il attrapa la chaise de son bureau et la tira pour s’asseoir près de lui, faisant comme si sa présence n’avait rien de surprenant ou d’imprévu. Dévisageant son amie, il finit par lâcher, avec une sincérité particulièrement étonnante pour lui

- Je me suis fait un sang d’encre.

Ce moment de franchise passé, il arbora à nouveau ce petit air moquer qui était le sien et enchaîna comme si de rien était sur de nouvelles taquineries.

- Comment vas-tu ? En tout cas, tu sais te faire désirer. Ton arrivée a enfin réussi à éclipser le pseudo triangle amoureux Finn-Carla-Blue. Je n’en pouvais plus. Il était grand temps que ta présence vienne rééquilibrer ce monde de fous.

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Du bout des doigts, je soulevai mon épaisse et moelleuse couverture et me glissai sous la chaleur réconfortante qu’elle m’offrait. Dehors, le soleil matinal comptait les minutes abondantes qui nous séparaient encore du déjeuner et ses rayons chaleureux contaient des températures douces, idéales pour une promenade. Hvil i morges. Du er fritaget for at være omkring vores gæster avait conclu Grand-Mère à la fin d’une entrevue qui avait directement succédé au petit-déjeuner. Une belle façon de m’ordonner de garder le lit quelques heures encore. Je connaissais par coeur la palette de ses tons et expressions et savais donc quand il était nécessaire de ne pas désobéir. Sa bienveillance ferme en était une manifestation. De toute façon, j’étais trop lasse pour retrouver les autres et leurs querelles incessantes, et, alors que je laissai tomber ma tête sur mon oreiller, je commençais à soupçonner mon aïeule d’avoir ajouté une pointe d’un je-ne-sais-quoi visant à me rendre somnolente dans la potion de soin qu’elle avait exigé que je boive. Les médecins de la veille avaient assurés que nous allions bien. Un peu frigorifiés, fatigués, en manque de nourriture et de sommeil, mais bien. Ce qui ne voulait pas dire que c’était tout à fait le cas : j’avais beau avoir tendance à tout prendre à la légère, je n’avais attendu plus longtemps pour informer mes grands-parents de ces douleurs dans la poitrine qui avaient ponctué ces derniers jours loin d’eux. J’attrapai mollement mon carnet noir et une plume qui traînait sur ma table de chevet, traçant quelques mots à destination de mon meilleur ami.

Je suis consignée dans ma chambre. Rejoins-moi quand tu verras ce mot.

N’avoir envie de voir personne ne s’appliquait jamais à Junior, encore moins alors que nous étions enfin chez moi, en Norvège. Trois jours, c’était le temps qu’il avait fallu aux autorités (in)compétentes pour nous retrouver. Plates excuses et courbettes en tout genre n’effaçaient pas ces heures infinies, ballotés par le froid polaire du Groenland, mais je laissais à Grand-Père le soin de sévir envers ceux qui avaient empêché une résolution rapide de cet accident. Depuis des semaines, je n’attendais que le moment où je ferais découvrir mes terres natales à mon meilleur ami. Une errance sur des plaines désertiques à l’autre bout du monde, ou presque, et maintenant l’obligation sommée par Grand-Mère de me reposer semblaient nous tenir éloignés de ces instants dont je rêvais. La patience n’avait jamais été mon fort, et l’unique chose qui m’empêchait de retrouver tout de suite Junior pour l’entraîner sans plus attendre dans une aventure sans danger, juste lui et moi, c’était la certitude que je croiserai la silhouette accusatrice de Grand-Mère avant la douceur de sa présence. Au moins me retrouverait-il dès qu’il lirait ce mot, maintenant inscrit sur le carnet jumeau du mien.

Je m’assoupis sans vraiment m’en rendre compte, perdue entre des pensées engourdies et le paysage qui se dessinait derrière mes fenêtres. Quand je rouvris les yeux, j’étais bien incapable de dire combien de temps j’avais dormi. Tout ce que je notai, c’était l’absence de Junior et d’une quelconque lueur bleue émanant du journal en cuir, annonciatrice d’un message de sa part. Une moue maussade sur le visage, je me redressai, cherchant du regard la pendule qui seule pourrait m’éclairer quant aux heures écoulées. Un coup frappé à la porte accapara brusquement toute mon attention. Le battant s’entrebailla et ce ne furent pas les traits de Junior qui se dessinèrent dans l’interstice mais ceux de Maxton. Si je n’étais jamais déçue de voir le Gryffondor, l’absence de mon meilleur ami se faisait cruelle. Depuis que nous avions été tirés de ce cabanon miteux, j’avais la sensation chagrine de l’avoir à peine croisé. J’invitai néanmoins mon camarade à me rejoindre dans un sourire chaleureux.

Maxton. C’est que j’avais toujourrrs voulu visiter le Grrroenland, vois-tu. Mon sourire se fait un peu plus flamboyant à chaque seconde tandis que mon regard clair ne le lâche pas alors qu’il s’empare d’une chaise pour s’asseoir près de moi. Je me sentais comme une Reine, ainsi visitée dans ses appartements, la posture droite et les mains jointes sur une courtepointe. Mais une Reine malade et privée de son Roi, ce qui gâchait un peu tout le plaisir de ce tableau. Son inquiétude verbalisée transforma brièvement mon sourire en rictus. Il n’y avait pas de quoi. N’était ce démon qui avait tenté de nous ôter tout espoir, je n’avais jamais perdu foi en Grand-Père et je ne doutais pas qu’il en avait été de même pour mes frères et mes parents. De toute façon, cet épisode était maintenant derrière nous, il ne servait plus à rien de se lamenter ou de présenter de vaines craintes alors que nous étions avec eux, en pleine forme, quelques heures de sommeil en moins.

Je préférais, et de loin, l’air moqueur qui remplaça celui, soucieux, sur les traits de mon ami. Le rictus redevint sourire, de plus en plus fauve à mesure que sa voix me tissait une douce mélodie. J’eus même un rire à la pensée de tout ce qui s’était probablement passé pendant ces trois jours. J’avais croisé tous nos invités au repas de la veille, mais c’était bien tout. Et ni Hannibal, ni Finnbjörn n’étaient encore venus me trouver, ce qui me laissait sans aucune information sur ce que notre manoir avait abrité ces derniers temps. En cela, je n’aurais pas pu avoir meilleur allié que Maxton. Je n’ai pourrrtant pas la rrréputation d’équilibrrrer quoi que ce soit. Plutôt celle de renverser tout sur mon passage et le sourire complice du Gryffondor éveilla le mien. Enfin, je vais bien. Et maintenant que je suis arrrivée ici, j’ai besoin de savoirrr ce qu’il s’est passé ! Un monde de fous, tu disais ? Mon invitation à me raconter ces soixante-douze dernières heures fut ponctuée d’un autre sourire alors que nos yeux clairs échangeaient en silence.

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@Erin B. Sørensen

S’il avait été sensible aux contes, ce qu’il n’avait jamais été même enfant, il aurait pu trouver à Erin des airs de princesse tout droit sortie d’une histoire. Elle en aurait eu la beauté et le décor se prêtait facilement à l’illusion. Encore aurait-il fallu que tout ce faste ne soit pas leur quotidien. Là seule chose qu’il voyait en se glissant dans la chambre de la Poufsouffle, c’est qu’il avait la sensation étonnante de ne pas être totalement à sa place. Habituellement, il se moquait bien de savoir s’il était invité ou non avant de débarquer quelque part et il adoptait presque partout une attitude conquérante qui était loin d’être une façade. Il se sentait en droit d’aller n’importe où et jugeait que le reste du monde lui appartenait ou presque. Mais là, il s’agissait d’Erin et de sa chambre. Jamais leurs rencontres n’avaient eu lieu dans des décors où ils vivaient au quotidien. La salle sur demande leur offrait une parenthèse hors du temps, mais aussi hors de tout ancrage dans leur vie quotidienne. Là il avait l’impression de franchir une limite tacite. Et en même temps, maintenant qu’il était en Norvège, qu’aurait-il pu faire d’autre ? Il n’allait pas attendre la salle sur demande pour la revoir et il n’allait pas non plus ignorer qu’il avait envie de voir de ses yeux qu’elle était en bonne santé.

Le sourire chaleureux d’Erin quand cette dernière l’invita à entrer dans la pièce fit disparaître ses doutes et il retrouva son arrogance habituelle. Posté près d’elle, il leva les yeux au ciel à sa remarque et répliqua

- Toute flamboyante que tu es Erin, faire fondre le pôle nord reste une entreprise audacieuse, même pour toi.

Si le froid lui manquait à ce point, nul besoin de s’exiler. L’ambiance entre ses différents invités était bien assez rafraichissante. Plus sérieusement, Maxton n’arrivait toujours pas à comprendre comment le reste du monde avait pu être incompétent au point de ne pas localiser deux adolescents pendant trois jours. Si ça n’avait pas été Erin et Junior, il y aurait sans doute eu des pertes à déplorer. Heureusement que leur illustre ascendance les rendait plus intelligents, doués et résistants que le reste du monde. Ca aurait été des nés moldus, on les aurait retrouvés congelés. Tout le monde en aurait fait tout un plat au niveau politique, ça aurait été particulièrement ennuyeux, même si en vrai ça aurait toujours fait deux nés moldus de moins sur cette terre.

L’inquiétude qu’il verbalisa fut vite chassée par la réaction d’Erin. Ce sentimentalisme ne leur ressemblait pas et le simple fait de l’avoir énoncé à voix haute était déjà bien assez surprenant en soit. Aucun des deux n’aurait su comment rebondir sur cette remarque. Est-ce qu’elle était touchée qu’il se soit inquiété pour elle ? Peut-être. Sans être démesurément sensible à la flatterie, elle appréciait les compliments à sa mesure. Est-ce qu’elle considérait également ça comme une preuve de faiblesse ? Sans doute. Tout ce qui était une émotion était une faiblesse potentielle à leurs yeux à tous.

- Profite de cet état de fait alors. Pour une fois chez les jumeaux Sorensen, tu seras celle qui aura les pieds sur terre. Vivement donc que tout ça soit fini pour que chacun puisse retrouver sa place. Nos jumeaux jouent très mal aux adolescents.

Finnbjörn était bien plus crédible dans son austérité habituelle. Maxton commençait presque à se dire qu’il le préférait fantomatique qu’obnubilé par sa soeur. Quant à Bluebell, il l’aimait peu importe son caractère mais force était de constater qu’elle était vraiment très contrariée ces derniers temps et que ça n’aidait pas à avoir des discussions posées avec elle. Echangeant un sourire complice avec son allié, il entreprit de lui donner les différentes informations dont elle avait besoin

- Déjà, n’est-ce pas preuve que le monde est fou que nous soyons là avec Blue ? Nos parents nous ont envoyés ici comme on enverrait un colis.

La désapprobation s’entendait dans sa voix. Attention, il ne fallait pas se méprendre, être ici servait ses intérêts, mais il n’appréciait pas la manière dont cela avait été fait. Blue et lui méritaient un peu plus d’égards. Ou en tout cas de préparation psychologique avant d’être expédiés au bout du monde.

- Bref, tu aurais dû voir notre arrivée. Nous n’avions pas plutôt posé le pied à terre que Blue s’est retrouvée face à Yaxley et Yaxley à elle. Les deux avaient l’air prêtes à se sauter dessus. Je t’avoue que personnellement, j’étais tout à fait prêt à organiser les paris clandestins sur qui mettrait la raclée à qui, mais personne ne semblait dans cette optique.

Quel dommage d’ailleurs. Puisque Finnbjörn avait décidé de mettre les deux jeunes filles en présence, autant aller jusqu’au bout de la démarche et les laisser exprimer un peu leurs ressentis. De toute façon, Blue aurait gagné. Nécessairement.

- Face à cette tension, Finn a été fidèle à lui-même : stoïque. Ce qui a évidemment achevé de contrarier tout le monde. Enfin, sauf Judith qui n’a probablement rien compris et Hannibal et Phoenix qui étaient ravis de se retrouver. Finnbjörn a tenté de parler politique, j’imagine que l’absence d’intelligence de sa petite amie l’empêchait de comprendre la conversation et Blue était trop contrariée pour la suivre. Tu imagines l’ambiance.

Dire que ça avait été un peu tendu n’était rien dire. Mais comme observateur, ça avait été fort drôle aussi.

- Quel était le but d'inviter Yaxley d'ailleurs ? J'avais l'impression que depuis la soirée de l'autre idiot de Carter, les cartes étaient un peu rebattues et là ce n'était pas réellement le cas.

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maxton & erin

Arrogance et insolence ne se mêlaient jamais aussi bien que sur nos traits moqueurs. La sienne échauffait la mienne, et vice-versa, sans que nos sourires amusés ne disparaissent jamais. Ne me lance pas de tel défi, je viens à peine de rrrentrrrer, il serrrait mal vu que je rrreparrrte déjà pourrr te prrrouver que tu as torrrt. J’appréciais néanmoins le compliment, habilement glissé au coeur d’une réplique narquoise. Je préférais, et de loin, les louanges à l’inquiétude, étant moi-même bien en peine d’en éprouver, pas suffisamment, en tout cas, pour savoir comment accueillir celle des autres autrement qu’avec une ironie éternellement mordante. Notre mésaventure n’était plus qu’un vague souvenir, pas vraiment lointain, mais qui s’effaçait déjà dans la chaleur retrouvée de ma demeure familiale. À quoi bon ressasser des sentiments qui n’avaient déjà plus lieu d’être ? Il y avait tout un présent à se préoccuper et un avenir à façonner, bien trop pour pouvoir continuer à se perdre en lamentations sur un passé révolu.

D’autant plus que la partie qui se jouait chez moi semblait des plus anormales, à en croire les dires de mon ami. Il fallait qu’elle le soit pour que les rôles s’inversent à ce point et que Maxton en vienne à me croire capable de rééquilibrer quoi que ce soit. Encore que, cet équilibre dont il parlait était peut-être tout simplement de retrouver la place qui était la mienne et de venir agiter les apparences dont tout le monde se dotait autour de nous. De cela, j’étais parfaitement capable, et un rictus amusé vint souligner cette pensée. Finn se heurrrte finalement à un rrrôle trrrop étrrroit pourrr lui. Je ne veux pas avoirrr les pieds surrr terrre, mais je suis toute disposée à ce que nous rrretrrrouvions nos places rrrespectives, et nos jumeaux. Nos orgueils blessés se comprenaient encore parfaitement sur ce point-là : si nous étions prêt à soutenir nos moitiés dans toutes leurs entreprises, ou presque, c’était encore plus vrai tant qu’ils nous tenaient au courant de leurs stratégies. Ni Maxton, ni moi, n’avions franchement apprécié d’être ainsi tenus à l’écart d’une toute nouvelle partie. Au coeur de notre domaine, les cartes étaient redistribuées, et tout ce petit monde allait être obligé de jouer face aux spectateurs.

Évoquer tout cela acheva de faire disparaître les dernières traces de fatigue. J’avais suffisamment dormi, je m’étais suffisamment retrouvée loin de tout et de tous. Malheureusement, l’heure était encore loin d’annoncer ma libération et je savais que Grand-Mère serait intransigeante avec cela. Je n’allais pas risquer mon après-midi entier pour gagner quelques minutes, surtout quand une si charmante compagnie était venue me trouver directement. Cela me laisserait tout le loisir de prendre connaissance des états d’âme de chacun. Chassant un pli imaginaire sur la couverture qui me couvrait encore les jambes, je la repoussai d’un geste brusque en abandonnant mon lit. Je n’étais pas malade, pas faible non plus, je n’avais pas à garder une position qui disait tout cela à la fois. L’adaptation est difficile ? le raillai-je avec un sourire moqueur, mes pieds nus sur le sol doux, m’emmenant jusqu’à la porte de ma chambre que je fis claquer du bout des doigts avant de m’adosser au battant en bois. Les couloirrrs ont des orrreilles expliquai-je dans un sourire brûlant. Il était hors de question que mon aïeule vienne m’ôter ma seule source de distraction de la matinée ou qu’un de nos invités se tienne au courant de ce que nous nous disions. Le seul qui était invité à nous déranger, c’était Junior, et mon mot dans notre carnet lui offrait tout le loisir de ne pas s’arrêter à une porte close.

Comme je regrettais de ne pas avoir pu assister à l’arrivée de nos invités ! Heureusement, le récit de Maxton me permettait de visualiser un tableau que j’estimais assez proche de la réalité. Entre le Groenland et le salon où ils s’étaient tous retrouvés pour prendre une boisson, j’avais du mal à décider quelles températures étaient les plus glaciales. Si j’avais été là, nous aurrrions non seulement prrris les parrris mais également orrrganisé le combat. Une petite moue traversa brièvement mon visage avant que mon éternel sourire ne reprenne sa place. Comme ce devait êtrrre agrrréable, de se rrretrrrouver seul au milieu de tout ça. Mais il n’était plus seul et maintenant que j’étais enfin arrivée, nous allions pouvoir nous jouer, nous aussi, de ces tensions. Finn l’a invitée en même temps que j’ai prrroposé à Juniorrr de passer ses vacances avec moi. Et il n’est pas homme à rrrevenirrr surrr une telle offrrre. J’imagine que son invitation tenait toujourrrs et que Carrrla a choisi de l’accepter. La soirrrée de Carrrterrr a peut-êtrrre mélangé quelques carrrtes, le jeu de Finn rrreste globalement le même. En tout cas, le pli de son estime enverrrs Carrrla n’a pas été défaussé. Si c’est ce que tu escomptais, c’est bien dommage. Et par tu, je sous-entendais Bluebell. Qu’est-ce que ta jumelle attend de mon frrrèrrre, exactement ? demandai-je soudainement, de but en blanc, plantant mon regard clair dans le sien, sans quitter mon poste contre ma porte.

electric bird.

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@Erin B. Sørensen

Délicieuse Erin, même après avoir frôlé la catastrophe et potentiellement épuisée, elle reste toujours aussi vive et mordante dans ses propos. Rien que pour cela, il était heureux de la retrouver. Il n’y avait qu’avec elle qu’il appréciat les joutes verbales, peut-être parce qu’elle était la seule à avoir assez de panache à ses yeux pour lui tenir habilement tête, en dehors de Bluebell bien évidemment. Il laissa échapper un léger rire et secoua la tête, comme pour retirer immédiatement ses propos

- D’accord, je n’ai rien. Je m’en voudrais terriblement que tu repartes à cause de moi. L’an prochain, tu pourras tenter le pôle sud si vraiment tu aimes les défis.

Confortablement adossé au dossier de sa chaise, il se contenta d’une moue polie, quoi qu’un brin condescendante quand Erin supposa que Finn se heurtait à un rôle trop étroit pour lui. S’il lui plaisait de croire cela, il n’allait certainement pas la détromper, mais il avait plutôt tendance à penser que son frère était juste actuellement trop fantomatique pour le moindre rôle, ce qui expliquait que toute cette histoire soit aussi ridicule. Finnbjörn n’avait pas l’étoffe de l’amoureux transi pour une jolie blonde, tout comme il n’avait pas la carrure pour la relation ô combien complexe qui l’unissait à Blue. Sans ses souvenirs, il n’était que l’ersatz de lui-même et aucun rôle n’était trop étroit pour lui. Ils étaient tous désespérément trop grands. Néanmoins, il ne pouvait pas détailler ce point de vue à son alliée. Pour des raisons de bienséance, mais surtout dans une forme de compassion inattendue. Peu importe l’opinion qu’elle avait de Blue, il détestait en entendre le moindre mal. Cela était sans doute son cas également et il n’avait aucune envie de crisper leurs relations. Après tout et même si ces mots l’avaient gênée, elle lui avait réellement manqué lors de sa disparition.

- Je me languis terriblement de ce retour à la normale.

Chose rare, Erin réussit à le surprendre en quittant son rôle de reine assignée dans ses appartements accordant généreusement de sa présence à un quelconque invité pour celui d’adolescente pleine d’énergie. Elle bondit vers la porte de sa chambre pour la fermer, aux motifs que les murs avaient des oreilles. Cette remarque lui arracha un rire. Cette demeure était tellement grande qu’il doutait sincèrement que quiconque ne les écoute à des kilomètres à la ronde, mais cela ne pouvait pas faire de mal. Après tout, quitte à comploter, autant le faire dans les règles de l’art.

Se détendant pour la première fois depuis leur arrivée ici, il s’anima au fur et à mesure de son récit, aussi amusé que consterné par les événements qui avaient eu lieu en son absence.

- L’adaptation fut sans doute moins difficile pour nous que pour la petite amie de ton frère. Si elle n’avait pas compris qu’elle était seule sur ce coup là, je pense que tout le monde a mis un point d’honneur à le lui rappeler.

Un rictus mauvais se dessina sur ses lèvres. Il n’avait pas été le dernier à participer à cette ambiance délétère et il devait avouer que l’absence de réaction de Finn et l’approbation silencieuse de Phoenix avaient achevé de finaliser un tableau fort désagréable. Il n’en éprouvait pas l’ombre d’un remord. Si sa présence contrariait sa soeur, alors tous les coups étaient permis, sans aucune pitié.

- Comme tes propos me font regretter ton absence ... Ca aurait été une entrée en la matière absolument grandiose. Du vin et des jeux, quoi de mieux pour accueillir des invités ?

Les jeux romains auraient fait pâle figure devant le combat à mort qui se serait annoncé.

- Ce n’était pas si difficile, j’avais le poste d’observateur et c’était fort divertissant.

Il haussa les épaules face à sa dernière remarque, commentant d’un ton froid

- Je n’étais pas le seul à l’espérer. Que Carla continue de salir son nom, c’est son problème. Je pense que toutes les personnes sensibles à la réputation de ta famille sont effarés de les voir continuer à s’afficher ensembles.

La légèreté de la conversation disparut au profit d’une question plus directe. Peut-être que cette façon frontale de l’interroger aurait dû le surprendre, mais ce n’était pas le cas avec Erin la patience n’était pas sa qualité de première et elle s’était déjà bien assez prêtée à l’exercice du bavardage pour ne pas vouloir continuer sans avoir de réponse à ses questions. Toute l’interrogation était de savoir ce qu’il pouvait révéler ou non. Et c’était plus délicat que ce qu’il y paraissait, puisqu’en réalité entre ce que sa soeur lui disait, ce qu’il supposait et ce qu’il constatait de premières différences ressortaient. Et ensuite, il ne voulait évidemment pas révéler quoi que ce soit qui puisse s’apparenter à une trahison pour Blue. Il prit un instant pour réfléchir avant de dire plus lentement, comme s’il pesait chacun de ses mots

- Je sais que Blue et Finn ont échangé brièvement pendant la soirée de Carter et après par hibou. Ce qu’il ressortait, c’est que Blue voulait qu’il laisse tomber tout ça, qu’il laisse tomber cette relation ridicule avec Yaxley. Je pense que dans leurs échanges, elle a jugé ça possible et que c’était tout le contraire arrivée ici.

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J’appréciais particulièrement la présence de Maxton ce matin. Il était le messager d’un retour à la normale bienvenu. Quelques brèves paroles lui avaient suffi pour me faire part de cette inquiétude qu’il avait ressentie durant nos soixante-douze heures d’errance, et c’était tout. Nous retrouvions sans plus attendre notre insolence, aussi similaire que l’était notre arrogance. Il n’était pas assez stupide pour croire que j’avais besoin de compassion ou de sollicitude et me connaissait suffisamment pour ne pas s’embarrasser de politesses malvenues. Nos rires s’entremêlent et la lueur au fond de mon regard se fait plus vive. Je ne me privais pas de cette délicieuse opportunité de retrouver tout mon mordant habituel et d’affronter celui de mon camarade, je m’en saisissais même avec joie. J’ai bien envie de prrrofiter de mes terrres avant de rrreparrrtirrr où que ce soit. Charrrmante idée que le pôle sud, cependant, un défi à ma hauteurrr. Junior et moi avions été capables d’affronter et de survivre à cette mésaventure polaire sans y être préparés : ni vêtements suffisamment chauds, ni nourriture, ni bagages, et sans être déjà majeurs. Je ne voyais pas ce qui pourrait me résister avec un peu d’organisation. Car il était hors de question que je retourne jamais moisir dans une cabane miteuse. Seule la présence de mon meilleur ami avait donné de l’éclat à ce royaume du bout du monde, mais nous avions tout le loisir désormais d’en construire d’autres, plus à notre image encore.

Telle la reine visitée dans ses appartements, je recevais une source de précieuses informations. Maxton avait été aux premières loges pour constater ce que ces derniers jours avaient soulevé comme tensions et il pouvait maintenant venir m’en faire part. Mon jumeau adoré n’avait rien d’un adolescent énamouré et idiot comme bien de nos condisciples à Poudlard. Il était au-dessus de tout cela, et bien mieux que n’importe qui en même temps. Un retour à la normale, comme le soulignait le Gryffondor, ne pourrait pas faire de mal. Retrouver Finnbjörn tel qu’il avait toujours été, survolant la masse infâme des gueux qui nous entouraient pour ne pas s'embarrasser de questions triviales. Carla ne me dérangeait pas vraiment, excepté quand elle se perdait en compagnie de ce débile de Carter, mais force était de constater qu’elle jouait un rôle dans la toute nouvelle perdition de mon tendre frère. Vivement que cela cesse. Si j’avais mon point de vue, il avait le sien. Ils se rejoignaient par certains aspects mais différaient sur d’autres, en témoignait cet air condescendant qui voila un instant les traits de Maxton et qui réveilla un éclat dangereux au fond de mes prunelles. Il était si facile de nous perdre sur une pente glissante lorsqu’il s’agissait de nos jumeaux. Mais, tout en politesse et en retenue, il ne fit rien d’autre que de commenter sobrement la situation. Son silence en disait tout de même bien plus que ses mots.

Je lui demandais donc un compte rendu détaillé de ces trois jours, en abandonnant mon trône tout en oreillers et en couette pour refermer la porte de ma chambre sur notre petit conciliabule. La demeure était immense, mais je savais mieux que personne que cela ne changeait rien. Nous savions intuitivement où trouver les autres et mes frères avaient cette fâcheuse tendance à considérer que leur rôle de parfaits hôtes signifiait être au courant de tout, absolument tout. Cette tranquillité assurée, Maxton débuta son récit. J’haussai les épaules, dans un geste indifférent. Carla était une grande fille et si elle n’était pas capable de se défendre seule, tant pis pour elle. Nulle pitié, nulle compassion à son égard. Être jeté dans la fosse aux lions dévoilaient les caractères, et si elle m’avait montré plusieurs fois qu’elle pouvait s’animer d’une force tout à son honneur, je doutais que ce soit-là sa nature profonde.

Comme je trouvais dommage de ne pas avoir été présente pour construire de mes propres mots une arène magnifique et sanglante ! Un beau gâchis. Peut-être n’était-il pas trop tard pour voir s’agiter les émotions et les rancoeurs du groupe que nous formions. À cette idée, un sourire carnassier ourla mes lèvres, tandis que Maxton surenchérissait. On ne peut pas rrrevenirrr surrr ce qui a été fait, mais on peut toujourrrs arrranger la suite du séjourrr. Rien n’avait disparu en si peu de temps et il était plus que probable que le feu soit entrain de couver. Il me faudrait quitter mon lit pour m’en rendre compte par moi-même et cela devrait attendre la fin du repos imposé par Grand-Mère. Je levai les yeux au ciel en l’entendant parler de la réputation de ma famille, mon rictus se faisant plus brûlant encore. Délaissant la porte, je parcourais ma chambre, l’air profondément absorbé par les tableaux aux murs et les photos dans les cadres. Comme c’est altrrruiste. Une bien belle manièrrre de cacher une disposition tout ce qu’il y a de plus égoïste raillai-je en reposant la photo de Finnbjörn et moi, celle-la même en face de laquelle il s’était arrêté lorsque nous nous étions retrouvés au Balcon du Monde. Que Maxton ne me fasse pas croire qu’il s’inquiétait de la réputation des miens, quand la seule chose qui le préoccupait réellement étaient les sentiments de son irritable soeur.

Alors, sans plus me cacher derrière des subtilités qui m’agaçaient bien trop vite, je choisis une approche bien plus frontale. Les secondes passèrent et mon sourire se faisait plus grand alors que je sentais l’esprit de Maxton s’activer. Que dire, que cacher ? Que confier, que dévoiler ? Il était doué pour les belles paroles pleines de fioritures, mais répondre à une attaque directe demandait des précautions qui se lisaient sur son visage. Elle doit horrriblement mal le vivrrre, son ego doit êtrrre en miettes. Une simple constatation qui, je n’en doutais pas, était la vérité. Mais je n’allais pas masquer la joie qui émailait mes propos. Voir Bluebell profondément touchée dans sa fierté avec quelque chose de plaisant. Il faudrrrait quand même m’expliquer pourrrquoi elle tient tant à ce que mon frrrèrrre ne soit plus avec Carrrla alorrrs qu’elle même a passé l’année entièrrre, ou peu s’en faut, à l’insulter de tous les noms et à le rrrabaisser sans arrrêt. Je me retournai pour faire face à Maxton. Je ne lui tenais pas rigueur du comportement insultant de sa jumelle, mais la chaleur de mon ton était tout de même descendue de quelques degrés. Je n’avais jamais rien eu contre le fait que Bluebell et Finnbjörn continuent de se côtoyer après notre dispute à toutes les deux. Mais que cette garce ose s’en prendre à mon noble jumeau, c’était plus qu’elle ne pouvait se permettre.

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- Aucun défi ne te résistera, nul besoin de partir si loin. Reste sur tes terres, elles ont besoin d’un souverain incontesté, tout comme la partie d’échecs de Finnbjörn a besoin d’une Reine.

Ce n’était pas réellement de la flatterie, contrairement aux apparences. Il était intimement persuadé qu’Erin était bien déterminée pour laisser le moindre défi lui résister. Et à choisir, il souhaitait sincèrement que la Poufsouffle devienne la reine de cette partie. Elle faisait une souveraine bien plus crédible que Yaxley dont la présence s’apparentait actuellement à celle d’une plante verte. Une jolie plante verte, il fallait lui reconnaître, mais elle ne brillait pas par son charisme. A chaque minute qu’elle passait en Norvège, elle semblait s’éteindre un peu plus, ce qui amusait Maxton au plus haut point. Tout était bon pour l’écraser.

La lueur qui brilla dans les yeux d’Erin lui indiqua que son silence n’avait pas fait illusion. Elle soupçonnait son point de vue, il devinait le sien. L’inconvénient avec les personnes que l’on avait l’habitude de côtoyer, c’est qu’elles commençaient à pouvoir deviner le sens de vos silences. Il avait hypothéqué bien trop d’heures de sommeil pour discuter avec Erin pour qu’elle ne sache pas traduire son mutisme. Mais pour aujourd’hui, joie des retrouvailles, perdre de perdre un allié … Peu importe la raison, chacun choisit de recouvrir d’un voile de pudeur tous les non dits qui flottaient entre eux.

Maxton eut un rire froid quand elle lui dit que la suite du séjour pouvait s’arranger et proposa, avec un ton suffisamment calme pour que ce ne soit qu’une demie plaisanterie.

- Si à défaut d’un spectacle d’accueil, le séjour pouvait se terminer par la disparition de Yaxley, je m’estimerai tout à fait diverti.

Il haussa les épaules

- Il n’y a rien d’altruiste en nous. Nous sommes juste conscients que la chute d’un Sørensen serait un coup dont notre cause mettrait un temps certain à se remettre.

S’il ne pouvait tout dire, il se devait néanmoins en dire assez pour que son engagement de franchise soit respecté et pour qu’Erin juge ses réponses suffisantes. Il acquiesça donc à ces propos, ne cherchant pas à cacher le ressenti de sa sœur.

- En miettes, je ne sais pas, mais elle l’a affreusement mal vécu effectivement.

Il savait également que cela lui faisait plaisir. Mais là encore, chacun fit semblant de ne pas savoir ce que l’autre pensait du jumeau de l’autre. Il soupira face à sa question et réfléchit encore une fois à ce qu’il pouvait ou non verbaliser, piégé dans un conflit de loyauté intérieur.

- Je crois …

Il hésita et reprit d’une voix plus sérieuse, dénuée de son arrogance habituelle.

- Elle ne me l’a jamais dit et ce ne sont que des suppositions personnelles, mais je crois qu’elle cherchait à tester inconsciemment les limites de Finnbjörn pour voir si cela lui permettrait de retrouver celui qu’il était avant qu’il ne perde ses souvenirs. Je ne sais pas pourquoi son amnésie la heurte tant, les souvenirs ont disparu et c’est ainsi.

Le ton détaché qu’il avait employé démontrait à quel point lui n’en était que peu, voire pas du tout affecté. Maxton avait des difficultés à manifester la moindre compassion envers d’autres personnes que sa sœur. Il y arrivait ponctuellement avec Erin, preuve de l’affection qui lui portait, mais rares étaient les personnes qui pouvaient en dire autant. C’était évidemment regrettable pour les souvenirs de Finnbjörn, mais il n’avait rien perdu de sa puissance magique ou de la qualité de son sang, son avenir n’était donc pas irrémédiablement terni. Partant de cette constatation, il ne tenait qu’à lui de retrouver sa grandeur d’antan. Mais sur cette question, Bluebell et lui n’envisageaient pas la situation de la même manière.

- Carla représente à elle toute seule tout ce que Finnbjörn n’est plus. Et tout ce que Bluebell aurait aimé retrouver.

Première fois qu’il faisait l’effort d’appeler Barbie par son prénom. Mon dieu ce que ça pouvait lui piquer la bouche. Mais au moins, cela démontrait à Erin qu’il faisait réellement des efforts pour lui fournir des interprétations plausibles de la situation.

- Est-ce une explication suffisante à tes yeux ?

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Ce qu’il y avait de fascinant dans nos échanges, c’est que, derrière les flatteries et les silences, se cachaient des vérités et une confiance mutuelle. Je ne prenais jamais ses propos comme des compliments hypocrites parce que Maxton ne me disait jamais rien qu’il n’avait pas envie de dire. Nous préférions un mutisme lourd de sens à des paroles qui en étaient dénuées. Les innombrables heures arrachées à un sommeil agréable pour profiter de la compagnie de l’autre avaient façonné ce jeu dont nous connaissions le fonctionnement par coeur. Si ces vacances étaient une partie d’échecs, entamée à Poudlard déjà, je ne voulais être rien d’autre que la Reine des pions de Finnbjörn. C’était une figure de puissance qui ne s’embarrassait pas des carcans dans lesquelles les autres pièces étaient engoncées. Elle pouvait aller en diagonale, devant, derrière, avancer d’une case ou de plusieurs, et elle assassinait tout sur son passage. Mais les défis ici sont lassants. Avec un haussement d’épaules, je jetai une chape d’indifférence sur cette idée. J’avais beau trouver la partie actuelle peu intéressante et bien loin de l’exaltation que j’aimais ressentir, il n’en était pas moins vrai qu’il suffirait d’un mot de mon jumeau pour que je me joigne à lui. Malgré l’agacement d’avoir été si longtemps tenue à l’écart, j’étais éternellement de son côté.

Nous passâmes sous silence ce qui aurait réveillé des tensions, pas vraiment entre nous, mais à défendre nos jumeaux respectifs nous finissions forcément par être en désaccord. Chaque chose en son temps et le temps savait venir, lorsqu’il était question d’avancer des faits de ce genre. Pour l’instant, toute mon attention concentrée sur ce que j’avais raté ces trois derniers jours, je pouvais bien laisser tomber cette envie brûlante d’écorcher verbalement sa garce de soeur. Elle n’avait jamais été ma priorité et nous étions toujours très bien parvenus à ne pas la mentionner dans nos tête-à-têtes nocturnes. C’était peut-être un peu plus compliqué aujourd’hui, puisque Finnbjörn et Bluebell persistaient à s’affronter, mais pas impossible. Tout de même, elle n’est pas une vulgairrre impurrre que l’on peut fairrre disparaîtrrre comme ça raillai-je sans quitter Maxton du regard. Sa relation avec Bluebell avait toujours été différente de la mienne avec Finn et je l’avais toujours su. C’était parfois prodigieux de constater à quel point. Mais si nous nous retrouvions sur un point précis, c’était cette capacité qu’avait le monde à nous indifférer profondément et les relations des autres à ne pas nous affecter, excepté lorsqu’il s’agissait de notre jumeau. Après tout, nous parvenions bien à nous entendre, et à merveille !, alors que sa soeur adorée me détestait et moi autant. Je n’avais jamais éprouvé le besoin que mes amis ne côtoient pas ceux à qui je ne pouvais sourire chaleureusement. Ils étaient libres de faire ce qu’ils voulaient, c’étaient là leurs histoires. Phoenix appréciait bien Bluebell, Junior trouvait chez ma cadette une estime incompréhensible, qu’ils fassent, tous. Je ne m’interposais jamais réellement que quand Finn était dans l’équation, encore plus facilement si l’on osait s’en prendre à mon frère adoré.

Qu’est-ce que je disais ! Une façon altruiste de présenter une disposition égoïste. Mon sourire s’étira un peu plus, féroce et amusé à la fois. Tu sais pourrrquoi je t’adorre alorrrs que je déteste ta jumelle ? Enfin, l’une des milliers de rrraisons ? C’est que tu sais quand il faut êtrrre frrranc et délaisser l’hypocrrrisie, ce fléau. Quelques mots qu’ils comprendraient à leur juste valeur : ce n’était pas une nouvelle facilité pour critiquer sa soeur, je n’avais pas besoin de ça, mais plutôt une manière d’apprécier son honnêteté. Bluebell Sherwin en était incapable : même dans les moments où sa haine brûlait le plus fort, elle se montrait toujours perfide et trompeuse. Est-ce qu’une seule vérité était jamais sortie de la langue fourchue de cette vipère ? J’en doutais.

Et puisque nous parlions de sa soeur, je me retournai pour lui faire face, abandonnant les politesses et courbettes en tout genre dont nous savions si bien habiller nos échanges pour retrouver mon impulsivité naturelle. Il y avait quelque chose, dans tout cela, que je ne comprenais pas, une nuance trop obscure que je ne parvenais pas à saisir. L’impératrice des garces, comme je me plaisais à l’appeler intérieurement, quand bien même c’était lui accorder presque trop de crédit et de noblesse, était incohérente dans ses propres et ses actes. Maxton hésita, partagé, je le savais, entre sa loyauté gémellaire et ce qu’il devait avoir envie de m’offrir comme réponse. Il hésita avant de reprendre, toute l’arrogance qui était normalement la sienne comme effacée. Lui-même était parfaitement détaché de ce qu’il avançait : tout ce qui l’intéressait dans cette histoire, c’était sa soeur, ses sentiments et son bien-être. Finnbjörn n’était sur le devant de la scène que parce que Bluebell l’y avait projeté.

Ce fut à mon tour de garder un silence pensif et empreint d’une gravité anormale. Cela faisait un peu plus d’un an et le souvenir était pourtant toujours aussi frais dans mon esprit. Je n’avais plus adressé la parole à mon jumeau pendant quinze jours, après son réveil, une colère bouillante m’animant alors. Il ne se souvenait de rien, de rien du tout, mais surtout, il ne se souvenait plus de moi. La pilule avait été difficile à avaler et repenser à cette période apportait toujours un goût amer. Plus que tu ne le conçois répondis-je sobrement. Je n’avais pas le temps pour les sentiments des autres, encore moins pour analyser leurs pensées les plus intimes, surtout pas celles de Bluebell Sherwin. Pourtant, les propos de Maxton faisaient comme écho à d’autres, aux miens. Je préférais perdre ce que je partageais avec Junior plutôt que d’avoir à le partager, notre relation unique ne pouvant souffrir, à mes yeux, d’autre présence. Je crois que je le lui avais même dit, une fois. Est-ce que c’était aussi ce que ressentait cette vipère ? Préférait-elle perdre ce qui avait un jour tissé sa relation avec mon frère adoré plutôt que d’en avoir une pâle copie ? Pour la première fois depuis bien des années, je la comprenais. Ce qui ne signifiait rien d’autre que cela. Un soupir m’échappa avant que mon sourire, moqueur, ne refasse surface, bien qu’un peu entaché par le tour sérieux que prenait cette conversation. À trrrop vouloirrr tester, elle a perrrdu. Je n’ai pas la prrrétention de tout comprrrendrrre de cette parrrtie, mais je suis cerrrtaine qu’elle a prrécipité sa prrroprrre perrrte. Cela ne rrressemble pas à Finn de jouer un tel jeu sans prrrovocation. Oh, il dirait sûrement le contraire, prétendrait que sa soeur n’était que la victime, j’avais un tout autre point de vue. Je me souvenais encore de cette veste que j’étais allée chercher dans la chambre de sa jumelle, la veste de mon frère. Jamais il n’aurait prêté ses biens à n’importe qui. Je ne vais pas te mentirrr. Ça m’est égal que ta jumelle souffrrre. Au contrrrairrre, je trrrouve qu’elle n’a que ce qu’elle mérrrite. Mais il me semble bien, malgrré tout, que le jeu touche à sa fin. Il faudrait que je trouve FInnbjörn, cet après-midi, pour lui parler de tout cela et sonder son état d’esprit. En même temps, je n’avais pas vu Junior depuis le petit-déjeuner et une escapade sur mes terres avec lui était tout ce que je souhaitais. J’aurais bien l’occasion de prendre mon frère à parti quand il nous faudrait assumer nos obligations sociales.

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@Erin B. Sørensen

Chassant sa remarque d’un geste de la main comme s’il s’agissait uniquement d’un insecte désagréable, il déclara

- Alors rends les palpitants.

Erin avait la carrure de rendre n’importe quoi passionnant, là où Finnbjörn avait l’étrange capacité de tout rendre affreusement ennuyeux. Il suffisait de se remémorer sa tentative de discussion politique à l’arrivée de tous les invités en Norvège pour en être convaincu. Ce n’était pas le fait que la conversation vole au-delà de l’habituel sujet de la météo le problème, mais uniquement qu’il y avait un moment pour tout et là, ce n’était pas le ni le lieu, ni le bon instant. Son discours avait eu l’effet d’un coup derrière la nuque, violent et particulièrement assommant. Quand Erin lui fit remarquer que Carla n’était pas une vulgaire impure qu’il pouvait faire disparaître, il se retint de lever les yeux au ciel. Pensait-elle qu’il ne le savait pas ? Sinon il s’en serait déjà donné à cœur joie. Là, il restait limité par le fait qu’il s’agissait de l’unique héritière d’une vieille famille. Quel dommage. Cette triste constatation disparut bien vite au profit des paroles d’Erin.

- Parce que je suis sans conteste le plus beau de nous deux ?

Un sourire aussi amusé qu’arrogant se dessina sur ses lèvres et il s’empressa de relever, taquin

- Alors ainsi, tu m’adores ?

Le choix de ce verbe l’amusait énormément. Personne ne l’adorait, en dehors de Bluebell évidemment. Il n’avait pas une personnalité adorable, et pourtant c’était ce choix de mots très précis qu’elle venait d’employer. D’ailleurs, il n’aurait jamais cru que ce qualificatif soit destiné à une autre personne que Junior. Junior et Erin étaient si fusionnels qu’il était parfois facile de se demander si ce n’était pas plutôt eux les jumeaux. Leur complicité était à la mesure de leurs disputes, toujours intenses, mais ils revenaient systématiquement l’un vers l’autre. Il était d’ailleurs assez étonné ne pas le trouver avec Erin ce matin. Mais il ne s’en plaignait pas, Junior était absolument charmant, mais Maxton avait quelques difficultés avec le partage. Ce matin, il voulait son amie pour lui seul, comme lors de leurs soirées.

A la réponse, peut-être maladroite, qu’il avait essayé de lui donner, Erin resta anormalement silencieuse. Cela le questionna l’espace d’une seconde, l’avait-il énervée ? Il n’était pas nécessairement doué pour exprimer des sentiments et comprendre ceux des autres en dehors de Blue. Il vivait plutôt les émotions comme une douloureuse perte de temps. Voilà pourquoi en dehors d’un ennui profond, il en ressentait lui-même fort peu. Tandis que le silence s’éternisait autour d’eux à la suite de sa réponse, il reprit plus doucement

- Je comprends parfois les émotions qui agitent Blue, parfois elles me sont étrangères. Je te réponds aujourd’hui parce que tu me le demandes expressément, mais sois assurée que je suis au courant de l’absurdité de mes propos. Que t’importent les ressentis de Blue quand il s’agit des souvenirs de ton frère jumeau, n’est-ce pas ?
Evidemment qu’il soutenait Blue, ça serait toujours elle avant le reste du monde. Toujours elle contre le reste du monde. Mais cela ne signifiait pas qu’il était aveugle ou stupide au point de ne pas voir la situation d’Erin. Sans compter qu’il était assez simple pour lui de se mettre à sa place, tout ce qui découlait de leur gémellité était quelque chose qu’il en était en mesure de concevoir. Il soupira et quitta la position nonchalante qu’il avait adoptée depuis son arrivée pour se relever et s’adosser contre l’un des murs de la chambre afin de faire face à la Poufsouffle. Certaines conversations méritaient que l’on y accorde une importance pour le manifester y compris dans sa posture.

- Je ne vais pas te mentir, surtout après que tu aies loué ma franchise, je n’ai aucune compassion pour Finnbjörn. Les souvenirs sont perdus, c’est ainsi. Pour le reste, il est libre de retrouver sa grandeur ou de lui tourner le dos, cela ne tient qu’à lui. Par contre, j’éprouve de la compassion pour la position qui était et qui reste la tienne. Je ne sais pas ce que j’aurais fait s’il s’agissait de Blue. Alors, sa tristesse m’affecte parce que c’est la sienne mais elle est sans doute dérisoire par rapport à celle qui a été la tienne.

Peut-être refuserait-elle la compassion implicite contenue dans ses propos, peut-être y verrait-elle une ultime preuve de franchise. Qu’importe sa réaction, les choses étaient claires entre eux. Ils étaient certes liés par une forme d’amitié, mais il était son allié parce que dans toute sa froideur, il respectait profondément le lien qui l’unissait à Finn. Peut-être était ce bien la seule relation qu’il pouvait comprendre d’ailleurs. Celle entre Blue et Finn lui semblait être actuellement une vaste perte de temps et d’énergie.

- Perdu, gagné, quel intérêt ? Tant qu’elle s’accroche à un souvenir, elle sera malheureuse. Maintenant, là où je serais moins catégorique que toi, c’est qu’elle aurait perdu de manière éclatante si Finnbjörn ne lui avait témoigné que de l’indifférence. Là au contraire, il est tout de même sorti de sa légendaire réserve.

Quand elle lui indiqua qu’elle ne mentirait pas, Maxton acquiesça d’un léger signe de la tête pour l’inviter à continuer. Il savait qu’elle ne travestirait pas la vérité pour lui faire plaisir et cette discussion avait bien trop avancée pour qu’il s’en formalise encore. Puis, sa franchise lui permettait de lui opposer sa propre honnêteté, sans que rien ne puisse lui être reproché.

- Sans surprise, je ne veux pas qu’elle souffre. Mais je veux aussi que le jeu se termine.

Mais contrairement à ce que semblait penser son interlocutrice, il savait pertinemment que c’était un vœu pieu. Le jeu sous la forme qu’ils connaissaient allait sans doute prendre fin, mais un nouveau le remplacerait, avec de nouvelles règles, de nouveaux buts. Seuls les protagonistes en demeureraient inchangés. Il n’y avait pas d’indifférence entre Bluebell et Finnbjörn, bien au contraire.

- Que sais-tu de ton côté des intentions de Finnbjörn ?

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Un instant, j’adoptai une moue contrariée avant qu’un sourire amusé ne la fasse voler en mille éclats. Je n’ai même plus le drrroit de me plaindrrre un peu. Aprrrès tout ce que je viens de trrraverrrser, c’est un comble ! déclarai-je théâtralement, mon regard ancré dans le sien lui signifiant en silence que je savais très bien ce qu’il s’apprêtait à me répondre. Je n’étais pas du genre à me plaindre et encore moins celui à utiliser ma récente mésaventure comme une excuse pour que l’on s'apitoie sur mon sort. Il venait d’en faire les frais, quelques minutes plus tôt, quand j’avais balayé aussi facilement qu’une poussière son inquiétude à mon égard. Qu’importe, il avait raison. Si tout n’était qu’ennui, il ne tenait qu’à moi d’insuffler un peu de vie et d’enthousiasme dans les jours que nous allions encore partager tous ensemble. Et en cela, je pouvais me fier à un allié de taille. Sans aucun doute, Maxton serait ravi de m’épauler dans cette mission si je décidais de la faire mienne.

Sa répartie m’arracha un rire joueur alors que je secouais la tête, mes cheveux bruns ondulant le long de mon dos comme autant d’échos à cet éclat amusé. Je venais de lui donner une opportunité en or pour se moquer de moi, mais je ne la regrettais pas, c’était de bonne guerre. Tu sais bien que, de mon point de vue, tu es parrré de toutes les qualités et ta soeurrr a rrrécupérrrré tous les défauts. Il était évidemment bien plus charmant à mes yeux que sa jumelle, c’était une évidence qu’il n’était pas utile de relever. Sa beauté tenait dans son arrogance et dans cette insolence méprisante que ses traits reflétaient. Maxton Sherwin avait un attrait certain qui ne me faisait rien. En réalité, je ne m’étais jamais posée la question : je ne voyais pas chez lui le physique, mais l’esprit ; pas la beauté, mais le sang et la noblesse. De toute façon, en matière de charisme et d’élégance, et de tout le reste d’ailleurs, personne n’arrivait, à mes yeux, à la cheville de mon meilleur ami. J’ai dit adorrrrrer ? Je voulais dirrre tolérrrer fis-je, espiègle, refusant de lui concéder une répétition.

Et puis, de ces petits jeux de piques et de répliques, nous déviâmes sur nos jumeaux et cette relation qui avait explosé à la figure de tout le cercle que nous formions à Poudlard. Les mots de Maxton éveillèrent des souvenirs que je préférais ne pas ressasser. L’amnésie de Finnbjörn me laissait, aujourd’hui encore, habitée d’un mélange de colère et de déception. Le reflet des sentiments de Bluebell m’apparaissait dans toute sa splendeur alors que je contemplais les miens. Qu’ils soient ceux que je dédiais à mon frère adoré, ou ceux qui me liaient à mon meilleur ami et qui n’étaient pas sans m’évoquer douloureusement ce que mon ami me racontait des tourments de sa soeur. Je chassai tout cela d’un froncement de sourcil : je n’étais pas cette peste de Sherwin, et si, bien malgré moi, je parvenais à comprendre son point de vue, il n’était en rien mon présent. Junior et moi ne nous livrions pas une guerre sans merci, et nous ne le ferions jamais. La douceur dans la voix du Gryffondor me laissa à penser que je n’avais pas bien masqué mes émotions et que quelques éclats avaient agité mes prunelles. Maxton était clairvoyant, bien plus que son indifférence quant aux autres ne le laissait penser. Je me contentai d’un léger signe de tête pour appuyer son interrogation, sans chercher à revenir dessus. Sujet sensible ou sujet arrivé à sa fin, la ligne était fine.

Prouvant que la conversation devenait sérieuse et importante, Maxton se releva et vint me faire face, adossé à l’un des murs de ma chambre, dans une posture similaire à la mienne. Quiconque serait rentré dans la pièce aurait pu s’étonner que nous discutions à une telle distance, mais c’était comme si elle était nécessaire pour laisser toute la place aux poids de nos mots et de nos décisions. Un autrrre de nos points communs : l’absence de compassion pour le jumeau de l’autrrre l'interrompis-je avec un sourire fauve, avant de laisser mes lèvres se rejoindre et m’imposer le silence pour le laisser poursuivre. Je penchai légèrement la tête et plissai légèrement les yeux à la suite de ses mots. N’importe qui me présentant sa compassion se serait vu mettre à la porte. Qui étais-je, pour avoir besoin de tels sentiments de la part du premier venu ? Sauf que le Gryffondor n’était pas vraiment le premier venu non plus et que je savais que cet apitoiement venait directement du fait qu’il possédait ce lien intense qui n’existent qu’entre jumeaux, que ceux-ci soient fusionnels ou non. Mon mutisme fut une preuve, bien à moi, du fait que j’acceptais ses propos.

Son point de vue, bien que différent du mien, se tenait. Il était aisé de modifier les perspectives pour les adapter à sa vision, ses sentiments, et aux personnes auxquelles nous tenions. Il était juste, cependant, de souligner que mon tendre frère était sorti de sa réserve, lui toujours contenu entre toutes les limites qui pouvaient exister. Je te le concède. Le jeu, cependant, ne se terrrminerrra que pourrr laisser place à un suivant, nous le savons tous les deux. Qu’est-ce que nous voulions, au fond ? Au-delà de ma haine pour Bluebell Sherwin, je voulais que Finnbjörn redevienne celui qu’il avait toujours été. Et ce comportement ne lui ressemblait pas. Rien ne disait que la suite serait de meilleure augure. Je vais avoirrr moins de cerrrtitudes à avancer. Je viens juste de rrrentrrrer et je n’ai pas vrrraiment pu échanger avec Finn depuis la soirrrée de Carrrterrr. Il est essentiel pourrr lui de fairrre bonne figurrre. Alorrrs, quoiqu’il décide, il le ferrra dans le rrrespect des convenances.

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@Erin B. Sørensen

- Pardon, loin de moi l’idée de te priver du bonheur de te plaindre. Je suis tout ouï, quelles sont tes doléances ?

Les paroles étaient compréhensives, le ton railleur de sa voix indiquait qu’il n’en croyait pas un mot. Erin avait toutes les raisons de se plaindre, c’était un fait, mais elle n’en avait jamais voulu. Ils partageaient sensiblement le même point de vue sur la question : geindre n’était qu’une vaste perte de temps. Les problèmes sur lesquels on s’apitoyait n’avaient que deux issus, soit ils étaient solubles, soit ils ne l’étaient pas. Dans le premier cas, se plaindre était une perte de temps et la seule chose à faire était de tout mettre en oeuvre pour obtenir ce que l’on souhaitait. Dans le second, chouiner ne changerait jamais rien, il fallait donc se détourner au plus vite de ce qui s’apparentait à une activité chronophage. Inutile de dire qu’avec une telle conception de la vie, la compassion était une émotion rare chez lui. A vrai dire, si elle avait pris le temps de lui exposer ses souffrances de ce voyage forcé au pôle Nord, il aurait écouté avec une politesse feinte, mais il se serait sans doute profondément inquiété pour la santé mentale de la jeune fille, se demandant ce qui avait bien pu lui arriver pour que sa personnalité soit à ce point altérée. Là, sa manière d’être le rassurait. Ses traits étaient marqués par une fatigue inhabituelle, mais c’était la seule marque notable et éphémère de sa mésaventure.

- Je suis prêt à t’accorder que la répartition fut inéquitablement en ma faveur, c’est bien pour cela que je suis celui qui s’occupe de communiquer avec le reste du monde pour nous deux. Je suis le plus charmant.

Là encore, ses propos avaient des accents ouvertement moqueurs. Il renchérissait parce que ces instants de plaisanterie étaient assez rares pour qu’il sache les apprécier à leur juste valeur, mais il n’aurait jamais pu proférer des paroles plus éloignées de ses pensées. Si répartition injuste il y avait eu, elle était en faveur de Bluebell. Blue était la meilleure facette de lui-même et il lutterait pour qu’elle le reste. Voilà pourqu’il il avait plongé dans cette stupide histoire avec Finnbjörn, parce que Bluebell était moins abîmée que lui et il était prêt à beaucoup de choses pour que cela reste ainsi. Elle éprouvait des émotions violentes qui la faisaient réagir avec impulsivité, mais elle éprouvait quelque chose. Tellement mieux que son éternelle froideur détachée. Il pouvait bien la dissimuler sous des manières enjôleuses, la vérité était que l’essentiel de sa vie était dominée par un profond sentiment d’ennui. Il ne ressentait presque jamais de remord, peut-être encore moins de regret. Il n’avait qu’un vague attachement intéressé pour ses parents adoptifs. Seule Blue changeait systématiquement cet état de fait, Erin ponctuellement, Phoenix rarement.

- Quelle cruauté de me refuser d’entendre encore une fois de si gentils mots de ta part. Tant pis, je devrais me contenter de ça.

Il s’en contentait bien volontiers en réalité. Elle l’avait dit une fois, c’était bien suffisant et il se fichait qu’elle le répète. Il avait assez avec une seule phrase pour la taquiner pour les dix prochaines années. L’humour laissa place à de conversations plus graves, trop peut-être pour leur conversations habituelles. Erin ne jugea pas utile de renchérir et Maxton l’imita. Certaines choses devaient être dites, mais une fois que les mots avaient quitté ses lèvres, nul besoin de revenir sur le sujet. Elle tolérait sa compassion, mais ne l’appréciait pas. Comment aurait-il réagi à sa place ? Difficile à prévoir. Il aurait pu balayer toute forme de sympathie d’une remarque acerbe tout comme il aurait pu la recevoir avec une forme de satisfaction. Il avait une manière assez possessive d’envisager ses relations. Cela était évident avec sa soeur, mais cela touchait aussi les personnes qu’il considérait comme des proches. Alors un témognage d’affection l’aurait encouragé dans cette manière presque exclusive qu’il avait de voir ses amitiés. Seul un sourire presque mauvais apparut quand Erin lui confirma qu’aucun d’eux n’avait de compassion pour le jumeau de l’autre. Le résumé était parfait. Il se contentai de ressentir une neutralité teinte de contrariété concernant Finnbjörn. A chaque fois que sa soeur était malheureuse, il l’estimait un peu moins, et à chaque fois qu’il était aimable avec elle, il déplorait que sa soeur puisse s’entendre convenablement avec une autre personne que lui sur cette terre. Bref, un paradoxe à part entière.

Maxton acquiesça, songeur. Oui, le jeu suivant arrivait, il le sentait. Qu’Erin le comprenne ainsi également ne faisait que renforcer sa conviction que son analyse était bonne.

- Si Blue s’estime satisfaite de la prochaine partie, peut-être m’en accommoderai-je.

Quoi que formulée avec tact, l’idée était assez claire. Il n’excluait pas de jouer la prochaine partie avec Erin comme partenaire si cela s’avérait nécessaire. Evidemment, il était ravi à l’idée que Carter et Yaxley disparaissent du paysage, mais cela ne voulait pas dire que la situation serait plus simple par la suite. Juste différente. Mais il se laissait également une porte de sortie si son intervention devait chagriner sa précieuse jumelle. La réponse de la brune le contraria sans le surprendre. Il aurait aimé plus d’informations, mais il ne pouvait pas décemment exiger d’elle après ses récentes mésaventures qu’elle ait couru grapiller des éléments à échanger.

- Evidemment. Je dois moi-même voir Bluebell pour savoir si de nouvelles choses se sont ou non produites.

Son sourire moqueur s’étira face aux derniers mots d’Erin

- Si tu considères qu’inviter Blue et Yaxley au même séjour est dans le respect des convenances, alors l’honneur est sauf.

Inutile de préciser qu’il ne le vivait pas ainsi. Convier une fille traître à son sang, c’était limite. La convier exprès pour embêter Bluebell, c’était inconvenant. Quelle serait la prochaine étape, si ses parents venaient à le fiancer, il organiserait des repas avec l’officielle et l’officieuse ? Ca promettait les repas de famille.

Il quitta le mur auquel il était adossé et se dirigea vers la porte de la chambre, conscient que tout ce qui pouvait être dit lors de cette entrevue avait été abordé.

- Je vais te laisser te reposer. Nous nous verrons au repas.

La main sur la porte, il se tourna vers elle pour lui adresser son sourire le plus charmeur, mais également le plus moqueur avant de quitter la pièce.

- Au fait Erin ? Je te tolère aussi.

Elle saurait parfaitement traduire qu’il lui rendait le compliment. Tout comme elle saurait qu’il ne cesserait jamais de la taquiner à ce sujet.

lumos maxima

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truth is, i missed you

maxton & erin

Maxton avait cette facilité à me comprendre et à déceler dans mes silences les réponses que je ne formulais pas, cette aisance à me retourne une ironie aussi mordante que la mienne, ce talent pour que mon sourire s’étire, féroce. Il faisait ressortir ce qui me plaisait le plus, chez moi : une brutalité impulsive et un feu qui ne demandait qu’à brûler. Parce que, au fond, des flammes similaires le consumaient. Des flammes plus glacées, mais des flammes tout de même, et elles ressortaient dans son regard insolent quand nous nous retrouvions tous les deux. Il les masquait bien mieux que moi, mais je n’avais jamais aimé travestir mes émotions. Raison pour laquelle je préférais l’intimité de ces conversations aux mondanités qui ôtaient toute sincérité à mon entourage. Trrrop tarrrd, l’envie m’est passée. Envie qui n’avait jamais existé, mais dans le jeu de nos sarcasmes, je poursuivais la comédie avec un amusement tout éveillé. Tandis que je pianotais du bout des doigts un air appris par coeur sur le bois du meuble contre lequel j’étais appuyée, je penchai légèrement la tête, comme pour mieux ancrer mon regard opalin dans le bleu profond de celui du Gryffondor. D’un compliment qui tenait de l’insulte à l’égard de sa jumelle, il parvenait à en tirer un trait espiègle qui ne pouvait que me faire sourire un peu plus largement, un rire s’échappant même d’entre mes lèvres retroussées. Sache que le monde en est rrravi. En ce qui me concerrrne, du moins. Entre échanger avec Maxton ou se retrouver face à Bluebell, le choix était vite fait… encore qu’il dépendait de mes humeurs. Au plus noires de mes pensées, je pouvais préférer rencontrer cette vipère afin de cracher mon propre venin sur ses traits agaçants. Le reste du temps, croiser la route de mon camarade et ami était bien plus agréable, sur tous les plans. Nos plaisanteries étaient de bon ton, aussi agréable que toutes ces conversations volées à la nuit que nous nous offrions dans les dédales de Poudlard.

Tu ne trrrouves pas que la crrruauté me sied au teint ? Moi, si, je la cultive donc prrrécieusement répliquai-je sur le même ton, rabattant une mèche brune dans mon dos d’un geste hautain, comme on balaie une poussière insignifiante. Maxton n’était pas insignifiant, mais les mots avaient une valeur et verser dans un sentimentalisme écoeurant ne me faisait pas envie. De toute façon, il l’avait entendu et imprégné, j’étais certaine d’avoir le droit à l’avatar de cette phrase pendant des mois encore, voire des années. Je ne m’en priverai pas, à sa place, ce qui me certifiait qu’il ne le ferait pas non plus.

Et puis les taquineries disparurent pour laisser place au plateau d’échec que nous contemplions, sourcils froncés, depuis bien trop longtemps. Le jeu avait avancé, les pions avaient bougé, en fait, la partie touchait à sa fin, nous tombions d’accord là-dessus, tous les deux. Mais nous avions la même vision quant à l’avenir : une nouvelle partie commencerait. Qui prendrait-elle en otage, cette fois, le destin nous le dirait, mais un sourire fauve étira néanmoins mes lèvres. Qu’importe le jeu, au fond. Si nous voulions faire entendre notre voix, nous savions qu’un allié n’était qu’à portée de doigts. Mes frères avaient toute mon estime et mon entière confiance, ils étaient ma priorité en cas de nécessité. Pour s’amuser un peu… c’était encore différent, Maxton comblant bien plus mes attentes à ce niveau-là. Finnbjörn préférait la jouer solitaire, ses tactiques ne m’incluaient que quand cela l’arrangeait. Je savais qu’avec le Gryffondor, nous pouvions trouver chacun notre compte dans une alliance qui défiait les années. Laissons-nous la possibilité de changer d’avis. De toute façon, les choses rrrestent identiques pourrr toi et moi. Nous ne ferrrons jamais rrrien qui puisse nuirrre à nos jumeaux, mais en cas de besoin, nous savons quel allié nous est constant fis-je en me détachant de mon appui et en faisant un pas dans sa direction, un sourire malin sur le visage, mes paroles faisant écho à celles qui avaient résonné dans la salle sur demande. Nos familles étaient unies, nous l’étions tout autant, à moins qu’une partie ne nous force à nous battre l’un contre l’autre pour le bien de celui ou celle qui tenait une place si importante à nos yeux.

Probablement aurions-nous plus de choses à nous dire une fois que nous aurons fait le point avec nos jumeaux, pour l’instant, mes informations étaient inexistantes, et les siennes n’étaient pas des plus récentes non plus. Dans un sourire mauvais, je ne pensais déjà plus qu’aux traits pincés de Bluebell Sherwin quand elle s’était rendue compte de la présence de Carla. Je me contentais de hausser les épaules, mon sourire plus aiguisé que jamais. Mes convenances à moi sont parrrfaitement rrrespectées, en tout cas. Maxton s’agita alors, délaissant le mur pour se rapprocher de la porte d’entrée, vers laquelle je fis quelques pas pour me porter à sa hauteur. Mon regard quitta un instant son visage pour se poser sur la pendule fixée sur le mur mais ses derniers mots m’arrachèrent à ces aiguilles qui avaient bien bougé depuis que je m’étais assoupie. Son sourire était charmeur et se reflétait jusque dans ses yeux bleus, comme pour mieux souligner toute la moquerie de son ton. Charmeur et moqueur, voilà deux adjectifs qui lui seyaient particulièrement bien. C’était autant un compliment qu’une pique taquine qui en laissait présager bien d’autres, mais je ne m’en offusquai pas, préférant un rire souverain alors que mon bras s’enroulait autour du sien. Tu sais quoi, c’est bientôt l’heurrre du déjeuner, tolèrrre-moi jusqu’au salon, je me suis assez rrreposée. Et sans plus le consulter, je l’entrainai dans le long couloir tapissé de rouge dont les portraits avaient rythmé mon enfance.

electric bird.

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