Soleil, jonquille et mimosa ▬ feat. Benjamin L. Duncan

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Une journée idéale ?

Lunox & monsieur Duncan

après l'effort, le réconfort ▬

Le soleil, puissant et encore loin de l'ouest, recouvrait le territoire de ses délicats rayons printaniers. Pas un nuage ne venait contraster avec l’azur qui se reflétait dans le ciel. Le vent se faisait rare, de faibles brises osant quelques fois faire vibrer les végétations alentours, offrant une ambiance des plus chaudes pour un mois d’avril. Le temps était idéal pour s’échapper des murs froids du château et surtout ceux des cachots, véritables souterrains humides et obscurs. Un bon nombre d’élèves flânait déjà à l’air libre, mettant les cours aux fins fonds des oubliettes et profitant simplement d’un instant de zèle en bonne compagnie. Les rires et les conversations fortes prenaient le dessus sur le chant harmonieux des oiseaux, leurs sacs de cours laissés à l’abandon à leurs pieds à l’exception des rares plus érudits qui aimaient autant enrichir leur savoir à l’intérieur de l’école qu’au beau milieu du parc où fleurissaient pourtant des parties intéressantes de bavboules ou de batailles explosives.

Des cheveux de blé ondulés filaient à toute allure à travers le grand pont qui menait vers les serres, le lac, la cabane du garde-chasse et la forêt interdite. Vêtue d’une simple t-shirt aux couleurs de Serpentard, d’une jupe noire et de chaussures assorties, Lunox était heureuse de pouvoir se dégourdir les jambes après un cours soporifique d’Histoire de la Magie. Elle avait lutté ardemment pour ne pas s’endormir à la fois parce que le chapitre ne l’intéressait pas et également parce qu’elle avait englouti un repas suffisamment calorique pour que sa digestion ne lui pompe quasiment toute son énergie. Désormais, elle se sentait plus légère et puisqu’il était l’heure du goûter, elle s’était permise le plaisir gustatif d’un donut à la vanille qu’elle avait conservé dans un mouchoir depuis le petit-déjeuner. Il était un peu plus sec que lorsqu’il était apparu sur la table mais cela ne semblait pas lui avoir posé de problème puisqu’elle l’avait englouti en moins de deux minutes avant de franchir les Grandes Portes de chêne.

Courir était l’une de ses activités physiques préférées puisque ici, elle avait encore plus d’espace que dans les jardins du domaine familial. La jeune fille aimait admirer l’étendue du Lac et des collines qui l’entouraient. Cela la fascinait surtout au moment du crépuscule où elle trouvait que la vue du ciel rosé rendait le paysage encore plus époustouflant. Alors, elle courait encore et encore, parfois seule ou accompagnée. Dans ce cas présent, elle voulait se défouler seule et elle s’était même établie un petit parcours impliquant plusieurs tours au bord de l’eau avant de sprinter à toute vitesse le long de la pente abrupte qui menait jusqu’à la cabane du garde-chasse. Des élèves qui l’apercevaient au loin la trouvaient sans doute folle et amusante, un spectacle qu’ils pouvaient penser risible mais qui, cependant, les occupait bien depuis leur banc.

Quand l’intensité de l’effort fut à son apogée, la fatigue se fit ressentir. La première année ralentit progressivement son rythme, victime de sa respiration qu’elle ne contrôlait pas correctement et de son endurance qui faiblissait. Couverte de sueur, elle n’avait qu’une envie : celle d’ôter son t-shirt. Malheureusement, elle ne pouvait pas le faire alors Lunox se contenta d’agiter frénétiquement sa main devant son visage pour rafraîchir un peu son visage. Puis, penchée vers l’avant, les mains posées sur ses genoux tendus, elle prit le temps de se calmer pour reprendre une respiration plus lente et régulière. Son faciès rouge pivoine n’était pas prêt de libérer ses couleurs. Ses yeux balayèrent l’environnement qui lui faisait face et elle remarqua au loin le garde-chasse qui paraissait s’occuper du petit potager situé devant sa cabane. Et si Lunox allait lui dire bonjour ? Peut-être qu’il l’avait aperçue plusieurs fois en train de dévaler la pente et de faire des aller-retour depuis tout à l’heure ? En tout cas, elle était bien déterminer à lui faire une courtoise visite. Le pauvre ne devait pas voir beaucoup de monde puisqu’il ne vivait pas au château et ne faisait que s'y restaurer.

Redressant sa posture, elle reprit sa veste qu’elle avait laissé au sol le temps de sa récupération et elle entreprit une marche lente vers sa destination. Cela lui faisait du bien de marcher. Ses jambes le réclamaient, elle le sentait.

— Bonjouuuuur, monsieur le garde-chaaaasse ! S’exclama-t-elle joyeusement alors qu’il lui restait un peu plus d’une dizaine de mètres à parcourir.

Son sourire grandissant et son esprit baigné de bonnes volontés étaient prêts pour engager une nouvelle discussion. Lunox ne lui avait encore jamais parlé mais elle pensait sincèrement que c’était l’occasion de pouvoir faire connaissance avec ce nouveau garde-chasse. Elle espérait qu’il serait aussi sympathique que l’ancien qui répondait souvent à ses questions diverses.

S’approchant de @Benjamin L. Duncan, l’enfant leva les yeux vers lui et reprit la parole :

— Vous aussi, vous profitez du beau temps, c’est ça ? Il est super beau votre potager même si je n’aime pas les légumes. Au fait, je m’appelle Lunox ! Je suis en première année, à Serpentard. Euh, vous aimez les légumes, vous ?

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C’était le printemps, avec ses fleurs, ses arbres, sa verdure qui renaît. Avec ses amourettes enfantines aussi, ses élèves déambulant dans le parc, main dans la main, le coeur battant à l’unisson. C’était la saison des ballades dans le parc, des baignades dans le lac, des pique-nique à la lisière de la forêt. Beaucoup d’élèves délaissaient ainsi les salles de cours et la bibliothèque pour prendre l’air, prendre le soleil qui dardait ses rayons lumineux, plus fort qu’à l’habitude. À Whitby ç’aurait été l’ouverture de la pêche pour de nombreuses espèces, la plie, le merlu, l’églefin. De quoi allier sortie au soleil et activité professionnelle à une époque où les touristes ne sont pas encore tout à fait légion. Willem devait avoir un peu de boulot avec son phare, les premiers touristes se pointant généralement autour du week-end de Pâques qui, cette année, avait été radieux.
C’était le moment de m’occuper de mon potager. Il fallait retourner la terre, faire des semis, planter mes graines de courgette. Mais c’était au-delà de l’entretien de routine puisqu’il fallait que je me préoccupe aussi de replanter des potirons, maintenant qu’ils avaient été détruits par les limaces géantes de Blaze. Une bêche à la main, j’étais donc occupé à retourner consciencieusement la terre de mon potager quand je me rendis compte qu’une jeune fille s’était approchée de ma cabane. Nul difficulté à la remarquer d’ailleurs, elle ne cherchait pas du tout à être discrète puisqu’elle m’adressa un bonjour plus qu’enthousiaste. Un grand sourire aux lèvres, les cheveux détachés, trempés comme si elle sortait de la douche, elle venait à ma rencontre, le pas lent. À la réflexion, es cheveux étaient certainement plus trempés de sueur que d’eau, au vu de son souffle légèrement saccadé elle devait sortir d’un certain effort physique.
Je n’avais pas l’habitude de recevoir de la visite mis à part celle de Blaze mais il n’était pas le bienvenu, et évidemment d’Hilary qui venait régulièrement prendre un thé et une mousse au chocolat dans ma cabane. Que me voulait cette jeune fille, visiblement à Serpentard comme me le montrait son tee-shirt dégoulinant ? Était-ce les nouvelles manœuvres de Blaze pour me jouer des tours, détourner mon attention ? Pourtant la jeune fille semblait sincèrement enthousiaste, désireuse d’engager la conversation. Je décidai de rester sur mes gardes, certes mais de me montrer très accueillant, après tout ce n’était pas souvent qu’on faisait l’effort de me rendre visite. Elle m’apprit très vite s’appeler Lunox et être en première année à Serpentard. Elle devait être soit très sociable, du genre à entamer la discussion avec n’importe qui, soit assez isolée et désireuse de trouver un interlocuteur.
« Eh bien, bonjour Lunox, enchanté de faire ta connaissance. Il fait beau aujourd’hui, tu étais sortie faire un peu de sport ? Oui, je profite du temps pour replanter mes potirons, ils ont été attaqués par des limaces récemment, elles ont tout dévasté… Tu as tort de ne pas aimer les légumes, personnellement j’apprécie beaucoup les courgettes, je vais en planter d’ailleurs. Mais le meilleur c’est les plantes qu’on peut aller cueillir dans la forêt, les baies et autres racines. Ça va, tu te plaît ici ? Qu’est-ce qui t’amène à me rendre visite ? »

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Lunox & monsieur Duncan

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Le garde-chasse ne se montrait pas fermé face à l’approche de Lunox. Il aurait certainement pu l’envoyer paître puisqu’une discussion futile avec un enfant de douze ans serait susceptible de le ralentir dans ses activités de jardinerie mais Mr Duncan semblait tolérer sa présence pour l’instant. Il disait même être enchanté de faire sa connaissance. Lunox sourit, contente que cette personne soit disposée à lui parler malgré le travail qui l’attendait. La besogne paraissait être cruellement ennuyante et fatigante aux yeux d’une élève de première année et elle ne comprenait pas pourquoi le garde-chasse devait passer autant de temps à s’occuper des légumes alors que ce n’était pas bon du tout. Qu’était-ce donc cette passion commune que partageaient les adultes en général ? Elle aurait tant voulu pouvoir cultiver des champs de bonbons avec sa grand-mère si la magie le permettait, plutôt que de l’observer de loin avec déception, en train de bécher la terre pour des futures tomates et carottes. En y réfléchissant, elle avait rarement trouvé les loisirs de sa grand-mère fascinantes ou intéressantes, mis à part les tours de magie qu’elle pouvait faire. Lunox ne comprenait décidément pas les adultes.

— Oui, j’adore courir car c’est super grand l’enceinte de Poudlard ! C’est la première fois que je peux aller partout sans me faire gronder, répondit-elle à la première question avec spontanéité. Ma grand-mère n’aurait jamais voulu que j’approche d’aussi près un Lac aussi géant !

Partout était un bien grand mot. Évidemment, Poudlard, tout comme chaque académie, possédait son propre périmètre et ses limites mais si l’on ne considérait pas la Forêt Interdite, la falaise rocheuse qui donnait droit vers les profondeurs du Lac et les collines inaccessibles, le vaste terrain disponible et légal d’accès restait suffisamment vaste pour que l’on y trouve son coin de bonheur ou des endroits permettant de se défouler.

Le garde-chasse lui déclara ensuite qu’il devait refaire ses plantations pour la malheureuse raison que des limaces avaient attaqué le terrain. Les yeux de Lunox s’écarquillèrent légèrement à cette annonce et elle baissa les yeux vers la terre fraichement bêchée. On lui avait dit un jour que c’était ça la chaine alimentaire et que le seul moyen de lutter contre les nuisibles était d’utiliser un produit spécial. Elle se souvenait vaguement du nom du fameux produit évoqué par le professeur de botanique.

— Elles devaient avoir faim, les pauvres, dit-elle avec une pointe de compassion pour ces petites bêtes avant de reprendre avec un petit air de dégoût. Je sais pas comment vous faites pour avaler tous ces légumes, n’empêche. Il y a pas de sucre dedans ! Les fruits et les bonbons, c’est plus agréable sur la langue. Oh, des baies, vous dites ? Celles d’ici ont quel goût ?

Lunox n’avait jamais visité une seule véritable forêt au cours de sa vie. Au mieux, elle avait accompagné sa grand-mère dans un petit bois afin de cueillir des champignons mais les bois n’étaient pas exactement la même chose qu’une forêt. La densité était bien différente. En tout cas, une chose était sûre : la première fois que la fillette eut entendu parler de la Forêt Interdite — le lendemain de sa répartition — elle avait ressenti à la fois de la curiosité et de la répulsion pour ce lieu où résidaient apparemment des bestioles horribles et sanguinaires. Avec les mois néanmoins, elle avait fini par s’y intéresser un tout petit peu.
Toujours sur le même ton, Mr Duncan lui demanda si elle se plaisait à Poudlard et ce qui l’amenait par ici. Lunox jeta un regard curieux à la cabane de ce brave homme, détaillant la structure de pierres qui la composait. Cela n’avait rien de bien luxueux et de commun aux lieux qu’elle connaissait mais ce trait atypique et simple lui plaisait bien.

— J’adore Poudlard. Grand-mère n’aime pas du tout et elle voulait m’envoyer à Durmstrang car ici c’est dangereux mais finalement, je me plais bien ! Dit-elle en riant doucement. Et je voulais simplement vous dire bonjour, monsieur le garde-chasse. D’ailleurs, euh… ça vous dérange pas de...euh… de pas être avec tout le monde dans le château ?

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Une jeune fille étonnante, vraiment. Lunox ne ressemblait à personne que je connaissais. Elle avait toute la fraîcheur d’une fille de 11 ans qui découvrait la vie, le monde, les gens. Une jeune fille qui abordait un adulte inconnu sans raison, sans demandes particulières, juste pour faire connaissance et parler de sa détestation des légumes. Dans d’autres circonstances, j’aurais pu la rabrouer, lui dire tout simplement que j’avais du travail. Mais il fallait croire que l’air printanier me rendait moins bougon que d’habitude, que le soleil qui baignait mon potager m’incitait à un peu de paresse et de légèreté. Je m’étais donc pris au jeu de la discussion, posant ma bêche dans l’herbe et m’approchant d’elle. C’était donc avec un grand sourire que je l’écoutait me vanter l’étendue de Poudlard, que je connaissais d’ailleurs mieux qu’elle puisque je m’en occupais tout les jours.
« Oui c’est immense et encore tu n’as pas l’occasion d’avoir accès à la forêt… Si un jour tu prends l’option de soins aux créatures magiques, tu pourras en voir un petit bout. » Ou si elle faisait une escapade nocturne mais je n’allais pas lui dire, j’espérais bien ne jamais me retrouver devant des élèves partis en ballade, encore moins des premières années. Quand elle me parla de l’immensité du lac je lâchai d’un air un peu mélancolique : « Tu ne connais pas la mer... » Avant de me reprendre : « Ah bon, ça lui faisait peur, à ta grand-mère ? »
Etonnante était bien le mot : la voilà qui plaignait les limaces géantes de Blaze. D’accord elle ne savait pas qu’elles étaient géantes, ni qu’elles avaient été ensorcelées par Blaze mais quand même, Lunox devait avoir un sérieux grief contre les légumes. « Eh bien, tu n’aimes vraiment pas les potirons, toi ! Je ne relève même pas ce que tu me dis sur les fruits et les bonbons… Les baies ? Eh bien je pense que c’est comme toutes les baies, ici on trouve pas mal de mûres, enfin je ne suis pas tout à fait sûr que ce soit des mûres mais ça y ressemble bien. » Cette petite avait l’air bien curieuse et quelque chose me disait qu’elle n’avait jamais vraiment dû courir dans une quelconque forêt, sur une colline ou une plage déserte. Elle semblait la caricature de la jeune fille trop maternée par ses parents. Ou par sa grand-mère ? Elle en avait parlé comme d’une figure d’autorité, comme on parle de ses parents en temps normal. Mais après tout, ça la concernait, elle n’avait pas à m’en parler si elle ne le désirait pas, j’hésitais bien toute discussion à ce sujet, moi. Puis elle me parla de Dumstrang, intéressant… « Durmstrang ? Mais… pourquoi ? Tu as des liens avec les pays slaves pour pouvoir y aller ? Pardon, je suis peut-être trop curieux, si tu ne veux pas me répondre n’hésite pas à me le dire. » Je ne voulais pas qu’elle me trouve désagréable ou intrusif. Elle s’étonna enfin de ma solitude. « Oh tu sais j’y suis habitué, ça ne me pèse pas et puis, si je veux de la compagnie je n’ai qu’à aller dans la salle des professeurs discuter avec des collègues. » Je devais pourtant avouer que je l’avais peu fait depuis mon arrivée.

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Lunox & monsieur Duncan

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Lunox enviait un peu cette grande liberté qu’offrait le métier de garde-chasse à Mr Duncan. Il devait connaître tout ce territoire, chaque recoin banal ou étrange, chaque chemin magique, l’emplacement des créatures sauvages et peut-être même plus ! Elle en était persuadée. Elle le voyait comme un ancêtre dont l’âge et l’expérience l’avaient nourri de connaissances et de sagesse. A la différence d’un professeur, le vécu de cet homme avait certainement été ponctué d’aventures et de découvertes animales et géographiques fantastiques. C’était tout à fait le genre de choses dont l’enfant rêvait ; les recherches, l’exploration et l’exotisme.

Il lui parlait d’un accès à la Forêt Interdite qu’elle pourrait obtenir en choisissant l’option de Soins aux Créatures Magiques. L’enfant n’était pas au courant de toutes les options à Poudlard mais elle cette information était très bonne à savoir.

— Soins aux créatures magiques ? Je ne connaissais pas mais ça m’a l’air chouette. Je pourrais la choisir quand, cette option ? Et on étudie quoi comme créatures ? Demanda-t-elle rapidement, son enthousiasme redoublé.

Ces questions stimulaient son imagination de rencontres avec des licornes, d’élevages d’animaux gentils et adorables, de l’étude risquée mais bien encadrée de loups-garous ou d’autres créatures machiavéliques. Cela lui faisait un peu peur mais imaginer tout cela dans sa tête rendait justement les choses moins effrayantes que de les vivre en réalité. Il devait y avoir tant de choses à découvrir au-delà de cette cabane, dans les profondeurs sombres et mystérieuses de la Forêt Interdite. Mais chaque chose en son temps puisque Lunox commençait à peine à se faire à l’incroyable panorama offert par le Lac Noir. Un paysage qui aurait pourtant tout à envier de la mer mais comme le garde-chasse l’avait si bien deviné, la petite n’avait jamais été à la mer. Les seules vacances qu’elle avait passées avec des amies et leurs parents ne s’étaient jamais déroulées au-delà de la civilisation sorcière. Il y avait toujours eu des maisons, des rues et des boutiques magiques à proximité.

— Grand-mère a très peu de peurs mais je pense qu’elle craint que je ne fasse une bêtise si je m’approche des endroits risqués.

Lunox se gardait bien de lui dire que des bêtises, elle en avait commis un paquet depuis sa petite enfance, que ce soit au manoir ou dans le restant du domaine. Elle n’avait pas envie de passer pour une fille turbulente et pénible alors que c’était la première fois qu’elle faisait la connaissance de Mr Duncan. Pour le moment, elle l’appréciait plutôt bien et ce, même s’il aimait les légumes et pas du tout les bonbons. Les mûres, en tout cas, devaient être au moins un aliment sur lequel ils tomberaient d’accord.

— Mmmh, des mûres ! En tarte, ça doit être délicieuuux.

Son ventre en gargouillait d’envie. Sa grand-mère, Cordelia, lui avait donné des cours de cuisine, très tôt. Rien de bien compliqué au vu de l’âge qu’elle avait mais la petite avait appris à réaliser quelques pâtisseries à deux. C’était une activité qui lui plaisait beaucoup et c’était sûrement ce goût pour la cuisine qui la rendait si motivée et intéressée par l’art des Potions. Dans un sens, c’était assez similaire.

Le garde-chasse l’interrogea par la suite au sujet de Durmstrang, école très célèbre dans laquelle Lunox aurait pu avoir suivi sa scolarité si ses parents avaient donné leur accord à Cordelia. Il lui demanda si elle avait des liens avec les pays slaves, ce qui justifierait pas mal ce choix tant voulu. Mais il n’en était rien.

— Oh, ne vous excusez pas. Moi aussi, on dit que je suis très curieuse, répondit-elle d’un air sceptique comme si elle se demandait pourquoi on lui reprochait ce trait de caractère. Alors, en fait, ma grand-mère a été professeur à Durmstrang. Professeur de défense contre les forces du mal. Elle n’arrête pas de me dire que c’est la meilleure école d’Europe et que je m’en sortirais mieux là-bas qu’ici parce qu’ici, c’est super dangereux. Il y a eu des mangemorts, un incendie, des morts, des blessés… Elle a envoyé plein de lettres à la directrice de Poudlard pour me désinscrire mais ça n’a pas marché.

La Serpentard ne regrettait pas que ces tentatives aient échoué. Au contraire, elle se plaisait dans cette école où elle était certaine que tous les élèves partageaient la même culture qu’elle. Ne connaissant rien du grand nord, de leur langue et de leurs coutumes, l’intégration n’aurait indubitablement pas été la même. Peut-être que cela aurait pris plus de temps. De plus, elle s’était fait ici des amis et des camarades très sympathiques qu’elle n’échangerait pour rien au monde contre des autres élèves.

Il fallait croire que le garde-chasse aussi s’était fait à sa vie à Poudlard. Il était certes quelques fois ami avec la solitude mais il pouvait facilement trouver la compagnie s’il le souhaitait.

— Oui, c’est vrai. Je n’avais pas pensé à ça. Les professeurs sont plutôt gentils en plus… enfin sauf le professeur Thorstein. Elle est méchante et sévère ! Elle nous prend pour de bons petits soldats alors qu’on est pas dans une brigade magique.

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Lunox était entre le rayon de soleil et le moulin à paroles. Rayon de soleil de par son enthousiasme communicatif à l’égard de tout ce qu’elle voyait, mis à part les légumes. Moulin à paroles parce qu’on sentait qu’une fois lancée il était difficile de l’arrêter dans son flot de question entrecoupé de remarques émerveillés, un flot qui pourrait sans doute se révéler fatiguant à la longue. Mais chaque chose en son temps, pour l’instant, même si j’essayais de ne pas trop le montrer, j’étais plutôt ravi d’avoir de la compagnie. Elle découvrait tout et c’en était touchant. Par exemple, j’étais étonné qu’elle n’ait pas entendu parler des soins aux créatures magiques.
« Oui, c’est une des options qu’on peut choisir en troisième année. On y étudie de nombreuses créatures, je ne sais pas exactement lesquels, il faudrait demander au professeur ou à son assistant. Ce que je sais c’est que Poudlard a de nombreuses créatures. Évidemment il y a notre cher calamar mais nous possédons des licornes, des noueux et bien d’autres créatures que tu découvriras peut-être un jour. »
Elle me parla un peu de sa grand-mère, encore une fois sans mentionner ses parents.
« Parce que ça t’arrive souvent de faire des bêtises ? » lui demandais-je malicieusement, me doutant que cette jeune fille était du genre à ne pas tenir en place bien longtemps, ce qui avait peut-être rendu difficiles les premières années de son éducation. Je n’osais par contre pas encore lui demander ce qu’il en était de ses parents. Chaque chose en son temps. Par contre nous tombions d’accord sur les mûres. D’ailleurs elle semblait avoir faim et moi aussi mon ventre commençait à se faire entendre. Le grand air ça creuse ! J’avais justement des fraises qui venait de pousser dans un coin de potager. J’en donnerais une partie à Hillary mais en attendant de la voir, je pouvais bien en proposer quelques unes à Lunox. « Tu aimes les fraises ? J’en ai planté quelques unes et normalement ça y est, elles sont mangeables. »
La discussion reprit ensuite sur ce qu’elle m’avait dit de ses liens avec Durmstrang. Ainsi donc sa grand-mère y avait enseigné la défense contre les forces du mal et craignait que sa petite fille aille à Poudlard du fait des récentes attaques. « Ah d’accord, intéressant. Je comprends qu’elle s’inquiète mais j’espère qu’elle ne t’a pas fait trop peur à ce sujet. En tout cas, sache que nous mettons tout en œuvre pour votre sécurité. » Elle ne pouvait pas deviner derrière mes paroles la culpabilité que je ressentait vis-à-vis de tous ceux qui avait été victime de ces attaques dans les dernières années. Je m’en sentait en partie responsable du fait de mon passé, du fait de ma participation active dans la propagation de ces idées haineuses à certaines périodes de ma vie.
Elle était curieuse et bavarde. Au point de me dire qu’elle trouver la professeure Thorstein trop sévère et méchante. J’esquissai un sourire, voulant un peu calmer ses ardeurs. Ça ne se faisait pas de parler ainsi d’un professeur, encore moins à un adulte. « La professeure Thorstein a ces méthodes d’enseignement et son caractère mais je suis sûr qu’elle saura bien vous enseigner sa matière. »

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Lunox & monsieur Duncan

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La troisième année semblait bien loin. Il serait nécessaire de valider deux ans d’études avant de pouvoir entrer en classe de créatures magiques. Lunox trouvait cela un peu injuste et elle se demandait pourquoi il n’était pas possible d’enseigner les bases au première année. Elle pensait qu’étudier un petit animal inoffensif pourrait tous leur plaire. Cependant, elle mettait de côté l’idée qu’une certaine maturité était attendue des étudiants afin de ne pas stresser les bêtes peuplant le château. Des enfants surexcités n’était sûrement pas l’idéal.

La liste du garde-chasse lui plaisait, quoi qu’il en soit. L’idée de pouvoir un jour rencontrer des licornes ou même le calamar géant la réjouissait d’avance. Quant aux noueux…

— Ca a l’air génial ! Mais c’est quoi des noueux, au juste ?

Elle tentait d’obtenir une réponse rapide mais elle envisageait déjà de rendre visite au professeur de cette matière un peu plus tard dans la semaine. Elle en profiterait pour poser les questions auxquelles le garde-chasse n’aurait pas été en mesure de répondre. Elle garda dans un coin de sa tête l’existence d’un assistant qui pourrait également l’aider.

Ils parlaient maintenant des vastes étendues qui entouraient le château. Lunox se sentait bien plus libre, loin des règles imposées par celle qui l’avait éduquée depuis toute petite et peu concernée par l’autorité des adultes d’ici qu’elle connaissait à peine. Elle recevait néanmoins souvent des lettres de sa grand-mère qui voulait s’assurer qu’elle n’en faisait pas à sa tête comme au manoir. Des bêtises qu’elle pourrait reproduire ici mais certainement au fur et à mesure du temps. Pour l’heure, elle ne s’était contentée que de quelques explorations innocentes avec Misha et Liam. Quant aux punitions qu’elle avait effectuées, elles lui avaient été donnée tout simplement parce qu’elle était dissipée dans certains cours.

— Non, j’en fais pas souvent, mentit Lunox en regardant distraitement le potager de Mr Duncan. Ou alors, ce n’est pas de ma faute.

Evidemment que la jeune fille ne tenait pas souvent en place et c’était même elle qui entraînait les autres dans ses envies de vagabonder là où il ne fallait pas poser les pieds. Les enfants que gardaient sa grand-mère lui en avaient parfois voulu de s’être fait prendre en flagrant délit à cause d’elle. Mais Lunox n’en démordait pas et continuait à commettre des erreurs. Elle était trop intrépide, trop impulsive.
La fillette était également gourmande. Mr Duncan l’interrogea au sujet de son éventuel goût pour les fraises. Il en avait planté dans les alentours et elles étaient apparemment mûres. Lunox tourna la tête vers l’adulte, les yeux légèrement écarquillés par cette bonne nouvelle. Des fraises. Elle adorait ça ! Elle porta aussitôt une main sur son ventre et elle crut même sentir un gargouillement s’y échapper. Après une séance de sport aussi intensive que celle-là, elle ne disait pas non à une petite collation fruitée.

— Oui, j’aime beaucoup ça ! Allons-y !

La Serpentard reprit la marche, laissant le soin au grand homme de la guider vers ses fraisiers. Cela faisait longtemps qu’elle n’en avait pas mangé et elle avait hâte d’avoir à nouveau cette merveilleuse saveur en bouche. En chemin, ils discutaient de la raison pour laquelle Cordelia n’avait pas voulu que Lunox ne passe sa scolarité à Poudlard. Le garde-chasse comprenait cette crainte fondée sur les différentes attaques subies par le château mais il répondit de manière rassurante, affirmant à la petite que le personnel ferait le nécessaire pour assurer la sécurité des apprentis sorciers. Lunox se doutait que de telles paroles n’auraient jamais suffi à convaincre sa grand-mère de la fiabilité du personnel — elle les jugeait toujours incompétents — mais cela semblait lui convenir à elle pour l’instant. Depuis sa rentrée, rien de bien fâcheux ne s’était encore produit.

— Ca m’a un peu stressée au départ, quand elle répétait qu’on allait tous droit vers la mort en allant à Poudlard… ou quelque chose comme ça. Mais mes parents me rassuraient dans les lettres qu’ils m’écrivaient. Ah oui, en fait, mes parents travaillent à l’étranger. C’est pour ça qu’ils m’écrivent. Alors, eux, ils me disaient que tout irait bien et que la nouvelle direction ne laisserait plus passer une nouvelle tra… (elle hésitait le mot, son index sur la lèvre) tra-gé..tragédie ! Et jusque maintenant, ça a l’air d’aller.

Comme tout le monde, elle espérait que l’école allait prospérer encore longtemps. Ce serait bien triste si l’Angleterre perdait son académie. Les élèves seraient contraints d’étudier dans d’autres pays et il n’était pas dit qu’ils étudieraient dans de bonnes conditions, avec de nouvelles langues à maîtriser et des cultures à assimiler.

La conversation se relança au sujet du corps enseignant et plus précisément autour du professeur Thorstein, que la tête blonde n’appréciait pas. Toutefois, Mr Duncan semblait avoir un avis plus nuancé à son propos. Lunox fixait à présent les fraisiers à proximité lorsqu’elle entra dans une petite réflexion concernant les compétences de l’experte en défense contre les forces du mal. Il était vrai qu’elle connaissait beaucoup de choses et elle était très douée mais ce caractère ne convenait pas à beaucoup d’élèves. La Serpentard n’était pas la seule à ressentir de l’amertume à son égard.

— Elle nous apprend plein de choses et on fait beaucoup de pratique. Ca, c’est très bien et c’est ma matière préférée en plus mais je ne comprends pas pourquoi elle se sent obligée d’être aussi dure ! Les autres professeurs sont sympas et ça nous permet de nous détendre en classe. Il y a beaucoup de choses à écrire et à retenir et c’est plus facile quand l’ambiance est tranquille.

Les cours n’étaient pas faits pour se détendre, ni pour se reposer sur ses lauriers mais Lunox avait une conception de l’école différente que celle que pourrait avoir un élève studieux, sérieux et ordonné. Elle trouvait avoir assez donné avec sa grand-mère, grande sorcière à la poigne de fer, qui s’était occupée de son éducation et de l’apprentissage des choses basiques telles que les mathématiques ou la littérature magique.

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