way down we go

Il est parti. Darius est parti. Il m'avait promis qu'il ne m'abandonnerait plus et pourtant il n'a eu aucun mal à revenir sur sa promesse. Pourquoi ? À cause de ce qu'il était devenu. 6 mois après son retour, alors que les choses semblaient presque redevenues comme avant, il m'a avoué son secret, la raison de son absence d'un an. L'accident qui a chamboulé sa vie et qui l'a littéralement transformé. Choquée sur le coup, je ne sais toujours pas comment prendre la nouvelle. Je savais que quelque chose était différent chez lui. Je le connaissais trop bien. Mais un vampire ? Je n'aurai jamais cru... Mais est-ce que c'est vraiment important maintenant qu'il est parti ? Maintenant qu'il m'ignorera et qu'il continuera sa vie de créature ? Qu'est-ce que j'étais vraiment pour lui ? Une amie ou un simple bout de viande auquel il essayait de résister ? Les questions se multiplient mais je n'ai pas pour autant de réponses.

Si le départ précipité de Darius était mon seul problème, ma vie serait bien trop simple. Ajoutez à cela l'absence de réponse quant aux événements tragiques de l'année dernière, le danger vraisemblable qui semble toujours planer autour de nous comme en atteste Noël, mon incapacité à me servir correctement de ma baguette magique qui semble bien déterminée à ne plus me répondre, Savannah qui ne va pas bien et qui n'est pas auprès de moi... Les nuits sont longues, sans sommeil. Je me sens vulnérable à tout moment du jour et de la nuit. J'ai constamment l'impression qu'un étau se resserre sur moi. Je n'arrive pourtant pas à en parler. Ni à Brooklyn que je ne veux pas inquiéter, ni à Casey, ni à Hadley et encore moins à Isidore. Je veux continuer de me montrer forte. Il ne manquerait plus qu'on me prenne pour une petite chose fragile après tout ce que j'ai dû endurer.

Malheureusement, cela affecte mon attention en cours. La voix des professeurs ne me parvient presque pas, ou alors seulement pas bribes incompréhensibles. Ma nouvelle place se trouve au fond de la salle maintenant, ce qui a fortement surpris les enseignants dans un premier temps mais comme toujours ils s'en sont accoutumés. Cette année est d'autant plus difficile que je me retrouve à me battre contre moi même pour ne pas céder. Et ce n'est pas Darius qui a rendu les choses plus faciles. Aujourd'hui en particulier, l'étau semble se resserrer sur ma poitrine. Les questions tournent en boucle dans ma tête, sans réponses, à m'en donner le tournis. À tel point qu'il ne faut pas longtemps avant que ma respiration se fasse plus difficile, plus hachée. Je n'arrive plus à reprendre mon souffle. Mon regard se braque sur la porte. Elle est fermée. La seule issue est fermée, nous retenant à l'intérieur, ravivant des souvenirs que je préférerais oublier. M'empêchant de respirer. Si je l'ouvre, cette sensation qui me donne l'impression de mourir partira sûrement ! Seulement, je n'ai pas le temps d'atteindre cette fichue porte que le noir se referme sur moi, m'entraînant dans ses profondeurs.

Je suis complètement perdue. Lorsque je reprends connaissance, j'ai l'impression d'être dans du coton. Il me faut de longues secondes avant que je ne trouve la force d'ouvrir les yeux. Au début, je ne vois que du blanc. Puis, peu à peu, je m'accoutume à mon environnement. Je regarde autour de moi, égarée, jusqu'à ce que je réalise enfin où je me trouve. Je suis dans l'infirmerie et on veut de nouveau m'empoisonner. Ou pire. La panique s'empare de nouveau de moi. J'essaie de retrouver l'usage de mes bras et de mes jambes et je me débats pour me défaire de ce fichu lit qui semble agir comme un aimant malsain sur moi, refusant de me laisser partir aussi facilement. Je repère un mouvement du coin de l'œil. Une silhouette s'approche de moi et cette vision m'arrache un hurlement. Ça y est. Il est venu en finir avec moi. « Ne vous approchez pas de moi ! » J'essaie d'hurler comme une mise en garde mais en toute honnêteté, je ne suis pas sûre que le rendu soit si héroïque.

way down we go

J’ai l’impression de revivre mes pires cauchemars avec une touche de réalité beaucoup trop douloureuse. J’en perds la notion du temps. Est-ce qu’on vient de me sortir des cachots ? Est-ce que je viens d’être empoisonnée ? Est-ce que je viens de rencontrer la créature alors que nous allions simplement nous entraîner en duel ? Je ne sais pas vraiment. Tout ce que je sais, c’est que je dois partir d’ici si je veux rester en vie. Les odeurs de l’infirmerie ne ravivent en moi que des souvenirs de dangers imminents. Empêtrée dans les draps, j’essaie de m’en défaire lorsque je repère une ombre qui s’approche de moi. Non. NON ! Je dois m’en tenir éloignée. Mais pourquoi ce fichus membres refusent-ils donc de répondre à mes ordres ? C’est pourtant pas compliqué ?

En quelques secondes, la personne est sur moi et je sens ses mains me toucher l’épaule. A ce contact, je sursaute et me débat de plus belle. Parallèlement, je mets quelques secondes à réaliser que c’est une femme. Et moi qui pensais que mon agresseur était un homme tout ce temps. Cela explique peut-être pourquoi je tournais en rond sans trouver de réponses. Je ne comprends pas ce qu’elle me dit mais une partie de mon cerveau me fait la remarque qu’elle s’essaie à des paroles rassurantes. Pourquoi voudrait-elle se montrer rassurante ? Pour que je me calme et me laisse faire ? A la bonne heure. Doucement mais surement, je sens l’étreinte des draps se desserrer. Un ultime coup de pied et je me libère de leur poids. La main de la jeune femme s’approche de nouveau de mon visage et je prends peur à son contact. Désireuse de m’éloigner, je m’écarte brusquement et perd l’équilibre, me retrouvant les quatre fers en l’air sur le sol glacial de l’infirmerie. Etourdie quelques secondes, je me remets vite de bout pour me rendre compte que la jeune femme me sépare de la sortie. « Ne me touchez pas. » Je siffle, haletante. Mon cœur bat vite. Trop vite et j’ai la sensation qu’une sorte de mains est en train d’étreindre mes poumons. J’ai du mal à respirer mais je n’ai pas le temps de m’inquiéter de ça. Je dois trouver un moyen de quitter ce lieu maudit.

Je prends une longue seconde pour détailler la situation. Je comprends facilement que je suis coincée, comme une proie prise au piège. Je n’ai rien sur moi. Je n’ai même pas la moindre idée d’où peux être ma baguette. Même si je suis persuadée que je ne serai pas en mesure d’en sortir grand-chose. En revanche, de son côté, je suis sûre qu’elle doit se trouver dans un des plis de sa robe, accessible. Fouillant du regard la pièce, je repère la chose la plus proche qui pourrait me servir d’arme. Une lampe. C’est mieux que rien. Si je parviens à la lui lancer dessus en la prenant par surprise, j’arriverai peut être à gagner assez de temps pour m’enfuir d’ici. Ça vaut le coup d’essayer. Mais avant ça, je dois trouver un moyen de la distraire. « Pourquoi est-ce que vous vous en prenez à moi ? Qu’est-ce que je vous ai fait ? C’est parce que je suis une née-moldu ? C’est toujours ça n’est-ce pas ? » Je demande d’une voix rauque. Voyant la surprise se peindre sur ses traits, j’en profite. Je ne me pose pas de question, imaginant simplement que c’est le fait que je comprenne ses intentions qui la surprend, je me saisis précipitamment de la lampe que je lance de toutes mes forces dans sa direction avant de me précipiter vers la sortie.

way down we go

C’est un véritable cauchemar. Pourquoi faut-il que ce genre de choses continue de m’arriver ? N’en ai-je pas déjà suffisamment bavé ? Est-ce que le but c’est d’en finir définitivement avec moi ? Je suis terrifiée mais pour autant, j’essaie de ne pas céder à la panique. Pas tout de suite. Je dois d’abord tout donner pour m’enfuir. Pour sauver ma peau. L’instinct de survie prime sur le reste et ma seule chance est de parvenir à atteindre cette porte. Ensuite, je n’aurai plus qu’à dévaler les escaliers et à trouver de l’aide. Je peux le faire. J’entends la voix de la femme, lointaine, mais je n’y prête pas attention. Certainement des paroles qui se veulent apaisante dans le seul but de me faire baisser ma garde. Mais je ne suis pas idiote. Je ne me laisserai pas avoir par ces fourberies. Et je ne retournerai pas dans ce lit pour recevoir je ne sais quelle drogue. J’y suis déjà restée trop longtemps. A quand remonte l’attaque du serpent ? Je n’arrive pas à remettre le doigt dessus mais ce n’est pas le plus important. Déjà, me mettre en sécurité.

Saisissant ma chance, je lance de toutes mes forces la lampe sur mon agresseur. Malgré ma fatigue, ça fera l’affaire. Je me précipite dans la foulée sur la porte, sprintant comme jamais, les mains tendues devant moi. Enfin, j’attrape la poignée et tente d’ouvrir la porte. Mais elle résiste, ne bougeant pas d’un millimètre. Je m’obstine, soudain paniquée, mais la porte reste résolument fermée. Je suis coincée. « Les portes sont fermées. » Me confirme alors la voix, beaucoup trop mielleusement. Je me retourne et plaque mon dos contre la porte, prise au piège mais souhaitant tout de même faire face à la jeune femme blonde. Ne jamais perdre son ennemi de vue. Mais dans ces circonstances, quel bien cela peut-il me faire ? Je n’ai pas d’armes et pas moyen de m’enfuir. Je parie qu’elle en revanche a au moins sa baguette en sa possession. Elle peut me faire n’importe quoi. Je suis à sa merci.

Ma respiration se fait plus courte. Plus sifflante. Mon cœur bat la chamade et j’ai l’impression qu’il est sur le point d’exploser. La main qui semble étreindre mes poumons se resserre. J’ai désespérément besoin d’oxygène mais mon corps semble refuser d’en faire le plein. « Prends le temps de respirer profondément et de te calmer, personne ne te veux de mal ici. » La jeune femme doit probablement voir ma détresse, mais une fois encore je refuse de lui faire confiance. Comment veux-t-elle que je me calme alors que je suis enfermée dans cette pièce avec elle, sans autres issues que les fenêtres ? Comment puis-je croire qu’on ne veut pas me faire de mal alors qu’on m’interdit de sortir ?

Acculée, condamnée, je finis par m’écrouler sur le sol, mes jambes ne parvenant plus à me maintenir debout. La panique commence à prendre le dessus. Je ne peux rien faire. « L… Laissez… Laissez-moi… Partir… » Je supplie de façon hachée entre deux inspirations difficiles. A genoux, recroquevillée, je ne suis clairement pas dans une position pour me défendre. J’étouffe. Ma vision devient floue. Lorsque j’approche mes mains de mon visage, je sens que mes joues sont baignées de larmes. . Visiblement, ça va se finir ici pour moi. Même mon corps semble l’avoir compris.