(#) Sujet: Chess mates ♔ Wes & Felicia Mer 29 Jan - 19:19
Chess mates
Wes ϟ Felicia ϟ Bonnie
Mardi était arrivé un peu trop vite à son goût. Depuis qu’elle avait reçu la note de Felicia, Bonnie avait la boule au ventre. C’était elle pourtant qui avait sollicité l’aide de son amie mais l’idée lui semblait aujourd’hui un peu moins lumineuse. Après tout, elle avait réussi à éviter la bibliothèque depuis septembre, elle pouvait bien tenir quelques mois de plus. Mais c’eut été faire preuve d’une belle mauvaise foi car Prudence et son frère avaient dû emprunter à sa place tous les ouvrages dont elle avait eu besoin pour ses cours. La Serpentard avait laissé la situation s’installer sans chercher à y remédier et elle se sentait maintenant un peu honteuse de ne pas avoir agi plus tôt. Plus facile à dire qu’à faire cependant. A chaque fois qu’elle s’approchait du premier étage, l’angoisse la prenait à la gorge et elle finissait inlassablement par battre en retraite. Hormis lorsqu’elle avait cours de défense contre les forces du mal, Bonnie évitait désormais de s’attarder dans les parages. C’était, en somme, plus facile que d’affronter sa peur. Et rien n’aurait changé si, pendant les vacances, Bonnie n’avait pas reçu un hibou en provenance de Poudlard. Wes MacCreery, un peu guidé par une certaine préfète jaune, lui avait envoyé un cadeau auquel elle ne s’attendait pas. Elle s’était sentie un peu idiote de voir qu’il avait pensé à elle alors même qu’elle n’était pas venue une seule fois depuis la rentrée. Il était temps de lui rendre la monnaie de sa pièce et elle avait déjà bien trop attendu. Aussi avait-elle pris les devants et à la fin des vacances, elle avait envoyé à Felicia un courrier lui demandant de l’accompagner. La Poufsouffle n’avait pas hésité une seconde et avant que Bonnie n’ait eu le temps de se préparer, elle lui avait fixé rendez-vous pour le mardi de la rentrée.
La veille au soir, la Serpentarde avait été incapable de dormir et cela malgré les six heures de cours auxquelles elle avait assisté dans la journée. Chaque fois qu’elle fermait les yeux, elle avait eu la désagréable sensation que le sol était en train de s’effondrer sans qu’elle ne puisse rien y faire. Elle s’était levée nauséeuse, avec l’impression d’avoir passé la nuit sur un bateau en pleine tempête. La classe de botanique était passée à la vitesse de l’éclair et Bonnie n’aurait pas pu résumer le sujet d’étude du jour malgré l’entrain que Felicia et Prue avaient essayé de lui communiquer. Cette histoire de bibliothèque la mettait dans un état de grande agitation et elle n’était pas très fière de la manière dont elle réagissait. Pourquoi n’était-elle pas fichue de faire ce que son amie jaune et noir avait fait il y a des mois de cela ? Nul doute que ses condisciples de Poufsouffle et Gryffondor étaient dotées d’un courage qui lui faisait cruellement défaut. Après tout, le château avait été restauré et il n’y avait pas de raison qu’un feu se déclenche au moment où elle mettrait les pieds au premier étage. C’était même tout à fait improbable… En sortant des serres, elle accompagna ses amies jusqu’au hall de l’école avant de prendre le chemin des cachots, tout en promettant à Felicia de la retrouver comme promis après le repas. Prudence ne serait pas de la partie cette fois-ci car son cours de soins aux créatures magiques débutait juste après manger. Bonnie profita de la halte dans son dortoir pour nettoyer sa robe et ses chaussures de la boue qui les maculait après leur sortie dans le parc. Elle déchargea ses manuels sur sa table de nuit et les remplaça par le jeu d’échec que lui avait offert Wes pour Noël. Ne pas perdre de vue l’objectif. C’était ce que lui avait dit Feli dans son courrier et la Serpentard tentait tant bien que mal d’appliquer son conseil. Ainsi chargée, elle glissa sa baguette dans sa poche, attrapa une barre chocolatée qui traînait dans un tiroir et se mit en route. Elle mit un temps considérable à atteindre le premier étage : chaque marche paraissait compter triple. Parvenue devant la porte du sanctuaire, son cœur battait tellement vite qu’elle ne put se résoudre à la franchir. Felicia n’était pas encore arrivée. Elle pouvait bien l’attendre là. A moins qu’elle ne fut déjà à l’intérieur ? Bonnie décida de patienter encore quelques minutes avant de se risquer à entrer. Il ne lui avait pas fallu très longtemps pour récupérer ses affaires dans sa salle commune, son amie n’avait très certainement pas encore fini de manger. Elle n’allait pas tarder.
Elle n’avait pas perdu son temps pour envoyer un message à Bonnie, après la reprise des cours. Son amie lui avait fait confiance en lui demandant de l’accompagner. Elle comptait sur elle quand elle lui a confié sa difficulté à se rendre à la bibliothèque depuis… depuis l’incendie. Felicia comprenait très bien pourquoi. Et c’était parce qu’elle comprenait, et parce que Bonnie était une précieuse amie, que la Poufsouffle avait accepté de l’aider. Ce genre de choses, elle les mettait en point d’honneur sur sa liste des choses à faire. Aussi, aussitôt la reprise faite, elle avait comparé leur emploi du temps pour trouver un créneau convenable qui ne leur laisserait pas une pauvre petite heure à survivre entre les rayonnages. Il leur fallait plus de temps. Il leur fallait un objectif précis pour ne pas se concentrer sur autre chose. Felicia savait - elle était passée par là en début d’année. Même avec un objectif bien précis, elle avait eu du mal à ne pas imaginer des crépitements, par-ci par-là, et les craquements du plancher. Elle n’imaginait pas comment serait les choses pour Bonnie. La Serpentard avait fui la bibliothèque depuis tout ce temps. Et elle en était arrivée au point de demander de l’aide. Et Felicia savait qu’elle pouvait être du genre à se défiler. Elle avait bien vu sa tête, à Halloween. Prudence avait dû les forcer toutes les deux pour qu’elles viennent à l’événement. Alors la jaune & noir craignait que son amie finisse par lui envoyer une nouvelle missive lui disant d’oublier tout ça. Mais il en était absolument hors de question ! Il fallait que tout rentre dans l’ordre. Le maximum possible, en tout cas. Et le plus tôt serait le mieux. Mardi, après manger. Elles se rendraient ensemble à la bibliothèque. Et elles iraient dans l’objectif de faire renouer le bibliothécaire avec les échecs. Avec un peu de chance, il ne serait pas beaucoup sollicité. Il y avait toujours peu de monde au retour des vacances, de toute façon.
Le matin même, Felicia voyait bien que Bonnie n’était pas dans sa plus grande forme. Elle en était à se demander même si c’était leur rendez-vous de tout à l’heure qui la mettait dans des états pareils… La Poufsouffle comprenait que ça pouvait la rendre malade, mais elle était tiraillée entre la forcer et lui laisser le choix. Prudence la connaissait bien mieux qu’elle et était amie avec la verte & argent depuis plus longtemps. Elle aurait su quoi faire. La Gryffondor avait un bon instinct en terme général et était beaucoup plus douée qu’elles deux dans le domaine social. Pourtant, Bonnie lui avait demandé à elle. Par solidarité et pour honorer son contrat d’amitié, Felicia se refusait de se désintéresser de son cas. Bonnie prenait déjà son courage à deux mains pour lui confirmer qu’elles se verraient tout à l’heure, une fois le cours de botanique fini. La Serpentard ne le voyait décidément pas, mais elle était beaucoup moins poltronne qu’elle ne le pensait. Felicia s’y connaissait également en lacheté, et Bonnie n’en faisait preuve que rarement. Même le bibliothécaire était d’accord avec elle sur ce point-là. Et il serait certainement un allié important pour que Bonnie se sente à nouveau à l’aise dans la bibliothèque. Il avait traversé la même chose, était responsable du lieu et un naturel avenant. La Poufsouffle se demandait comment il avait pu gérer les choses au retour sur son lieu de travail de son côté… Il lui avait donné une bonne impression quand elle était retournée dans la bibliothèque à la rentrée. Mais, bien qu’elle soit heureuse qu’il soit toujours le bibliothécaire attitré et qu’il ne soit pas parti, Felicia n’oubliait pas qu’elle avait une dette à payer envers lui.
Williams était simplement passée prendre une pomme pour son repas du midi avant de remonter au dortoir des Poufsouffle pour se décrasser. Les cours de botanique avaient pris une place important dans son esprit cette année, mais il n’en restait pas moins salissant certains jours. Une bonne douche ne serait pas de trop. Et, en vérité, elle ne voulait pas se l’avouer, mais elle appréhender également un peu. Cela faisait déjà six mois qu’elle pouvait retourner sur les lieux, mais le fait de rajouter Bonnie à l’équation la mettait un peu mal. Si elle y croisait Casey, Felicia craignait d’avoir de nouveau des hallucinations auditives. S’ils se retrouvaient tous au même endroit à nouveau… Heureusement, Brooklyn était beaucoup trop bête pour qu’elle ait le malheur de le croiser là-bas. Elle ne voulait pas le recroiser d’ailleurs. Moins elle le voyait, mieux elle se portait. Qu’il ait pris le minimum vital de cours était une vraie bénédiction. Felicia n’imaginait même pas devoir le surveiller. Elle espérait que Bonnie n’avait de mauvais coton à se faire avec un énergumène pareil chez les verts. Mais peut-être avait-elle de plus grande préoccupation dans son esprit… Comme ce qu’elles s’apprêtaient à faire aujourd’hui. La jaune & noir avait la chance d’avoir sa Salle Commune proche de la bibliothèque, mais cela ne l’avait pas empêchée d’arriver en retard. Ou Bonnie était-elle en avance ? Allez savoir ! Elle était là.
Felicia pressa son pas claudiquant pour la rejoindre avant que cette dernière ne file. Elle lui adressa un large sourire quand elle capta son regard. « Tu as eu le temps de souffler au moins ? Ou de récupérer ce qu’il fallait ? » Avait-elle seulement mangé ? Felicia imaginait que non, mais son sac ne laissait pas de doute sur ce qu’il devait contenir. Elle-même avait pris les magnifiques pièces que la Serpentard lui avait offertes, ne serait-ce que pour jouer à côté pendant que monsieur MacCreery serait en train de perdr… d’apprendre. Il y avait un sortilège - si elle se souvenait bien - pour ensorceler les pièces de façon à pouvoir jouer seul. Mais fallait-il déjà pour ça entrer dans la bibliothèque, trouver l’adulte et l'amener à s’asseoir pour jouer. Par réflexe, Williams posait déjà sa main sur la poignée, mais elle arrêta son geste rapidement. « Tu es prête à entrer ? Ça va aller ? » demanda-t-elle à Bonnie en se tournant vers elle. Même si, honnêtement, il était trop tard pour reculer. La Poufsouffle ouvrait déjà la porte. Bonnie pouvait encore partir, mais il était dans son intérêt de ne pas le faire.
Son amie n’avait pas mis beaucoup de temps pour la rejoindre et pourtant, Bonnie avait déjà réussi à dérouler un bon mètre de fil en tirant sur le morceau de laine qui dépassait de son écharpe. Heureusement que Felicia n’avait pas tardé plus, car alors c’était tout le vêtement qui aurait fini en pelote. Si c’était chanceux pour le morceau d’étoffe vert, la Serpentard n’aurait pas été contre quelques minutes t’attente supplémentaires. Dans le fond, cela ne changerait pas grand chose car l’instant fatidique finirait indubitablement par arriver, la préfète des jaunes n’était pas vraiment du genre à se défiler. Du moins, c’était l’image que Bonnie se faisait d’elle, une personne fiable sur qui l’on pouvait compter et ce n’était pas pour rien qu’elle s’était adressée à elle pour cette histoire de bibliothèque. En voyant la silhouette de Felicia se dessiner en haut de l’escalier, la vert et argent avait tiré d’un geste sec sur la laine avant de fourrer dans sa poche les restes du désastre vestimentaire. Arrivée à sa hauteur, la Poufsouffle lui adressa un sourire réconfortant que Bonnie lui rendit, un peu inquiète. A cette instant précis, elle avait l’impression que ses mâchoires étaient tellement crispées qu’elle ne parviendrait plus à parler avant de nombreuses heures. « Tu as eu le temps de souffler au moins ? Ou de récupérer ce qu’il fallait ? » Souffler n’était pas le terme qu’elle aurait employé pour décrire son passage éclair dans les dortoirs de Serpentard mais elle en ce qui concernait le chargement, Bonnie n’avait pas perdu son objectif de vue. Elle fit glisser l’anse de son sac de son épaule et l’ouvrit pour en montrer le contenu à son amie. Une manière comme une autre de grappiller quelques secondes de plus.
« J’ai apporté le jeu, comme tu me l’avais conseillé ! »
Sa voix était un peu rauque d’être restée silencieuse aussi longtemps. Felicia posa la main sur la poignée de la porte et Bonnie retint son souffle. Elle ne pouvait plus reculer. A la question de la jaune et noire, elle acquiesça sans piper mot. Au moment où Williams s’apprêtait à pousser la porte, celle-ci s’ouvrit à la volée. La Serpentard sursauta. Le bruit lui parut raisonner dans le silence du hall. C’était juste un élève de Serdaigle un peu pressé de quitter la bibliothécaire. Il se confondit en excuses avant de reprendre son chemin. La préfète des verts ne parvint pas à articuler une syllabe, son cœur tambourinant contre sa poitrine. C’était juste un élève de Serdaigle, rien de plus. Aucune raison de paniquer. Elle releva la tête : la porte n’avait pas claqué. Et la réponse à ce mystère était simple : Wes MacCreery se trouvait sur le seuil, appuyé contre le battant qui ne s’était donc pas refermé. Il leur sourit avec entrain. Cette fois, plus question de se débiner, elle n’allait pas faire marche arrière maintenant. A la question de savoir comment elle allait, elle ne trouva rien à répondre. Elle était bien incapable de mettre des mots sur le tourbillon de pensées qui tournait dans sa tête. Avisant son sac toujours ouvert, Bonnie sortit le jeu d’échec qu’il lui avait offert pour Noël et le lui tendit.
« Tu as du temps pour une partie ? » demanda-t-elle timidement.
Depuis leur rencontre de cet été, elle avait pris l’habitude de tutoyer le bibliothécaire. Elle savait qu’il ne le prendrait pas mal et elle ne se voyait pas lui donner du « vous » à présent qu’ils avaient reçu le même plafond sur la tête. Elle respira un grand coup, il était temps de franchir le pas. Elle n'avait jamais été aussi proche de son objectif.
nightgaunt
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(#) Sujet: Re: Chess mates ♔ Wes & Felicia Mar 10 Mar - 21:55
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Au moins, Bonnie ne s’était pas désistée. Felicia avait envisagé la possibilité, bien sûr, mais le simple fait de penser que Bonnie puisse se raviser au dernier moment l’avait tétanisé d’horreur. La Poufsouffle aurait pu aller la chercher, dans ce cas-là, et la traîner devant les portes de la bibliothèque, mais cela n’aurait rien changé au fait : elle aurait agi en lâche. Et dans ces moments-là, c’était plutôt la traîner en justice que Felicia aurait voulu faire. C’était plus fort qu’elle. De la poltronnerie, de la lâcheté, et son corps avait une forte réaction de répulsion, des frissons, un ventre qui se tordait et la gorge qui se nouait. Comme un coup de couteau dans la colonne vertébrale qui l’empêcherait de marcher jusqu’à la fin de ses jours. Certains détestaient l’injustice par dessus tout, ce qu’elle comprenait fort bien, mais dans son cas, c’était la couardise. Plus grande bassesse de l’humanité à ses yeux, et plus grande trahison possible de la part d’une amie. Heureusement, Bonnie était loin de tout ça. Felicia avait eu peur, oui, mais elle aimait dire et continuerait de dire que la Serpentard était tout sauf une dégonflée. La preuve en était aujourd’hui. Cela dit, son amie n’avait pas non plus l’air très à l’aise. La jaune & noir n’en attendait pas forcément mieux, même si cela aurait été idéal, car elle ne savait pas exactement comment la rassurer au mieux. Elle ne pouvait pas lui faire avaler que tout se passerait bien quand elle-même avait fait la même expérience qu’elle quelques mois plus tôt. Williams tenta, au mieux, de la recentrer encore une fois sur l’objectif avec ses questions. Elle ne voyait pas quoi faire d’autre. Un esprit orienté sur une idée claire et précise avait de meilleure chance de l’accomplir qu’un esprit qui se laissait parasiter par d’autres choses. Dans tous les cas, Bonnie avait ce qu’il fallait. Felicia jeta un coup d’oeil et leva un pour ce en l’air pour donner son approbation. « Parfait. » Sans son jeu d’échecs, Bonnie n’était pas vraiment Bonnie. Et aujourd’hui, elle avait besoin d’être elle-même à cent pour cent si elle ne voulait pas se perdre dans les mauvais souvenirs.
Felicia demanda à Bonnie, pour la forme, si elle était prête à entrer. Si elle avait eu besoin de quelques minutes de plus, elle aurait attendu, sinon elle l’aurait obligée à entrer en cas de premiers signes de fuite. Mais Felicia n’eut rien à faire. Au contraire : la poignée lui échappa des mains si rapidement qu’elle faillit en perdre l’équilibre. La porte s’était ouverte à la volée et un jeune Serdaigle en était sorti au pas de course. La Poufsouffle le suivit du regard, les sourcils froncés, quelque peu mécontente qu’un élève puisse courir sous leur nez, mais s’il rejoignait un cours, elle n’allait pas le retarder. Plus vite il disparaissait de sa vue, mieux cela vaudrait. Son attention fut alors captée par une voix familière qui se trouvait au niveau de la porte, en train de les saluer. « Monsieur MacCreery, vous tombez bien ! » Au moins, elles n’auraient pas à le chercher dans toute la bibliothèque, Dumbledore merci. Même si, au cours de ces vacances, Felicia avait eu le temps d’apprendre les endroits stratégiques où l’adulte se posait quand il n’était pas en train de ranger des livres dans les rayonnages. Pour une fois qu’un bibliothécaire restait plus de quelques mois dans cette école… La jaune & noir avait presque l’impression d’être accueilli par un vieil ami dans une vieille chaumière. Elle voulait que Bonnie finisse par ressentir la même sensation avant de repartir d’ici.
D’ailleurs, son amie ne prit la parole pour la première fois que pour lui signifier la raison de leur venue. Cette dernière avait une toute petite voix comparée à d’habitude, mais, au moins, elle ne se défilait pas. Elle annonçait clairement la raison de leur venue à toutes les deux, et si l’adulte acceptait, elle n’aurait raison pour se débiner. Il serait mal vu de s’enfuir en faisant demi-tour alors qu’on vous ouvrait la porte en grand juste devant vous. Quant au bibliothécaire… « Je suis persuadée vous avoir prévenu qu’il était temps pour vous de renouer avec les pièces. » Autant dire qu’il n’avait pas le droit, lui non plus, de refuser la proposition. Bonnie avait besoin d’affronter ses démons, et il avait besoin d’utiliser sa matière grise. Felicia avait attention à ce qu’il ne prenne pas la poussière, mais pour ce qu’il était de la gymnastique intellectuelle, ce n’était pas encore ça ! Il ne lisait même plus ce qu’il avait à portée de main, rendez-vous compte ! Inadmissible. « Pouvons-nous entrer ? » Bien sûr, la question ne se posait pas, mais tout avait l’air si officiel… Enfin, elle rendait cela beaucoup trop officiel. Bonnie se contentait déjà de le tutoyer, chose qu’elle ne s’autoriserait jamais. Cela ne changeait rien au reste. Lui, elles, les pièces d’échecs. Maintenant.
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(#) Sujet: Re: Chess mates ♔ Wes & Felicia Dim 22 Mar - 17:56
La sortie fracassante du Serdaigle résonnait encore dans le hall et Bonnie eut toutes les peines du monde à empêcher son cœur de tambouriner dans sa poitrine. Cet élève était simplement en retard et il se rendait probablement à un cours, il ne fuyait pas un monstre quelconque ou un incendie funeste. Cette idée était d’ailleurs totalement ridicule et elle tâcha de ne plus y penser. Comme lui avait suggéré Felicia, elle devait se concentrer sur son objectif, à savoir : jouer aux échecs. Nul doute qu’elle ne disputerait pas la plus belle partie de sa vie, ne serait-ce que parce qu’elle savait par avance que sa concentration ne serait pas au maximum. Un but à la fois, elle n’était pas venue pour remporter des trophées. Si déjà elle parvenait à entrer dans la bibliothèque et à rester suffisamment longtemps pour disputer une partie, elle serait satisfaite. Il était temps. La porte était ouverte, Wes était là. Elle n’avait plus aucune excuse pour renoncer à présent. Pourtant, ils étaient toujours là, échangeant des banalités sur le seuil de la bibliothèque. Bonnie se sentit soudain idiote : c’était à cause d’elle tout cela… Elle voyait bien toutes les précautions que prenaient les deux compères pour la mettre à l’aise, ou du moins pour lui faciliter la tâche. Cela aurait été bien mal les remercier que de les planter là. Elle devait y mettre du sien et affronter sa peur.
Wes MacCreery était une personne enjouée et en qui Bonnie avait confiance. Ils ne se connaissaient pourtant pas vraiment, en dehors de la discussion qu’ils avaient eue l’été dernier et bien sûr, de l’épisode du feudeymon… Décidément, tout la ramenait à cela. Elle avait beau essayer de songer à autre chose, à un événement plus heureux, les souvenirs effrayants semblaient plus tenaces que les autres. « Avec plaisir, Mesdemoiselles ! » Maintenant que l’offre était acceptée, il n’y avait plus à hésiter. Felicia semblait aussi parfaitement à l’aise en compagnie de l’adulte. Il faut dire qu’il se montrait moins rigide ou austère que certains professeurs de l’école… Même si sa camarade continuait de le vouvoyer, elle semblait néanmoins faire preuve d’une certaine familiarité avec le bibliothécaire, ce qui contribuait à rassurer Bonnie.
« Oh non, elle n’oserait pas insinuer une chose pareille tout de même ! »
Elle leva les yeux, l’air faussement étonnée. Que Felicia puisse se permettre de dire une chose pareille à un professeur l’aurait réellement surprise. Mais la relation qui les unissait à Wes était un peu différente. Bonnie inspira un grand coup, resserra l’anse de son sac sur son épaule et mit un pied devant l’autre pour franchir la porte maudite. Le plancher craqua sous ses semelles lui rappelant le crépitement angoissant des flammes dévorant le bois. Elle n’en laissa rien paraître, enfin, elle essaya mais elle ne ralentit pas pour autant. Si elle s’arrêtait en si bon chemin, elle n’était pas sûre de garder contenance. Elle jeta un regard autour d’elle. Tout était neuf. Les étagères brillaient, de même que les tables et le reste du mobilier. Elle ne put s’empêcher de remarquer que malgré les efforts extraordinaires déployés par le gardien du lieu, la collection n’avait pu être recomposée dans son ensemble. Quelle tristesse quand on pensait aux trésors qui avaient composé la réserve de Poudlard… Wes s’était éclipsé pour terminer de ranger quelques ouvrages, la laissant seule en compagnie de Felicia.
« C’est calme aujourd’hui. » remarqua-t-elle pour troubler le silence.
Elle n’avait aucune idée du degré d’animation de cet endroit d’ordinaire. Enfin, du moins pas cette année. Aussi bien, cette journée ne faisait pas exception et les étudiants avaient déserté la bibliothèque. Mais cela lui paraissait toutefois hautement improbable. Tous les élèves avaient besoin d’un lieu pour étudier en paix pour les examens…
« On se met où ? »
Elles avaient l’embarras du choix et Wes leur avait même proposé de s’installer à son bureau. Bonnie sortit le jeu d’échec de son sac et entreprit de le déposer sur l’une des tables qui se trouvait en face de l’entrée. Elle se ravisa lorsqu’elle remarqua le regard courroucé que lui jeta un jeune serdaigle occupée à bouquiner un peu plus loin. Bien, pas le bon endroit visiblement. Elle haussa les épaules et récupéra le jeu.
« On se met au bureau ? On ne dérangera personne comme ça. »
Joignant le geste à la parole, elle empoigna une chaise et l’approcha du pupitre. Elle posa le jeu à un endroit libre et commença à disposer les pièces à leur place. Wes n’allait pas tarder à les rejoindre. Et le ciel ne leur était toujours pas tombé sur la tête.
Felicia ne voulait pas que cette discussion ressemble à une discussion à deux. L’intérêt du jour n’était pas pour elle, et monsieur MacCreery devait bien le comprendre. Le bibliothécaire n’était pas idiot, juste un peu poussiéreux dans certaine zone de son cerveau. Elles allaient passer un coup de balai là-dedans dans très peu de temps, de toute façon. Mais en attendant, il fallait faire en sorte que Bonnie se détente. Le sourire immuable de l’adulte ainsi que quelques petites railleries de sa part, et Felicia espérait grandement que Bonnie accepterait de relever un peu plus la tête et de marcher fièrement à l’intérieur de cette bibliothèque. À force de rester sur le seuil, même la Poufsouffle allait finir par devenir hésitante. Parfois, mieux valait ne pas trop réfléchir. Enfin… c’était sûrement plus facile à dire qu’à faire, mais elle espérait, oui, elle souhaitait ne pas avoir à pousser Bonnie dans cette antre si chère à son coeur. Elles ne venaient pas pour lire, mais leur raison était tout aussi louable. Surtout du point de vue de Felicia. Le bibliothécaire avait grand besoin de faire autre chose que de trier des livres - même si l’activité était tout a à faire respectable, si l’adulte ne lisait pas en plus à côté, il fallait bien lui trouver une activité pour réveiller tous ces neurones qu’il avait sous la caboche. Elle disait ça autant pour rire que pour discuter sérieusement. Mais actuellement, mieux valait faire passer ça pour une blague, surtout si on commençait à lui faire des reproches. « Moi ? Mais voyons, jamais je n’o… » commença-t-elle en prenant un air faussement indigné avant que Bonnie ne la coupe en volant à son secours. « Voilà, exactement. » La Serpentard redevenait peu à peu elle-même. Avec cette avancée, Felicia s’enquit auprès de l’adulte pour savoir si elles pouvaient entrer, et ayant son aval, la Poufsouffle passa la première de son pas claudiquant.
Jetant un coup d’oeil derrière elle pour s’assurer que Bonnie suivait toujours, elle remarqua que monsieur MacCreery laissa la porte d’entrée ouverte. L’idée lui parut déplaisante au début, bon à faire des courants d’air, à faire croire que l’entrée était possible à n’importe quel idiot de l’école ou à amener le bruit et la saleté dans un endroit qui n’avait rien de tout ça ; mais finalement, à force de regarder le mur du couloir en face, elle en comprenait l’intérêt. Drôle qu’un endroit si réconfortant puisse apparaître comme une cage quand on y faisait pas attention. Cette porte lui faisait autant l’impression de réconfort que de vulnérabilité. Felicia préféra poser son regard sur son amie alors que le bibliothécaire était parti s’afférer ailleurs quelques instants. Pour cette dernière, il faisait bien calme. Pour Felicia, le calme n’était jamais assez présent à son goût. Rien qu’aujourd’hui, les oiseaux faisaient trop de bruit, les quelques élèves présents grattaient trop fort leur plume sur leur parchemin et le plancher faisait un craquement bien trop sonore à son goût. Il ne faisait jamais assez calme. Et en même temps, le bruit était un bon moyen de ne pas se focaliser intensément, de ne pas commencer à entendre ce qui n’existait pas - ou plus. « Ah bon, tu trouves ? Le retour des vacances peut-être. » Mieux valait parler, dans ce cas, plutôt que de laisser Bonnie psychoter. Les banalités étaient une chose horrible, mais parfois, bien nécessaires.
Où se mettre, demandait Bonnie. Felicia n’en avait cure, mais le plus loin des gens si possible. Autant la Poufsouffle respectait les personnes fréquentant l’endroit, autant elle les trouvait antipathique. Il n’y avait qu’à voir le regard que lança un Serdaigle à Bonnie juste pour avoir voulu s’installer à proximité. Felicia lui en lança un plus noir encore. Les tables, ce n’étaient pas ce qui manquait ici, s’il n’y avait ça qui le dérangeait à l’autre piaf. Bonnie proposa de se mettre au bureau pour ne déranger personne. « Faisons ça, oui. Ce sera très bien. » Surtout parce que sa hanche commençait à lui faire comprendre qu’elle était debout depuis trop longtemps. À moins que ce ne soit l’endroit qu’il lui réveille de vieilles douleurs. La sensation d’être une vieille personne atteinte de rhumatismes était franchement déplaisante. Elle n’avait que seize ans, par tous les diables ! La jaune & noir ne se fit pas prier pour prendre une deuxième chaise et venir s’installer avec son amie. Cette dernière commençait déjà à disposer les pièces et Felicia lui fila un coup de main. Il n’y aurait pas assez de place pour deux plateaux de jeu, aussi sortit-elle un énorme bouquin sur ses jambes pour s’occuper un peu. « Je me contenterai d’observer, si ça ne vous dérange pas ! » fit-elle une fois que le bibliothécaire revenait vers elles. Et de commenter, bien sûr. Sauf si elle se perdait trop dans le livre que lui avait précisément offert l’adulte.