Really ?

Études des runes. Sortilèges. Botanique. Elle passait en revue tous les livres qu’elle venait d’emprunter, ceux concernant des cours et ceux qui n’avaient aucun rapport. Comme ce livre sur les elfes de maison ou encore la biographie complète de Pythagore qu’elle avait vu en arithmancie. Elle aimait tellement tout apprendre qu’elle ne se sentait jamais satisfaite de ce qu’elle avait appris jusqu’à date. Il lui en fallait toujours plus. Ce n’était jamais assez. Pourtant, elle était déjà bien en avance sur son année. N’avait-elle donc déjà pas lu certains manuels concernant les cours de sixième année ? Bien sûr. Pourquoi ne l’aurait-elle pas fait ? C’était ce à quoi elle passait ses journées. S’entraîner. Étudier. Travailler. Presque toujours dans la bibliothèque. C’était le lieu qu’elle avait vu le plus souvent depuis qu’elle était à Poudlard. Depuis 4 ans. C’était un lieu merveilleux, sauf quand elle s’endormait et qu’elle recevait des livres sur la tête de la part du bibliothécaire, ce qui la faisait bien rire secrètement. Après tout, elle avait connu tellement pire. Brûlures. Fouet. Coup de ceinture. Privation. Séquestration. Elle pourrait lister tellement longtemps chaque châtiment reçu pour des erreurs enfantines normales. Mais qu’elle n’était pas autorisée à faire. Lorsqu’elle était toute petite encore, et qu’elle apprenait à être propre, si elle faisait pipi dans son lit, elle avait le droit à des coup de ceintures. Et ça avait marqué son esprit. Cette famille n’avait rien d’une famille et le sang de ces moldus ne coulaient pas dans ses veines. Néanmoins, ses parents n’avaient point voulu d’elle. Au final, elle était orpheline. Enfant de la terre. Du vent et de l’air. Enfant de l’univers qui n’avait personne et ne désirait avoir personne. Plus petite, elle avait espéré que ses parents reviennent. Que cette famille l’aime. Maintenant, elle se complaisait dans sa solitude et ses désirs de vengeance, tout en étant détruite par les souvenirs des punitions, par la haine de cet homme et la froideur de cette femme. Aiden avait, une fois, parler de stress post-traumatique, et Ellyaïna n’avait jamais rien voulu entendre parler.

Elle soupira légèrement et s’attaqua à ce travail qu’elle s’était donnée en cours d’astronomie. Une rédaction complète entre les différentes planètes telluriques. Ils avaient vu Mercure, mais elle ne se limitait pas à cette planète, opposant ainsi Vénus à la Terre, Mars à Vénus, Mercure à Mars. Elle les comparait toute entre elles, opposant la vitesse de rotation de la Terre (1 674,364 km/h) à celle de Mars (868,220 km/h) sans oublier de mentionner l’excentricité et la période de rotation. Elle vit, à la toute fin, un court paragraphe qui venait opposer les planètes telluriques aux planètes gazeuses en sachant que son prochain parchemin sera entièrement destiné aux planètes gazeuses qui valaient le détour. Elle allait également se pencher sur l’excentricité des planètes et leurs orbites. L’élève de la maison Serpentard considérait qu’il y avait tellement de choses à dire en Astronomie, tellement de sujets à couvrir, qu’elle pourrait y penser des jours entiers et elle comptait bien le faire, mais en séparant les moments où elle travaillerait sur l’Astronomie, puisqu’elle avait d’autres cours bien entendu. Le cours de Soins aux Créatures Magiques en faisait partie. Surtout que pour celui-ci, le professeur Armstrong avait accepté de lui fournir quelques renseignements avancés, ce qui lui plaisait tout particulièrement.

Elle sursauta brusquement lorsqu’elle entendit un fracas assourdissant. Par chance, elle n’était pas en train d’écrire à ce moment, mais en train de parcourir quelques paragraphes discutant des divers unités en Arithmancie. Elle leva la tête et soupira. Elle se leva alors et se dirigea rapidement vers la source du bruit pour découvrir un élève enterré sous une pile de livres. Elle ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel. Il aurait pas pu demander à quelqu’un au lieu de faire n’importe quoi et de troubler sa quiétude ? Enfin. Elle n’allait pas le laisser là. S’il était tombé dans le lac, elle l’aurait fait, parce qu’elle ne prendrait pas la peine de plonger dans un espace comme celui-ci, mais là, ce n’était rien de bien compliqué. C’étaient des livres et elle connaissait bien les livres. “Tergeo !” Elle observa les livres qui se remettaient maintenant tranquillement et lentement à leur place. Elle avait appris ce sort en deuxième année, et elle l’avait trouvé bien efficace, bien qu’elle ait lu à son propos après l’hiver de sa première année. “Ce serait peut-être plus intelligent de ta part de demander de l’aide.” Elle garda le silence encore quelques instants. Elle n’avait pas envie de passer énormément de temps auprès de quelqu’un, d’un être vivant, elle qui s’entendait bien mieux avec les ouvrages, mais elle ne désirait pas que son inaction entraîne une mort par asphyxie non plus. “Bon, t’as besoin de livres à quel sujet ?” Surtout que de par la petite taille du jeune homme et -visiblement- son inexpérimentation, elle ne lui donnait pas plus de 12 ans.

Really ?

La précipitation ne donnait rien. C’était tout ce qu’elle pouvait se dire, là, maintenant, devant cet élève dont elle ne connaissait strictement rien. Tout ce qu’elle pouvait dire de celui qui se trouvait maintenant devant elle, c’était évidemment sa maison. Parce qu’il était encore dans sa tenue de sorcier. Elle songeait que peut-être qu’un jour, il faudrait qu’elle se vêtisse de vêtements normaux. Enfin, normaux, disons seulement qu’elle devrait peut-être arrêter de toujours porter sa tenue de sorcier. Mais elle se fichait bien de comment elle était habillée, elle, elle passait tout son temps dans la bibliothèque, alors est-ce que ça changeait vraiment quelque chose la façon dont elle était habillée au final ? Non, strictement rien. Quoi qu’il en soit, elle avait devant elle un élève de la maison Poufsouffle. Elle n’avait aucune affiliation avec cette maison. Elle n’avait aucune affiliation avec quelconque maison que la sienne, elle qui ne se mêlait jamais aux autres et qu’on ne connaissait pas. Fantôme errant dans les couloirs que l’on ne voyait pas passer, parce que c’était ce qu’elle désirait. Qu’on ne la voit pas. Qu’on ne lui parle pas. Qu’on ne cherche pas à apprendre à la connaître parce que de toute façon, elle ne se confierait pas. Elle ne se livrerait pas à des confidences. Elle resterait toujours secrète, mystérieuse, elle resterait Ellyaïna Stayn, la Serpentard dont on ne connaît pas, que l’on entend pas parler dans les cours et qui se contente de regarder le professeur sans déroger de cette observation.

Encore une fois, elle regardait. Elle regardait le jeune homme devant elle qui ne savait pas attendre ni réfléchir avant d’agir, et qui avait ainsi ébranlé les heures d’études tranquilles d’Ellyaïna dans la bibliothèque par un bruit sourd, parce qu’il n’avait pas eu l’intelligence de demander de l’aide à quelqu’un en voyant qu’il n’était pas capable d’atteindre les livres dont il avait de besoin. Il faudrait que ce Poufsouffle apprenne que tenter constamment de se débrouiller par soi-même ne servait à rien si c’était pour entraîner ensuite des conséquences. Un jour, les conséquences seront graves et importantes. Ce n’était pas le cas actuellement, ce n’était que des livres tombés sur lui, et en un tour de baguette, elle avait pu réparer l’erreur du garçon. Il avait les cheveux blonds, il n’était pas très grand. Elle le pensait vraiment en première année, ce qui pouvait expliquer cette façon qu’il avait de paraître émerveillé par le simple sort effectué. Ensuite, peut-être que c’était un né-moldu, et si c’était le cas, elle espérait vraiment que ce n’était qu’un élève de première année, qu’il n’ait pas connu Blackman et les néo-mangemorts. Elle tressaillit. Comme chaque fois qu’elle pense à ça. Comme chaque fois que le sortilège de Doloris lui revient en mémoire. Elle était une sang-pur qui s’était opposée au sort des né-moldus et elle avait payé. Durement. Replongée dans les cauchemars, dans la lutte pour sortir des flashbacks, replongée dans la douleur de son passé, des châtiments. Replongée. “Il va falloir que tu réfléchisses avant d’agir. Avec la magie, réfléchir est obligatoire si tu ne veux pas finir avec un bras en moins.” Elle exagérait un peu, mais c’était sans doute nécessaire pour faire comprendre à cet élève l’importance de la réflexion. Ceci dit, elle n’avait pas totalement tort.

Elle l’écouta attentivement quand il lui parlait de ce dont il avait de besoin et elle hocha la tête. Elle se souvenait d’avoir dû faire ce devoir en première année. Elle se souvenait aussi qu’elle avait rendu le double du nombre de parchemins attendus. Parce qu’il y avait beaucoup à dire sur cette époque. “Tu trouveras certaines informations à la page 65 de ton manuel Histoire de la magie. Ensuite, tu as aussi le livre Magie théorique qui pourra te renseigner sur certains détails de l’époque de l’antiquité. Par contre.. si tu veux vraiment quelque chose d’intéressant qui te permettra d’étoffer ton devoir. Accio L’Égypte en profondeur de Billie Green.” Elle récepta dans ses mains le livre qui venait doucement vers elle. Elle le donna au garçon devant elle. “Il t’aidera beaucoup dans ton devoir. Sinon, tu as L’Antiquité revisitée aussi. La bibliothèque est grande et haute, c’est vrai. J’étais intimidée devant cette grandeur en première année, moi aussi, mais on apprend vite à s’y repérer.” Il ne lui vint pas en tête un seul instant à lui demander son nom ou quelques précisions le concernant.

Really ?

Elle ne savait pas ce qu’Elle devait faire de ce jeune homme. Sans l’ombre d’un doute, il faisait partie de ceux qui paniquent la veille de la remise d’un devoir parce qu’ils n’ont strictement rien fait et qui ne savent ainsi pas du tout comment le commencer et par où débuter. Au fil des années, elle avait pris tendance à mépriser ce type de personne, parce qu’elle ne comprenait pas comment on pouvait laisser traîner les travaux jusqu’à la dernière minute possible. C’était toujours bien plus évident de les faire tout de suite, comme ça aucun stress. M’enfin, fallait croire que tout le monde ne pensait ainsi pas comme elle. Cet étudiant de première année en était la preuve vivante et elle devait admettre que ce n’était pas le premier de ce genre qu’elle rencontrait. Elle ne pourrait jamais saisir la raison d’un tel comportement et peut-être qu’elle n’essayerait même pas. Elle se fichait pas mal des autres. Tout ce qui l’intéressait, c’était le savoir. Ce savoir qu’elle trouvait dans les livres, entre chaque petite phrase, entre tous ces petits mots que ses yeux parcouraient longuement. Même la nuit. Toutes les heures du jour, sauf en classe - parfois même en classe parce que fallait bien lire ce que le professeur demandait de lire, n’est-ce pas ? Elle lisait. Et elle faisait toujours tout en temps et en heures, elle.

Un léger, très léger, sourire effleura ses lèvres quand l’élève affirma qu’il désirait garder ses bras. « Oui, essaie. Ce serait dommage de te retrouver à l’infirmerie.» Il avait perdu beaucoup de couleurs après qu’elle ait parlé et Ellyaïna sentait qu’elle aurait peut-être dû quelque part éprouver des regrets ou des remords, mais ce n’était pas un sentiment qu’elle avait pour habitude de ressentir et elle restait ainsi de glace devant ce jeune homme qui semblait tant intimidé par la liste de tous les livres qu’elle avait débité. Elle aurait presque cru que les yeux du poufsouffle s’étaient écartés d’horreur. On pouvait dire qu’il passerait sans aucun doute une nuit blanche avec la lourdeur de la tâche qui semblait s’annoncer et elle, elle se tenait devant lui, totalement insensible à ce désarroi. C’était à lui de s’y prendre plus tôt, après tout, non ? Cette absence de sentiments ne l’empêcha point de l’écouter quand il se plaignit de la nuit qui l’attendait à finir ce travail qu’il s’était décidé de laisser traîner. Elle ne comprit pas comment il pouvait aimer la lumière et répugner les lieux sombres et froids comme pouvait l’être la bibliothèque. Elle était clairement son opposé, elle qui répugnait la lumière, le soleil et tout ce qui pouvait exprimer une once de joie et qui se complaisait dans l’absence de soleil, dans le froid et la noirceur - en dehors de la nuit parce que la nuit lui procurait cauchemars. La bibliothèque apportait le silence dont la jeune femme avait de besoin, elle qui méprisait au-delà de tout le bruit. La joie n’était pas son fort. « Il fallait commencer ton devoir plus tôt. » Son ton était froid. Sec. Comme toujours. Sans la moindre trace de douceur. Elle ne connaissait pas ça, Ellyaïna, la douceur. On ne le lui avait jamais appris alors elle ne savait pas en témoigner.

Le débit de paroles du jeune homme l’étourdit. Il avait recouvert des couleurs et semblait aller bien mieux tandis qu’il parlait et parlait et parlait, chose que la Serpentard n’aurait jamais pu faire, elle qui était avare de paroles. Elle ne pouvait s’empêcher de penser qu’elle était véritablement l’opposé même de celui à qui elle faisait face tandis qu’il lui posait des questions et faisait des observations. Enfin, surtout posait des questions. Elle n’eut même pas le loisir de compter le nombre de questions posées. Trop. Simplement. « Euh… Ellyaïna Stayn. Et tu m’appelles Ellyaïna.» Personne ne l’avait jamais surnommé. Et elle jugeait cela comme une marque d’affection. Elle ne voulait pas qu’on lui témoigne de l’affection. Coeur refroidit. « Donc… comme tu peux le voir à ce que je porte, je suis de Serpentard et je suis en quatrième année. J’ai 14 ans. Euh.. Merci ? » Elle prit un chocogrenouille. Et elle réfléchit. Elle pouvait bien se montrer gentille et l’aider pour son devoir, ça lui ferait de la révision et c’était toujours bon de la révision. « Tu parles beaucoup. Et non, je n’ai jamais rencontré de créatures magiques comme les trolls et les licornes. J’aimerais bien en recontrer une un jour, c’est un animal si pur. Et je peux t’aider pour ton devoir si tu veux. On aura fini avant la moitié de la nuit à deux et comme je connais déjà les livres.. »