Cette interrogation trottait dans la tête de la jeune fille depuis quelques mois déjà et il lui était impossible de s'en défaire tant elle restait prise dans sa tête. Scorpius n'était plus là pour passer de longues heures à débattre avec elle dans la bibliothèque et elle se rendit compte à quel point il pouvait lui manquer, depuis qu'il avait terminé ses études à Poudlard... Ses heures à la bibliothèque étaient devenues solitaires et bien mornes... Bien qu'elle pouvait désormais se concentrer plus sur le contenu de l'ouvrage, n'ayant personne pour la distraire, il manquait quelque chose... Il n'y avait plus d'approfondissement, plus que de l'apprentissage brut et dur dont elle ne raffolait pas tant au final... Étant de nature à aimer discuter, les débats étaient pour elle une source d'apprentissage qu'elle chérissait plus que tout.

Au fur et à mesure de ses recherches au sujet de la source et l'origine même de la magie, Niamh comprit rapidement qu'elle tournait en rond et que les informations classées sur le sujet à la bibliothèque étaient bien trop généralistes. Rien n'entrait dans le vif du sujet, les réelles origines... Seule, la Poufsouffle avait l'impression de patauger dans le vide. Elle aurait voulu écrire à son ami Serpentard mais elle se dit que rajouter un sujet supplémentaire à celui de la recherche généalogique sur sa famille serait bien de trop et qu'il fallait savoir rester concentrer pour atteindre ses objectifs... Elle avait donc longuement réfléchit à savoir à qui elle pourrait demander des informations à ce sujet. Ce fut un matin qu'elle songea à questionner directement celui leur ayant donné des cours à ce sujet. Après tout, qui de mieux qu'un Professeur pouvait la renseigner ? Encore plus sur le sujet de la magie et des sortilèges... C'est ainsi que la jeune Préfète attendit patiemment la fin du cours de la journée pour aller demander une entrevue personnelle avec le Professeur, en dehors de leurs cours respectifs.

Une fois arrivée devant le bureau du Professeur, Niamh réajusta son uniforme et tenta de se donner plus de consistance. Même si ces questionnements étaient importants pour elle, elle avait tout de même peur d'être totalement ridicule dans ses ''recherches'' du moment. Peut-être que la réponse était en réalité évidente et qu'elle était stupidement passé à côté de quelque chose... Pourtant, elle avait épluché et répluché de trop nombreuses fois tous ces livres. Tandis qu'elle soupirait pour expier l'air de ses poumons et les gonfler de nouveau, elle finit par toquer deux coups timides sur la porte.

- Bonjour, Professeur, commença Niamh en se glissant dans la pièce.

Elle attendit ensuite patiemment d'être invitée à prendre la parole avant de ne prendre place sur une chaise en face du Professeur de sortilèges.

- Je... Je voulais vous voir un peu plus en privé, enfin, non pas tant en privé en fait, je me mélange ! Je voulais prendre un temps avec vous, et pas juste 5 minutes à la volée après un cours... Parce que je me questionne au sujet de la magie et que je n'ai trouvé aucune réponse sur ça dans les livres de la bibliothèque. Mais vous, vous êtes Prof de Sortilèges et vous avez étudié à l'Université Magique. Ils ont bien plus d'ouvrage qu'ici !

La jeune fille s'accorda une pause, autant pour respirer que pour laisser le temps à l'homme en face d'elle de comprendre sa présence ici.

- Vous vous souvenez, de ce premier cours que vous nous avez donné dans les cachots ? Celui pour créer du feu sans baguette. En fait, ça m'a marqué... Je me suis posée beaucoup de questions sur comment tout ça fonctionne, je suis même allée faire des recherches sur ça à la Bibliothèque mais rien ne parle de ces Sortilèges informulés concrètement... C'est frustrant.

Pourquoi est-ce que la magie reste bloquée en nous ? Pourquoi a-t-on besoin d'un catalyseur, genre la baguette magique, afin de l'exploiter ? Parce qu'à y réfléchir... La magie doit forcément prendre source chez le Sorcier, non ? Sinon les Moldus devraient pouvoir y arriver aussi, si c'est une source extérieure... Puis c'est sûrement comme ça qu'ils doivent détecter les naissances de Sorciers, je me dis... Du coup j'me demande d'où elle vient cette source mais surtout pourquoi elle est bloquée en nous au point qu'il soit extrêmement difficile de l'utiliser dans baguette... Avez vous des connaissances sur le sujet ?

La jeune fille s'arrêta enfin de parler tandis qu'elle se rendait progressivement compte du monologue et du surplus de questions qu'elle venait de poser au Professeur, ouf...

C’était une soirée presque banale qui se profilait quand une jeune élève de poufsouffle, née-moldue, avait demandé à me voir. Qu’est-ce que miss Mandragoran pouvait bien me vouloir ce soir ? Nombreux étaient les élèves à demander des conseils à leurs professeurs en dehors des cours, mais je ne me souviens pas qu’elle ait déjà fait ce genre de démarche. Elle devait réussir à faire ses travaux seule. Malgré tout, je n’allais pas lui dire non si elle avait besoin de mon aide. Quel prof serais-je si je ne l’aidais pas ? Malgré certains qui ne me voyaient que comme un amateur de café, je savais faire mon travail. J’avais donc sans hésitation accepté sa demande et, le soir même, elle se présenta devant mon bureau. Le contraire aurait été étonnant, c’était elle qui voulait me voir. Je l’invitais donc à entrer dans mon bureau, refermant la porte derrière elle.
« Bonsoir, mademoiselle. Asseyez-vous je vous prie. Pourquoi vouliez-vous me voir ? »
Tandis qu’elle s’installait sur la chaise des convoqués, je prenais place de mon côté du bureau, tout ouvert pour l’écouter.

Le début de son discours semblait assez maladroit, mais il posait bien la situation tout de même. Si elle voulait m’en parler plus longuement que le temps que je pourrais lui accorder à la fin d’un cours, ça devait sûrement être un sujet vaste, ou au moins pointu. Le fait qu’elle ne trouve pas de réponse à la bibliothèque me mettait tout particulièrement la puce à l’oreille. Les rayonnages de Poudlard étaient assez fournis pour répondre à la plupart des questions des élèves. Si elle ne trouvait rien à ce sujet, il s’agissait sûrement de quelque chose d’un niveau plus évolué que ce que l’on enseigne ici. Elle précisa rapidement ce qu’elle cherchait, et dès ses premiers mots je savais que j’allais finalement devoir assumer les conséquences de mes cours de l’an dernier, aux cachots. Je savais que ce jour finirait par tomber où un élève voudrait en savoir plus sur l’art de la magie sans la nécessité de la baguette, je n’étais pas étonné ni effrayé. J’étais prêt. Et puis, après tout, il valait mieux bien les encadrer plutôt qu’ils provoquent des cataclysmes un peu partout dans le château en s’essayant à cela sans protection, sans conseils et sans garde-fou. D’autant plus que la première approche que j’avais faite avec eux portait sur des sorts de feu pour pouvoir se défendre. Autant dire que s’ils prolongeaient les essais seuls, c’était dangereux.

Et les questions fusèrent, des questions assez théoriques, des questions plus pratiques. Elle avait soif de connaissances, et c’était tant mieux, se renseigner au maximum était une bonne chose. Dans cette voie, il valait mieux être préparé au mieux. C’était un travail à faire en amont pour être prêt pour la suite. M’éclaircissant la gorge, je me lançais donc pour lui répondre.

« Je vois. Vous êtes la première à revenir me voir à ce sujet, je me doutais bien que certains d’entre vous seraient intéressés par la magie sans baguette – et non informulés, mélanger les deux sera une autre histoire. Se renseigner à ce sujet est important, et je vous félicite d’avoir franchi le pas de ma porte pour me poser ces questions. »
Tous n’auraient pas ce cran, certains préfèreraient sûrement faire leur affaire dans leur coin. Possiblement en demandant un accès à la réserve, ils se multipliaient ces derniers temps.
« La magie fait partie intégrante du sorcier, en effet. Personne n’a su s’accorder sur ce qui faisait la différence entre un sorcier et un moldu fondamentalement, la magie apparaît simplement chez certains individus, avec plus ou moins de probabilité en fonction de l’ascendance. Comme vous l’avez souligné, le seul point de détail sur lequel tout le monde s’accorde est le fait qu’elle est bien relative à chacun, et non tirée d’une source de puissance invisible. »
Avec la technologie, les moldus auraient effectivement eu tôt fait de pouvoir s’en servir aussi, à condition évidemment qu’ils apprennent notre existence, et qu’on ne les oubliette pas avant qu’ils puissent en tirer profit.
« Cela étant, bien que naturelle, ça ne veut pas dire que la magie est contrôlable facilement. Elle coule naturellement en nous, sans qu’on puisse la contrôler. C’est pour cela que la plupart des enfants en bas âge arrivent à déclencher des éclats de magie qui permettent de savoir s’ils en sont doté. Il s’agit simplement d’un trop plein accumulé pendant leur plus jeune âge qui finit par ressortir tout seul, sans contrôle. Si vous voulez un parallèle simple, vous avez du sang en vous qui coule en continu ? Et pourtant, si je vous demande de maîtriser votre sang, ou même votre circulation sanguine, vous n’arriverez pas à grand-chose… » une courte pause « Sauf si vous pratiquez certains exercices pour contrôler un minimum votre corps. C’est un apprentissage naturel pour contrôler une force naturelle, et c’est ce qu’il faut aussi pour la magie. Et cette comparaison ne s’arrête pas là. Vous parliez des catalyseurs, et une fois de plus pour contrôler le sang vous avez également besoin de catalyseurs. Des potions ou médicaments pour les personnes dont la circulation est défaillante, ou bien dans les hôpitaux moldus il y a des machines qui contrôlent la circulation à la place du corps. »
Moi aussi je m’emportais dans ma réponse, mais c’était un domaine vaste mais pas moins intéressant. D’autant que ses questions ne portaient même pas encore vraiment sur la magie sans baguette.
« Dans le cas de la magie, c’est donc la baguette qui sert de catalyseur. A ma connaissance, on n’en a pas trouvé d’autres, et puis elle marche bien. » concluais-je comme un point de départ pour le reste du sujet.

Elle était la première à venir le voir à ce sujet, sérieusement ? Elle n'avait bien évidemment pas énormément parlé de ses interrogations aux autres nés-moldus, mais elle était réellement surprise de voir que le cours de Mr Winslow n'avait pas soulevé plus d'interrogations que ça, surtout depuis tout le temps qui s'était écoulé depuis. Ce fut donc avec une certaine fierté qu'elle accueilli les félicitations du Professeur concernant son initiative. Qu'il ait souligné le fait que ce sujet était important la ravie d'autant plus. Ayant été privée de sa baguette durant une année, incapable de se défendre contre quiconque, elle se rendit compte d'à quel point cette technique pouvait être importante. En fouillant de part et d'autres de la bibliothèque elle remarqua également à quel point le sujet était bien trop vague. Quelle était la véritable origine de la Magie ? Comment prenait-elle sa source chez les Sorciers et pourquoi disparaissaient-elles parfois chez les Cracmols ? Qu'est-ce qui faisait qu'au final, l'on est capable ou non d'utiliser la Magie ? Elle espérait fortement pouvoir trouver un bon nombre de réponses aujourd'hui.

- Les probabilités sont parfois vraiment étranges, je trouve. De ce que j'ai pu voir en fait surtout en comprenant l'arbre généalogique de beaucoup... Certains nés-moldus sont plusieurs d'une fratrie à posséder de la Magie. D'autres familles sang-pur se retrouvent avec des Cracmoles... Parfois j'ai l'impression que ça ressemble à de la loterie pourtant quand mes parents me parlent de la génétique animale concernant certaines espèces, ça ressemble vraiment pas à de la loterie. Ils m'ont également dit que la génétique humaine ressemblaient aussi à ça. Et ça fait du sens, surtout depuis que j'ai apprit que mon grand-père était en fait un Cracmole d'une famille de sang pur. Ce qui explique pas mal pourquoi ma sœur et moi on est des Sorcières. Mais pas vraiment le cas de ma cousine Tracy qui est du côté Moldu de ma famille.

L'exemple que le Professeur sorti sur le sang qui circule donna une image assez clair dans l'esprit de la jeune fille du propos qu'il voulait illustrer. Peut-être que les Sorciers possédaient une sorte de flux en eux qui circulent comme du sang ? Et qui demande la connaissance du corps et beaucoup d'entraînements pour le contrôler ?

- C'est pourtant quelque chose de fou de pouvoir utiliser la Magie sans catalyseur ! Puisque c'est possible pourquoi personne n'essaie vraiment ? Pourquoi ce n'est pas populaire ? Vous êtes le seul à nous avoir parlé de cette possibilité jusqu'à maintenant... Et ç'aurait été un super avantage pour nous l'an dernier, sans les baguettes.

Au plus elle y réfléchissait, au moins elle comprenait comment le monde des Sorciers avait pu passer cette opportunité... Elle n'était pourtant pas inaccessible et si personne ne travaillait dessus, il était certain que la complexité et l’incompréhension allait rester de mise encore longtemps sur le sujet.

Peut-être que d’autres suivraient sa lancée, mais pour l’instant, elle était la seule à s’intéresser suffisamment au sujet pour venir me demander des informations. On verra bien jusqu’où ira la discussion, si je finirai par l’entraîner à cet art pour bien la cadrer, si j’attendrai quelques jours pour voir si d’autres se manifestaient soudainement… Pour l’instant, l’heure était au dialogue, un dialogue composé de répliques étonnement longues. Elle n’était pas sans me rappeler Joanne Griffith qui savait très bien bombarder les questions. Là, c’était un peu la même chose, traduisant une grande curiosité que j’étais tout à fait volontaire à satisfaire. La discussion s’articula tout d’abord autour des origines mêmes de la magie et sur son caractère personnel. Il n’y avait pas de puits de magie dans lequel on piochait, les baguettes n’étaient pas chargées de magie, elle venait simplement de chaque sorcier. Les probabilités parfois étranges de la transmission de la magie étaient encore assez peu connues, à part des hypothèses assez évidentes comme le fait que deux sorciers ont de grandes chances de faire un enfant sorcier, tandis que deux moldus ont une chance bien plus faible. Ce qu’elle ne manqua pas de souligner.

« Il y a du hasard dans énormément de choses en ce monde. Que l’apparition et la transmission de magie soit parfois aléatoire ne m’étonne qu’à moitié. Et c’est bien pour cela que tout le monde n’arrive pas à s’accorder sur les origines de la magie. »
Les cracmols, les nés-moldus, les sang-purs, les sang-mêlés… Il n’y avait pas tant de catégories que ça, mais leur intrication était complexe. Prévoir à l’avance où apparaîtraient certains comme les nés-moldus et les cracmols était quasi impossible. Et pourtant, nombre de théoriciens s’y étaient essayé. Mais finalement, on ne détectait les nés-moldus que quand leur magie se réveillait, et on ne détectait les cracmols que quand on se rendaient compte qu’ils étaient incapables d’en produire. La métaphore de la loterie n’était pas si farfelue après ce constat. Et si on y mêlait la génétique vue par les moldus, on aurait très vite fait de s’y perdre encore plus.

Et pour en revenir à la magie sans baguette, la question de l’utilisation presque inexistante dans nos pays tomba. C’était une question qui pouvait sembler difficile, mais je pense que la réponse était plus simple que ce que l’on pourrait imaginer.
« C’est tout simplement un effet de mode, ou de fainéantise. Dans nos pays européen, on est habitués à avoir une baguette très tôt, et il est plus facile d’utiliser la magie avec cette baguette. Mais il n’en est pas de même partout. En Afrique, par exemple, la baguette existe très peu, et la magie sans est bien plus répandue qu’ici. Si tout le monde n’y prête pas attention ici, c’est simplement culturel, dans notre culture un sorcier a une baguette et c’est comme ça, aussi fermé que soit cette pensée. »
Ce qui n’empêchait pas certains curieux de se pencher sur le sujet. Sans forcément chercher à se démarquer du reste de la population, cet art pouvait présenter bien des avantages pour ceux réussissant à le manier. Et c’était ça qui m’avait amené à m’y pencher, et qui semblait l’amener à en faire autant.
« L’utilité de la magie sans baguette est indéniable en effet. Quand on est désarmé, de quelque façon que ce soit, on n’est plus aussi impuissant que quand on se repose uniquement sur sa baguette. Il y a des avantages et des désavantages à l’utilisation de la baguette, et peut-être que maîtriser les deux est la meilleure option, permettant de choisir la bonne utilisation de la magie en fonction de la situation. »