Fringale Nocturne

Je savais que revenir à Poudlard allait être dur, mais je ne m’imaginais pas que ce serait aussi dur. Certes, nous ne sommes plus sous le règne tyrannique de Blackman, je ne suis plus considérée comme une esclave et je peux retrouver un semblant de liberté mais tout de même. Chaque partie du château est désormais le foyer d’un souvenir douloureux, pour moi comme pour tous et j’ai du mal à reconsidérer cet endroit comme ma maison après tout ce qu’il s’y est passé. Les choses ne seront plus jamais comme avant et il est assez dur de rester dans un endroit qu’on a envie de fuir. Je suis consciente que le temps est supposé être le meilleur allié pour ce genre de situations mais bon. Dans l’immédiat, je n’y crois pas trop. Ou je n’en ai pas envie. Disons qu’en prime je ne suis pas aidée avec ce fichu redoublement qui me mine le moral. Comment voulez-vous que je trouve la moindre motivation pour aller de l’avant ou faire quoi que ce soit si on m’éloigne de mes amis et si je dois retaper une année alors que ce n’est même pas faute d’avoir étudié ? Je n’ai tout bonnement pas pu à cause de ces Mangemorts à la c*n. Je déteste avoir la sensation de régresser. J’imagine que le Choixpeau ne m’a pas envoyé à Serdaigle pour rien.

Je me retourne une énième fois dans mon lit, cherchant la position idéale pour essayer de m’endormir. Pourtant je sais d’avance que Morphée m’a oublié cette nuit. Ou alors je lui suis insensible. On pourrait pourtant croire qu’après cette première semaine de cours je sois bien fatiguée mais …. Visiblement, je n’ai pas hâte de voir ce que mes rêves me réservent cette nuit. Depuis mon retour à Poudlard, ils ont la fâcheuse tendance à me faire revivre des horreurs dont je me passerai bien. A croire que mon cerveau et mon subconscient se sont ligués contre moi ! Je ne suis pas la seule dans ce cas. Tracy et Alaska qui étaient également dans les cachots, quoi que moins longtemps pour la première, n’ont pas des nuits faciles elles non plus. Nous n’en parlons peut-être pas mais je l’entends très bien. Après encore quelques longues minutes, je décide de rendre les armes. Je fixe le plafond de mon lit à baldaquin, songeuse, avant de m’extirper de mon lit. Je farfouille dans mon sac pour en sortir un bouquin ainsi que ma baguette avant de fuir mon dortoir. Quitte à ne pas dormir, autant lire un livre pour se changer les idées. Pas de manuel ni de grimoire pour une fois, seulement un bon vieux fantasy. J’attrape au passage un gilet avant de me diriger dans la salle commune qui n’est malheureusement pas vide malgré l’heure tardive.

Je suis en train de descendre les escaliers quand je remarque une silhouette qui se déplace à travers la pièce. Elle se retourne vers moi au moment où je m’arrête et je n’ai aucun mal à reconnaître Casey. « Oh, salut ! » Aux inflexions de sa voix, je devine qu’elle ne s’attendait pas non plus à ce que quelqu’un d’autre ait l’idée de squatter la salle commune en plein milieu de la nuit. « Salut. » Un dernier coup d’œil dans la pièce m’indique que nous ne sommes que toutes les deux et je remarque également que le feu de la cheminée est allumé. J’en conclus que Casey s’en est chargé parce qu’elle ne comptait pas dormir de sitôt. J’ai toujours eu un peu de mal à cerner cette fille et je me demande l’espace d’un instant si rester dans la même pièce qu’elle est une bonne idée. D’un autre côté, je n’ai aucune envie de retourner dans le dortoir donc la réponse est vite trouvée. Je finis de descendre les escaliers. « J’imagine que je ne suis pas la seule à avoir du mal à dormir… » je remarque. En soit cette phrase n’attend pas particulièrement de réponse. C’est un fait. Aucune de nous deux ne serait là dans le cas contraire. Je m’installe dans un fauteuil à proximité du feu, posant mon livre et ma baguette sur mes genoux et fixant l’âtre un moment. Je n’ai jamais été vraiment douée pour faire la conversation. A part balancer des vannes ou des remarques pourries, je ne gère pas trop. C'est plutôt le domaine de Savannah et je dois admettre que je ne sais pas trop comment elle fait. Je pourrai me mettre à lire mon livre comme ça, ça résoudrait mon problème mais je me retiens. Finalement je me retourne vers la brune. « J’ai faim. Y aurait pas un truc à manger ? J’ai plus de réserves là-haut… » Comme pour soutenir mon propos, mon ventre se met à grogner. Bah quoi, ne pas réussir à dormir ça creuse mine de rien !

Fringale Nocturne

J’ignore si les choses reviendront un jour à la normale. J’ignore combien de temps ces insomnies m’empêcheront de faire des nuits entières. J’ignore combien de temps il faudra avant que ces souvenirs qui tournent dans ma tête s’estompent et arrêtent de me hanter. Un an ? Dix ? Une vie entière ? Allez savoir. Ce que nous avons vécu l’année passée est encore trop frais et bien que peut-être pas insurmontable, difficile à oublier. Et il est évident que je ne suis pas la seule dans cette situation. J’imagine que des dizaines de corps se retournent inlassablement chaque nuit à la recherche de repos. Personnellement, je me refuse à aller à l’infirmerie pour me droguer avec je ne sais quelle potion qui me rendra le sommeil facile. C’est sans doute puéril de ma part, mais j’estime que c’est à moi de me battre avec mes démons intérieurs. Ce n’est pas en m’assommant chaque nuit que je parviendrais à surmonter tout ça. Néanmoins, actuellement mes démons ont décidé de s’attaquer à autre chose que mon sommeil… Ma faim. J’en fait part à ma camarade nocturne dans l’espoir qu’un miracle se produise et qu’elle ne fasse apparaître un quelconque en-cas. Sérieux, je crois que je pourrais avaler n’importe quoi là ! « Malheureusement je viens de faire le tour de la Salle Commune et je n’ai rien trouvé… Mes réserves sont vides aussi... » C’est officiel, ma vie c’est vraiment de la merde. Je ne suis pourtant pas compliquée ! Je ne demande pas la lune ! Malgré cela, en plus de m’empêcher de dormir, on m’empêche de manger. Par tous les dieux et par tous les sorciers, cette année sera vraiment horrible sur toute la ligne. Déçue et malheureuse comme tout, je m’enfonce un peu plus profondément dans le fauteuil, prête à lancer mon regard le plus glacial à l’âtre et à laisser mon ventre lui faire entendre tout son mécontentement. Je ne pourrai clairement pas attendre le petit déjeuné de demain matin … « Je crois bien que le seul endroit qui contienne encore de la nourriture dans ce château, ce sont les cuisines... » Continue Casey, ce qui n’est pas vraiment pour m’aider. J’ai faim quoi ! Je suis sûre que des élèves ont dans leurs dortoirs des réserves mais je me vois mal débouler en plein milieu de la nuit pour leur demander d’assouvir ma faim. Néanmoins, je crois que certains petits elfes de maisons se feraient un plaisir d’exaucer mes souhaits culinaires. Il suffirait juste de descendre en cuisine. Surtout si c’est le seul endroit avec de la nourriture comestible dans ce château. Subitement enjouée par cette perspective, je me redresse et tourne doucement la tête avec des yeux pétillants d’excitations vers Casey, qui effectue la même chose de son côté. Je remarque qu’elle se mord la lèvre, comme si elle s’empêchait de prononcer à voix haute ce qu’elle a en tête. Un large sourire commence à étirer mes lèvres. « Est-ce que tu penses à ce que je pense ? » je demande, malicieuse. Je sais que ce n’est techniquement pas autorisé de se balader la nuit dans les couloirs après le couvre-feu mais pour être honnête, c’est bien le cadet de mes soucis ! Ce n’est pas marcher dans un château de nuit qui va me faire peur. Par contre, je ne sais pas si Casey partage cet avis. « Miss Beckett, que diriez-vous d’une petite excursion nocturne ? » Je demande d’un air mutin. Un petit peu d’aventure, je crois que c’est ce qu’il me manquait de toute façon pour me remonter le moral. Avec un peu de nourriture. Voir beaucoup. Et puis, cela faisait bien longtemps que je n’avais pas fait le contraire de ce qu’on me demandait de faire et … Il est temps d’y remédier.

Fringale Nocturne

Je sais pertinemment que, techniquement, nous ne sommes pas autorisées à sortir de notre dortoir la nuit une fois le couvre-feu passé. Il paraît que c’est pour notre sécurité. Après les évènements de l’année passée, je trouve cette excuse totalement pitoyable. J’estime que ce n’est pas ça qui mettra ma vie en danger après ce que j’ai vécu et ce n’est clairement pas me promener de nuit dans les couloirs qui va m’effrayer. Surtout quand de la nourriture est en jeu. Alors certes si quelqu’un nous trouve, nous serons dans de beaux draps mais qu’importe. Je compte bien jouer la carte de la née-moldue marquée à vie, insomniaque et en manque d’espace dans sa parfaite petite salle commune. Comme si j’allais me gêner tiens. Au pire, je me ferais virer de l’école mais sérieusement, je doute qu’on en arrive à ce stade : ils n’oseraient pas en arriver jusque-là et après tout ce qu’il s’est passé l’année dernière, ce serait abusé. Et puis, après tout je n’attaque personne, je crève juste la dalle. Je ne devrais sans doute pas penser de la sorte ni même entraîner une camarade dans cette histoire mais je dois avouer que … C’est plus fort que moi. Et je suis d’autant plus contente quand Casey m’annonce qu’elle partage la même idée que moi. Je ne la connais pas vraiment mais je sens que nous allons bien nous entendre, au moins sur ce point. Elle ne fait pas partie de ces Serdaigles chiants à mourir qui suivent scrupuleusement le règlement. « J’en dis que je suis plus que partante, Miss Caldwell. Après vous. » Presque théâtralement, Beckett se décale et me fait signe de passer la première. Mon sourire mutin ne se fane pas tandis que je me lève, pose mon livre sur le fauteuil sur lequel j’étais assise et avance jusqu’à la sortie de la salle commune. Avant d’ouvrir la porte, je vérifie que ma baguette se trouve bien dans ma poche et me retourne pour lancer un ultime sourire complice à ma partenaire de crime de la soirée. Allons chercher à manger !

Il faut admettre que c’est assez grisant de se promener ainsi dans les couloirs alors que nous sommes supposées être dans notre dortoir. J’en ai la chair de poule tellement je suis surexcitée. Un peu plus et je me mettrai à sautiller au lieu de marcher silencieusement. C’est exactement de ça dont j’avais besoin, de cette décharge d’adrénaline qui me prouve que malgré tout ce qui se passe et toutes les pressions quotidiennes, je suis toujours bel et bien en vie et capable de faire ce que je veux. Certes ce que je veux peut-être répréhensible mais qu’importe. Le tout est de ne pas se faire attraper. Aussi, je prête une oreille attentive à notre environnement et je suis sûre que Casey fait de même. Instinctivement, nous suivons le chemin que nous utilisons tous les jours pour nous rendre au cours de Potions. Savoir que les cuisines sont proches des cachots ne me met pas plus à l’aise que ça, je n’aime pas vraiment retourner dans ce coin là mais il faut revoir ses priorités et à l’heure actuelle, je veux manger. Je n’ai pas à m’inquiéter plus que cela, ces cachots ne sont plus qu’un horrible souvenir, il n’y a plus de Mangemorts dans le château. Malheureusement, même si nous connaissons le chemin, il semble que cela va nous prendre plus de temps que prévu. En effet, les escaliers se montrent particulièrement capricieux ce soir, comme si ils ne voulaient pas nous laisser nous nourrir. « Il va nous falloir de la patience... » murmure Casey et j’hoche la tête dans un grognement. C’est clair que si ils la jouent comme ça, on ne va pas être potes longtemps eux et moi. Et je ne suis pas certaine qu’ils aient particulièrement envie de me voir en colère quand j’ai faim. Déjà que je dois faire des efforts surhumains pour que mon ventre ne grogne pas et ne réveille tous les tableaux environnants … Je suis rapidement coupée dans ma réflexion bougonne par un bruit étrange qui retentit derrière nous. Je regarde Casey, lui faisant signe silencieusement de se taire. Je n’ai pas la moindre idée de ce que cela peut être mais ça n’augure rien de bon. On risque d’avoir un peu d’animation. Juste au cas où, je sors ma baguette.

1 & 3 - Le reflet d’un fantôme finit par nous apparaître. Visiblement, il nous a remarqué parce qu’il se dirige droit sur nous. « Mesdemoiselles, que faites-vous en dehors de vos dortoirs par une heure si tardive ? C’est interdit par le règlement ! Je devrai alerter sur le champ le concierge et le Directeur. » S’il nous dénonce, on est vraiment dans la panade. Il ne faut pas le laisser faire sinon on n’est pas prêtes de manger. Que faire ? Vite, il me faut de l’inspiration. « Pas besoin. Il est très noble de votre part de remplir ce rôle de veilleur à la perfection mas nous faisons partie de l’armée de Londubat. Il a engagé un petit groupe d’élèves pour surveiller le château la nuit pour éviter que les évènements de l’année dernière ne se répètent. Normalement nous devons être plus discrètes mais apparemment nous avons encore des progrès à faire à ce niveau. Vous n’étiez pas au courant ? » Je demande de manière ingénue en penchant la tête sur le côté pour lui faire avaler ce mensonge. Dans la précipitation, je me suis inspirée de l’Histoire de Poudlard. Londubat lui-même a fait partie de l’armée de Dumbledore pendant sa scolarité. On peut parfaitement imaginer qu’il a fait de même. Maintenant il n’y a plus qu’à espérer que Monsieur le Fantôme gobe ça et nous laisse tranquille. S’il ne me croit pas on fait quoi ? On court ?

2 & 5 - Pour ne pas tenter le sort et ne pas risquer de nous faire repérer par un veilleur ou un préfet, j’attrape précipitamment Casey par le poignet et cours à toutes jambes dans le couloir, frôlant les murs, avant de nous cacher derrière un épais rideau. Lorsque je m’arrête, je suis pliée en deux. Pas parce que j’ai le souffle coupé, non, mais parce que je suis totalement hilare. Bon par contre, je crois que nous nous sommes un peu éloignées voir même perdues mais bon … « Tu crois qu’on a été suivies ? » je demande dans un souffle à Beckett.

4 & 6 - A l’entente du bruit je me retourne et plisse les yeux en provenance du son. Après quelques secondes d’attentes, un chat fini par s’approcher de nous et par détaler quand il nous remarque. Je pousse un léger soupir, remarquant que j’avais retenu ma respiration. On peut continuer notre périple vers les cuisines. Sauf que de nuit, c’est plus compliqué que ce que j’avais pensé. J’ai l’impression de ne rien reconnaître. Est-ce que j’ai d’ailleurs déjà mis un jour les pieds dans ce couloir ? Je n’en suis même pas sûre … C’est assez difficile de savoir où on va en fait. Un peu troublée, je me retourne vers Casey « Tu sais où on est ? Parce que moi pas du tout… » je lui avoue en chuchotant.

Fringale Nocturne

Mon cœur se met à battre à cent à l’heure tandis qu’une dizaine de scénarios différents prennent places dans mon cerveau. Je me dis que ce sont les mangemorts qui sont revenus, je me dis qu’on va nous dénoncer, j’imagine que nous allons passer un sale quart d’heure. L’année déroulée a visiblement laissé des séquelles et un traumatisme qui ne s’effaceront pas de sitôt. Casey et moi restons parfaitement immobiles, attendant de voir ce qui se cache dans les ténèbres du couloir. Je ne vous dis pas le soulagement quand c’est finalement un chat qui pointe le bout de son nez. Rassurées, nous reprenons silencieusement notre chemin en direction des cuisines. Enfin, je supposais qu’il s’agissait de la direction pour aller aux cuisines, mais plus nous avançons, plus je me mets à douter. Troublée, je demande son avis à ma camarade. Normalement, je ne suis pas le genre de personne qui se réfère à l’avis des autres, surtout « d’autres » que je ne connais pas particulièrement. J’aime bien faire les choses à ma manière et voir ce que ça donne. Mais là, clairement, ça donne pas grand-chose. Visiblement, Casey n’est pas plus avancée que moi. Elle a tout de même le réflexe de prendre sa baguette pour utiliser Lumos et voir plus précisément où nous sommes. Aux aguets, j’observe avec attention tout autour de moi pour nous assurer que nous sommes seules. En tout cas, je confirme que je ne connais pas ce couloir. Etrange… « Je n’en ai aucune idée. » m’indique finalement ma cadette. Mais où est-ce qu’on a pu tomber ? Ca fait quand même un bon de temps qu’on les arpente ces murs, et on est infichues de savoir où on est le soir fatidique où on crève la dalle ? C’est vraiment pas cool.

Afin d’éviter de nous perdre encore plus, nous tentons de revenir sur nos pas. La logique voudrait que nous reconnaissions le chemin précédemment emprunté et que nous retombions sur l’escalier. Mais au lieu de me retrouver, j’ai l’impression que les couloirs nous mènent encore plus en bateau. On nous avait jamais averties que la nuit il y avait des sortilèges de confusions ! Ou alors c’est qu’on a vraiment un mauvais sens de l’orientation. Cette seconde option serait fort probable mais quand même, que nous soyons deux filles débrouillardes qui réussissent à se perdre en 10 minutes chrono, c’est quand même fort ! Nous finissons par tomber sur une intersection qu’il ne me semblait pas avoir déjà vu. Sérieusement, c’est quoi ce bordel ce soir ? Perplexe, je suis Casey qui décide d’aller à droite. Vraiment, je trouve tout cela étrange. Est-ce un dispositif de sécurité instauré par Londubat pour ralentir une potentielle invasion ? Il faudrait que je me renseigne à l’occasion parce que même si c’est moi qui en fait les frais, c’est dans le fond plutôt intéressant. Je me demande si Zach, en tant que préfet, est au courant de quelque chose. Perdue dans mes pensées, j’ai arrêté de faire attention à ce qu’il se passe autour de moi depuis plusieurs secondes déjà. Je ne reviens à l’instant présent que lorsque j’entends un espèce de fracas, comme si quelque chose de lourd tombait des escaliers. Je m’arrête net et regarde à côté de moi, mais je ne trouve pas la personne qui devrait y être. « Casey ? » J’appelle doucement, tâtant le vide à côté de moi à l'endroit où elle se trouvait quelques secondes plus tôt. N’ayant pas de réponse, je lance à mon tour un Lumos pour y voir plus clair. C’est en découvrant les escaliers à quelques millimètres de mes pieds que je comprends. Je les dévale à toute vitesse et manque de percuter Casey quand j’arrive en bas des escaliers. « Ca va ? » Je chuchote en arrivant à sa hauteur. Je vois qu’elle se tient le poignet et que son expression n’indique pas vraiment du bonheur. Je me penche à sa hauteur pour l’observer avant de pointer ma baguette dessus. « Episkey » je murmure. Ce sort appris en 4ème année devrait la soulager instantanément. Il ne faudrait pas qu’elle ait des séquelles de notre escapade sinon les gens risqueraient de se poser des questions. Enfin, si on arrive à rentrer au dortoir avant le lever du soleil s’entend.

2, 4, 5, 6 – Evidemment que le sortilège fonctionne. Je ne suis pas à Serdaigle pour rien.
1, 3 – Il faut croire que je commence à rouiller. Aider les gens n’est pas ma spécialité. Je lance un regard désolé à Casey. « Les Elfes de Maison devraient pouvoir arranger ça. » Si on arrive jusqu’aux cuisines s’entend.

Ceci étant fait, je regarde autour de nous. Casey a effectué une belle chute, il faut l’avouer. Ce serait d’ailleurs étonnant qu’elle n’ait pas réveillé la moitié de l’étage. A ce sujet… A quel étage sommes-nous ? En regardant autour de nous, j’ai l’impression de reconnaître le premier étage. « Grâce » à Casey, nous sommes descendues plus vite. Malheureusement, comme je le craignais sa chute à fait un peu de bruit. Des bruits de pas s’approchent de nous. On ferait mieux de filer ! Même si je trouve le nouveau directeur plutôt mignon, je n’aimerai pas me retrouver nez à nez avec lui là, tout de suite.

Fringale Nocturne

Que d’histoires pour une simple fringale. Il faut avouer que se perdre dans les couloirs de l’école et manquer de se briser le crâne en dévalant les escaliers à toute vitesse ne faisait pas partie du planning de ma soirée. J’avais plutôt en tête une soirée posée au coin du feu à lire un de mes bouquins préféré mais … Au final, ce n’est peut-être pas plus mal. J’avais soif d’aventures. Je commence à me sentir oppressée entre ces murs avec cette histoire de redoublement et tout ce qui va avec. Il était temps que je me change les idées et que je flirt avec le règlement. Cela faisait bien trop longtemps que je n’avais pas laissé mon âme rebelle prendre le contrôle. Ceci dit, jamais je n’aurais pensé que je le ferai en compagnie de Beckett. Outre le fait que je suis relativement solitaire, on ne peut pas dire que Casey et moi soyons les plus grandes amies du monde. J’ai toujours eu la sensation qu’elle me jaugeait du regard dès que l’on se croisait, comme si elle espérait deviner quelque chose simplement en m’observant. Quoi ? Allez savoir. Ajoutez à cela notre année de différence, et vous comprendrez pourquoi je n’ai jamais vraiment essayé de faire amie-amie avec elle. Je me contentais de liens amicaux que j’essaie simplement d’entretenir avec les membres de ma maison pour me rendre la vie plus facile, à quelques exceptions près telles que Logan. Mais cet idiot ne mérite même pas que je pense à lui. Pour en revenir à nos moutons, nous n’en sommes pas encore au stade où nous sommes prêtes à jeter l’autre par-dessus les escaliers, ce qui est plutôt positif ! Non pas que ce soit moi genre de faire ça mais on ne sait jamais, il faut être prêt à se défendre quand les circonstances l’exigent. Mais là, ni elle ni moi n’avons besoin de l’autre pour se casser la gueule dans les escaliers. On y arrive très bien toutes seules. Enfin, surtout elle, même si moi je frôle la catastrophe à quelques centimètres près. Fort heureusement, je parviens à garder le contrôle et à effectuer avec succès le sortilège qui permet de soulager le poignet de la jeune fille. Elle me remercie et je lui signifie d’un signe de tête que c’est tout naturel. Malheureusement, le fracas engendré semble avoir alerté du monde. Je ne sais pas qui au juste mais je ne préfère pas savoir. Et visiblement, Casey semble partager mon avis. Un simple regard nous met d’accord. On ne va pas s’attarder ici au risque de se faire attraper sans même avoir récupéré une petite collation. La bonne nouvelle, c’est qu’on se trouve au premier étage. En d’autres termes, plus proches que jamais des cuisines. Nous remettant sur nos pieds, nous empruntons finalement le bon escalier pour nous rendre au Hall. A partir de là, c’était un jeu d’enfant, si ce n’est qu’il fallait que l’on descende aux cachots. Ni Casey ni moi ne pouvions oublier ce qui nous était arrivé là-bas, c’est encore bien trop frais et trop vif dans notre mémoire. Je remarque l’hésitation de Casey et ce serait mentir que de dire que tout va bien pour moi. Des images de tout ce que nous avons subi ainsi que diverses sensations de terreur et de peur me frappent de plein fouet comme à chaque fois que je me retrouve vers ces lieux. Comme d’habitude, je ne laisse rien paraître mais comme d’habitude, c’est un véritable champ de bataille émotionnel. Pourtant, toutes les semaines je dois l’affronter pour aller au cours de potion. C’est bête me direz-vous parce que dans le fond, je sais pertinemment qu’il n’y a plus de Mangemorts et que je ne risque techniquement plus d’être traînée et torturée comme un vulgaire animal mais que voulez-vous… Le traumatisme subsiste. Et il est d’autant plus présent dans l’obscurité offerte par la nuit. Casey est la première à réagir, rompant cet espèce de trouble macabre qui nous étreint. Sans prononcer le moindre mot, je m’avance à sa suite, empruntant le petit escalier qui s’illumine sur notre passage, nous révélant des tableaux de victuailles comme pour nous souhaiter la bienvenue et nous faire oublier que nous nous enfonçons dans les entrailles du château. Arrivée devant un tableau représentant une coupe en argent remplie de fruits, je m’arrête. Je sais que c’est celui-là, et je connais la marche à suivre. Sans hésiter, je chatouille du bout du doigt une énorme poire verte. Il ne faut pas longtemps avant que celle-ci s’anime, se torde de rire et se transforme en poignée de porte. « Enfin ! » Je lance un sourire complice à Casey puis me saisit de la poignée. « Après vous, Miss Beckett. » Je murmure doucement et malicieusement tandis que j’ouvre la porte. Je m’empresse d’entrer à sa suite et de laisser mes narines me porter au paradis des odeurs. Tandis que je salive sans encore avoir de nourriture, les Elfes de maison nous remarquent et nous font la fête, nous demandant ce que nous désirons, nous dirigeant vers les bancs pour que nous nous asseyions. « Je prendrai bien un peu de tarte au citron, des muffins et un chocolat viennois. Et toi Casey ? » Je demande avec des étoiles pleins les yeux. Mon ventre me fait la fête tandis que les Elfes attendent d’exaucer nos souhaits. Enfin, nous y sommes parvenues ! Et je vais pouvoir me goinfrer jusqu’aux premières lueurs du jour.

Fringale Nocturne

C’est officiel. Je suis présentement au paradis. Ou du moins, à ce qui s’y rapproche le plus dans les circonstances actuelles. Au lieu de passer une simple nuit blanche avachie dans un canapé de la salle commune de ma maison avec un bon livre mais sans une once de nourriture, je me retrouve dans la plus grande cuisine magique que je connaisse, entourée d’Elfes de maisons prêt à tout pour répondre au moindre de mes désirs culinaires. Si c’est pas le rêve ça ! Bon certes, si un adulte nous trouvait là, Casey et moi, on serait certainement punies à vie pour ne pas avoir respecté le couvre-feu mais c’est à l’heure actuelle le cadet de mes soucis. Tout ce que je veux, c’est pouvoir manger. Mon ventre me donne l’impression que je ne l’ai pas nourri depuis une semaine et ce n’est pas la douce odeur qui règne dans la pièce qui m’aide vraiment à refouler les grognements de cet estomac capricieux. « Une part de tarte à la framboise, de la mousse au chocolat et un chocolat chaud à la noisette. » J’hoche la tête avec un petit sourire, comme pour donner mon assentiment quant à ce choix. Attention, on ne plaisante pas avec la nourriture ! Et puis, on n’a pas fait tout ce chemin pour rien ! Je crois que j’aurais été passablement vexée si son choix n’avait pas valu la peine ! Non, je n’abuse pas. J’aurais pris ça pour une déclaration de guerre. Oui bon, j’ai peut-être besoin d’un peu de sommeil aussi. Dans tous les cas, tout va bien dans le meilleur des mondes et les Elfes s’empressent de préparer notre commande. J’en salive d’avance … Songeant aux différentes saveurs que je vais bientôt avoir devant moi, je ne cherche pas vraiment à faire la conversation et à remplir ce blanc qui commence à s’éterniser entre la jeune Beckett et moi. C’est quand même assez étrange. Nous ne nous sommes quasiment jamais parlées de notre vie, nous contentant de nous lancer quelques regards suspicieux et méfiants de temps et temps, et maintenant, on se retrouve à contourner le règlement pour nous rendre aux cuisines en plein milieu de la nuit. Ensembles. Soit le monde ne tourne pas rond, soit il tourne justement autour de la nourriture. « Nuit difficile ? » Je lève les yeux vers la jeune Serdaigle, la sondant quelques secondes du regard. A quoi fait-elle référence au juste ? A cette absence de sommeil commune ou à cette balade nocturne commune ? Dans un cas comme dans l’autre, on peut dire que nous sommes toutes deux vraiment concernées. Et c’est assez étrange de se considérer comme tel. Je ne pensais pas avoir beaucoup de points communs avec Casey mais je peux dorénavant en nommer plusieurs. Nous sommes toutes deux à Serdaigle, nous avons vécu presqu’une année entière enfermées dans des cachots et traitées comme des esclaves, Morphée nous oublie et maintenant, guidée par une même fringale nocturne, nous nous retrouvons dans les cuisines de l’école en plein nuit. Qui l’eut cru ! « Tu m’étonne ! En plein jour ça a pas l’air si difficile de venir ici ! Mais de nuit, c’est une toute autre affaire ! » Mais ça n’en est pas moins drôle. Franchement, cette petite aventure me fait me sentir vivante. Je n’en peux plus de ce sentiment d’oppression permanent. Toujours enfermée entre quatre murs, même s’ils sont plus grands que ceux du cachot… J’ai besoin d’espace. Et de nourriture à volonté. « Au moins nous allons être récompensées pour l’effort fourni ! » J’ajoute en tournant la tête vers les Elfes qui s’activent pour nous apporter notre commande. Une ombre passe soudain sur mon visage qui était pourtant illuminé par la pensée des sucreries qui allaient arriver. Maintenant que nous ne sommes plus des esclaves, ce sont aux Elfes de se remettre à toutes les tâches pour tenir le Château. N’est-ce pas abusé de notre part de débarquer au milieu de la nuit et de commander de la sorte ? N’est-ce pas ce pourquoi nous avons été libérés ? Je sais d’après les cours d’Histoire de la Magie et de tous les livres que j’ai pu lire que c’est dans la nature même des Elfes de Maisons d’occuper ce genre de place mais est-ce bien normal ? Tous ces questionnements me ramènent indubitablement à mes nuits sans sommeil. « C’est comme ça toutes les nuits pour toi ? Pas l’escapade, les nuits blanches je veux dire... » Je demande sans trop savoir pourquoi. Peut-être ai-je besoin de me rassurer et de me dire que je ne suis pas la seule à finir dans cet état. Enfin, je sais que je ne suis pas la seule, il me suffit d’écouter Tracy ou Alaska se retourner dans leurs lits chaque nuit et d’entendre leurs petits gémissements pour comprendre que leurs rêves ne leur font pas de quartiers. Je sais aussi que Sav’ n’est pas au meilleur de sa forme non plus mais bon … J’imagine que ça fait toujours du bien de savoir qu’on n’est pas seule…

Fringale Nocturne

L’attente est dorénavant carrément plus douloureuse. Avec les odeurs si délicieuses de la cuisine qui flottent dans les airs et sachant qu’il sera incessamment sous peu comblé, mon ventre me fait des misères. Il se tord et grogne comme un fou, à croire que je ne lui ai rien donné pendant le repas de la soirée. Que voulez-vous, je suis en pleine croissance ! « Effectivement, ça valait le coup. Les tartes à la framboise peuvent bien compenser un poignet endolori. » Tartes aux framboises, tartes aux citrons, tout ! Tant que du sucré empli ma bouche et contente mon estomac. Néanmoins, sa remarque attire mon attention sur son poignet et me rappelle sa chute. Je jette un regard inquiet à son poignet, essayant de distinguer s’il a gonflé ou non. En tout cas, il n’a pas l’air d’avoir doublé de volume, c’est déjà ça. Au moins, j’ai réussi mon sortilège, ça n’a pu lui faire que du bien. « Comment va ton poignet ? On peut demander des glaçons si tu sens que ça te chauffe. » Quand on a une tripotée de petits frères et sœurs, dont des jumeaux casse-cou, on connaît les premiers gestes qui soulagent. Y a plutôt intérêt si on veut éviter trop de pleurnichements. Evidemment si son poignet la fait encore souffrir, le mieux serait d’aller à l’infirmerie mais pour son bien, il faudra qu’elle attende demain matin si elle ne veut pas que Lennox la suspecte d’avoir enfreint le couvre-feu. En attendant, il faudra se satisfaire des bonnes vieilles méthodes.

Etonnamment, je me sens plutôt à l’aise avec Casey. C’est sans doute les balades nocturnes qui rapprochent. En tout cas, je me sens suffisamment à l’aise pour oser lui demander si elle souffre également des nuits blanches de manière régulière. Je ne suis pas le genre de filles à avoir besoin de faire constamment la conversation mais là, j’ai envie de savoir. Peut-être pour me sentir un peu plus proche d’elle. Peut-être pour me rassurer. Sous ses airs de fille inaccessible et mystérieuse que rien ne peut toucher, j’ai du mal à croire que rien ne l’atteint effectivement. Ce traumatisme que nous avons vécu, ça laisse forcément des traces. Je doute que sa présence dans la salle commune n’ait été qu’une simple coïncidence, surtout à une heure aussi avancée. « Depuis quelques temps, oui. Pas toutes les nuits, mais presque. » J’hoche la tête, compréhensive. Je n’ai aucun mal à comprendre que par quelques temps, elle entend depuis la fin des évènements, et très probablement depuis son retour dans l’enceinte de Poudlard. Remettre les pieds ici après ce qu’on nous a fait subir n’était pas une mince affaire. J’ai dû m’y résoudre parce que c’était la seule façon de pouvoir continuer mes études efficacement. Pourtant, mes nuits me le font regretter. Parfois, je me surprends à vouloir rentrer chez moi. Moi, qui n’ait jamais été très famille et plutôt du genre à les fuir, je voudrais me retrouver avec eux. « Toi aussi ? » Alors que j’étais en train de penser à ma famille, cette question me fait brutalement revenir à l’instant présent, ce qui est étonnamment douloureux. Si j’étais plus sensible, je me serais sans doute mise à pleurer… Mais, heureusement pour moi, je ne suis pas de cette trempe-là. Je parviens à cacher toute trace fugace d’émotion sous un masque d’impassibilité. En guise de réponse à sa question, je me contente d’hocher la tête en signe d’assentiment. Après tout, ma réponse est la même que la sienne. « On est dans le même bateau je crois. » Je réponds en haussant les épaules, comme si c’était un fait sans grande importance. Comme si … Si seulement. Personne n’est dupe. Ce n’est pas anodin mais il faut parfois dans la vie aller de l’avant et continuer d’avancer, même si c’est douloureux. Même si nos nuits ne nous permettent pas de nous reposer comme avant. Peut-être qu’un jour les choses redeviendront comme avant. J’ai envie de lâcher un grand rire sarcastique à cette pensée. La bonne blague. En tout cas, ce ne sera pas demain la veille. Au moins nous n’étions pas seuls. Et ça, c’est important.

Fringale Nocturne

Inquiète et concernée, j’ai l’impression de réagir comme une maman poule en lui proposant de mettre des glaçons. En fait, on dirait Savannah. Ce n’est pas si étonnant que ça quand on prend en compte le fait que nous avons grandi dans le même environnement, entourés de plus petits dont il fallait constamment prendre soin. Enfin … Dont elle prenait constamment soin, parce que clairement, ce n’était pas mon truc. Je préférais disparaître dans les arbres pour qu’on arrête de me demander de l’aide ou me chamailler avec les jumeaux. Malgré tout, il faut croire que j’ai tout de même développé un certain côté protecteur qui a tendance à ressortir. Comme maintenant. J’essaie de distinguer un carré de peau au niveau du poignet mais je remarque que Casey ne prend même pas la peine de relever sa manche pour observer l’étendue des dégâts. Cela m’intrigue un peu, mais je ne la connais pas assez pour la forcer à le faire. Est-ce qu’elle cacherait quelque chose ? Ou est-ce simplement parce qu’elle n’a pas assez mal et qu’elle pense que ça n’a pas gonflé ? Etonnée, je la scrute du regard mais la jeune Serdaigle ne laisse rien paraître. « Il va bien, juste une légère douleur qui aura disparue demain. Ça ira sans glaçons. » J’hoche la tête, rassurée, et n’en rajoute pas. Elle n’a pas grimacé une seule fois en tournant son poignet, j’imagine donc que ce qu’elle ressent ne sont que les résidus de l’impact. Tant mieux d’un côté. Elle évitera les questions et les suspicions de l’infirmier. Il vaut mieux que ce genre de petite balade nocturne reste secret. Non pas que je sois inquiète qu’elle me balance, je serais même curieuse de voir la punition qu’on me réserverait, mais on ne sait jamais. Après tout, on ne se connaît pas tant que ça. Et pourtant, il semble que l’on a partagé contre notre gré des choses bien semblables. Nous avons les mêmes maux et les mêmes insomnies. Finalement, nous ne sommes peut-être pas si différentes. La preuve en est : comme moi, elle se contente d’hocher la tête en guise de réponse à ma remarque ; il n’y a rien à ajouter. En même temps, qu’est-ce que vous voudriez dire. Les faits sont là et aujourd’hui nous en subissons les conséquences. Je pourrais prendre des somnifères ou d’autres médicaments de ce type, mais je redoute l’état second dans lequel ils pourraient me plonger. Je redoute plus que tout les rêves qui me menacent car ceux-ci ne sont jamais plaisants et me font revivre des horreurs que je préfèrerais oublier. Des assiettes libérant des odeurs alléchantes me tirent de mes sombres pensées. Les Elfes n’auraient pas pu choisir meilleur moment pour nous apporter les délices commandées. Je les remercie et les gratifie d’un grand sourire que je réserve uniquement pour les occasions spéciales avant de reporter mon attention sur la nourriture. « Bon appétit alors. » J’adresse un autre sourire à Casey, encore toute heureuse de l’arrivée de cette commande tant espérée. Je ne sais même pas par où commencer. Au final, je décide de copier Casey et d’enrouler mes doigts autour de ma propre tasse. Je souffle dessus légèrement avant de la goûter et de laisser le liquide exquis satisfaire mes papilles. « Toi aussi. On l’a bien mérité ! » Est-ce vraiment du mérite ? On peut dire que c’est la moindre des compensations avec les nuits horribles que nous passons. Après tout, nous ne faisons de mal à personne. Je regarde discrètement Casey pour ne pas qu’elle me remarque. Après ces quelques heures passées avec elle, elle ne m’apparaît plus comme cette jeune fille mystérieuse et sombre que je me figurais. Les apparences sont visiblement trompeuses. Comme moi, elle se bat pour cacher des choses au monde, des choses qui n’appartiennent qu’à elle. Toutes deux, nous nous battons contre les démons qui nous assaillent chaque nuit, ce qui a favorisé notre rencontre nocturne. Nous avons beaucoup de points communs, peut-être même plus que ce que je pense. Je m’installe un peu plus confortablement au fond de ma chaise tout en sirotant mon café. Nous allons attendre encore quelques heures avant de nous faufiler jusqu’à la grande salle, ni vu ni connu. De toute façon, nous sommes mieux ici, dans cet environnement chaleureux, que dans nos chambres face à nos cauchemars. Par-dessus ma tasse, je lance un autre regard à Beckett. Un regard amical, presque protecteur.