(#) Sujet: SKAT ✝ Zovem se Saša. Dim 9 Juil - 19:48
Skat est un Sang-Mêlé, né le 28 Février à Leicester en Angleterre. D'ailleurs il n'y vit plus puisqu'il a déménagé sur l'Île de Gigha en Écosse. Aujourd'hui, Skat a donc 14 ans et sera en 3ème année (à la rentrée). Et juste pour ta culture personnelle, sache qu'il a un Jobberknoll qui s'appelle Tišina.
Il est bon de savoir que Skat est discret, intelligent, attentif, doux, pudique, serviable et consciencieux mais également croyant, manipulable, moralisateur, réservé, en total décalage avec la réalité, socialement inadapté et silencieux. Il a des goût étranges, par exemple il aime son père, la Croatie, se lever tôt, faire ses tâches quotidiennes, qu'on soit fier de lui, les temps de prière collective, le rose,coudre, la tolérance ou encore faire partie d'un groupe alors qu'il déteste qu'on l'appelle Skat, être malade, l'orage, le changement, les pantalons, chercher ses mots, pêcher, devoir expié ses fautes, sa « vraie » famille et Poudlard.
Sa baguette est composée d'Aulne avec un cœur de crin de licorne et mesure 27,2 centimètres. Grâce à elle, Skat a le malheur de suivre les cours obligatoires, de divination et d'étude des runes.
Skat Ashley Cunningham
feat. Finn Wolfhard
ET EN VRAI ?
J'ai 24 ans, mais peut-être que tu le sais déjà parce que je suis Rioghbhardan O'Callaghan, j'ai même dépensé 360 points à prendre chez Dan pour l'arrivée en cours de scolarité, la répartition à
Serpentard
et l'animal de compagnie de ce nouveau personnage. Je suis arrivée sur NYL il y a bien longtemps et je devrais être là en moyenne sept jours par semaine. Avant de finir j'aimerais juste rajouter que vous ne vous débarrasserez jamais de moi.
Tout le monde a une histoire
Le réfectoire avait repris ses airs de salle de prière, ce matin-là. L'horloge n'affichait que cinq heures trente, pourtant la communauté toute entière était réunie. Face à elle, un homme d'une quarantaine d'année psalmodiait des versets de la Bible. Il posait sur cette foule un regard paternel, presque protecteur. Un enfant se mit à parler. Le temps se suspendit un instant. Des chuchotements lui intimèrent de se taire, il n'en fit rien. L'air se fendit juste avant que la main de son père s'abatte sur lui. Peut-être qu'il aurait dû pleurer mais ça ne fut pas le cas. Seuls ses grands yeux bleus baignés de larmes, les mêmes qui coulaient à n'en plus finir sur ses joues, laissaient entrevoir sa souffrance. Lorsque le silence fut revenu, l'homme reprit de la même voix lente et hypnotique. On écoutait. On buvait ses paroles. Assis au premier rang, une adolescente l'observait sans ciller. Elle récitait sans un bruit chaque mot qu'il prononçait, animée des mêmes tics que son aîné. Son père. Les premiers et derniers temps de prière de la journée étaient ses préférés. Se retrouver là, au milieu du monde, ne serait ce que silencieusement, la rassurait. Qu'importe les liens de sang, ils étaient une famille. Unie, soudée. Elle se sentait en sécurité, protégée. Et la sécurité était réelle, elle le savait très bien. Il ne fallait seulement pas quitter le domaine. Qui savait ce qui les attendait au dehors ? En sept ans, elle ne s'y était jamais aventurée. Les limites bien définies de ce qui leur appartenait lui suffisaient amplement. Malheureusement, l'extérieur s'aventure parfois, lui, à l'intérieur de ce qui ne lui appartient pas. « Policija ! 1 » La porte vola sur quelques mètres, laissant l'assistance dans un état de choc total. Un groupe d'hommes se tenait là, dans la gueule béante du bâtiment. Elle les regardait sans oser bouger. Sa respiration s'était arrêtée. Peut-être que si elle se faisait oublier, ils ne la remarqueraient pas. Ils n'eurent pas le temps de faire un pas dans le réfectoire qu'un coup de feu retentit. La panique ne mit pas longtemps à s'inviter à son tour. Les enfants hurlaient à s'en déchirer les tympans, les mères imploraient le Seigneur de les laisser en vie. Tout le monde courait, se bousculait. Un deuxième coup. Des ripostes aussi... « Spasitelj ! » Une main se referma sur son poignet, la sortant malgré elle de sa torpeur. Les cris martelaient son esprit apeuré. Son père avait prévenu : les Autres rompraient bientôt la paix qui les liait. Et ils étaient là, les Autres, prêts à tuer pour réduire à néant ce qu'ils avaient construit ici ! Ils étaient à la botte du Démon et venaient jusqu'à eux pour les détourner du chemin éclairé qu'ils avaient emprunté. Un corps tomba juste à côté d'elle alors qu'elles traversaient la salle à grands pas. Elle étouffa un cri d'effroi, sa respiration devint difficile. La main se resserra sur elle, bienveillante, et elles pressèrent le pas. Elles passèrent une porte camouflée derrière une tapisserie et descendirent des dizaines et des dizaines de marches. Au bruit de leurs pas faisaient écho ceux des coups de feu qui s'acharnaient au dessus de leur tête. On aurait dit que la colère divine grondait. Avaient-ils déçu le Seigneur ? Son cœur se serra. Elle n'espérait pas. De sa vie, elle n'avait fait que ce qu'elle savait juste et bon. Elle ne méritait pas que Son courroux s'abatte ainsi sur elle... Sa main s'appuya contre le mur. L'air venait à manquer. Quelques secondes plus tard, son père les rejoignit loin de la bataille qui continuait de faire rage. Son visage était pâle et même s'il tentait de rester digne, on voyait très clairement l'angoisse danser dans ses yeux. Sans réfléchir et pour la première fois depuis bien longtemps, ses bras se refermèrent autour du corps frêle de sa fille. « Ne riskiraš ništa, Saša. 2 » Alors elle ne douta plus. Elle avait confiance. Elle parvint même à se calmer légèrement. Pas assez néanmoins pour reprendre correctement son souffle. Les bruits se turent peu à peu alors qu'ils s'éloignaient du réfectoire au travers des entrailles de la Terre. Il avait été prédit depuis longtemps que ce jour viendrait et la famille toute entière avait œuvré pour leur offrir cette échappatoire. Et lorsqu'ils remontèrent enfin à la surface, le réfectoire n'était plus qu'un souvenir lointain qu'il fallait désormais fuir pour de bon... C'était l'Enfer qui venait de lui ouvrir ses portes.
1 « Police ! » – 2 « Tu ne risques rien, Sasha. »
Démantèlement de la secte de Pothum Plaščanski
Hier matin, les forces de l'ordre ont fait irruption dans le bâtiment principal de l'Ordre de la Sainte Vérité, dans le hameau de Pothum Plaščanski (Karlovac). Des adeptes ont ouvert le feu sur les policiers, blessant trois d'entre eux dont un mortellement. Les agresseurs, deux hommes âgés de seize et trente-et-un ans, ont été abattus. Plus de soixante autres membres ont été interpellés et seront interrogés dans les heures à venir. Le fondateur présumé, Anđelko Kovačević, est toujours recherché.
Extrait du Večernji list, publié le 06/05/2023
La voiture cahotait à un rythme lent et régulier sur le chemin de campagne qu'ils avaient emprunté. C'était une épave qui leur avait été offerte par l'un des membres de la famille, l'un de ces membres éloignés mais fidèles malgré tout. Il les avait vus débarquer tous les trois et n'avait pas hésité un seul instant à leur ouvrir sa porte. Tout lui avait été raconté, expliqué. L'arrivée de la police au beau milieu de la prière, leur départ précipité alors que le soleil n'avait pas encore fini de se lever ainsi que leur errance incertaine dans la forêt où ils avaient tenté de rester à couvert le plus longtemps possible. C'était un miracle qu'ils aient réussi à arriver jusqu'à lui sans encombre, la preuve que le Seigneur ne leur reprochait rien et veillait toujours sur eux. Il fallait partir loin, désormais, là où personne ne leur voudrait du mal. Terminer ailleurs ce qui avait été commencé ici. La famille les retrouverait plus tard. Elle les rejoindrait. Ils rencontreraient de nouveaux membres tout aussi dévoués que les premiers, ça ne faisait pas le moindre doute. Allongée sur la banquette arrière, Saša ouvrit péniblement les yeux. Elle s'étira sans un bruit, repoussa une boucle brune qui lui tombait devant le visage avant de se redresser. Sa crise l'avait épuisée, la panique n'avait rien arrangé. Il lui avait fallu ce qui lui avait paru des heures pour parvenir à la surmonter. Devant elle, son père et celle qui s'était imposée depuis plusieurs années comme une mère de substitution depuis l'abandon de la vraie discutaient à voix basses, espérant probablement ne pas la réveiller. « Tata ? 1 » Son père releva les yeux et l'observa à travers le rétroviseur, l'enjoignant d'un regard à continuer. « Moram piškiti... 2 » Sa voix était aussi désolée qu'elle-même pouvait bien l'être. Elle savait pertinemment que ça n'était pas le moment, qu'ils ne pouvaient pas s'arrêter mais cela faisait bientôt neuf heures qu'ils roulaient sur des routes impraticables et désertes, faisant des détours sans fin pour tenter de brouiller les pistes. Elle n'en pouvait plus. « Uskoro, Saša. Budi strpljiv. 3 » Sur quoi elle hocha honteusement la tête et reporta son attention sur le paysage qui défilait par la vitre. Des champs jaunâtres à n'en plus finir, des maisons isolées et rien qui ressemblait à chez elle. Le manque commençait déjà à se faire ressentir. Elle n'était jamais partie aussi loin de leur domaine. Et elle n'avait jamais eu l'intention de le faire... « Spasitelj ? Mi smo gotovo u Ljubešćica. Tamo ćemo stati. 4 » La voix d'Iskra était rassurante, bienveillante, teintée d'un respect bien trop grand pour une simple adolescente. Elle ne voulait que son bien et y était toujours parvenue correctement. La jeune fille la remercia d'un sourire et la regarda se tourner à nouveau vers la route. Ljubešćica n'étant qu'un village sur leur trajet, ils n'y risqueraient sûrement rien. Peut-être même qu'ils pourraient passer la nuit dans un hôtel, aussi miteux qu'il soit, ne serait-ce que pour dormir ailleurs que sur ce siège défoncé. Mais elle n'osait pas vraiment espérer. Dieu seul était en mesure de savoir ce qu'il convenait de faire et saurait en informer son père assez tôt. Ils n'eurent malheureusement pas le temps d'arriver où que ce soit qu'une voiture de police garée sur le bas-côté attira leur attention. Un homme en descendit et leur fit signe de ralentir. Probablement un simple contrôle de routine. Cependant, la tension monta d'un cran. Son père ralentit lentement mais se ravisa au dernier moment et accéléra brusquement. Leur antique bolide fonça sur la route pendant un moment mais ça ne suffit pas. Les autorités, alertées, avaient fait dresser un barrage près de la ville voisine. Ils étaient pris au piège. L'épave cahota une dernière fois avant de s'immobiliser. On demanda les papiers du véhicule, les leurs aussi. Mais ils n'avaient rien. Ou, du moins, ils ne donnèrent rien. La discussion s'éternisa. Puis elle finit par s'envenimer... Alors les portières s'ouvrirent d'un coup sec et on les en sortit brutalement. « Što se događa ?! Pusti me ! 5 » implora l'adolescente alors qu'on la forçait à entrer dans une autre voiture. Mais en vain. Les portes de l'Enfer, à l'instar de celle du véhicule, se refermèrent violemment sur elle...
1 « Papa ? » – 2 « J'ai envie de faire pipi... » – 3 « Bientôt, Sasha. Sois patiente. » – 4 « Spasitelj ? On arrive bientôt à Ljubešćica. On s'arrêtera là-bas. » – 5 « Qu'est-ce qu'il se passe ?! Lâchez-moi ! »
Fin de cavale pour Kovačević
Après deux jours de fuite, Anđelko Kovačević, gourou de l'Ordre de la Sainte Vérité récemment démantelé, a été arrêté alors qu'il tentait de fuir le pays avec sa fille, Saša, âgée d'une quinzaine d'année, et Iskra Živković, adepte de l'Ordre et déjà connue des services de police. Kovačević et sa compagne ont été mis en détention dans l'attente d'un procès. L'adolescente, quant à elle, a été transférée à la Dječja bolnica Srebrnjak, où se trouvent déjà les seize autres enfants présents vendredi dernier à Pothum Plaščanski.
Extrait du Večernji list, publié le 08/05/2023
Il avait été question de rejoindre la Roumanie, de repartir à zéro. Mais c'était désormais de l'histoire ancienne. Ils avaient été emmené au commissariat le plus proche puis interrogés. Elle n'avait rien dit. Son père avait toujours été clair sur le sujet : personne ne devait savoir. Mais son silence n'avait pas suffi. On avait fini par savoir malgré tout. On avait mis un nom sur leurs visages et compris qu'ils avaient fui. Le voyage s'arrêtait ici. Ce qu'ils ne comprenaient pas, c'est que son père avait fui pour les protéger tous les trois. Ils ne voulaient de mal à personne, seulement qu'on ne leur en fasse pas davantage. Et l'autre matin, on leur en avait voulu, on les aurait sûrement tués si on l'avait pu. On l'aurait tuée, elle, pour l'empêcher d'accomplir son destin, ce pourquoi elle était faite. Ils ne comprenaient rien. Ils ne comprendraient pas. Tout ça les dépassait, de toute façon. Ça les dépassait tous. Ça la dépassait, elle aussi. Elle ne savait pas pourquoi c'était elle qui avait été choisie parmi l'humanité toute entière alors qu'elle n'était, de toute évidence, qu'une adolescente parmi les autres mais les voies du Seigneur étant impénétrables, elle s'y était docilement pliée. « Saša Kovačević ? » Elle ne releva pas les yeux, fixant sans les voir ses mains moites et tremblantes qui reposaient nerveusement sur le tissu sombre de sa jupe. Elle ne bougea pas davantage. « Saša Kovačević...? » Une femme s'approcha doucement d'elle. Sa blouse blanche se fermait difficilement et laissait entrevoir un chemisier vert tout aussi maltraité par son embonpoint. Elle semblait douce. « Tvoje ime je Saša, zar ne ? 1 » L'adolescente ne répondit pas. Ses doigts se refermèrent sur son vêtement. La femme s'installa sur le siège à côté du sien, gardant néanmoins une distance raisonnable. « Znam da je ti. 2 » Elle haussa les épaules et tourna la tête, s'intéressant avec désespoir à ce qui se passait dans le couloir. Des enfants passaient d'une salle à l'autre, certains peinant à traîner des perfusions à leur suite, d'autres avançant péniblement grâce à des béquilles. Elle ne comprenait pas ce qu'elle faisait là. « Dobro sam. 3 » déclara-t-elle finalement d'une toute petite voix. C'était la première chose qu'elle s'autorisait à prononcer depuis qu'on l'avait arrachée à son père et Iskra. Elle ne les avait pas revus. Elle n'avait même pas pu leur dire au revoir. Son cœur se serra à cette pensée et sa vue se troubla un instant. « Samo želimo to provjeriti. Ne smeta ti ? 4 » Saša haussa une nouvelle fois les épaules et croisa machinalement les bras sur son gilet gris. Si, ça la dérangeait. Mais elle n'avait pas l'impression d'avoir le choix. Alors, à contre-coeur, elle finit par hocher la tête. L'infirmière lui adressa un sourire encourageant avant de se relever, l'incitant d'un geste à en faire de même. « Dođi, samo je tamo. 5 » Une hésitation la cloua sur place, la laissant contempler avec inquiétude la porte qu'on lui désignait. Il lui fallut de longues secondes pour se décider enfin à se lever à son tour. Puis d'autres encore pour accepter de rejoindre la salle blanche qu'on lui désignait. À l'intérieur, un lit, quelques machines et ustensiles ainsi qu'un tas de tissu fin et jaunâtre qu'elle lui tendit. « Skinite tvoj odjeću i stavite je na njega, vratit ću se. 6 » L'adolescente se figea. Se changer ? Ici ? Mais c'était interdit. On se montrait pas dévêtu, surtout devant des inconnus. Et elle encore moins que les autres ! Elle secoua la tête, refusant même de prendre le vêtement qu'on lui tendait. « Ne brinite, bit će samo mene. Sve će biti u redu. 7 » Elle le reposa sur le lit, plongea une seconde son regard dans celui de Saša sans jamais cesser de sourire avec une patience presque maternelle et sortit avant qu'elle n'ait le temps de lui répondre. L'Enfer avait décidé de l'entraîner vers le fond...
1 « Ton nom est Sasha, n'est-ce pas ? » – 2 « Je sais que c'est toi. » – 3 « Je vais bien. » – 4 « On veut seulement vérifier. Ça te dérange pas ? » – 5 « Viens, c'est ici. » – 6 « Retire tes vêtements et enfile ça, je reviens. » – 7 « Ne t'inquiète pas, il n'y aura que moi. Tout ira bien. »
Nom du patient : CUNNINGHAM Skat Ashley
Arrivé le 07/05/2023, le patient s'est présenté sous le nom de KOVAČEVIĆ Saša, femme âgée de 14 ans, née à Karlovac (Croatie) de KOVAČEVIĆ Anđelko et de mère inconnue. Après examen, il s'avère qu'il s'agit de CUNNINGHAM Skat Ashley, homme âgé de 14 ans, né à Leicester (Angleterre) de CUNNINGHAM Adrian et SHEPHERD Deirdre, porté disparu depuis avril 2016.
Le patient présente un asthme n'ayant pas été traité correctement, un léger retard de croissance relatif à une malnutrition, de nombreuses cicatrices témoignant d'un cas de maltraitance, une appendicectomie datant de plusieurs années probablement réalisée en dehors du cadre hospitalier ainsi que des troubles de la mémoire importants potentiellement liés à un choc traumatique.
Compte-rendu du 11/05/2023
La soirée était déjà bien avancée. La nuit, probablement, l'était aussi. Les surveillants avaient eu l'occasion de se retirer, les laissant seuls maîtres du dortoir. Et quels maîtres ! Un rire froid et cruel parcourut le petit groupe alors qu'un des gamins empoignait à pleine main les épaisses boucles brunes à sa portée, tirant dessus sans retenue. Ça avait commencé par des moqueries, l'incompréhension ne laissant que peu de place à la sympathie. Puis les moqueries s'étaient transformés en insultes. Quelques bousculades, par-ci par-là, avaient rapidement suivi. On feignait de ne rien voir, on imaginait que ça passerait. Il fallait le temps qu'ils s'adaptent, tous autant qu'ils étaient. Pourtant, force était de constater, aujourd'hui, que ça n'était pas le cas. L'adolescent, recroquevillé contre le mur du fond, près du lit qu'il occupait encore quelques secondes plus tôt, suppliait en sanglotant, plein de l'espoir ridicule qu'on le laisse enfin tranquille. « Prestani cviliti kao djevojka ! 1 » aboya le bourreau. Derrière lui, les spectateurs ricanaient. C'en était une, de fille ! Depuis le début, c'en était une ! Une pédale, une tapette... Une vraie gonzesse ! Ils n'avaient pas compris ce qu'il se passait lorsqu'on avait poussé une demoiselle dans leur couloir. Les filles n'avaient pas leur place dans ce bâtiment, elles devaient aller en face et y rester ! Pourtant, elle était là. Et elle n'était pas elle, elle était il. C'était sûrement pire que tout. Cette interminable chevelure de sirène, ce gilet rose et ces soquettes à volants devenaient des atours masculins. Ça et son attitude bizarre... Tout en elle – en lui qu'importe ! – leur était insupportable. Alors ils s'étaient mis en tête de le ramener dans le droit chemin, de le faire devenir un homme, un vrai ! Les ciseaux glissèrent de main en main alors qu'un murmure enthousiaste couvrait les gémissements de leur victime. Les doigts se resserrèrent sur les mèches brunes, tirant toujours plus fort avec un plaisir sadique. « Začepi, ili ćemo smanjiti nešto drugo... 2 » De nouveaux rires, plus cruels encore que les premiers, se mêlèrent à la conversation. Est-ce que c'était ce qu'on attendait ? Sans le moindre doute. L'humiliation n'était certainement pas suffisante. Un sanglot étouffé servit d'acquiescement. Le silence s'en suivit. Tant le sien que celui de ses agresseurs. Plus rien. Il n'y avait plus que le sifflement anarchique de sa respiration qui l'était au moins tout autant. On le fixait. On attendait. La sentence allait tomber d'une seconde à l'autre. L'acier brilla dans l'aveuglante lumière du plafonnier et s'abattit violemment sur la masse sombre. On jubilait. Le bruit des lames assassines se confondait presque avec celui des larmes. Et les boucles parfaites tombaient une à une, mourant sans un mot sur le lino grisâtre de la chambre. C'était l'innocence que l'on achevait, l'enfance que l'on égorgeait. Les coups pleuvaient, arrachant les cheveux coincés dans la vis, mutilant le reste. On s'amusait à ramasser les cadavres pour les lui brandir sous le nez comme autant de trophées bien lâchement gagnés. Son père avait prévenu : s'il quittait la famille, on s'en prendrait à lui, on le traquerait, on le tuerait. Il fallait rester discret, cacher qui il était vraiment. Mais on ne lui avait laissé le choix de rien... Il n'avait jamais voulu désobéir. La porte s'ouvrit brusquement. Le groupe se dispersa, ne laissant plus face à lui que l'assassin. « Što radiš ?! 3 » tonna le surveillant, alerté par le bruit. Il ne lui fallut que quelques secondes pour rejoindre la scène de crime. L'homme éloigna l'adolescent et lui arracha des mains la paire de ciseaux qu'il tenait encore. « Skat ? Jesi li dobro ? 4 » L'interpellé repoussa la main salvatrice qu'on lui tendait et cacha son visage ravagé par les larmes entre ses bras, tentant de se soustraire enfin à la vue du monde. Et c'était le mieux qu'il pouvait faire. Parce que l'Enfer n'avait pas encore prévu de lui rendre sa liberté...
1 « Arrête de pleurnicher comme une fille ! » – 2 « Tais-toi, ou on te coupera autre chose... » – 3 « Qu'est-ce que tu fais ?! » – 4 « Skat ? Est-ce que ça va ? »
Décision du bureau de coopération magique internationale
Čaroban Vlada Republike Hrvatske, en accord avec le Ministère de la Magie du Royaume-Uni et compte tenu de la situation, accepte que Monsieur Skat Ashley Cunningham retourne auprès de sa mère, Madame Deirdre Sheperd, sur l'Île de Gigha (Écosse). Une prise en charge par un établissement spécialisé est à prévoir en raison de l'état psychologique de Monsieur Cunningham. L'hôpital Sainte-Mangouste de Londres, sous réserve de l'accord de la famille, consent à lui fournir les soins nécessaires ainsi qu'à le préparer à l'intégration prochaine d'un établissement scolaire dit « normal ».
Rédigée à Zagreb le 09/06/2023
Quitter la Croatie n'avait pas été chose facile mais le destin n'en avait eu que faire. C'était une décision qui ne lui appartenait pas. Une de plus... Il fallait qu'il comprenne qu'il n'avait aucune famille là-bas, que c'était mieux pour lui de retrouver les siens sauf qu'ils se trompaient. Il avait la famille, sûrement plus dévouée que toutes les familles de sang du monde, prête à se saigner littéralement pour qu'il ne manque de rien. Alors que « les siens », comme ils le disaient si bien, il n'en connaissait rien. Sa mère l'avait abandonné des années plus tôt, le laissant aux bons soins de son géniteur sans un regard en arrière et c'était auprès de cette femme qu'on voulait le renvoyer ! Les mensonges s'étaient mis à pleuvoir ces dernières semaines... On disait qu'il avait été enlevé, que sa génitrice avait remué Ciel et Terre pour le retrouver. On prétendait que son père avait mal agi, que lui n'avait pas eu une vie normale pour un garçon de son âge. On crachait sur ce qu'il aimait, on encensait ce dont il se méfiait et on espérait encore qu'il se montre docile et confiant. C'était sa vie toute entière qu'on avait mise en ruines ! Appuyé contre le mur du couloir, Skat l'observait de loin. Cela faisait un moment qu'elle était arrivée, discutant avec les médecins qui s'occupaient de lui depuis quelques jours. Celle que l'on prétendait être sa mère. Il n'en avait aucun souvenir. Il avait oublié jusqu'à son nom. Son visage, son odeur, le son de sa voix... Tout avait disparu. Elle n'existait simplement plus. Pourtant, elle était là, à quelques pas de lui. Elle se tenait droite, elle semblait fière. Il ne l'entendait pas mais il n'avait aucun mal à imaginer un son sec et froid. Quelque chose de cassant, qui cingle et qui blesse. Elle ne lui plaisait pas, cette mère-là. Elle ne semblait pas avoir la douceur d'Iskra. Il ne l'imaginait pas veiller sur lui secrètement lorsqu'il serait malade ni même lui apporter quelque chose à grignoter les soirs d'hiver où il n'avait pas mérité son dîner. Les gens allaient et venaient dans le corridor, l'obligeant par moment à bouger légèrement pour la garder dans son champ de vision. Puis le moment de l'affrontement finit par arriver enfin. Bien trop vite à son goût. Il n'était pas prêt. Il voulait revenir au stade de l'ignorance, alors qu'elle n'avait même pas conscience de sa présence. Elle avait tourné la tête dans sa direction et plantait à présent son regard dans le sien. Il ne cillait pas, pétrifié par ce contact inattendu. Doucement, ses prunelles sombres se détachèrent des siennes et se mirent à la dévisager. Il ne la trouva pas particulièrement belle. Sa main passa nerveusement dans ses boucles mutilées avant de lisser le tissu sombre de sa jupe. Elle suivit chacun de ses gestes. Son visage se durcit presque imperceptiblement alors qu'elle achevait de le détailler. Ça ne dura qu'un dixième de secondes à peine avant qu'elle ne se fende d'un sourire qui se voulait rassurant. Mais il avait vu la déception qui avait voilé son regard. Il l'avait vue. Non, elle ne lui plaisait pas. Et il ne lui plaisait pas davantage, il en était certain. Elle ferait sûrement partie de ces gens qui ne comprendraient pas. Elle voudrait sûrement faire de lui le fils qu'elle aurait aimé avoir, celui-là même qu'elle avait abandonné. C'était trop tard ! Un médecin lui adressa à nouveau la parole, la forçant à détourner son attention un instant. Un instant suffisant pour que l'adolescent disparaisse, aussi silencieusement qu'il était arrivé, dans les entrailles de l'Enfer qu'il habitait désormais...
Retour sur l'affaire Cunningham
C'était en 2016 et déjà son nom s'étendait tristement dans nos colonnes. Skat Cunningham, un jeune garçon de sept ans, s'est volatilisé le 13 avril alors qu'il jouait à Bouskell Park, au sud de Leicester. Les caméras de surveillance des environs l'ont montré s'approchant d'un bosquet et puis plus rien. Disparu sans laisser de traces. Si les soupçons se sont rapidement dirigés vers le père de l'enfant, aucune preuve ne put être apportée contre lui. Adrian Cunningham, ancien Oubliator au service du Ministère, avait quitté le Royaume quelques mois auparavant et rien ne permettait de le situer sur les lieux de l'enlèvement. Et pourtant...
Aujourd'hui, après sept ans sans espoir, l'affaire connaît un rebondissement de taille ! Au matin du 05 Mai, les forces de police croates décident d'intervenir à Pothum Plaščanski, au sud de Zagreb, pour démanteler l'Ordre de la Sainte Vérité, une secte implantée dans le hameau et suspectée, entre autre, de maltraitance sur mineurs. Le gourou, Anđelko Kovačević, est rattrapé après deux jours de cavale avec sa fille de quatorze ans. Les examens auxquels a été soumise l'adolescente ont révélé que Saša Kovačević était en réalité le jeune garçon disparu : Skat Cunningham.
Le gourou et l'ancien employé du Ministère sont également une seule et même personne, à l'origine de l'enlèvement de l'enfant. Il est impossible de déterminer avec exactitude la manière dont il a procédé mais le gouvernement sorcier semble pencher pour un Portoloin illégal ayant échappé à ses services. Quoi qu'il en soit, le jeune Skat doit revenir entre nos frontières dans les heures à venir et sera pris en charge par Sainte-Mangouste en attendant de pouvoir retourner auprès de sa mère. Cunningham, quant à lui, attend son procès en Croatie, un procès dont il ne risque pas de sortir indemne.
Extrait de La Gazette du Sorcier, publiée le 12/06/2023
Un nuage courut devant le soleil, assombrissant un instant le bureau blanc. Blanc comme le reste du bâtiment. Blanc comme la chambre qu'on lui avait attribuée. Blanc comme les blouses de tout ceux qui lui tournaient autour chaque jour comme des vautours le feraient autour d'une proie. Blanc. Blanc. Blanc. Seul le tissu vieux rose de son gilet tranchait avec la pâleur ambiante. Il avait une robe de la même couleur, on la lui avait donnée à l'hôpital de Zagreb avant qu'il n'en parte parce qu'il n'avait pu récupérer aucune de ses affaires, mais sa mère avait été très claire : c'était un garçon et il fallait le considérer comme tel. Alors, lentement, les médicomages chargés de lui opéraient le changement. Un jour de lessive, sa robe n'était pas revenue ; dans la nuit, on avait remplacé ses jupes par des pantalons. Et lui, il se pliait docilement à ce qu'on lui imposait encore. Il ignorait encore combien de temps il pourrait garder le reste. L'homme qui se tenait derrière le bureau face à lui se redressa, attirant automatiquement son attention. « On m'a expliqué que tu avais pleuré en t'habillant. Pourquoi tu ne m'as rien dit ? » Le jeune homme n'afficha aucune réaction, fixant avec une attention exagérée les quatre oiseaux bleus qui voletaient dans une cage près de la fenêtre. Cela faisait des jours qu'il venait ici tous les après-midi ou presque et il n'avait pas daigné ouvrir la bouche. Il écoutait, simplement. Il ne comprenait pas tout, bien sûr, mais réussissait à en saisir l'essentiel. « C'est normal que tu ne te sentes pas bien, Skat, tu n'as pas à en avoir honte, personne ne te le reprochera ici mais il faut que tu nous fasses confiance, on est là pour t'aider. » L'un des oiseaux s'éloigna du groupe et se posa sur un perchoir, isolé. Ses plumes bleues semblaient briller au soleil. Il sentait le regard clair de l'homme peser sur lui. Il détaillait le moindre de ses gestes, tâchait de déceler la moindre réaction de sa part mais il n'y en avait aucune. Le silence s'installa un instant. Total. Les oiseaux eux-mêmes ne faisaient pas de bruit. Depuis qu'il venait, il ne les avait jamais entendu chanter. « Est-ce que tu as réfléchi à ce dont nous avons parlé hier ? À ce que t'a fait ton père ? » Malgré lui, Skat se crispa légèrement. L'ombre d'un sourire encourageant passa sur les lèvres du psychomage. « Bien. Et qu'est-ce que tu en penses ? » L'oiseau s'approcha du bord de la cage alors l'adolescent quitta son siège, traversa la pièce en silence et glissa son doigt entre les barreaux. L'oiseau le fixa. Il n'en pensait rien. Il n'y croyait pas. Ça n'avait même aucun sens. Pourquoi son père aurait-il effacé ses souvenirs ? Pourquoi en aurait-il modifié d'autres ? Son père l'aimait, il ne lui aurait jamais fait ça ! Mais il avait mis le doigt sur quelque chose de dérangeant : il ne se souvenait pas du tout de sa vie avant ses sept ans. Il ne se souvenait pas de sa mère avant de la revoir, ne se rappelait même pas avoir une sœur avant qu'on le lui apprenne... Il n'avait pas de souvenirs d'école. Ça n'était qu'un trou noir et oppressant. Un trou noir qui devait avoir une autre explication. Il y avait forcément une autre explication. L'oiseau ne fuit pas. « Je vois... Peut-être préférerais-tu parler d'autre chose pour l'instant ? Est-ce que tu voudrais que je te fasse part des résultats aux tests que tu as passé avec nos professeurs ? » Skat laissa son doigt s'avancer lentement vers la minuscule boule bleue. Il retint sa respiration, craignant de l'effrayer, et finis par caresser avec une douceur infinie le joli plumage. Le regard de l'homme ne l'avait toujours pas quitté. « Tu as impressionné la potionniste, tu sais ? Elle dit que tu pourrais passer ton ASPIC si tu le voulais. Mais également qu'il y a beaucoup de choses que tu ne devrais pas savoir pour l'instant... Comment as-tu appris tout ça ? » L'oiseau se laissa faire, bougeant seulement sa petite tête pour observer le visage de l'adolescent. Ils partageaient le même silence. Derrière eux, une plume gratta un parchemin. « Par contre, il va falloir que tu travailles un peu dans plein de matières, tu en as conscience, j'imagine ? Il n'est pas question que tu intègres Poudlard en quatrième année, bien sûr, mais cela n'empêche pas qu'il va falloir rattraper un peu ton retard, surtout en Histoire et en Défense contre les forces du mal, ce sont des cours importants, tu sais ? » De tout son monologue, Skat ne tourna pas la tête vers lui, le laissant simplement parler. L'oiseau pinça doucement le doigt. La chaise racla contre le parquet. Les lames craquèrent sous des pas. Et puis l'oiseau s'envola à la seule vue de l'homme qui s'était avancé. L'adolescent soupira. On posa une main sur son épaule, une main douce et protectrice mais il s'en défit d'un geste et recula. « Ta famille est ici. Ta mère ne t'a pas abandonné, elle t'a cherché pendant tout ce temps, elle a espéré chaque jour que tu reviennes enfin... Tu ne rentreras pas en Croatie, Skat. Je sais que tu comprends ce que je te dis. Il est temps de faire un effort et de communiquer. » Le gamin planta son regard sombre et froid dans celui de son vis-à-vis. Il le soutint un instant, silencieux, et finit par quitter la pièce sans jamais avoir ouvert la bouche. Personne ne pouvait l'aider à quitter son Enfer...
Ordre de la Sainte Vérité : mensonges et soumission
Plus d'un mois après le démantèlement de la secte qui a fait couler tant d'encre ces dernières semaines, beaucoup tentent encore d'en percer les secrets et de trier les rumeurs des vérités. Ce vendredi, le Večernji list a publié l'interview exclusive d'une ancienne adepte, prise au sein de « la Famille » pendant cinq ans. En pleine période de reconstruction, elle a accepté de revenir sur son expérience et de montrer au journal croate l'envers du décor de l'Ordre de la Sainte Vérité...
traduction : Jordan Hemming
Vous avez fait partie de l'Ordre pendant cinq ans. Comment l'avez-vous connu ? Dans quelles circonstances l'avez-vous rejoint ?
Il faut savoir qu'au début, ça n'avait rien à voir avec ce que l'on en raconte aujourd'hui. Ça n'était pas vraiment « une secte » à proprement parler, c'était plus un groupe de parole, une petite association religieuse. C'est une amie qui m'en a parlé, elle y était venue quelques fois et trouvait qu'il y avait une bonne ambiance... Je venais de me faire licencier et n'avais plus vraiment de vie sociale alors j'y suis allée en pensant que ça me ferait rencontrer du monde. C'est comme ça que tout a commencé.
Un groupe de parole ? Quand est-ce que s'est opéré le changement ? Malgré tout, vous êtes restée...
Je serais incapable de vous répondre précisément. Je crois que tout s'est fait progressivement. On a commencé par nous faire comprendre que tout ce que nous faisions était mal, contraire aux principes de Dieu, on nous poussait à culpabiliser, à admettre que nous ne valions rien, puis petit à petit, on nous a coupé du monde extérieur en nous rabâchant qu'il était dangereux, que mille et un malheurs nous y attendaient. On a besoin de croire en quelque chose et on imagine pas que ces gens en qui on a confiance, Anđelko et Iskra je veux dire, pourraient nous mentir. Ils avaient l'air tellement sûrs, tellement convaincus qu'on l'a été avec eux... Alors oui, je suis restée mais quand j'aurais pu comprendre ce qu'il se passait, c'était sûrement trop tard de toute façon.
Pourtant, vous avez quand même fini par partir. Qu'est-ce qui vous a fait ouvrir les yeux ?
Mon fils. Il y avait des règles d'éducation strictes que tout le monde devait respecter... Et notamment les châtiments corporels lorsqu'ils faisaient quelque chose de mal. Il avait trois ans. C'était encore un enfant... C'était l'heure de la prière et il n'était pas concentré. Alors il parlait, parlait, parlait... Même lorsqu'on lui demandait de se taire. J'ai quitté la salle avec lui et... Et je l'ai fouetté avec l'une des ceintures de mon mari. Si je le faisais pas, ils l'auraient fait à ma place. Il fallait lui faire comprendre que c'était mal, lui faire passer l'envie de recommencer. Quand j'ai arrêté, il a planté ses grands yeux plein de larmes dans les miens et m'a dit « Je t'aime plus, t'es plus ma maman ». Un sacré choc... J'ai réalisé que ça allait trop loin. Je pouvais plus lui imposer ça. J'en ai parlé à personne et le lendemain, on partait pendant la nuit...
On vous demandait de battre les enfants ? Kovačević traitait son fils de la même manière ?
Oui, évidemment. Il était bien plus dur que beaucoup d'entre nous. Saša devait montrer l'exemple et elle a rapidement intégré les règles. C'était une gamine exemplaire, vraiment. À la fin, quand elle faisait quelque chose de mal, elle se punissait elle-même. C'était un peu effrayant de voir cette môme aussi obéissante, aussi soumise... Parfois, elle donnait l'impression d'avoir subi un véritable lavage de cerveau...
Vous dites « elle », vous saviez que c'était un garçon ? Et en quoi il devait montrer l'exemple ?
On savait que c'était un garçon, oui. Enfin, certains savaient et d'autres s'en doutaient. Vous savez, on nous a rapidement présenté Saša comme une sorte de nouveau Messie... On nous disait que la fin viendrait bientôt et que son sacrifice nous sauverait tous. C'était Spasitelj, l'enfant sauveur. Alors forcément, elle devait être irréprochable. Jamais une femme n'aurait pu se voir confier un rôle d'une telle importance par le Seigneur alors elle devait s'habiller et se comporter comme telle pour éloigner les soupçons de l'armée de Satan. Personne en dehors de la famille ne devait savoir. C'était pour sa sécurité et notre salut à tous.
Mais en sept ans, il y a bien eu des gens qui l'ont su, non ? Au moins un médecin... ?
Bien sûr que non ! S'il nous était déconseillé de sortir de Pothum Plaščanski, Saša n'a jamais mis les pieds dehors. Nous étions soignés par l'un des nôtres, dans une infirmerie installée derrière le réfectoire. Plusieurs d'entre nous ont été opérés là-bas. Avec plus ou moins de succès... On devait généralement supporter les maux sans rien dire, ça faisait partie des épreuves divines mais en cas d'urgence, on avait accès à tout ce qu'il fallait. Enfin, normalement. Saša est asthmatique, il me semble, mais son père la laissait souvent en crise en lui récitant des versets de la Bible. La pauvre gamine étouffait pendant une éternité avant que quelqu'un daigne lui apporter un inhalateur...
L'emprise qu'exerçait Kovačević sur votre communauté paraît importante. Jusqu'à quel point il dirigeait vos vies ?
C'était une emprise inconsciente pour nous. On obéissait juste aux règles que Dieu lui avait dictées, en réalité. Maintenant, j'ai un peu de mal à réaliser comment j'ai pu suivre aussi bêtement... Mais ça semblait normal. Anđelko et Iskra dirigeaient absolument tout. Ils surveillaient nos lectures, décidaient si nous méritions ou non nos repas, on avait aucune intimité et on vivait dans un climat de suspicion et de délation. Ils savaient tout ce qu'on faisait, quand, où, comment... Rien ne leur échappait jamais. Lors des séances de prière collectives, juste après le dîner, ils disaient que certains d'entre nous avaient pêché, que le Malin les avait pénétrés et qu'il était temps de le faire partir. Alors ils tombaient dans une sorte de transe qui pouvait durer des heures, ils se tordaient sur le sol, ils hurlaient... Et quand c'était terminé, ils ne se souvenaient de rien. C'était impressionnant... Et ça nous forçait à rester droit, pour ne pas subir le même traitement...
Parce que vous pouviez ne pas mériter vos repas ?
Oui... En fait, on devait se rendre utile à la communauté. Certains s'occupaient du potager, d'autres de coudre les vêtements... Qu'importe. Chacun d'entre nous avait un certain nombre de tâches à faire et si tout n'était pas terminé à la fin de la journée, on n'avait pas le droit de manger, il fallait aller dans notre chambre et demander pardon de ne pas s'être donné totalement dans notre travail. Les deux repas étaient liés, si on avait pas le droit de dîner, on ne déjeunerait pas non plus le lendemain. On passait une journée de jeûne à réfléchir sur notre manque d'implication...
Qu'est-ce que ça vous a fait de voir l'Ordre et Kovačević à la une de tous les journaux ?
Honnêtement ? Ça m'a un peu attristée. Je pense qu'il y aura toujours un lien particulier entre eux et moi... C'était ma famille pendant cinq ans, les seules personnes que je voyais, tous autant qu'ils étaient. Mais ça devait forcément arriver. Anđelko commençait déjà à être plus confiant quand je suis partie, vous savez ? Il allait forcément finir par commettre une erreur. Par contre, j'aurais jamais imaginé qu'il avait enlevé Saša... Elle avait l'air d'aimer tellement son père... Et pas une fois elle a posé des questions sur sa mère ou sur le reste de sa famille. Je pensais qu'il était père célibataire, que la mère était partie. En fait, je croyais juste ses mensonges...
Extrait de La Gazette du Sorcier, publiée le 20/06/2023
Dernière édition par Noel T. Shiver le Lun 10 Juil - 5:47, édité 4 fois
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(#) Sujet: Re: SKAT ✝ Zovem se Saša. Dim 9 Juil - 19:48
Famille et compagnie
Le bureau des infirmiers était juste à côté de sa chambre, si bien que, lorsqu'il en laissait la porte ouverte, les bruits lui arrivaient sans le moindre mal. Comme aujourd'hui. Un grésillement maladroit avait rapidement attiré son attention. « Comme prévu, nous retrouvons Dorothea Langbroek... » Skat se cala confortablement contre son oreiller, observant avec désintérêt une poussière accrochée à sa chaussette droite. L'ennui lui était tombé dessus après le dîner et ne l'avait plus lâché alors cette distraction, aussi faible soit-elle, était la bienvenue. Et puis, avec un peu de chance, peut-être pourrait-il apprendre un peu comment ce monde fonctionnait. Bien sûr, il y mettait de la mauvaise volonté et il demandait pardon chaque soir, mais il n'avait rien contre l'idée de comprendre ce qui l'entourait. « ...notre spécialiste de l'enfance, afin de revenir sur le cas Cunningham. » Le jeune homme se renfrogna à l'entente de son nom. Ils n'arrêtaient donc jamais ? Comme si le traumatisme n'était pas assez présent comme ça, ils l'enfonçaient chaque jour un peu plus. C'était un gamin comme les autres, qu'on le laisse un peu tranquille. « Le Chicaneur a laissé entendre que Sainte-Mangouste aurait tenté de dissuader Poudlard d'accepter l'enfant à la prochaine rentrée. Est-ce que vous pensez qu'il puisse représenter un quelconque risque pour ses camarades ? » Un risque ? Mais c'était pas vrai ! Il n'était pas un risque ! Pourquoi est-ce qu'on racontait des choses comme ça ?! « Vous savez, il est important de nuancer les propos tenus par le Chicaneur. Si Skat Cunningham était une menace pour la sécurité de nos enfants, jamais Poudlard n'accepterait de lui faire intégrer l'école. Cela dit, sans représenter un risque, est-ce qu'il est judicieux de tenter l'expérience dès maintenant ? » Le débit était rapide et nombreux étaient les mots dont le sens lui échappait. Il n'était pas certain de comprendre ce qui se disait devant lui. De lui.
Pourtant, il refusait d'abandonner son écoute incertaine, sa curiosité piquée au vif. « Je ne pense pas. Il faut bien comprendre que la vie qu'il a menée jusqu'ici ne lui permet pas d'avoir les armes pour se défendre dans le monde extérieur. Si vous le voulez bien, j'aimerais qu'on se penche un instant sur son père, Adrian Cunningham. » Son nez se plissa légèrement. Adrian Cunningham ? Son père ? Mais non ! Il s'appelait Anđelko ! « Rapidement. Cunningham est originaire de la banlieue de Leicester, une famille de sorciers sans histoire. Il entre à Poudlard, à Serpentard, mais rapidement, il apparaît comme un enfant un peu spécial. » Il ne savait pas vraiment à quoi correspondait Serpentard. Son psychomage lui avait brièvement expliquer le fonctionnement de l'école maintenant qu'il était véritablement question de l'y envoyer mais tout ça le dépassait encore... « Il gravite au centre d'un petit groupe qu'il dirige presque totalement. Ses amis expliquent un malaise constant en sa présence mais une incapacité à s'en éloigner. Ce qu'ils faisaient n'était jamais assez bien, la faute leur incombait à chaque fois, quelque chose qu'on retrouve également dans le témoignage publié en juin par la Gazette. Alors que ses professeurs parlent d'un élève agréable et appliqué. » Sans s'en rendre compte, l'adolescent s'était redressé et son corps tout entier se tendait vers la porte entrouverte dans l'espoir d'entendre un peu mieux. « Une fois dehors, il entre au Ministère en tant qu'Oubliator. Les tests psychologiques de recrutement ne relèvent rien d'anormal. Ses supérieurs en font l'éloge, sa carrière est brillante. Pourtant une ombre vient tacher le tableau : sa petite-amie de l'époque dépose une plainte pour harcèlement. Elle la retire deux jours plus tard, Cunningham n'est pas inquiété. » Son père n'avait jamais parlé de son travail. Il avait toujours prétendu qu'avant ne comptait pas et que son seul emploi était celui que le Seigneur lui avait confié, à savoir veiller sur lui et lui montrer la voie à suivre lorsqu'il serait temps d'accomplir son destin. Il n'y avait jamais eu aucune autre réponse et maintenant on prétendait qu'il était Oubliator... Il ne savait même pas ce que ça signifiait.
« Je ne sais pas si vous voyez le schéma qui commence à se dessiner...? À chaque fois, il y a deux versions. Un homme publique sympathique dont personne n'a rien à redire d'un côté et un homme privé plus sombre dont on finit sûrement par se méfier. Il contrôle son image, il en joue. Il manipule éhontément son entourage. » Un bruit dans le couloir l'empêcha d'entendre la phrase suivante. Il n'écoutait plus, il buvait littéralement le flux de paroles qui lui parvenait. Il n'en croyait pas grand chose mais était bien incapable de s'en détacher. « Quelques années plus tard, c'est au tour de sa femme, la mère du petit, d'avoir recours à la justice. Non seulement pour le divorce qu'il refusait de signer mais également pour le déchoir de ses droits parentaux. Il y a débat sur la véracité de ce qui lui a été reproché mais le juge a tranché faveur de Deirdre Shepherd. » Skat se relaissa tomber contre l'oreiller, hébété. Il n'avait strictement rien compris. Il ramena sa jambe droite contre son torse et chassa enfin la poussière qui s'était accroché à sa chaussette. « Il n'est pas difficile d'imaginer un enfant totalement sous l'emprise d'un tel individu. Si des adultes ont pu se laisser avoir, un petit garçon ne doit pas pouvoir faire davantage preuve de discernement. D'autant plus qu'il s'agit du père. Aujourd'hui, je doute qu'il puisse penser par lui-même, trop habitué à s'effacer pour être à la hauteur des attentes de son géniteur. » Ses oreilles bourdonnaient. Il commençait à avoir mal à la tête. Chercher à comprendre au mieux ce qu'on lui racontait et tenter de faire la part des choses entre la vérité et les mensonges l'épuisait, mais son calvaire n'était pas encore terminé. « Vous êtes en train de dire qu'Adrian Cunningham a manipulé son propre fils ? » Machinalement, il secoua la tête. La question ne lui était pas adressée mais il en connaissait la réponse mieux que quiconque. « Bien entendu ! Même sans parler des sortilèges d'altération de la mémoire auxquels il l'a exposé, oui. Il l'a coupé du monde, s'est présenté comme étant sa seule famille et a fait peser sur ses épaules de multiples menaces pour le forcer à rester à ses côtés. » Elle ne comprenait rien ! Ça n'était pas des « menaces », c'était des « prophéties ». Ce qu'il disait était vrai. Et ça finirait bien par se produire un jour.
« Je vois... Mais la question que tout le monde se pose maintenant est sûrement : est-ce qu'il peut prétendre à un cadre familial plus sain avec sa mère ? » Sa mère... Il n'arrivait pas à voir cette femme comme telle. Sa mère, c'était Iskra. Enfin, elle s'était toujours très bien débrouillée à cette place et il n'en avait jamais voulu d'autres. « Naturellement ! Je pense même que l'autorité qui la caractérise pourrait lui être bénéfique, dans un premier temps. Il ne serait pas totalement livré à lui-même et pourrait continuer à se reposer sur une figure forte. Néanmoins, j'ai un peu peur que le retour à la maison soit difficile. Skat a toujours vécu dans la peur alors l'image de cette femme froide et sévère risque de le braquer. Avec tout le respect que je dois à Madame Shepherd, il est difficile de s'ouvrir à quelqu'un qui n'inspire pas forcément confiance au premier abord. Il paraît que les médicomages sont confiants et qu'il devrait réintégrer le foyer familial d'ici la fin du mois mais je me permets d'en douter. » Les souvenirs de sa génitrice lui revinrent naturellement en mémoire. La déception dans son regard le fit frisonner. Elle avait honte de lui. Honte de ce qu'il était. N'avait-elle pas vu avec les médecins pour commencer à en faire ce qu'elle voulait qu'il soit ? Ses vêtements avaient tous disparu, petit à petit, remplacés par des atours masculins qu'il n'avait jamais portés. Des jeans, des polos bleus et rouges, des baskets à lacet... Plus la moindre trace de rose ou de robe... « Il ne sera pas livré à lui-même ? Vous le pensez ? Rappelons quand même que Shepherd dirige d'une main de maître l'une des plus grandes entreprises de balais du pays ! J'imagine qu'elle ne pourra pas offrir à son fils toute l'attention dont il doit avoir besoin tout en continuant son activité professionnelle. Elle va devoir faire un choix et tout le monde sait que sa société passera avant sa progéniture. C'est plus ou moins ce qu'elle a fait avec sa fille, Jade, non ? » Jade... Sa sœur... Il ne l'avait encore jamais vu mais les quelques fois où sa mère était venue lui rendre visite, ici, elle lui en avait parlé. Elle lui avait même montré des photos. Est-ce qu'ils savaient qu'elle avait été mordue par un loup-garou en partant à sa recherche ? Il s'en voulait de lui avoir causé tant de soucis mais pensait, en même temps, que si Dieu l'avait ainsi punie, ça n'était sûrement pas pour rien. Il s'imaginait qu'il avait touché la fille pour atteindre la mère et ainsi la blesser par là où elle avait pêché. Elle avait abandonné un enfant ? Et bien on s'en prendrait à l'autre. Mais la pauvre Jade ne méritait sûrement pas ça.
« Eh bien, vous venez de soulever un élément important : Jade. Je pense très sincèrement que son retour au sein de sa famille lui sera véritablement bénéfique. D'un côté, il y aura cette mère qui lui rappellera la figure paternelle, ce qui lui permettra de ne pas rompre trop brusquement le lien avec ce qu'il a vécu jusque là, mais il y aura aussi cette sœur auprès de laquelle il apprendra sûrement énormément. Vous savez, c'est avec les enfants de son âge que les échanges sont les plus simples. Ils doivent avoir deux ans d'écart, à peine, alors ils se trouveront naturellement. Elle lui apparaîtra comme une alliée dans ce monde qui lui échappe et sera sûrement le pilier de la communication familiale. Il est difficile de prédire exactement comment les choses se dérouleront mais les auditions faites lors de l'enquête suivant l'enlèvement font état d'une véritable complicité entre les deux enfants alors il y a de fortes chances qu'elle refasse surface. » Ils étaient proches... Sa mère le lui avait dit, ça. Il y avait des photos qui les montraient ensemble, en train de rire et de jouer. Il avait l'air d'en prendre soin de sa petite sœur, d'y tenir. Et maintenant, c'était à peine s'il savait qui elle était. Il avait totalement oublié son existence. Et qui savait ce qu'il avait oublié d'autre ? « Il paraît que Theodore Duncan, le beau-père des enfants, s'est rendu à Sainte-Mangouste cette semaine. Même s'il n'a pas de lien direct avec Skat, il lui montre un véritable soutien, il tend à l'intégrer complètement à la famille qu'ils ont construit. C'est important de faire bloc autour de lui, que son arrivée fasse l'unanimité. C'est une très bonne chose qu'il fasse la connaissance de cet homme avant d'avoir à partager son quotidien, c'est une bonne initiative. » Si l'impression que le pauvre homme lui avait faite n'était pas aussi mauvaise que celle laissée par sa mère, elle n'était pas brillante pour autant. Il s'était présenté poliment, lui avait balancé quelques mots bateau dans un anglais assez simple pour qu'il le comprenne. Il semblait faire des efforts mais ça n'y changeait rien. Il était gentil. Trop gentil. Ça devait sûrement cacher quelque chose. Tout le monde avait été trop gentil avec lui jusque là et il n'y avait qu'à voir où ça l'avait mené... Loin de chez lui. Dans l'anti-chambre de l'Enfer. Il lui avait expliqué que c'était lui qui resterait à la maison lorsqu'il rentrerait, que c'était son travail de s'occuper du manoir (il ne savait pas ce que c'était qu'un manoir) alors ils seraient amenés à passer un peu de temps ensemble. Il avait dit aussi qu'il ne le forcerait pas à lui parler s'il n'en avait pas envie, que tout le monde devait déjà le faire mais que, lui, il savait qu'il le ferait quand il se sentirait prêt et que ça n'était pas pressé. Ils trouveraient un autre moyen pour communiquer en attendant. Pendant tout son discours, Skat l'avait fixé, observant avec méfiance le sourire rassurant qui étirait ses lèvres et les regards qu'il lançait à sa femme à chaque phrase ou presque comme pour s'assurer qu'il n'avait rien dit qu'il ne fallait pas. Il lui paraissait étrange. La porte de sa chambre s'ouvrit toute grande, le faisant sursauter bien malgré lui. « Skat ? C'est bientôt l'heure d'aller te coucher. » L'infirmière entra dans la pièce et lui tendit le pyjama qu'il avait posé sur le dossier de sa chaise. « Je te laisse te changer et te brosser les dents tranquillement. Mais extinction des feux dans quinze minutes, d'accord ? » Il hocha doucement la tête en soupirant alors que ses doigts se refermaient sur le tissu bleu et blanc. Elle lui adressa un sourire maternel et repartit aussi rapidement qu'elle était arrivée, laissant dans son sillage comme une odeur de déception : dans la pièce voisine, la radio s'était finalement endormie...
La première fois ici
Lentement, le train ralentissait entre les champs. L'interminable voyage touchait à sa fin. Cela faisait des heures qu'il était coincé là, filant au travers de ce pays dont il ne voulait pas. Tout ça pour quoi ? Pour une école dont on lui vantait les mérites tout en s'en méfiant ouvertement. Qu'était-il censé croire, lui, au milieu de tout ça ? C'était à n'y rien comprendre ! Peut-être que l'enseignement y était de qualité, il n'en savait rien, mais les élèves n'avaient-ils pas été séquestrés cette année ? Sa propre sœur en avait fait les frais... Cette sœur qui ne l'avait pas lâché du voyage, supportant sûrement bien malgré elle le silence dont il la gratifiait. Assise sur le siège face au sien, elle devait trouver le temps long, elle aussi. Pourquoi n'avait-elle pas rejoint ses amies ? S'il appréciait qu'elle semble se soucier de lui, il ne lui avait rien demandé. Enfin qu'importe... On reprochait à son père de l'avoir coupé du monde pendant des années mais on n'hésitait pas à l'envoyer au milieu de nulle part au nom d'une scolarité normale sans même savoir si ce fichu train n'allait pas directement en Enfer pour la seconde fois en bien peu de temps. Enfin... Difficile de faire plus au milieu de nulle part que le « domicile familial » qu'on lui avait si gentiment offert. Une vieille bâtisse qu'il soupçonnait d'être hantée plantée sur une île quasi déserte. Même Pothum Plaščanski semblait plus peuplé. C'était un cauchemar. Un soupir s'enfuit entre les lèvres du jeune homme alors qu'il s'abandonnait contre le dossier de son siège. Dehors, les taches sombres, vaguement jaunes et vaguement vertes, se précisaient petit à petit, laissant voir des arbres et quelques animaux isolés. Cela ressemblait au désert de leur fuite. La voiture traînante et puis rien. Des pâturages à perte de vue et de vieux chemins de terre abandonnés. Skat avait l'impression qu'une vie toute entière s'était échappée depuis ce jour-là. Et celle qui l'étreignait aussi étroitement, à présent, ne lui appartenait pas. Il fallait tout reprendre, tout recommencer. On lui avait tout arraché : sa maison, sa famille, son destin. Il ne lui restait plus rien. C'était comme si les quatorze premières années de sa vie n'avaient servi à rien. On le ballottait d'une ville à l'autre, d'une vie à l'autre, sans prendre la peine de se demander ce qu'il pouvait bien en penser. Que pouvait-on avoir à faire de l'avis d'un môme qui, de toute façon, ne disait rien ? S'il voulait qu'on l'entende, il n'avait qu'à parler. Mais lui savait pertinemment que ça n'aurait rien changé...
Il ne comprenait pas pourquoi on lui imposait tout ça. Méritait-il vraiment ce qu'on lui infligeait depuis d'interminables semaines ? Il n'avait jamais rien fait de mal, d'aussi loin qu'il se rappelait. Il s'était toujours plié aux volontés divines sans rechigner, suivant la voie qu'Il avait choisi pour lui. Pourquoi en viendrait-Il à le punir aujourd'hui ? Où s'était-il trompé ? Où avait-il pêché ? Son père devait le savoir. Il le savait forcément. Jusque là, il ne s'était jamais trompé. Tous les oracles qui lui revenaient en mémoire s'étaient réalisés, jusqu'au funeste qui lui annonçait mille et un malheurs s'il venait à quitter l'enceinte rassurante du hameau. On l'avait forcé à sortir ! On l'avait forcé à révéler au monde ce qu'il était vraiment ! Il n'avait jamais rien voulu de tout ça. Il aurait donné cher (n'importe quoi, même) pour revenir en arrière. La Famille lui manquait terriblement. Il voyait en celle qu'on lui avait attachée à son arrivée en Angleterre qu'un simulacre ridicule. Cette femme autoritaire qui prétendait être sa mère n'avait pour but que de le modeler à sa guise, suivant les lignes superficielles de l'enfant parfait qu'elle aurait sûrement souhaité avoir. Sauf qu'il ne l'était pas. Il ne le serait jamais. Quand bien même il aurait espéré pouvoir la contenter, ç'aurait été un échec. Il le savait. Il avait vu toute cette déception dans son regard lorsqu'elle l'avait aperçu pour la première fois. Elle ne le connaissait pas, elle n'avait pas eu besoin de ça. Sa seule existence, sa seule apparence la dérangeait déjà. Et sa sœur... Sa sœur maudite pour avoir voulu un jour le retrouver... On lui avait raconté l'histoire. Peut-être n'avait-il pas tout compris mais il en avait saisi suffisamment pour que la culpabilité l'enlace. Elle avait risqué sa vie, un jour, pour le retrouver et lui n'avait même plus souvenir qu'elle existait. Malgré tout, cette histoire d'enlèvement ne tenait pas la route. Il n'avait pas été enlevé. Il devait y avoir une autre explication. Peut-être que leur mère ne lui avait seulement pas dit qu'elle l'avait laissé à leur père, refusant de s'en occuper plus longtemps, et que la pauvre gamine qu'elle était alors l'avait crue sans sourciller. Pourquoi aurait-elle remis en doute la sincérité maternelle, après tout ? Il y avait quelque chose d'étrange dans cette affaire, quelque chose qui le dépassait totalement. Des mensonges à ne plus finir dans lesquels il se noyait lentement.
Un dernier cahot et tout s'immobilisa. Dans sa cage, Tišina s'agita sans un bruit. « Shh... » souffla l'adolescent alors qu'il glissait à son doigt entre les barreaux. L'oiseau bleu eut un mouvement de recul mais finit par se laisser approcher. Il était plus sauvage que celui du psychomage qu'on lui avait imposé pendant l'été mais il ne doutait pas qu'avec le temps, ils sauraient s'apprivoiser. Il n'avait jamais été question d'avoir le moindre animal mais lorsqu'il avait fallu aller chercher ses fournitures, quelques Jobberknolls voletaient dans une immense cage dorée juste devant la vitrine de l'animalerie, si bien qu'il n'avait pas su résister à l'envie de les regarder. Ils étaient étranges, ces oiseaux. Ils ne chantaient pas. Ils ne piaillaient pas. Ils se contentaient d'observer le monde avec leurs grands yeux aussi sombres que les siens. Ils devaient un peu le subir, ce monde. Incapable d'appeler à l'aide ou de se défendre, conscients que leur voix quelle qu'elle soit ne compterait pas. Il les comprenait, probablement. Si les oiseaux, derrière leur vitre, n'en avaient eu que faire de son existence, toute l'humanité ne les avait pas imités. Le vendeur avait passé la tête par la porte grande ouverte et s'était fait un devoir de leur proposer ses conseils avant de réaliser que le gamin qu'il avait en face de lui n'était autre que le pauvre kidnappé dont la Gazette parlait à tout va dans ses colonnes mensongères. Et il ne les avait plus lâchés. Sa mère avait bien tenté de s'en débarrasser mais déjà Skat s'était faufilé à l'intérieur pour voir les oisillons de plus près. La décision maternelle était sans appel : on ne prendrait pas un oiseau incapable d'apporter le courrier, qu'il choisisse un hibou s'il voulait un animal ! Ça se serait sûrement dû s'arrêter là si le vendeur n'était pas réapparu, déclarant d'un ton paternel qu'il serait ravi d'aider « ce pauvre bonhomme à se reconstruire après tout ça ». Il offrait l'animal s'ils achetaient la cage. Et il n'avait fallu que d'un « s'il te plaît » prononcé avec un accent affreux (premier mot qu'il adressait à sa génitrice) pour que la cage soit achetée. Il avait entendu le psychomage lui conseiller de récompenser ses efforts pour l'encourager dans cette voie et, au moins cette fois, elle avait visiblement décidé de l'écouter... Et maintenant que Tišina était là, il fallait l'abandonner dans cet horrible train. Il serait monté dans son dortoir, ils se retrouveraient ce soir.
Comme s'il avait envie d'avoir « un dortoir ». Il ne voulait pas s'installer ici, seulement rentrer chez lui. Son vrai chez-lui. Pas ce que tout le monde lui présentait comme la maison du bonheur où il pourrait enfin s'épanouir auprès des siens. Les siens avaient été arrêtés ! Un frisson se glissa sous son pull alors qu'il passait enfin la porte de son compartiment. Il n'était pas sûr que ce soit le froid, juste l'inquiétude du sort qui avait été réservé à son père. Son pauvre père au bout du monde, enfermé dans une cellule qu'il ne méritait pas... Et puis son regard se perdit dans la foule qui se pressait hors du train. Un poids s'installa dans sa poitrine. Tout ce monde... C'était avec eux qu'il allait devoir vivre désormais ? Les quelques enfants de Pothum Plaščanski étaient si loin, désormais. Les jambes flageolantes, l'adolescent descendit les trois marches qui menaient au quai. Des graviers crisèrent sous les semelles de ses chaussures. La fumée de la locomotive montait jusqu'au ciel, se mêlant aux nuages sombres qui couraient au-dessus de leur tête, chassés par le vent. Il n'avait fallu qu'un instant pour que la nuit s'installe, plus inquiétante que jamais. Sa sœur prononça quelque chose mais le brouhaha créé par des centaines d'élèves surexcités ne lui permit ni d'entendre ni d'écouter. Il ne put que remarquer qu'elle s'éloignait. Son cœur s'accéléra. Quoi ? Déjà ?! Mais il ne connaissait qu'elle ! Pourquoi être restée avec lui jusque là pour l'abandonner au pire moment ? C'était cruel ! Il refusait de réaliser qu'elle n'avait pas le choix, que leurs chemins se séparaient ici au nom d'une tradition qui ne le concernait même pas. « Susrećemo se poslije ? » Peut-être que le bruit avait couvert son faible filet de voix car elle ne lui répondit pas, elle lui adressa seulement un bref signe de main et disparut au milieu de cette marée humaine qui menaçait de l'engloutir lui aussi. Il se sentait pris au piège, comme dans un étau qui n'aurait de cesse de se refermer. L'air peinait à arriver jusqu'à lui. Le groupe se mit en marche, l'emportant dans son mouvement. Il n'offrait aucune résistance, se laissant submerger par la panique qui s'était vilement insinuée en lui. Il savait, pourtant. Il savait depuis des jours ce qui l'attendait ici. On était venu le voir à l'hôpital, juste avant qu'il n'en sorte et on lui avait expliqué. Il se souvenait des images qui se bousculaient dans sa tête, des mots qu'il ne comprenait pas. De l'eau et d'un château. D'un choix et d'un chapeau...
Un pas après l'autre, chacun plus difficile que le précédent, Skat avançait lentement. Il ne détonait pas dans la foule de première année. Personne ne pouvait imaginer qu'il avait bientôt quinze ans, c'est à peine s'il en paraissait douze. On ne s'étonnait pas de le trouver là. On ne le remarquait pas. Puis l'Enfer prit un nouveau visage. Des barques branlantes s'enfuyaient devant lui, avec à leur bord des petits groupes chahutant. Un gémissement paniqué lui échappa, rapidement couvert par les « oh » et les « ah » qui s'élevaient à la découverte de l'immensité du monstre qui semblait prêt à les dévorer. Il y avait trop à craindre, trop à regarder. C'était trop pour ses frêles épaules. Beaucoup trop... Doucement, les enfants disparaissaient à sa vue. Les embarcations quittaient la rive et voguaient vers l'inconnu. Vers le danger, probablement. Vers ce géant de pierre qui l'attendait. Qu'on était loin des cours donnés à la hâte par Iskra et son père dans l'intimité de leur chambre à coucher. Il ne voulait pas être ici ! Il se fichait de rester ignorant jusqu'à la fin des temps pour un peu qu'on le ramène chez lui ! Pourtant, la décision lui avait échappé depuis longtemps. « Tu veux tenir la lampe ? » Il ne restait plus qu'un bateau et une fillette dont les boucles brunes lui rappelaient les siennes. Il ne restait plus qu'un bateau. Le leur. Le sien... Le garçon secoua la tête et recula d'un pas. La surface du lac restait immobile, lui promettant sans un bruit qu'il ne lui arriverait rien. Il ne pouvait se résoudre à s'approcher. Il ne savait pas nager. Il n'avait même jamais vu tant d'eau d'un coup. Alors il secoua la tête, le cœur battant. L'étau s'était brusquement resserré. L'air devenait brûlant. « C'est pas aux filles de porter ça normalement. T'es sûr, tu la veux pas ? J'ai pas envie de la garder moi. Ça a l'air un peu sale en plus... Tiens, prends-la. » Elle lui tendit la perche au bout de laquelle se balançait une lanterne crasseuse dans l'espoir qu'il s'en saisisse. Elle ne comprenait pas. Il se fichait de cette lampe, il voulait bien l'en débarrasser pour un peu qu'on ne le force pas à grimper dans cette barque. Pourtant, un professeur (il l'identifia comme tel en tout cas) arriva derrière lui, posant doucement sa main sur son épaule. « Tout va bien ? » L'adolescent se dégagea de l'emprise d'un geste brusque. On ne le touchait pas. Personne n'avait le droit ! Le regard de l'homme se fit surpris mais il ne releva pas. « Il veut pas monter. On va être en retard ! » La fille s'impatientait, trépignant presque sur la planche qui lui servait de siège. « C'est vrai ? Tu ne veux pas ? » Skat baissa les yeux en haussant honteusement les épaules. « C'est pas grave. Si tu as peur, on ne va pas te forcer. Il y a une calèche qui attend, tu veux la prendre avec moi ? » Après une légère hésitation, il finit par hocher la tête. « Moi aussi, je veux venir ! »
La calèche promise attendait quelques mètres plus loin mais le soulagement n'était pas aussi présent qu'il l'aurait attendu. Il en avait vu plusieurs des chevaux, au cours de sa vie, on les utilisait souvent chez lui mais aucun n'avait jamais ressemblé à celui qui était attaché à la calèche. On voyait ses os sous sa peau sombre et ses ailes immenses auraient pu appartenir à une chauve-souris. Il s'ébroua en hennissant, forçant Skat a reculé d'un pas. Le mouvement attira son attention alors l'animal tourna vers lui sa tête squelettique, le fixant de ses yeux blancs. De ses yeux morts. Il n'avait rien d'un cheval, c'était une créature démoniaque ! Au prix d'un effort sur-humain, il s'arracha à ce contact dérangeant et chercha du regard la fille qui les accompagnait. Elle était grimpée à bord et attendait, encore, qu'il daigne en faire de même. Elle ne semblait pas dérangée par la vue de la hideuse création du Malin. Elle ne semblait même pas l'avoir vue... Avec une prudence incroyable, il monta à son tour, s'installa le plus loin possible de l'horreur et se mit à implorer, dans un murmure maltraité par les cailloux chahutés par les roues, que Dieu l'enlève des griffes du Mal. Il ne comprenait pas. Y avait-il seulement quelque chose à comprendre ? Il n'en était pas convaincu. La sécurité à laquelle il avait toujours cru et l'amour divin dans lequel il avait toujours baigné l'avaient abandonné sans prévenir. Et aujourd'hui, il devait se débrouiller sans, perdu au milieu d'un Enfer qu'il n'avait jamais mérité. Les minutes filèrent au rythme de sa litanie et, bientôt, la diligence s'arrêta au pied des marches qui menaient au château. Le professeur descendit, aidant la fillette à en faire de même. Lui refusa la main qu'on lui tendait et descendit sans un mot. « Dépêchez-vous, la cérémonie va bientôt commencer ! » L'homme les poussa doucement vers les portes vous les inciter à accélérer. Si la gamine le fit sans mal, Skat, lui, ne put s'empêcher de regarder prudemment en arrière. Le cheval funèbre le fixait à nouveau. Un frisson lui parcourut l'échine alors qu'il s'en détournait. Elle avait déjà commencé à grimper les marches. Il dut hâter le pas pour la rattraper. « La...la cheval...? Bizarre un peu ? » Il détestait cette langue stupide, il détestait ces mots qui ne lui venaient pas, il détestait ces sons qui semblaient barbares lorsqu'il les prononçait. « Hein ? Quel cheval ? » L'incompréhension qui se lisait sur ses traits ne trompait pas : elle n'avait vu aucun cheval...
Il n'eut pas le temps de lui expliquer que le Hall se dessinait devant eux. Les élèves, ceux qui avaient pris les barques, attendaient devant d'imposantes portes en bois. Ils chuchotaient avec excitation, attendant avec impatience que le verdict tombe. Lui ne la ressentait pas, cette excitation. Il n'y avait que l'appréhension. La peur. Les doutes. Et si ce cheval n'était qu'une hallucination ? Une mise en garde ? Est-ce qu'il empruntait un mauvais chemin en restant dans cette école ? Il n'en savait rien. Il ne savait plus rien... Ils eurent à peine le temps d'arriver dans le bâtiment que le groupe se remettait en marche. « On a loupé les infos importantes à cause de toi, t'es nul ! » Si le sens exact de « nul » lui échappait, il en comprenait l'idée et ne put éloigner bien longtemps la culpabilité. C'était à cause de lui qu'ils avaient perdu du temps, elle avait raison. S'il n'avait pas eu peur au bord du lac, ils seraient arrivés en même temps que les autres. « Oprostite... » Elle ne releva ni la langue ni l'excuse et se fondit dans la masse. Un soupir échappa au pauvre garçon alors qu'il lui emboîtait le pas, l'esprit malmené par le tourbillon de ses pensées. Les choses étranges et dérangeantes, les traumatismes et les inquiétudes s'accumulaient depuis des semaines sans sembler lui laisser une seule seconde de répit. Et maintenant qu'il était là, dans cette école qu'il n'avait jamais demandé, la Fortune continuait de se jouer de lui. Les enfants avançaient lentement entre deux tables interminables. Il y en avait cinq, en tout. Cinq tables et une marée humaine, la même qu'il avait traversée à la sortie du train. La même qu'il devrait côtoyer jusqu'à ce qu'on lui rende enfin sa liberté. Des taches de couleur se découpaient sur le fond noir. On lui avait vaguement expliqué le système des maisons sans parvenir à lui en faire retenir grand chose. Les qualités qu'on leur prêtait ne lui parlaient pas. Peut-être qu'il se serait fait un avis sur la question si on les lui avait traduites mais, comme ça n'avait pas été le cas, il ne voyait finalement que des noms abstraits sur des idées qui l'étaient tout autant. Sa sœur était là, quelque part. Il la chercha à la table de sa maison, son regard sombre et perturbé glissant avec espoir sur chaque visage. Jusqu'à ce qu'elle lui apparaisse enfin. Sa main s'agita, ses lèvres remuèrent. Il ne comprenait rien mais répondit à son geste par un bien moins à l'aise. Ils étaient des bêtes de foire, l'attraction de la soirée. Il sentait l'attention de tous ces adolescents déjà installés à leur table peser lourdement sur lui. Des murmures s'élevaient sur leur passage, des murmures mélangés et déconcertants.
L'interminable traversée de cette salle finit par prendre fin comme celle qui l'avait mené au travers du pays. On se pressa au pied de l'estrade où les professeurs les observaient avec attention. « Je sais que les rumeurs vont bon train et que certains savent déjà que nous allons devoir changer légèrement le déroulement habituel de notre cérémonie de répartition... » Les voix s'intensifièrent un instant mais il ne fallut qu'une seconde pour ramener le silence, plus total encore qu'il ne l'était jusque là. « Une répartition exceptionnelle pour des circonstances exceptionnelles puisque l'un de vos nouveaux camarades entrera directement en troisième année. Je compte sur vous, quelle que soit sa maison, pour l'accueillir chaleureusement et le guider dans ses premiers pas dans notre belle école. » Le groupe s'agita, cherchant sûrement à mettre le doigt sur l'intrus. Skat tourna doucement la tête vers Jade, cherchant un soutien aussi faible soit-il. Il voulait rentrer chez lui. Cette comédie avait assez duré. À la maison, rien ne lui semblait aussi compliqué. Ici, tout lui semblait insurmontable. Non. Tout était insurmontable. « Mais avant toute chose, écoutons la chanson de notre cher Choixpeau ! » C'était le Choixpeau qui choisissait là où devaient aller les élèves, il s'en souvenait, mais il ne s'attendait pas à ce que le couvre-chef s'anime sur son tabouret. L'adolescent eut un mouvement de recul alors qu'il glissait la main devant sa bouche dans un geste surpris. Dans la salle, tout le monde paraissait trouver cela normal. Est-ce qu'il devenait fou ? Jusque là, il n'en avait jamais eu l'impression... Les secondes n'avaient aucune fin et l'objet s'égosillait sans respirer. Il ne pouvait pas respirer, c'était un objet. Mais un objet ne parlait pas. Il n'y avait que l'Homme pour avoir de telles capacités, Dieu en avait décidé ainsi. Et ils avaient bafoué son œuvre en créant cette abomination. Le calvaire prit fin lorsque le tissu s'avachit sur son siège. Le silence puis quelques applaudissements ennuyés. Un frisson de dégoût s'enfuit sous son pull. « Bien... Bien... Commençons sans plus tarder ! » On déroula un parchemin et lut silencieusement ce qui s'y étalait. « Skat Ashley Cunningham. » Les murmures reprirent. C'est que depuis plusieurs mois, son nom était devenu tristement célèbre. Il n'était rien d'autre que la pauvre victime d'une folie paternelle, la preuve même qu'on ne pouvait faire confiance à personne et que ces illuminés extrémistes pouvaient s'avérer dangereux. Alors qu'il n'en était rien. Il était en réalité la victime de gouvernements qui le dépassaient totalement et qui prétendaient bêtement agir pour son bien sans s'attarder un seul instant sur ce qu'il en pensait, lui, principal concerné. Il n'émit aucune réponse, n'esquissa aucun geste. « Skat Cunningham ? » On s'approcha du bord de l'estrade, on dévisagea chacun des mômes présents ici. Quel lecteur de la si célèbre Gazette n'avait pas aperçu rien qu'une fois ses traits fins ? La discrétion que son père lui avait toujours apprise était morte, sauvagement assassinée par la rubrique des faits divers. On descendit les quelques marches et la petite foule s'écarta devant l'autorité comme les eaux devant Moïse. « Ne faites pas l'enfant, venez. » Un silence de plomb régnait sur la Grande Salle. Une main se posa dans son dos et le poussa doucement en avant. Il obtempéra sagement. « Zovem se Saša. » Un sourire plein d'une gêne désolée passa sur les lèvres du professeur alors qu'il secouait vaguement la tête. Il n'avait sûrement rien compris. « Allez, asseyez-vous. » On lui désigna le tabouret et, sans attendre qu'il se soit véritablement installé, on laissa tomber le Choixpeau sur ses boucles mutilées, dérobant à sa vue les centaines de paires d'yeux braquées sur lui. C'était ici que commençait sa nouvelle vie et il n'avait jamais tant espéré pouvoir y échapper...
QUESTION DU CHOIXPEAU
Une personne pas douée tombe dans le lac noir, malheureusement, il/elle est le seul témoin de la scène, que fait-il/elle ? – Il attendra un peu dans l'espoir qu'elle parvienne à en sortir seule puis il appellera à l'aide en priant pour que le temps perdu ne lui soit pas fatal. Quoi qu'il en soit, il ne s'y risquera pas lui-même. Il ne sait pas nager alors inutile de n'être qu'une victime de plus.
Dernière édition par Noel T. Shiver le Dim 16 Juil - 4:31, édité 2 fois
DETAILS EN PLUS Et plus en détails ? Statut Sanguin: Sang-Mêlé Pouvoirs spéciaux: Légilimens en devenir Poste de Quidditch: Aucun Patronus: Epouvantard: Matières suivies et niveau: Points Défis: (2000/2000) Disponible pour un RP ?: Si t'es pas pressé, c'est d'accord ! D'autres comptes ?: Azraël
Re-bienvenue J'adhère complètement à ton choix d'avatar
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(#) Sujet: Re: SKAT ✝ Zovem se Saša. Mer 12 Juil - 2:03
Purée, j'ai mis 20 millions d'année à lire et du coup je suis en retard au boulot. u_u
Mais bon, je te souhaite quand même rebienvenue parmi nous avec cette petite nouvelle ce petit nouveau ! Encore un qui va mal terminer et mourir, je suppose.
DETAILS EN PLUS Et plus en détails ? Statut Sanguin: Né-Moldu Pouvoirs spéciaux: Poste de Quidditch: Aucun Patronus: Un chiot golden retriever Epouvantard: Une meute d'oiseaux en plein vol Matières suivies et niveau: Points Défis: (2000/2000) Disponible pour un RP ?: Si t'es pas pressé, c'est d'accord ! D'autres comptes ?: E. Adrian Leonhart & Willow Gillespie
(#) Sujet: Re: SKAT ✝ Zovem se Saša. Mer 12 Juil - 3:06
(#) Sujet: Re: SKAT ✝ Zovem se Saša. Jeu 13 Juil - 18:19
Je ne sais pas comment j'ai fais mais j'ai réussi à tout lire j'ai adoré d'ailleurs, ce personnage est vraiment trop cool
Du coup re-bievenue
Le Choixpeau Magique
À SAVOIR Arrivé(e) le : 21/04/2011 Parchemins rédigés : 1910 Points : 0 Crédit : (c) Septimus Veturia
DETAILS EN PLUS Et plus en détails ? Statut Sanguin: Pouvoirs spéciaux: Aucun pour l'instant Poste de Quidditch: Aucun Patronus: Epouvantard: Matières suivies et niveau: Points Défis: (0/0) Disponible pour un RP ?: D'autres comptes ?:
(#) Sujet: Re: SKAT ✝ Zovem se Saša. Dim 16 Juil - 11:42
Bienvenue parmi nous
Ton parcours difficile fera ta force et tu seras bien entouré en allant à...
SERPENTARD
!
Quelques conseils pour bien commencer
Maintenant que tu es réparti(e), il ne faut pas te reposer sur tes lauriers. Ta vie NYLienne commence à peine et pour la faire démarrer sur de bonnes bases, il te reste encore pas mal de petites choses à faire. Ne t'inquiètes pas, je vais tout te montrer...
Commence par créer ta fiche de liens, ta fiche de RPs, ainsi que boîte aux lettres qui te permettra aussi de gagner des points RPs en écrivant des lettres de plus de 300 mots et ta boite à hiboux express pour les messages plus courts. Peut-être que tu n'en trouveras pas tout de suite l'utilité, mais ça ne saurait tarder... Alors mieux vaut l'avoir fait tout de suite. Et puis, si jamais tu cherches quelqu'un d'important pour le développement de ton personnage, n'hésite pas à créer un poste vacant.
Aussi, je te conseille d'aller lire comment marche le système de points, si ce n'est pas déjà fait. Ce serait bête de ne pas savoir comment rapporter des points à ta maison. D'ailleurs, tu peux jeter un coup d'oeil aux sabliers pour voir où en est la course à la Coupe. Et comme les votes, c'est le bien, Top-Siter rapporte des points !
N'empêche que le meilleur moyen d'obtenir des points reste d'aller en cours. Et oui, nous sommes dans une école et nos chers professeurs vont se faire une joie de t'apprendre tout ce qu'ils savent. Quand tu te seras bien installé(e) dans ton dortoir, attrape tes bouquins et rends toi vite en classe ! Nos professeurs t'attendent, et pour savoir à qui tu as à faire, tu trouveras la liste ici. La liste des sortilèges par année est disponible là.
Il n'y a pas que les points des sabliers qui sont importants ici. Il y a aussi les points défis ! Tu peux aller lire ce sujet pour savoir exactement ce que c'est que les points défis. N'oublie pas de créer ton sujet d'ailleurs, qu'on puisse tous t'en proposer ! Bien sûr, tu peux également savoir combien tu as de points en allant voir la fiche ! Le nombre de point s'initialise automatiquement à 0/0 mais dès que vous avez un point, vous pouvez voir l'évolution de ceux-ci à 1/2000...
Heureusement, il n'y a pas que les cours dans la vie ! Tu vas pouvoir t'entraîner à être une fouine en écoutant les rumeurs qui se baladent dans les couloirs, attraper ton balai pour devenir le plus grand joueur de Quidditch de l'histoire de Poudlard... Enfin, pour être sûr(e) de ne rien louper des activités qui te seront proposées, garde un oeil sur le panneau d'affichage, et sur la Gazette du Sorcier pour être informé(e) de tout ce qui peut bien se passer dans le monde magique.
Le HRP (hors-RP) te donnera également de quoi t'occuper grâce à une partie Flood bien remplie. Tu pourras également faire plaisir aux autres membres en leur offrant des cadeaux. N'oublie pas, à l'occasion, de passer sur la ChatBox, avec un peu de chance, tu tomberas en plein jeu... S'il y a quelque chose que tu ne comprends pas, nous répondrons à toutes tes questions.
Sur ce, je te souhaite beaucoup de plaisir dans cette nouvelle vie qui commence, et plein de merveilleux RPs !
Toi non plus pas question que t'y échappes, même réparti. C'EST MON FRÈRE ! REGARDEZ MON FRÈRE, IL EST BEAU MON FRÈRE !Quoique peut-être pas trop barraque, mais bon c'est la vie comme on dit.
Rebienvenue. Comme je t'ai déjà dit, j'ai beaucoup aimé ta fiche, et j'ai hâte de pouvoir commencer à jouer ce lien avec toi, bientôt bientôt ! Bien sûr un gros problème persiste, à savoir pourquoi ce pauvre Skat s'obstine dans les mauvaises fréquentations, par exemple ces blaireaux de Sinclair ou ce crétin de Rosenbach, mais il sera remis sur le droit chemin bien assez tôt.
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(#) Sujet: Re: SKAT ✝ Zovem se Saša. Mer 26 Juil - 16:52
Rebienvenue ! J'adore et j'aurai lu d'une traite s'il n'y avait pas eu l'appel de la nourriture. ^^
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(#) Sujet: Re: SKAT ✝ Zovem se Saša. Mer 26 Juil - 19:04
J'ai tout lu ! Et ben qu'elle histoire... re bienvenue