Dans une petite maison fleurie de Llandaff, dans Cardiff, le soleil se levait & le printemps régnait pour la première fois dans mes yeux. Mariés dix mois plus tôt, ils venaient tous deux de milieux différents. Ma mère, Alison Moss, était une sorcière, & une sorcière au sang-pur. La première déception pour ses parents, fut qu’elle intégra Poufsouffle au lieu de Serdaigle. Leur rang faisait fréquenter la famille depuis des générations la Maison de l’éclairée Rowena.
Mais Alisson aimait les arbres bien vivants dehors, pas morts dans une bibliothèque, bien qu’elle aimait fourrer le nez dans de vieux ouvrages de sciences naturelles. L’envoie du faire-part de mariage, avec Lord Albawr Habber – qui, comme son prénom l’indique venait d’Ecosse, & était d'origine allemande – dont le sang était mêlé, coupa définitivement la relation entre les deux générations, malgré sa classe sociale.
Quand elle était enfant, c’était une petite fille solitaire. Elle avait l’habitude de passer les vacances d’été chez ses grands-parents paternels, en campagne. Dans leur maison remplie de bibelots, elle faisait voler les objets, danser les pantins avec ses premiers signes de magie, à huit ans.

Au départ, elle n’avait pas tellement envie d’aller à Poudlard : ses grands-parents maternels n’étaient-ils pas passés par là aussi ? Mais, à Poufsouffle, elle s’y plut énormément, & sa scolarité défila à une vitesse tellement folle qu’elle tente de ne pas y penser, suivant les conseils du philosophe Pascal. Elle était une véritable encyclopédie, néanmoins, remplie de beaucoup d’anecdotes & d’histoires de l’Histoire.
Les années passèrent. Une, puis deux, puis trois. La Première Guerre Mondiale était de plus en plus proche dans l’Europe, & Grindelwald commençait à faire ses premiers méfaits. Elle fut marqué par la mort de sa grand-mère en 1916, soit six ans après celle de son grand-père.
Elle travailla au département de Contrôle des Abus Magiques, puis devint Auror.
C’est dans ce contexte qu’elle se blessa mortellement lors d’une intervention, en 1925, & qu’elle fut enterrée à Cardiff à quarante ans : elle était en pleine course poursuite avec un jeune faussaire Sorcier dans le comté du Cheshire, & à l'entrée d’un tunnel, près d’un fleuve bourbeux, la voiture se déporta & heurta l’un des murs dont la répercussion projeta notre conductrice dans le bourbier, où elle se noya inconsciente.
La nouvelle de « Miss Franny » eut un retentissement dans la sphère médiatique de l’époque, aussi bien sorcière que moldue, avant d’être oublié des esprits un mois après. Elle n’avait nul part où aller, sinon auprès de ses parents qu’elle accompagna durant tout leur deuil. Son père & sa mère moururent dix & douze ans après, respectivement, mais se résignèrent à la mort totale, & sa solitude reprit de plus belle.

Sa première réaction fut de pleurer… Aussi. Ses souvenirs étant assez flous après, elle se souvient seulement d’être arrivé à Poudlard grâce au Moine Gras qui l’avait toujours apprécié, & lui avait envoyé une lettre spectrale ; c’était durant la scolarité de celui qu’on nomma plus tard Voldemort – Vous-Savez-Qui ou Tom Jedusor pour les intimes – car elle avait un frisson intense dans le dos chaque fois qu’elle le croisait dans les couloirs, mais elle ne se gênait pas non plus pour lui passer au travers & lui procurer la même sensation !

« J’ai connu la Grande Dépression, la Seconde Guerre Mondiale & la fin de Grindelwald, la Guerre Froide, la construction de l’Union Européenne, la mort du Seigneur des Ténèbres, la Première Bataille de Poudlard, les Tour Jumelles, le gouvernement de Hermione Granger, le Brexit, & maintenant la domination du Royaume-Uni magique par les mangemorts. J’ai comme une impression de déjà-vu ; étrange puisque je n’ai aucun souvenir d’ancêtres Français dans ma famille, ha ha ! » confiera-t-elle au Moine Gras, un jour.

Alisson Habber née Moss (1850-1937) ♦️ la mère de Franny était une femme fort sympathique, même si elle avait, sans doute, une inimité forte envers ses parents. Une sorcière fort sympathique qui, hélas, n’avait jamais souhaité rejoindre sa fille en tant que fantôme, malgré tout l’amour qu’elle avait pour elle. Elle était femme au foyer – normal à l’époque – & avait pour passe-temps préféré un ancêtre du bridge avec ses amies. Elle n’a jamais regretté sa vie, en tout cas !

Lord Albawr Habber (1850-1935) ♦️ Cet homme était un sorcier respecté & un Lord travailliste. Toute sa vie, il a œuvré avec les Moldus comme les Sorciers, & c’est assassiné par un militant conservateur Moldu que sa vie se termina ; on apprit plus tard que ce dernier était soumis à un Imperium, & il fut quand même condamné par la justice Moldue, le jeteur de sort, qu’on retrouva peu après, subis le même… Sort.

Klaus Habber (1820-1900) & Rachel Habber née Bennot (1830-1916) ♦️ Les seuls grands-parents que la jeune femme morte ait connu & aimé : deux Moldus peut-être, mais deux personnes amusantes. Klaus – dont le nom est évocateur – a toujours gardé un accent certain, & un talent dans la peinture, ayant fait l’Académie royale prussienne des arts de Berlin, & gagna bien sa vie. Pour Rachel, elle enseigna dans un pensionnat pour jeunes filles de bonnes familles qui fut, hélas, bombardé durant la guerre.

Il y avait de la musique. Notre voisin Moldu des Etats-Unis était un grand fêtard, comme tout le monde riche de mon époque. Les tables de buffet étaient garnies de majestueux hors-d’œuvre, des jambons cuits & des épices, mélangés à des salades, des coquillages & de dindes. Dans le hall principal, le bar était bondé, les serveurs ne savaient où donner de la tête, & une fontaine à alcool dans le jardin à l'extérieur avait une petite popularité.
Que l'air était plein de bavardages & de rires ! Les rencontres étaient toujours la bienvenue sur la piste de danse, & je pense que mon rire était des plus joyeux à ces moments là. Lumières, musiques, personnes… Tout brillait, tout scintillait, tout se composait, se décomposait, & se recomposait encore, dans un rythme fou !
On dansait maintenant dans l’impressionnante salle de réception ; des hommes riches, quoi qu’âgés, avaient cette chance si particulière d’être entourés de jeunes & jolies belle femmes d’une trentaine d’années ; puis l’orchestre commença à jouer LA musique si bien connue qui vous transporte à l’ère du Charleston & du jazz ! Comme portés par une euphorie collective, la quasi-totalité, pour ne pas dire l’entièreté des invités, alla sur la piste &, sans faire attention, prit un ou une partenaire pour danser avec pendant plusieurs minutes. Les têtes, enivrés par l’alcool & la fatigue, ne se souciaient plus de qui était qui, ce qu’on faisait : l’important était de danser jusqu’à l’épuisement total. & dans un éclat total d’hilarité, un groupe de danseuses emplumées firent péter les confettis dans toute la salle !

Il fallait en profiter : nous étions dans notre aire d’insouciance, nous étions jeunes, nous étions beaux, nous avions de folles nuits, nous avions des jours sans fin… Pour paraphraser ce film moldu Barry Lyndon, je dirais que « ce fut sous le règne du roi Georges V que ces personnages vécurent et se querellèrent ; bons ou mauvais, beaux ou laids, riches ou pauvres, nous sommes tous égaux maintenant ».

Poudlard a eut ses Années Folles, maintenant c’est la guerre !