Spencer & Jill

Now the moon begins to shine; good night sleep tight.

Le château était endormi depuis quelques heures déjà mais on pouvait distinguer une silhouette solitaire dans la bibliothèque. Une pile de livres en main, elle disparaissait derrière les rayonnages avant de réapparaître ailleurs à des intervalles plus ou moins régulier. Le né-moldu effectuait sa corvée nocturne. Enfin, si un mangemort avait pris la peine de surveiller l'ex cinquième année, il aurait plutôt jugé que ce dernier traînait au lieu de travailler. Certes, les tables se vidaient petit à petit mais on ne pouvait pas laisser Spencer dans un endroit aussi riche en connaissance que la bibliothèque sans le voir tenter de compléter les siennes. La fatigue qui donnait à ses jambes la consistance du plomb ne faisait pas le poids face à cette avidité de savoir et même l'épée de Damoclès suspendue au-dessus de sa tête si tout n'était pas en ordre en temps et en heure ne savait le dissuader de feuilleter fébrilement les bouquins. Ce n'était certes pas agréable de lire avec le peu de luminosité qu'on lui accordait, ses paupières plissées en témoignaient, ni très confortable de lire en marchant mais il faisait avec. Ça faisait déjà un petit bout de temps que Spencer avait corné tous les livres encore en possession de ses camarades de galère et certains d’entre eux avaient même dû craindre pour sa santé mentale en le voyant déchiffrer une notice d'utilisation en allemand. Les énigmes que l’ex-poufsouffle recevait de son correspondant mystère étaient une bouffée d'oxygène, mais il n'était pas près d'en profiter étant donné qu'il n'avait toujours pas eu l'occasion de déposer sa réponse. Spencer n'avait plus grand chose pour s'occuper l'esprit, son principal refuge s'était envolé et il était en manque. Aux grands maux les grands moyens dit-on ? Ça résumait assez bien la situation et expliquait en partie qu'un livre se soit retrouvé glissé dans un recoin du bureau de la bibliothécaire, près de la sortie et facile d'accès quand on savait ou chercher. N'allez pas non plus croire que le poufsouffle a dit adieu à son inquiétude légendaire, mais il a longuement pesé le pour et le contre. Son choix pourrait réduire à néant touts les efforts qu'il faisait pour ne pas attirer l'attention, mais la tentation était forte, son plan bien réfléchi comme toujours et il avait l'avantage d'être seul, sans son binôme en qui il avait confiance mais qui n’était pas à l’abri d’une gaffe. Cette situation ne se représenterait pas avant longtemps, il le savait alors il avait pris le risque. Au pire, rien ne l’empêcherait de faire marche arrière au dernier moment, il y avait veillé.

Bien sûr, Spencer restait au aguets, enfin autant que possible quand on est fatigué, stressé, dans une pièce peu éclairée et qu'on range des livres dont on essai en même temps de lire le résumé. C'est sans doutes ce dernier point qui explique que Spencer se soit retrouvé un livre ouvert en main, au beau milieu de l'allée centrale alors que la lourde porte s’ouvrait sur ce qu’il entendit être un mangemort. Sa respiration s’accéléra, il tenta de refermer le livre, mais dans la précipitation, ce dernier lui échappa et fini sur le sol. La porte se claqua alors qu’il se baissait pour le ramasser et que sa main libre traçait de longs sillons rosés sur son bras, un toc. Spencer releva prudemment la tête et n’eu pas le temps d’être soulagé de reconnaître une née-moldue, Jill qu’un livre s’envolait vers lui. Spencer ne su pas éviter, déjà que ses réflexes restaient à prouver, alors dans la situation actuelle, ils étaient inexistants. la jeune homme se vit percuter à la jambe et suivit des yeux le parcourt du livre jusqu’au sol.

- Oh excuse…excuse…J’voulais pas ! Je n’ai pas … ?

La question resta en suspend pendant quelques secondes avant que les pensées du jeune homme s’éclaircissent.

- Heu ben heu, si. ‘Fin je me doute que tu ne voulais, ce que je voulais dire c’est que tu m’as touché. Jill aurait débarqué un peu plus tôt dans la soirée, il l’aurait sans doutes rassuré tout de suite, mais il n’y pensa qu’après. Enfin, c’est pas grave. Un bleu de plus ou de moins. Au vu de l’expression confuse de Jill, il aurait sans doutes été moins maladroit de s’arrêter juste avant, mais Spencer ne s’en rendit pas compte tout de suite. En tout cas, je suis content que tu sois là pour m’aider. Ça aurait été quelqu’un d’autre que Jill, Spencer aurait continué sur sa lancée sans trop se poser de questions mais il était face à quelqu’un qu’il ne comprenait pas. Non, je me doutes de ce que ça doit être pour toi d'être réveillé comme ça. Tu as déjà fait ta corvée ce matin et cet aprèm. Mais je préfère que ce soit toi qu’un mangemort. Spencer s’était remis de sa frayeur et son toc avait disparu, enfin presque. Il n’y avait, à priori, plus de risque de voir son sang couler mais les doigts du jeune homme emprisonnaient toujours son bras. Il détacha un doigt, puis un deuxième. On s’y met ? Parce que jusque là, j’étais tout seul du coup, j’ai pas avancé aussi vite que prévu. Mon binôme n’était pas en état, mais pas du tout après être passé dans la grande salle. Son dernier doigt vint quitter sa peau, il était prêt.

Spencer & Jill

Now the moon begins to shine; good night sleep tight.

Spencer s'était finalement rendu à ce qui lui semblait être une évidence : pour une fois, il passerait sa nuit en solitaire dans la grande bibliothèque. Son binôme a fait le con ce matin et les représailles ont été si violentes qu'il n'est probablement pas capable de tenir debout cette nuit. Une corvée l'attend au levé du jour, c'est certain, mais en attendant Spencer se tape la leur tout seul. L'ex cinquième année n'en parait pas plus que ça troublé, calme et méthodique il remet en ordre sa deuxième maison. Quand on y pense, c'est fou le nombre de personnes qui sont incapables ou ne prennent pas la peine de reposer les choses là où elles les ont trouvées. C'est pourquoi, il essai de ne pas y penser, de prendre de la distance car il sait que sinon la chute dans le trou noir qu'il a tant de fois aperçu est inévitable. Le jeune homme ne peut rien faire pour améliorer sa vie là, maintenant, tout de suite, cette nuit, alors il fait ce qu'on lui demande sans poser de questions, même s'il laisse ses yeux traîner un peu partout.

Spencer était persuadé d'être tranquille pour la nuit, ce qui explique en partie l'expression de surprise qui a du se lire sur son visage quand on l'a tiré de sa lecture, le résumé d'un livre qui traitait du sang de dragon. Le jeune homme n'a pas de montre mais à vu d’œil, le jour était encore bien loin de se lever. Voir l'un des lourds battants de la porte bouger et une silhouette en émerger l'a donc un peu déstabilisé : Spencer a laissé tomber l'un de ses précieux et un toc s'est déclenché. L'ex cinquième année s'attendait à tout, un doloris lancé pour le plaisir ne l'aurait tellement pas surpris, mais certainement pas à voir un livre s'envoler dans sa direction. On a pu voir ses yeux s'écarquiller et éventuellement l'un de ses membres tenter d'esquiver bien trop tard.

Une seconde plus tard, Jill s'excusait et Spencer tentait de la rassurer avec tout le tact dont il était capable de faire preuve, autrement dit, comme un éléphant dans un jeu de quille. En tant normal, il n'aurait pas cherché à comprendre et dit à la personne de se calmer mais là, c'est différent et pas forcément parce qu'il est en face de Jill. Non, il n'est plus le seul à réveiller les autres la nuit, plus le seul à vivre l'enfer. Son destin l'a peut-être poignardé dans le dos, mais il n'est pas le seul à en baver, tout les né-moldus en bavent. On ne peut pas comparer les atrocités, c'est ce qu'il a fini par se dire. Il comprenait qu'on puisse péter un câble, ça lui arrivait aussi.

Un léger sourire s'accrocha à ses lèvres quand elle lui parla de statistique. Il acquiesça. Jill n'avait pas tort, les probabilités que le livre vienne le percuter étaient moindres, mais, du point de vue de jeune homme, sa rapide évaluation méritait quelques précisions. Elle était en train de s’inquiéter qu'il évaluait déjà grossièrement l'angle entre la porte et l'endroit où ils se trouvaient. Spencer savait bien que fautes d'instrument de mesure, les imprécisions allaient s'accumuler et ses calculs donneraient de ce un résultat probablement faux et évidemment inutile mais c'était une manière comme une autre de s'occuper l'esprit.

- Sincèrement non, ça va. Il la fixait dans les yeux, pas le moins gêné du monde, il faut dire qu'il y était un peu habitué. Je te jure. Le livre doit faire à tout casser 500 grammes, tu étais loin et on ne peut pas dire que tu, qu'on soit en pleine possession de notre force. C'est difficile à croire, mais il lui épargnait un calcul qui n'était pas terminé, la laissant juger par elle-même, pour qu'elle arrète de s'inquiéter pour rien.

Le silence plana quelques instants, un sourire crispé naquit sur les lèvres de la jeune femme déclenchant un haussement de sourcil chez Spencer. La réponse finit par venir. Il faut croire que la parole n'est pas forcément nécessaire entre eux, ou pas. Il venait de lui dire qu'il n'y avait rien de grave et elle s’excusait. Cependant la suite était bien mieux et Spencer espérait que l'incident était clos de son coté avec ces derniers mots.

- C'est ça. Fait attention à toi. T'as plus qu'une chance, profite en bien. Après on sera quitte et j'aurai le droit de refuser tes excuses.

Ils ne s'étaient quasiment jamais adressé la parole depuis qu'il l'avait rembarré en troisième année, et là soudainement, une sorte de discussion prenait forme. Étrange ? Pas tant que ça, c'était surtout la situation qui l'était et s'y prêtait. Ce n'était que la deuxième fois qu'ils se retrouvaient à deux et l'autre jour était une nuit où la priorité n'était pas de discuter : en pleine bataille. Les autres encore n'étaient pas vraiment un souci pour engager une discussion, son crétin de frère l'était. Toujours à se mêler de tout, il voyait le mal partout y compris dans les coups d’œils jetés en cours. Oliver n'était peut-être qu'une gêne agaçante et il n'aurait pas su dévier Spencer de son but s'il avait voulu parler à la jeune femme, mais ce but n'avait pas existé. Tout était une histoire de circonstances du point de vue de l'ex-cinquième année. Là encore, si elle l'avait salué le plus normalement du monde, ils seraient déjà au travail. Cela lui parut donc normal de résumer la situation et de lui expliquer le pourquoi de sa présence ici avant qu'ils ne se mettent au travail pour de bon. Comme l'avait si justement dit Jill, le mangemort allait revenir à un moment ou à un autre. Ils se séparent donc sur ces paroles.

Un temps indéterminé s'était écoulé et un bon paquet de livre rangé, le mal de dos s'ajoutait aux autres douleurs mais Spencer ne ralentissait pas le rythme, marchant vite pour compenser la perte de temps à feuilleter les bouquins. Il arriva dans un rayon botanique, examina l'endroit quelques secondes avant de glisser un document, arrangeant au passage, ceux rangés au mauvais endroit. De la poussière vint lui chatouiller les narines et il détourna la tête, pas vraiment surpris de découvrir Jill en train de le fixer. Le jeune homme leva un sourcil et lui lança un regard qu'elle saurait interpréter comme une interrogation : "Qu'y a-t-il ?" Il n'eut pas l'occasion d'entendre si le message était passé que l'éternuement qui le guettait se déclencha. Deux secondes plus tard, il était à elle.

- Pardon. Spencer attendait maintenant une réponse à sa question, bien qu'il soit presque sur de la réponse. Sa beauté légendaire avait déconcentrée la jeune femme de sa tache. Enfin, il n'avait pas pensé exactement ça, mais c'est l'idée.

Spencer & Jill

Now the moon begins to shine; good night sleep tight.

C'était inattendu, mais au final, ça ne dérangeais pas Spencer de faire sa corvée avec Jill. Elle aurait pu trouver une manière un peu moins violente de lui annoncer sa présence mais c'était déjà oublié, chose qu'il tentait de lui faire comprendre. Certes, il n'était pas de ceux qui donnaient une seconde chance mais l'ex-poufsouffle ne l'avait pas visé avec le livre et il y avait des circonstances atténuantes. Si le jeune homme commençait à se prendre la tête pour des broutilles, il ne serait pas au bout de ses soucis. Le message était visiblement passé, Jill cessait de se confondre en excuse pour répondre à la taquinerie de son camarade de galère. Elle venait à douter de la véracité des propos du jeune homme, et allait même jusqu'à vanter ses propres capacités. C'est vrai qu'elle ne le connaissait qu'à peine, assez peu pour penser qu'elle était capable de lui décrocher un pardon s'il n'avait aps voulu le lui céder.

- Je demande à voir. Rien que pour voir le résultat quand tu y mets du tien, j'en serais capable.

L'ex cinquième année ne serait pas aussi sure d'elle si elle avait vu à quel point Spencer pouvait se montrer froid face aux tentatives d’attendrissements quand elles étaient volontaires. En plus du talent, il fallait avoir des arguments en béton armé pour réussir à déclencher son empathie quand on venait de lui causer du tort. Inutile de dire que la pitié était simplement inaccessible. Pour l'instant, même s'il ne l'avait pas voulu, Spencer aurait quand même accepté ses excuses parce qu'il se sentait redevable, mais il était curieux de découvrir les fameuses capacités que la née-moldue n'avait pas encore dévoilées, même si ça signifiait qu'ils se seraient embrouillés.

Ce n'était pas pour aujourd'hui, ils n'en avaient pas franchement le temps, une quantité astronomique de livres les attendait sur les tables. Ranger ces bouquins n'était pas un travail d'équipe et ils se séparèrent bien vite pour remplir cette tache qui leur était imposée. Il n'y avait pas à dire, Spencer se sentait bien mieux entre ces murs familiers qu'à laver les toilettes, ou à subir la météo écossaise. Se lever la nuit ne le dérangeait pas, c'était même une habitude. Combien de devoirs, avait-il rédigé seul dans la salle commune entre deux mauvais rêves ? Beaucoup, Spencer ne saurait être plus précis, sa vie nocturne était riche. Et encore, on ne parlait pas de ses escapades hors du repère des jaunes et noirs, qui étaient devenues de plus en plus fréquentes au fur et à mesure que les années avançaient. Spencer donnerait beaucoup pour pouvoir goûter à un moment de solitude, installé sur un placard à balais dans le noir, là où personne ne viendrait le chercher, mais cette tranquillité lui était interdite alors il se contentait de sa corvée à la bibliothèque.

Le livre qu'il avait en main le guida non loin de sa binôme d'un soir sans qu'il ne le remarque tout de suite. Il fallut l'intervention des acariens pour découvrir qu'il était observé. Spencer, habitué à voir les yeux de la née-moldue, et ne s'en inquiétant plus, se contenta de lui lancer un regard interrogatif. Un éternuement le força à détourner le regard et quand ses yeux se rouvrirent, il n'y avait plus moyen de les diriger vers ceux de Jill, elle était retournée à sa tache. Spencer, lui, ne fit pas comme si de rien était et observa sa camarade gagner le haut de l'étagère. Allait-il intervenir ou non, il n'eut pas le temps de se décider qu'elle prenait la parole pour lui poser une question. Les questions, le jeune homme n'aimait pas ça. Sa curiosité le poussait à en poser beaucoup mais elle était rarement tournée vers les gens, sans doutes par peur de se la voir retourner. Cette fois-ci ce fut Spencer qui relu négligemment la couverture cornée du document qu'il n'avait toujours pas rangé.

- C'était il y a cinq mois, évidemment que j'ai oublié des détails. La mémoire fait le tri entre ce qui est important et ce qui ne l'est pas. Ou comment éluder la question. Spencer aurait pu simplement dire qu'un pan entier de sa mémoire s'était effacé sans en dire plus, s'il n'était pas quelqu'un d'aussi secret. S'il pensait avoir été alerté de l'intrusion par le Moine Gras, c'est simplement parce qu'il avait entendu dire que c'était ce dernier qui avait sonné l'alerte dans la salle commune des Pouffsoufle. Ce n'était qu'une supposition, il était peut-être en train de squatter une salle vide du quatrième étage au lieu de sagement dormir. Spencer était bien incapable raconter avec certitude le début de cette nuit de folie. Le livre vint retrouver sa place entre ses congénères, Spencer s'était tu. Son premier souvenir était celui de Jill, enfermé avec lui dans une pièce étroite et sombre. Elle lui parlait, il ne comprenait pas ce qu'elle disait. Il entendait juste sa respiration diminuer dans sa poitrine. Ses bas étaient en sang, blessures qu'il s'était lui-même infligées.

Jill brisa le silence pour l'informer du fait qu'il n'est pas le seul à être amnésique, mais le vide sonore reprit aussitôt ses droits. Spencer rangea méthodiquement les deux derniers bouquins de sa pile avant de se retrouver les mains vides. Sans contenance, il se retrouvait face à un dilemme. S'éloigner pour chercher d'autres livres et laisser le semblant de discussion où il en était, ou répondre, se dévoiler au moins un peu. Spencer devait être dans ses bons jours car après un temps indéterminable, il s'appuya contre l'étagère, leva les yeux vers la née-moldue et repris la parole.

- Je ne pense pas que ce soit une impression et c'est peut-être bien comme ça. On a peut-être vu des choses qu'il est mieux d'avoir oublié. On a peut-être fait des choses qui se sont effacées pour notre bien.

Spencer avait peut-être opté pour la deuxième solution mais ça ne voulait pas dire qu'il allait lui livrer ce qu'il avait sur le cœur sur un plateau d'argent non plus. Il restait lui-même.

Spencer & Jill

Now the moon begins to shine; good night sleep tight.

Spencer aimait cette pièce, autant par son architecture que par le savoir qu'elle recelait, et il espérait de tout cœur qu'elle resterait un bon souvenir quand il aurait quitté Poudlard. Il y a quelques mois de cela, le jeune homme n'aurait jamais imaginé un seul instant que la quiétude qui s'imposait à lui quand il était ici puisse s'estomper mais depuis les tortures, il n'était plus sûr de rien. Les mangemorts prenaient plaisir à répandre le malheur autour d'eux et ils n’attentaient pas d'occasions, ne cherchaient même pas d'excuses valables pour s'amuser. Les risques étaient devenus omniprésents pour les opposants au système, qu'ils le soient de leur plein gré ou non, et les inquiétudes de Spencer, déjà bien trop présentes avant, n'avaient fait que se multiplier avec l'arrivée de leurs justifications, Blackman et compagnie. Aussi quand la porte de la bibliothèque s'était ouverte, la réaction de Spencer aurait semblé disproportionné au plus couard des humains pourvus qu'il soit extérieur au décor. Mais ce brusque changement de comportement n'était pas une comédie et témoignait d'un sentiment plus proche de la terreur que de la peur, sentiment qui lui était malheureusement habituel. Plus par normalité que par chance, le soulagement qui suivit alla de paire, aussi fort, quand le jeune homme reconnu une de ses camarades de cachot Jill. C'était une silhouette familière et bien qu'elle ne soit pas à proprement parler une amie, plutôt une connaissance, il préférait lui faire face à elle, eut-elle la merveilleuse idée de lui envoyer un livre dans la face, qu'à un sbire de Blackman.

L'incident clos, les deux esclaves étaient allés vaquer à leurs obligations, chacun de leur coté. De longues minutes s'étaient écoulées quand ils s’accordèrent une petite pause et naturellement Spencer avait réussi à retrouver son calme, bien qu'il soit plus prudent encore qu'avant l'arrivée de sa binôme d'un soir. Cela dit, la frayeur ne serait pas oubliée de sitôt et il n'en fallait pas beaucoup pour que les sentiments négatifs resurgissent. Quelques mots, quelques questions pour être plus précis, de Jill suffirent. Qu'avaient-ils tous à se préoccuper du passé comme si leur vie en dépendait ? C'était à croire qu'ils faisaient exprès de confronter Spencer à des questions qui, s'il ne les redoutait pas toutes, le mettait en difficulté. L’ex cinquième avait hésité sur la réponse à fournir. Il se faisait une vague idée de ce que pouvait attendre Jill, et ça ne correspondait certainement pas à ce qu'il était près à livrer mais il devait bien lui rester d'autres options que l'ignorance. Finalement, Spencer trouva une fuite moins impolie, lui offrant une réponse énigmatique. La vision du monde et du savoir qu'ils exposa ne correspondait pas du tout. Les mots qui franchirent ses lèvres étaient à l'opposé de l'érudit qu'il était mais Jill n'était pas censé le savoir. Spencer s'était très vite dit que si mentir lui permettait de conserver la part d'ombre qui entourait sa personne, il en userait à outrance. Il jouait le rôle du parfait né-moldu depuis sa première rentrée à Poudlard, Spencer avait eu le temps de chasser ses remords, c'était pour la bonne cause, en général du moins.

Le silence aurait toutefois était préférable, Spencer s'en rendit malheureusement trop tard, quand Jill précisa sa pensée. La jeune fille était bien incapable de masquer son hésitation mais justement, si elle surmontait sa timidité, son intimidation ou quoi que ce soit d'autre, c'est qu'elle attendait une réponse, que la précédante ne lui avait pas convenu. Le jeune homme la fixait sans parler, la laissant se dépatouiller toute seule pour formuler ses phrases sans chercher à l'aider, un simple non aurait pourtant suffit.

S'était-il finalement trompé ? Sa première intuition était-elle finalement la bonne ? Jill posait si souvent son regard sur lui, elle avait mit un moment avant d'accepter ses excuses et maintenant elle peinait à formuler sa question devant lui. Même si l'on exceptait l'ambiance étrange alors qu'elle les avaient entraîné dans un placard pour qu'ils échappent au danger de la bataille, Spencer n'y voyait qu'une seule explication : Si Jill n'était pas forcément amoureuse de lui, l’ex-cinquième année devait tout de même lui faire plus d'effet que les autres gars de Poudlard. C'était flatteur et, jusque maintenant Spencer s'était contenté de cette conclusion, assez plausible. Seulement, il ne pouvait pas s’empêcher de se demander si tout n'aurait pas été plus simple s'il n'avait pas changé d'avis depuis qu'il l'avait violemment rembarré deux ans plutôt, s'il ne s'était pas excusé, continuant de voir en elle une fouineuse parmi tant d'autres. Ils n'avaient échangé que des regards depuis le jour où il avait fait marche arrière jusqu'à la bataille, rien de compromettant à mettre au compte de la jeune fille, mater est humain. Mais peut-être avait-elle juste cherché à endormir sa méfiance. Deux ans, c'était quand même long, l'ex poufsouffle le reconnaissait, mais certaines personnes avait une patience de dingue, elles étaient rares, mais existaient.

- "Est-ce que c'est vraiment important de faire resurgir des souvenirs ?"

Spencer ne savait plus quoi penser. Il était conscient de se faire parfois des films, d'être parano, mais il avait rêvé de la souffrance, elle était là. C'était digne d'une série américaine moldue, mais c'était bien réel. Après, révéler qu'il ne se souvenait pas de tout n'ouvrait à priori aucune porte sur son secret, la preuve, Jill disait aussi en avoir un de trou de mémoire. Le truc, c'est qu'ils ne devaient pas être nombreux à savoir de quoi ils étaient vraiment capables en cas d'accès de folie, vraiment pas beaucoup à craindre leurs actes.

- "Tu préfères que je retire mes excuses ? Comme ça on est quitte tout de suite."

Il n'y avait plus aucune trace de plaisanterie contrairement à ce qu'il avait dit quand elle était arrivée. Si Spencer avait le mérite de ne pas s'emporter, son ton était froid. Le jeune homme s’efforçait de dissimuler ses émotions. Encore une fois, il regrettait de s'être excusé, il y a deux ans. S'il ne l'avait pas fait, il aurait toujours son crétin de frère à dos à la différence qu'il y aurait une justification à ses gamineries mais là n'était pas l'important, s'il ne l'avait pas fait, Spencer ne serait pas la maintenant en train d'hésiter, il serait en train de ranger les livres. Spencer s'arrangeait en général pour avoir le temps de prendre les bonnes décisions, là, il ne l'avait pas ce précieux temps.

- "En quoi ça t’intéresse de savoir ce... Ce que j'ai fait... Ce que j'ai pu faire de mal ce soir là... Tout c'est bi... Non, je ne vais pas dire que tout c'est bien terminé mais je me suis excusé parce que c'est la politesse, c'est l'important. Non ? Il y aurait un problème si c'était l'inverse, tu ne crois pas ?"

Le ton était toujours aussi froid mais ses pensées un peu plus claires. Il lui faudrait être plus persuasive si elle voulait l'entendre dire qu'il s'était excusé dans le doute où il aurait fat quelque chose dont il se savait capable de faire.

Spencer & Jill

Now the moon begins to shine; good night sleep tight.

Pourquoi fallait-il que les personnes à poser des questions soient les moins légitimes ? Tout le monde connaissait le passé d'Isidore mais jamais il n'avait cherché à prendre connaissance de celui de Spencer. Ils passaient leurs journées ensemble jusqu'à Halloween, ils étaient trop proches pour que le serpent ne se rende pas compte qu'il y a anguille sous roche. Les occasions de percer le mystère, il y en a eu un paquet, avec ou sans l'aval de Spencer il aurait pu tout savoir, mais il s'est contenté du silence de son meilleur ami. Encore une qualité à relever chez ceux dont ils s'entouraient et Spencer avait la preuve qu'elle n'avait pas fait défaut à Isidore. Il n'aurait pas pu garder sa découverte pour lui, si découverte, il y avait eu, c'était sans appel pour Spence. Ce secret lui pesait, et s'alourdissait à mesure que les horreurs du monde lui parvenaient. Non, Izzie n'avait pas cherché à en savoir plus qu'il ne voulait lui en dire, pas plus que Savannah. Leurs questions auraient été plus que légitimes et l'ex-poufsouffle aurait eu beaucoup de mal à prendre sur lui et à leur refuser ce qu'ils, en d'autres circonstances, auraient été en droit de savoir. Jill par contre, n'avait aucune bonne raison pour s’intéresser d'aussi près à lui. Certes elle ne lui posait qu'une question simple, répondre ne coûterait pas grand chose à Spencer mais il connaissait les gens, vous leur donnez un doigt et ils vous prennent un bras. Jill ne faisait peut-être pas parti de cette majorité mais comment savoir et pourquoi lui montrerait-il la voie vers ce qu'il cachait, alors qu'il n'avait rien dit à Megan qui lui avait pourtant raconté son histoire, pas plus facile à livrer que la sienne ? Non. Spencer aurait aimé que ce dernier mot puisse résumer définitivement ce qu'il pensait, mais il avait aussi tout un tas d'arguments justes qu'il ne pouvait balayer d'un revers de main. Il restait ferme sur ses positions, pour l'instant, et comptait bien faire lâcher l'affaire à Jill.

Et ça commençait par l'excuse la plus bidon du monde mais qui marchait quand même dans la situation actuelle : les mauvais souvenirs sont fait pour être enterré. La réponse de la jeune fille ne se fit pas attendre, de son point de vue il n'y avait pas de mauvais souvenir. Elle se fichait de lui là ? "Donc, je me suis excusé d'avoir fait quelque chose de bi... ? Laisse tomber." En parlant, il avait visualisé pour la dix-huitième fois de la soirée ce fameux moment dont il parlait, mais sous un autre angle, un angle positif. C'était vrai qu'en y repensant, Spencer ne pouvait laisser de coté, qu'en d'autres circonstances, rester un peu plus longtemps ne lui aurait pas déplu. Ce à quoi rétorquait sa raison que les émotions qu'ils avaient ressentit n'étaient pas juste dues à la proximité physique, peut-être en partie certes, mais ils avaient étaient décuplé par la panique et la peur, de la mort entre autres. Et Spencer n'était pas chaud patate pour revivre ça, ne le serait sans doutes jamais.

Le mieux restait donc de tout oublier non ? Si on effaçait les excuses de Spence qui avaient amené à cette discussion, à moins que ce ne soit qu'un prétexte, le problème était réglé. Encore fallait-il qu'elle accepte, ce qu'elle fit curieusement. Le problème était censé être réglé là non ? C'était sans compter la couche que rajouta Spence sous prétexte intérieur que la dernière réplique de Jill l'avait fortement intrigué et qu'il ne voulait plus rester avec des suppositions qui se cassaient la fiole. La réponse fut décisive et eue le mérite de couper cours à la discussion. Spencer suivit Jill du regard alors qu'elle s'éloignait, ne croisant que brièvement son regard. Il resta silencieux jusqu'à ce qu'elle soit hors de sa vue, la suivant dans son initiative de terminer cette pause, bien qu'elle ait été plus que méritée.

En tout cas, Jill lui avait donné à réfléchir, c'était une évidence. Encore une fois, il s'était attendu à tout, sauf à ça pendant le laps de temps qui s'était écoulé avant qu'elle ne s'explique. Preuve qu'il ne la connaissait vraiment pas bien. Certes, physiquement, il pourrait sans difficulté tracer un portrait fidèle s'il était doué en dessin, pour sa défense, depuis le temps qu'ils se regardaient, ça devait probablement être réciproque. Par contre, vu qu'ils n'avaient presque jamais eu l'occasion de se parler, psychiquement, c'était une autre histoire. Pour le moment, tout ce que pouvait tirer Spencer de cette conversation agitée, c'était que son énervement avait l'air aussi sincère que l'était sa propre hésitation. Ce n'était pas la première à le quitter dans cet état d'esprit. Souvent, il était le responsable, y allant rarement de main morte quand il avait quelque chose à dire, aussi rarement que les fois où il le reconnaissait au lieu d'accuser la susceptibilité des gens. Mais cette fois, il avait été soft, et avait raison de ne pas se sentir responsable.

Ce qui l'inquiétait, c'était surtout les paroles de la jeune fille, qui avaient fait leur petit bout de chemin pendant qu'il rangeait les livres. La frustration dont elle parlait, Spence la connaissait plus que bien même s'il ne pensait pas que, de son coté, le responsable soit la fierté. Et face à ce sentiment dérangeant, sa réaction était toujours la même, il cherchait encore et encore, il s'acharnait. Rappelons quand même, que c'est la frustration de ne pas comprendre la raison de la mort de ses parents qui avait poussé Spencer à apprendre le fourchelang, et depuis cinq ans, son objectif n'a pas dévié d'un pouce. Certes d'autres raisons se sont ajoutées mais elle ne sont rien sans la motivation de base. Voilà, pourquoi Spencer s'inquiétait, il préférait encore céder et lui ouvrir une porte tout de suite, plutôt que de retrouver toutes ses barrières défoncées et sans doutes pas une relation positive après. Spencer n'était pas non plus certain de la chose à faire, alors il prit le temps de peser le pour et le contre avant de finalement se décider en voyant Jill apparaître au détour d'un rayonnage. Elle était de dos. Il la rattrapa et lui saisi le bras pour qu'elle se retourne. "Jill !" Cela devait bien faire une heure qu'ils s'étaient quittés et il n'avait pas surpris de regard de la jeune fille malgré l'attention qu'il y avait apporté. Il était partagé et il espérait que lui avoir saisi le bras -doucement hein, pas comme un bourrin. Ça pourrait possiblement être douloureux pour elle si elle avait un gros bleu - l’empêcherait de revenir sur ce qu'il avait fini par se dire. "Tout ce que je sais, c'est que je ne sais pas tout" Curieuse phrase. " Je ne sais pas ce qu'il c'est passé avant qu'on se retrouve dans le placard... J'ai juste déduit que j'étais probablement en panique... et je ne préfère pas savoir de quoi et capable un Homme en panique."

Ce n'était pas si compliqué au final. Et puis Jill était jolie et avait plus que l'air sympa, ça en valait la peine. Non ? Si elle stoppait ses questions bien sur.

Spencer & Jill

Now the moon begins to shine; good night sleep tight.

C'était incroyable mais vrai : alors que Spencer et Jill se croisaient presque tous les jours depuis cinq ans, étant dans la même promo du même internat, ils n'avaient jamais eu de vraie discussion. Si des fantômes hantaient la bibliothèque cette nuit, ils auraient la joie d'entendre une conversation qu'ils n'espéraient plus. Enfin, la joie, tout est relatif, ces hypothétiques spectres chanceux seraient surtout déçus de la tournure que prenaient les événements. La façon dont les deux adolescents avaient géré l'incident du livre laissait présager une bonne entente mais c'était tout autre, aucun des deux ne semblait plus y mettre du sien. D'un coté, il y avait Jill, qui, bien qu'elle soit à l'initiative de la petite pause discussion, y mit très vite fin, retournant énervée à ses bouquins. Et de l'autre, il y avait Spence qui, en plus de ne pas être décidé à répondre à la seule question de sa camarade de galère, ne prenait pas de pincettes. Et les voilà qui circulaient depuis un bon moment dans la bibliothèque, évitant de se regarder, ce qui était pourtant une tradition chez eux.

Cela ne voulait pas dire que Spence était passé à autre chose et qu'il se contrefichait de ce qu'il s'était passé un peu plus tôt. Non, son hésitation avait été longue, mais après un bon, mais bien insuffisant, paquet de livre rangé, elle arrivait à son terme. Bien sur, il fallait que la jeune fouineuse apparaisse à sa vue pour qu'il se décide à agir. Répondre à sa question allait déjà être bien difficile, il n'allait pas en plus s'amuser à la chercher et prendre du retard dans son rangement. L'ex-cinquième année n'eut pas cette excuse bien longtemps car la jeune fille apparut dans son champ de vision alors qu’il n’avait même plus de livre en main.

Il n’était pas parvenu à croiser son regard, depuis qu’elle avait mit fin à la discussion, visiblement énervée. C’était dommage, car il pensait pouvoir en déduire l’état d’esprit de la cinquième année. Son œil était aguerri pour les faces à faces les yeux dans les yeux, mais pas pour les regards en coin bien vite détournés malheureusement. En bref, il était dans le flou total et il n’en apprendrait pas plus avant de se lancer, Jill était de dos. En jeune doué qu'il était, il lui fit d'ailleurs peur en lui prenant le bras, ne songeant qu'après à s'annoncer pour sortir ses paroles toutes faites mais vraies.

Spence avait bien fait, au final, de préparer ce qu'il allait dire car si il était habitué à échanger des regards avec la jeune fille, il ne l'était pas à lui parler. La voie de Jill, au contraire était beaucoup plus assurée que pendant leur dernier bout de conversation, sans doutes parce que Spence avait choisi ses mots, et qu'elle ne cherchait plus à lui extirper quoi que ce soit. Elle lui confirmait ce que le jeune homme avait finit par se dire devant son insistance, ses excuses n'avaient pas lieu d'être et elle voulait le remercier en plus. Et puis quoi encore ? Elle allait s'excuser de ne pas le lui avoir dit merci avant ? Spencer n'en saurait pas plus pour le moment car une voix inamicale venait de s'élever à travers les rayons. Il n'eut pas le temps de réagir que Jill lui fourrait un de ses bouquins dans les mains. Quel idiot il faisait d'avoir oublié de prendre un alibi, au cas où. Les questions de la née-moldue l'avaient tellement préoccupé qu'il en avait oublié les mangemorts, enfin presque. Alors que cette dernière allait répondre au mangemort, il resta sur place, quasiment immobile alors que sa main libre, la droite passait sous sa manche pour griffer son autre bras, bien attaqué un peu plus tôt, à la dernière venue du mangemort. Il fallut d'ailleurs que quelques longues secondes s'écoulent après le claquement de la porte pour qu'il parvienne à reprendre une attitude normale. C'était nerveux, Spence ne pouvait rien y faire, ses tocs reprenaient le dessus à la moindre occasion et elles étaient nombreuses en cette période.

"On a eu chaud." Laissa-t-il échapper après un soupir de soulagement. Jill le regardait à nouveau dans les yeux, le froid était passé, mais la colère qu'il avait pu apercevoir quand elle s'était éloignée, toujours présente. Il n'était pas nécessaire d'être un génie pour savoir vers qui elle se dirigeait. "Que tu ne lui ais pas balancé ton livre à la figure", poursuivit Spencer avec un rictus. Il n'aurait jamais imaginé tenter de faire de l'humour dans une pareille situation mais c'était bien ce qu'il était en train de faire, même s'il avait encore des progrès à faire dans ce domaine. Jill avait-elle au moins sourit ? Le jeune homme n'en savait rien, et pour cause, il avait détourné le regard pour ranger le livre qu'elle venait de lui filer. Juste le temps de voir la trace rouge qu'il avait sur la paume de la main, et qui n'était pas présente il a quelques minutes, avant de se tourner vers Jill. Il referma son poing le plus normalement de monde. Avec la qualité de lumière dont ils bénéficiaient en dehors des heures d'ouverture de la bibliothèque et son sweat bien en place, les risques que Jill ait pu remarquer qu'il s'était blessé étaient mince. Heureusement, car si Spence était ravi que le sujet de l'autre nuit, soit oublié, ce n'était pas pour qu'elle se remette à poser des questions.

Spencer & Jill

Now the moon begins to shine; good night sleep tight.

Spencer était revenu sur sa décision, et maintenant qu'il avait répondu à Jill par autre chose que des questions, il pouvait en convenir que ce n'était pas une si mauvaise chose. Du moins c'est ce qu'il avait pu se dire après que le mangemort ait quitté les lieux, les laissant avec le contrecoup de la belle frayeur qu'il leur avait fait. Spence tenta de blaguer, pour clore définitivement l'embrouille, et reçu une réponse positive, une bonne chose. Tout n'était pas perdu pour Jill visiblement, elle savait se maîtriser depuis Halloween, selon ses dires, Spence n'avait pas oublié son entrée fracassante.

C'est sur qu'il valait mieux faire profil bas face aux mangemorts si on ne voulait pas trop prendre chair parce quand ils vous avaient dans le collimateur, ça s’annonçait rien de très bon. Spence avait eu la chance -en étais-ce vraiment une - d'avoir eu moins de mal à s'adapter à ce niveau, que certains. Il y avait bien sur des choses qu'il ne pouvait cautionner, qui pouvait rester impassible à toute épreuve (?), mais en général, il essayait de respecter ce règlement qu'il haïssait pourtant. Était-ce le cas de Jill ? Elle vint se planter devant le jeune homme pour lui proposer quelque chose qui n'avait jamais été conforme au règlement, même quand celui-ci était juste.

Aller dans la réserve, bien sur, c'était tentant, mais c'était hors de question pour Spence. Elle lui aurait proposé cette petite aventure alors que la torture n'était pas adoptée comme punition officielle, il aurait peut-être pris le temps d'y réfléchir mais en ce moment, ce qu'elle proposait était totalement inconscient.

"Hé mais..!" Spencer se retourna. Il n'avait pas eu le temps de donner sa réponse que Jill était déjà derrière lui prête à s'élancer sans réfléchir. Quoi qu'il puisse dire, de toutes façons, ça ne changerait rien, sa question n'en était pas une, la jeune fille n'en ferait qu'à sa tête, c'était évident. Spencer ne pouvait rien dire pour la faire changer d'avis, mais il pouvait toujours faire. Encore fallait-il qu'il soit assez réactif, Jill s’apprêtait à traverser le cordon qu'il était encore loin derrière elle. Elle ne se serait pas interrompue pour lui parler qu'il n'aurait pas su la ramener à lui sans entrer lui-même dans la zone interdite. Il l'avait pris par le bras et la tenait fermement. "Ecoute-moi Jill !"

Spence n'était pas convaincu de pouvoir la maintenir indéfiniment mais avant d'être affaibli, il n'aurait pas eu de mal à la maîtriser et là, ils vivaient dans les mêmes conditions. Il aurait le temps de lui dire tout ce qu'il avait à lui dire avant qu'elle ne s'enfuie. " Ça ou autre chose de moins sympa. " Il l'avait bien entendu parler du charme du cridurut et avait bien noté qu'elle n'en avait cure. Cependant, il n'était pas aussi optimiste. " Qui contrôle Poudlard ? Jill répond moi ? Tu crois vraiment que si sortilège il y a, ils se seront contentés d'un cridurut. En oubliant les livres qui nous attendent, j'ai moyennement envie de nous retrouver piégés dans la réserve." Il y avait des livres qui, là, derrière ce cordon l'attirait. Spencer pourrait y passer sa vie, mais n'avait pas forcément envie de s'y retrouver enfermé contre son gré à subir les déviances des mangemorts. En attendant sa réponse, Spencer jeta un coup d’œil trop long pour être anodin en direction des rayons interdits. Le jeune homme savait qu'il avancerait beaucoup plus vite dans son apprentissage du fourchelang avec CES livres, et que la magie qui avait été perdue n'était pas totalement oubliée. Quand il se replongea dans les yeux de la jeune fille, c'était pour lui demander ce qu'elle contait y faire. " Tu as une idée du type de livre que tu veux consulter avant qu'on ne prenne un risque qui pourrait nous coûter cher. " Spencer ne la lâcherait pas tant qu'il n'aurait pas de réponse satisfaisante, elle avait laissé passer sa chance. "Au pire, et si tu as l'intention de feinter pour m’échapper, envoie un livre, plutôt que de te jeter dans la gueule du loup... Mais encore faudrait-il que tu le puisses ! " Un sourire étira ses lèvres, non il n'était pas totalement rabat-joie, juste prudent.

Spencer & Jill

Now the moon begins to shine; good night sleep tight.

On ne pouvait pas dire que les corvées de rangements de la bibliothèque étaient celles où Spencer se montrait le plus efficace. Il faisait ce qu'il pouvait pour ne pas trop ralentir, mais c'était plus fort que lui, le jeune homme ne pouvait remettre en ordre des centaines de documents, sans même en jeter un coup d’œil. Il aimait à penser que sa connaissance de l'endroit compensait son manque de concentration, mais ce n'était pas cette nuit que cette hypothèse allait être validée. En effet, Spence n'était pas tout seul et avait un temps soit peu de respect pour Jill, raison pour laquelle, il avait accéléré le mouvement. Honnêtement, si la née-moldue n'était pas venue le rejoindre, certes de mauvaise grâce mais on ne pouvait pas lui en vouloir, Spencer ne serait jamais venu à bout de la pile de livre à ranger avant le matin. Là, même s'il lui était impossible d'en être certain faute de montre, le jeune homme pensait être dans les temps : ils n'avaient pas fait assez de pauses pour avoir pris du retard.

Ce n'était pas pour autant une raison de se laisser aller à des pertes de temps et à des risques inutiles, du point de vue de notre angoissé de service, qui était à l'exact opposé de celui de sa camarade de galère. Aller dans la réserve, une proposition que le jeune homme aurait été susceptible d'étudier avec soin en temps normal, mais qui était pure folie en cette période trouble. C'était une décision irréfléchie qu'elle avait prise en s'élançant, une décision à la Isidore à la différence que ce dernier prenait le temps d'écouter l'avis de son meilleur ami sur la question et qu'il avait l'amabilité de ne pas l'impliquer s'il se révélait impossible de tomber d'accord. Jill avait foncé, sans se préoccuper des conséquences possibles visiblement, et il s'en était fallu de peu pour que Spencer n'arrive trop tard pour la ramener sur "le droit chemin."

Enfin, l'ancien poufsouffle la maintenait pour l'instant, mais certainement pas indéfiniment : il allait devoir lui exposer son point de vue avant qu'elle ne songe à échapper à son emprise. Jill le laissa parler sans l'interrompre, et eu la gentillesse de lui épargner des yeux levés aux ciels, des doigts qui s'agitent ou un quelconque geste trahissant un agacement ou un ennui certain. Ne le quittant brièvement des yeux que quand lui-même dirigeait son regard ailleurs, la jeune fille était attentive, une bonne chose mais qui ne compensait pas le fait qu'elle ne  prenne pas la menace d'un charme apposé par les mangemorts au sérieux. La réponse qu'elle lui apporta quant au type de livre qu'elle voulait consulter en était la preuve. " Mais encore ?" Des inferii, comme si c'était une surprise qu'elle n'ait pas ce genre de livre sur sa table de chevet. Elle se fichait de lui, ça avait le don d'agacer un peu Spencer mais il eut la bonne idée de rester calme pour changer de stratégie.

Visiblement, il allait être compliqué de la rallier à son point de vue et s'il ne voulait que le temps passé à tenter de la résonner soit perdu, il devait assurer ses arrières au cas où. Il ne souhaitait pas le moins du monde la voir envoyer un livre là où il pourrait se trouver un détecteur de mouvements, mais s'il devait choisir entre l'envoyer elle ou bien un livre, le choix était vite fait. Spencer avait dit ce qu'il avait à dire et attendait le verdict. Il avait cessé de jeter des coups d’œil vers la zone interdite, conscient qu'il en perdait de la crédibilité, pour soutenir le regard de sa camarade de galère. Les yeux sont le miroir de l’âme dit-on, l'ancien poufsouffle n'en était pas spécialement convaincu mais il était d'accord sur le fait qu'ils pouvaient être très révélateurs. Jill le fixait en silence, elle réfléchissait à sa réponse, ça ne sentait pas bon, c'était à peu près ce que Spencer pouvait lire dans les siens, pour l'instant.

Heureusement, la réponse ne se fit pas attendre bien longtemps, confirmant son mauvais pré-sentiment. Il la laissa parler, comme elle l'avait fait juste avant. Ce n'était pas pour lui faire plaisir, mais les arguments de Jill tenaient debout, le risque qu'il y ait des sortilèges de protections était faible. S'il avait eu à défendre le point de vue de la jeune fille, il aurait même rajouté qu'il était probablement plus faible encore depuis l'arrivés des mangemorts qui n'étaient pas vraiment hostile à la magie noire. Mais ce n'était pas dans son intérêt de compléter, il aurait mieux fait de lui opposer que si la possibilité qu'il y en ait n'était pas à écarter, celle que ce ne soit qu'un simple cridurut l'était, esprit tordu de mangemort oblige. Spencer avait pourtant décidé d'économiser sa salive, dans l'hypothèse ou Jill serait prête à continuer de l'écouter poliment, sa décision était déjà prise, nul besoin de parole pour s'en rendre compte. " C'est moi qui te tiendrais la main pour éviter que tu ne t'embarque plus loin dans ta folie." Un autre jour, Spencer aurait peut-être sourie, mais pas cette nuit. S'il avait dit oui, il était convaincu que l'avenir lui prouverait que c'était une erreur. Après un soupir de résignation, il joignit le geste à la parole, en lâchant son bras pour glisser sa main dans la sienne. C'était elle qui avait proposé l'idée non ? On se demandait pourquoi. 

" S'il ne se passe rien...." Spencer s'empara de sa main libre d'un livre sur une étagère. Un de plus à ranger. "Je n'ai rien contre au fait de feuilleter des bouquins. Il n'y a pas que des livres sur les Inferii et je ne vois pas l’intérêt de prendre des risques pour prendre des risques."  Car c'était bien de ça qu'il s'agissait, Jill lui proposait de s'exposer à la folie des mangemorts sans rien, ou si peu à la clef. Du Isidore tout craché. Pourtant, il ne s'y habituerait jamais. " Tiens, à toi l'honneur. " Spence lui tendit le livre, non sans en avoir lu le résumé auparavant. 

Spencer & Jill

Now the moon begins to shine; good night sleep tight.

Spencer avait été clair dès le début, cette idée ne lui plaisait pas, faute d'être un minimum raisonnable. Aller dans la réserve par les temps qui couraient, quand on était catégorisé comme un esclave, c'était irresponsable et s'il ne l'avait pas dit à voit haute, le jeune homme l'avait pensé très fort. Mais il a avait finit par accepter de s'embarquer dans cette entreprise folle, après des négociations qui s'étaient révélées très superficielles, il fallait le reconnaître. Pourquoi ce changement de position ? La curiosité, celle qui le poussait à accepter que Thomas prenne des risques inconsidérés, y était pour quelque chose mais Spencer était bien conscient que les informations qu'il pourrait récolter seraient dérisoires. Le rat de bibliothèque n'était pas seul et avec Jill a ses cotés, il ne pourrait faire aucune recherche sérieuse. La curiosité avait peut-être eu sa part de responsabilité dans ce changement d'avis mais, le comportement de la jeune fille avait beaucoup plus influé. Jill irait, seule ou accompagnée, qu'il le veuille ou non, et ils seraient deux à en payer le prix si les mangemorts la prenait en faute. Puisqu'il ne semblait pas y avoir de moyen de la convaincre, autant rester près d'elle pour la surveiller de plus près. Son choix était fait, il n'était plus question de traîner, Spencer avait glissé sa main dans celle de Jill, histoire de ne pas se rétracter. Il se saisit d'un bouquin et entreprit d'en lire le résumé afin de tromper son angoisse, pendant que l'ancienne cinquième année tentait de lui expliquer ce qu'elle espérait tirer de cette virée nocturne.

L'adrénaline, Spencer n'était pas assez inconscient pour savoir apprécier cette sensation, qui se muait en panique lorsqu'elle atteignait son paroxysme. Quant aux souvenirs, parfois il préférait avoir la mémoire d'un poisson rouge, en ce qui concernait le vécu, mais il tenait à ses connaissances. Bien sûr, ces deux mémoires, étaient liées et indissociables et Spencer n'était pas prêt à faire une croix sur l'une d'elle. Le mieux restait donc d'éviter de créer d'autres mauvais souvenirs. L'ancien poufsouffle aurait pu tenter de raisonner sa camarade en lui dévoiler le fond de sa pensée mais ça aurait été se mettre des bâtons dans les roues, enfoncer les portes qu'elle tentait d'ouvrir, alors qu'elle tenaient depuis 5 ans. Non, son absence de réponse rendait explicite son point de vue, c'était mieux comme ça.

Les livres, par contre, Spence pouvait en parler à condition de bien choisir ses mots car il savait que son avis sur la question souvent mal vu. "Des bouquins vivant ? C'est bien ça. Tu crois qu'ils vont venir si je les appelle ?" Le jeune homme détacha les yeux du résumé qu'il ne lisait plus vraiment, pour les tourner vers sa camarade, un léger sourire peint sur les lèvres, l'espace d'un instant, anant que la graité de la situation ne le rattrape. "Il n'y a pas que des livres de magie noire, dans ces rayons. Il y a aussi des livres qui, si des élèves inconscients s'en emparaient, pourraient se révéler dangereux pour eux même. Je pense, sans me vanter être assez raisonnable et intelligent, pour ne pas me laisser avoir." Ce n'était qu'une petite partie de la vérité, mais peut-être en avait-il tout de même trop dit. A voir.

Spencer quitta la brune du regard pour finir de lire son résumé, une façon de garder son calme comme une autre. Cette histoire le stressait plus qu'il ne le laissait paraître, au point qu'il ne remarque pas le malaise qui s'était installé depuis qu'il était sorti du rôle de camarade de classe en lui prenant la main. En temps normal, il n'aurait clairement pas été aussi tactile, c'était une évidence. En temps normal, il n'aurait pas oublié avoir fait saigner sa main un peu plus tôt. Les cicatrices étaient toujours dans un coin de sa tête, sauf quand toute son attention était mobilisée ailleurs. Il avait commit une erreur, il n'aurait jamais du prendre la main de Jill mais maintenant qu'elle avait remarqué sa blessure, il ne lui restait plus qu'à se justifier, en résistant à l'envie de tirer sur la manche de son pull. Il était trop tard.

" On m'a fait mal à la main." Il allait remettre la faute sur les mangemorts, c'était la première idée qui lui était venue en tête. "Enfin, il y a un mangemort qui a remarqué mes cicatrices et qui à préférer s'acharner dessus plutôt que de me lancer un doloris impersonnel. " C'était gros comme mensonge mais ils savaient tous deux que les mages noirs ne faisaient pas dans la demi-mesure. De toute façon, Spencer comptait bien clore le sujet au plus vite, en passant le livre qu'il avait en main, à sa camarade. Il suivit des yeux les mouvements de la jeune fille et la chute du bouquin avec une attention démesurée.

Verdict ? Un cri strident leur annonça la couleur. Spence n'avait jamais eu l'occasion de le voir en action et ne pouvait en être certain, mais le livre avait déclenché ce qui semblait être le charme du cridurut, comme l'avait imaginé Jill. Le jeune homme se détacha de cette dernière avant de faire un tour sur lui-même, se prenant la tête dans les mains, à la recherche d'une solution. Contrairement à Jill, il n'avait pas cru à la possibilité que les mangemorts aient posé d'un cridurut. Malgré le fait qu'ils s'en soient contentés à la veille de la bataille de Poudlard, en 1998, il ne s'était pas permis de croire que les mangemorts aient pu être si... indulgents cette fois. C'était une erreur, il les avait surestimés. Son idée de lancer un livre lui paraissait maintenant dérisoire : ils n'avaient rien prévu à propos de la marche à suivre pour sauver les pots cassés, si la chance n'était pas avec eux.

Jill lui demanda de s'éloigner, sa voix couvrant le cri qui leur vrillait les tympans. Spence aurait pu l'écouter, si la jeune fille n'avait pas parlé au futur. C'était maintenant qu'il fallait trouver une solution, et même s'il ne lui avait accordé qu'un bref regard, elle ne semblait pas avoir l'ombre d'un plan. "Non. Il ne va pas être compliqué de justifier qu'on soit au même endroit, avec le boucan du charme..." Il aurait au contraire semblé suspect que l'un d’eux continue tranquillement à ranger les livres comme si de rien n'était. " Il faut trouver quelque chose de solide." Spencer parlait rapidement, avait déjà été plus serein mais il était encore maître de ses capacités de réflexions. " Un accident, c'est un accident..." Le jeune homme parlait plus pour lui qu'à sa camarade, concentré sur ce qui pourrait accréditer leur excuse dans leur environnement. Il fouilla dans ses poches à la recherche d'un quelconque objet mais ce fut le frottement de sa peau contre le jean usé qui lui donna une idée. Il ressortit sa main en vitesse et considéra un instant sa blessure. Le sang avait coagulé, mais un choc suffirait à refaire couler le sang. " J'ai chuté et laissé échapper un livre, ce qui justifie ma main ensanglantée. " Cette fois-ci, il exposait son idée à sa camarade, il serait fâcheux qu'ils se contredisent. Si elle avait une meilleure, idée, il n'attendait que ça mais le temps leur était compté, et elle put le voir, en désespoir de cause, frotter sa plaie contre le coin d'une table. Ca fonctionnait, Spence le sentait plus qu'il ne le voyait, les yeux plongés dans ceux de Jill. Ils n'avaient qu'un très court laps de temps et allaient devoir se montrer convainquant, le moindre détail pourrait faire la différence.

Suspens...:

Spencer & Jill