Je naquis un jour d'entre-deux saisons. Un certain 18 juin, où la douceur de l'atmosphère printanière se mêlait à la chaleur estivale (malgré le climat habituellement frais de la Grande Bretagne). On pourrait qualifier mon enfance, non de "difficile", ni de "traumatisante", mais plutôt..mouvementée. Oui.C'est le mot le plus adéquat pour définir la période de ma naissance à mes onze ans.
Je vivais donc jusqu'à mes trois ans à Cardiff, dans une maison bien plus que confortable, toujours assez éloignée du monde moldu (la raison pour laquelle je n'ai vu que très brièvement mes cousins, tantes et oncles pour la plupart moldus) et ouverte au monde de la magie, en ne voyant qu'occasionnellement mon père, très pris par son travail au magenmagot où il siégeait (et siège encore) fièrement en tant que fonctionnaire. Pourtant très jeune, il parvînt à s'y faire une place de haut-rang. Outre ses capacités qu'il n'a plus à prouver, il a sûrement bénéficié de l'aide de ma grand mère paternelle qui a également travaillé dans ce milieu.
En parallèle, ma mère, rédactrice à la gazette du sorcier, quémandait déjà plus d'attention de la part de mon père à l'égard de nous deux, les filles de la maison. Les disputes se firent à des fréquences de plus en plus courtes, les reproches fusaient de toute part, la négligence de mon père avait tendance à réveiller le tempérament explosif de ma mère.Un jour, la dispute fut bien plus violente et radicale que d'habitude; ma mère prit d'un geste impulsif ses affaires ainsi que les miennes, avant de les lancer furtivement dans de grosses valises poussiéreuses.Cette fois, on partait. Mon âge proche du nourrisson ne me permettait pas de manifester le moindre choix.
Malgré tout, ayant toujours eu des liens plus solides et authentiques avec ma mère , je ne pus que me résigner sans broncher, malgré les menaces de mon père qui résonnent dans ma tête encore à mes quinze ans. C'est avec son argent et nos affaires qu'elle m'emporta en Roumanie, capitale des Dragons, au sein des Monts Bucegi, où j'y vécus de 2009 jusqu'à mes onze ans, en 2017.
A ma plus grande surprise, je remarquais que ses économies étaient loin d'être ridicules, et au vu de son air décisif, elle avait déjà une idée de l'endroit où nous pouvions loger. Nous arrivâmes chez Drustan, un ami avec qui elle correspondait depuis son adolescence, qui suite à ce conflit explosif conseilla ma mère de venir en Roumanie pour nous héberger. Petit à petit, ma vision du père avare, négligeant et sans coeur finit par s'estomper, voire s'effacer, puis se remplacer par un père aimant, sincère et passionné. Malgré que ma mère ne planifiait aucunement de l'épouser (puisque de toutes façons Drustan était marié, je le voyais comme un substituant du père avec qui je n'avais jamais pu développer les moindres liens. Drustan me fit découvrir le dressage de dragons, auquel je ne pouvais m'essayer dû à mon jeune âge, mais qui me passionnait déjà et qui m'étayais sur mes choix d'avenir. La passion qui lustrait ses yeux était particulièrement communicative et bien que je n'avais pas le droit de toucher à son matériel, j'avais la permission de m'occuper en sa présence des nouveaux nés dragons. Ces derniers m'inspiraient, et pour une petite fille comme moi qui se découvrait une passion pour le dessin, je me sentais renaître! Mon carnet à croquis était usé d'esquisses dragons et autres créatures magiques, de paysages roumains et de ciels étoilés. Bien que la maison dans laquelle je logeais en Roumanie n'avait rien à voir avec le palace de Cardiff, je n'éprouvais aucun manque envers toutes ces salles de bains superflue, cette piscine qui ne servait qu'à la décoration et aux sofas en cuir que mon père s'offrait pour les exhiber à ses innombrables invités.(un autre fait qui agaçait ma mère,d'ailleurs). Je me découvrais en tant que quelqu'un de minimaliste à la plus grande satisfaction de ma mère, qui éprouvait une profonde aversion pour le matérialisme de son ex époux, avec qui elle avait commencé à signer les papiers de divorce.
En 2010, ma mère rencontra Dan Antobescan, un dresseur de dragons qui travaillait avec Drustan. Lors d'une prestation, leur regard se rencontra mutuellement et mes yeux d'enfants parvenaient déjà à déceler les prémices d'un coup de foudre réciproque, puisque Dan s'était blessé ce jour là par manque d'attention. Hypothèse que ma mère a vite validé lorsque j'ai vu leurs lèvres se sceller et leur amour s'officialiser par les liens du mariage. C'était un homme que j'appréciais beaucoup, à l'instar de Drustan.
2 ans plus tard, je pus assister à la naissance de mon petit frère Ionel Antobescan un premier février glacial et nuageux. Je développais une profonde affection envers ce dernier au fil du temps.Fort heureusement, je ne décelais en lui aucun trait de caractère pouvant dériver à un comportement semblable à celui de mon père biologique.
Quant à mon appartenance au monde de la magie, il n'y avait plus aucun doute ; je fis ma première bêtise d'inadvertance vis à vis d'un dragon dont j'avais oublié de fermer la cage, et , prise par la panique, je répondis à ses attaques en faisant léviter des cailloux (non de mon plein gré..) et ils firent projetés en direction du dragon afin de faire diversion tandis que Ionel et Drustan replacèrent la jeune créature dans sa cage. Maintenant que je savais que j'appartenais bien au monde de la magie, la seule chose qu'il restait à faire était de me permettre de les modérer, de les contrôler, d'en être maître.Bien que ma mère avait pour projet avec mon père de m'inscrire à Poudlard, elle songeait déjà à d'autres écoles de magie.
Cette période de mon enfance fut la plus agréable à vivre. J'avais un père aimant , une mère complice, un petit frère fort attachant et une passion à laquelle m'accrocher. J'étais dans mon petit cocon, dans ma zone de confort dans laquelle je voulais rester éternellement.
Je m'étais même fait une amie par l'intermédiaire de Drustan, dont elle est la nièce, Phoebe. Phoebe Siwan Llewellyn. Une jolie petite brune au style déjà affirmé pour son âge. Elle venait passer la plupart de ses vacances en Roumanie chez son oncle. C'était une fille dont le caractère, manifestement, me ressemblait beaucoup ! Elle semblait être dotée de toutes les qualités d'une amie loyale et sincère, ce qui ne put que m'enchanter un peu plus.
Malheureusement, tout a une fin, et je l'ai appris, lorsqu'en 2017, à mes onze ans, ma mère m'a annoncé que je devais retourner chez mon père biologique.
"Je ne suis pas parvenue à te déscolariser de l'Ecole de Poudlard pour te placer dans une autre école...Tu vas être obligée de retourner à Cardiff..."
Cette annonce a littéralement perturbé le cocon dans lequel je m'étais emmitouflée.
Le départ fut déchirant, pour ma mère, ma belle famille, ainsi que pour Drustan avec qui j'avais développé des liens forts et solides. Je partis comme je vins ici, déboussolée et anxieuse de l'avenir.
Après un long voyage en avion moldu (afin d'éviter les formalités lourdes de déplacements magiques), mon père m'attendait, le visage déformé par un sourire aussi faux que l'amour qu'il éprouvait envers ma mère.
Le premier mois fut particulièrement pénible à endurer, la solitude que je redoutais était bien présente. Nos rapports furent froids, la frontière entre nous deux était large et massive, et c'était peut être préférable comme ça. Développer une complicité envers lui n'était non seulement pas possible par son caractère, et de toutes façons je l'aurais vu comme une sorte de trahison à l'égard de ma mère. Je restai en contact avec la famille en Roumanie par lettre, en espérant combler le vide que je ressentais.
Un jour de juin, mon père et moi fumes réveillés par de forts coups sur la fenêtre de ma chambre.C'était une chouette, le bec encombré par une lettre tamponnée d'un sceau rouge. Lorsqu'elle me la tendit pour la prendre, je mis peu de temps à comprendre que le sceau était celui de Poudlard. En outre d'une liste de fournitures relativement longue, une lettre jaunie par l'érosion et écrite à la plume se trouvait dans l'enveloppe.