Ecrire son autobiographie sans même être majeur, n’est-ce pas un peu prétentieux ? On m’a souvent posé cette question et je ne crois en rien que ce soit le cas. Au contraire, c’est sûrement ce que j’ai de mieux à faire si je veux me souvenir de ma vie lorsque celle-ci aura pris la tournure que j’attends et que je devrais alors me remémorer tous ces petites détails qui ont fait la différence et qui m’ont permis de devenir celle que je vais devenir. Lorsque les gens auront envie d’entendre l’histoire que j’ai à raconter, ils auront au moins la satisfaction de se trouver en face de fait réels et non des propos tout droit sorti de l’imagination du premier écrivain venu. Je ne suis pas très douée pour écrire et je le sais, mais je suis moi et c’est ce qui fait, me semble-t-il, toute la différence.

Je ne peux pas commencer cette autobiographie sans aborder mon enfance, mais ça devrait aller vite, il n’y a pas tant de choses que ça à en dire. Je suis née à Lerwick, village totalement pommé où il ne fait pas spécialement bon vivre, mais contrairement à beaucoup d’autres parents, les miens n’ont pas pu dire que ma naissance avait fait leur bonheur puisque j’ai partagé les honneurs avec mes deux frères. Eh oui ! Des triplets, je fais dans l’originalité… Mais je dois admettre que ça m’a bien arrangé, j’ai beau être l’enfant du milieu, étant la seule fille, je suis devenue la petite princesse de tout le monde et obtenir tout ce que je veux me plait vraiment beaucoup. Et puis, je dois bien l’admettre j’adore mes frères et nous avons toujours été très proche, en tout cas quand nous étions enfants puisque je ne peux pas vraiment dire qu’on a les mêmes centres d’intérêt maintenant. J’y reviendrais ultérieurement, il y a d’abord une information importante que j’ai totalement oublié de donner : je vis dans un cirque et je déteste ça. L’ambiance est étrange, les gens sont étranges et j’ai l’impression de vivre dans un univers totalement opposé à celui dans lequel je devrais être.

Pourtant, je ne peux pas dire que j’ai été malheureuse, j’ai une famille formidable même si je m’entends pas si bien ça avec ma mère, mes deux frères sont géniaux et mon père me gâte depuis toujours. En plus, quand on était petits, on a découvert un truc vraiment cool ! On entend nos pensées respectives, enfin, je sais que ça parait un peu bizarre dit comme ça, mais c’est la vérité, on arrive à savoir ce que pense l’autre mais ça reste quelque chose de très aléatoire, on ne peut pas discuter en pensée, ça arrive seulement rarement et puis il faut qu’on soit à proximité, si nous ne sommes pas dans la même pièce, il y a aucune chance que ça fonctionne. Je ne vais pas le cacher, au fil du temps cette étrange particularité est devenue un peu encombrante, nous n’avons plus forcément envie de tout partager et notre vie privée n’est pas aussi bien protégée que nous le souhaiterions, malheureusement, nous n’avons pas trouvé le moyen de nous en débarrasser et pour dire la vérité, je ne suis pas sûre de le vouloir, ça fait partie de moi malgré tout et j’ai l’habitude de vivre avec.

Comme je le disais, en grandissant nous sommes devenus très différents mes frères et moi. Snow est devenu un sportif accompli totalement accro à sa discipline, mais je dois reconnaitre qu’il est totalement formidable et super doué dans ce qu’il fait, il a suivi la voie de notre père et est devenu trapéziste et je ne le verrais dans une aucune autre discipline. Noel, quant à lui, a choisi la prestidigitation et je trouve que ça lui va également très bien, il a toujours été un peu marginal, de mes deux frères c’est celui que je comprends le moins bien et même si j’arrive parfois à savoir ce qu’il pense, j’avoue avoir beaucoup de mal à le suivre. Il est souvent dans son monde numérique et semble avoir un cerveau qui fonctionne toujours dans un univers parallèle au notre, je le soupçonne d’être une sorte de génie qui s’ignore, ça expliquerait son côté outsider. De mon côté, j’ai choisi un domaine un peu plus artistique, j’ai commencé à apprendre le violon à mes six ans après avoir suivi deux ans d’initiation musicale auprès des musiciens du cirque. Ce n’était pas les meilleurs professeurs du monde, mais le cirque étant en constant déplacement, je n’ai pas pu trouver un vrai professeur et j’ai dû me contenter de ce que j’avais. J’ai déjà eu beaucoup de chance que mes parents acceptent de m’acheter un vrai violon, j’ai mis du temps à l’obtenir et si je n’avais pas été l’enfant chérie de son papa, je crois que je serais encore en train d’attendre. Mais malheureusement, cette seule activité ne pouvait pas vraiment me permettre de participer à la vie du cirque et je me devais d’y prendre part, comme tout le monde. Je n’ai pas mis beaucoup de temps à décider de me spécialiser dans l’équitation et je suis devenue dresseuse, en commençant d’abord par entrainer un petit poney appelé Pompon en étant supervisée par ma mère, avant d’avoir quelques années plus tard mon propre cheval, Flake, et la piste pour moi toute seule. J’ai toujours adoré être sous les feux des projecteurs, mais savoir que c’était grâce à ça que je gagnais ma vie et celle de ma famille mais également que mon passage sur scène ne durait que trois minutes alors que l’entrainement et les voyages se poursuivaient en continu me suffisaient à dire que ce n’était pas fait pour moi et j’en suis toujours convaincue à l’heure actuelle.

J’ai donc dû chercher des plaisirs de substitutions et pendant que Noel courrait après tous les cafés wifi de la planète à chacun de nos arrêt, je me précipitais vers la première bibliothèque venue pour me plonger dans les bandes dessinées, les romans et toutes les histoires que je pouvais trouver, surtout lorsqu’elles mettaient en scène un prince et sa princesse. C’est comme ça que j’ai découvert ma vraie passion, à savoir l’histoire de France et particulièrement la Renaissance et la femme à laquelle je voudrais absolument ressembler : Diane de Poitiers. Je n’ai pas encore eu la chance d’aller en France mais j’espère bien pouvoir la découvrir un jour ou l’autre, une chose est sûre, mon futur mari sera un aristocrate français et je vivrais dans un château. On me dit toujours que je suis belle, en tout cas ma famille me le dit, donc je ne devrais pas avoir trop de problèmes pour trouver quelqu’un de riche à épouser, il me faut un garçon susceptible de m’acheter de jolies tenues, de me couvrir de cadeaux et de me permettre de devenir célèbre, je voudrais voir mes photos dans des magazines auprès des membres des familles de la haute société, je n’ai aucune envie d’avoir à travailler plus tard, une place privilégiée suffira à mon bonheur. Evidemment, ça désespère mes parents lorsqu’ils m’entendent en parler, ils n’arrêtent pas de répéter que je suis intelligente que je devrais avoir un bel avenir, mais l’avenir que j’entrevois est absolument parfait et je n’en désire aucun autre.

Poudlard a été une sorte de libération pour moi, mais également un cadeau empoisonné puisque nous avons tous les trois été séparés. Ce n’est pas étonnant, nous sommes totalement différents, mais j’aurais aimé savoir que mes frères resteraient auprès de moi. Mais ça m’a permis de réaliser un bout de mon rêve un peu plus rapidement que prévu, à savoir quitter le cirque pour emménager dans un château magnifique. Mais ça ne me satisfait pas pleinement, à Poudlard je ne suis pas tout à fait la reine que je voudrais être, même si je fais tout pour. J’aime faire en sorte d’être la plus belle, la plus regardée, la plus impressionnante, je m’intéresse de très près aux ragots, essaie d’être la copine de toutes les personnes qui se trouvent sur le devant de la scène et me désintéresse totalement des cours. D’ailleurs, mes notes sont médiocres, à part à l’histoire, je ne suis pas très branchée magie, cours de biologie, et autres et ça se ressent sur mon bulletin scolaire. Pourtant, lorsque j’étais petite, j’adorais aller à l’école et apprendre, mais désormais, ça ne me semble pas aussi important que ça, de toute façon, je n’ai pas prévu de faire des études plus tard. Je sais que je suis une sang-pur et que la magie devrait « couler de source » pour moi, mais je n’ai pas pour habitude de l’utiliser trop souvent, mes excentriques de parents n’avaient pas pour habitude de le faire, le cirque étant dirigé à la manière moldue exclusivement. De toute façon, tout ça ne m’intéresse pas tant que ça, mon rêve est tout ce qui quiconque et je ferais ce qu’il faut pour en arriver là où je le veux.

Père: Jaden Shiver est un homme à la fois un peu excentrique et amical mais également fier, réservé et très exigeant. Ancien Gryffondor, il a abandonné le monde magique directement après ses études. Son cirque et ses enfants sont toute sa vie et c’est donc tout naturellement qu’il pense que ses enfants reprendront l’entreprise familiale lorsque son grand âge l’empêchera de son occuper, avant de le léguer à leurs petits-enfants et ainsi de suite… January a eu plus de chance que ses frangins dans cette histoire, aucune pression ne repose sur ses épaules à ce sujet. Certes, il a bien tenté une ou deux fois de lui faire accepter l’idée de finir ses jours dans ne roulotte, mais c’est un sujet sur lequel elle ne compte pas lui donner le moindre espoir, la jeune fille compte bien fuir dès qu’elle en aura l’occasion et il est hors de question qu’elle dirige quoi que ce soit. Depuis toute petite, elle a l’habitude d’être choyée par son père qui la considérait comme son petit trésor parce qu’elle était la seule fille alors ça ne lui posait aucun problème de refuser tout net de répondre à ses plus grands espoirs. Elle n’a jamais su si son père avait été déçu de ce refus catégorique, il ne semble pas avoir altéré leur conversation et il a tout simplement évité d’aborder une nouvelle fois le sujet depuis, mais elle se rend bien compte que ses frères n’ont pas cette chance.

Mère: Hannah Shiver est une femme joyeuse, pétillante mais surtout très, très étrange, elle a des lubies et des manies que ne partagent pas les personnes « normales » et ne semble pas en être perturbée plus que ça. Son passage à Poufsouffle a été très remarqué à cause de son comportement qui était loin de passer inaperçu mais elle a su trouver son chemin sans se préoccuper de ce qu’on pouvait dire sur elle et mène maintenant la vie qu’elle voulait avoir depuis toujours. Si January aimait bien ses histoires loufoques lorsqu’elle était petite, elle s’en est lassée avec le temps jusqu’à être irritée par l’incapacité de sa génitrice à faire preuve de sérieux. Mais ce qui l’agace le plus, c’est surtout la ressemblance frappante entre sa mère et elle, il lui arrive trop souvent qu’on les pense sœur lorsqu’elles font les courses ensemble et ça déplait totalement à la jeune fille qui considère que sa mère est en tous points celle qu’elle ne voudrait surtout pas devenir. Hannah a beau être une mère aimante et une femme charmante, sa décision de vivre au milieu d’un cirque avec peu de moyens financiers est un faux pas monumental que January ne lui pardonne pas.

Frère(s) et soeur(s): January a deux frères Noel et Snow. Ils sont triplets et de ce fait ont une connexion particulière entre eux qui les rapproche alors qu’ils sont complètement différents. Entre Noel et elle, ça a toujours été un peu compliqué, ils s’entendent sans problème et January adore son frère mais ils n’ont pas grand-chose à se dire finalement, tant leurs deux mondes se trouvent à l’opposé, toutefois les liens fraternels qui les unissent les aident à surmonter les obstacles qui se dressent entre eux et à apprécier passer du temps ensemble sans que les silences ne deviennent des obstacles. Avec Snow, c’est un peu différent, c’est un garçon sportif et nettement plus en accord avec le portrait qu’elle pourrait dresser d’un « vrai homme », en plus, elle a la chance d’avoir le frère le plus serviable de l’univers et elle use et abuse de son statut de seule-fille-de-la-fratrie pour lui faire exécuter ses moindres désirs. Toutefois, elle n’est pas non plus une vraie garce et ne s’amuse pas toujours avec le caractère de Snow, elle sait trouver un juste milieu et cette relation semble leur convenir à tous les deux. D’un point de vue plus général, le trio Shiver, aussi mal accordé soit-il, fonctionne très bien et leur permet d’avancer ensemble en restant, la plupart du temps, soudés et attachés les uns aux autres. Le désir de January de renoncer au monde du cirque pour découvrir un univers plus en adéquation avec sa personnalité n’empiète en rien sur leur bonne entente.

« C’est absolument hors de question ! » S’entendait-elle encore dire la veille au soir dans la roulette familiale. « Vous ne pouvez pas nous faire ça, on ne regardera que nous ! »

En repensant à cette conversation désormais, elle se sentait vraiment stupide d’avoir pu envisager que ses parents renonceraient à se balader avec leur plus beau jouet en plein milieu des rues de Londres. Maintenant qu’elle était assise dans la roulotte, la tête entre les mains, elle se demandait comment elle allait se sortir de ce cauchemar. Sa vie allait bientôt commencer, pour la première fois de sa courte existence, elle allait pouvoir quitter le cirque, pour vivre dans un château en plus ! Mais il fallait que ses parents gâchent sa vie une fois de plus en s’amusant à la ridiculiser devant tout le monde alors qu’elle n’avait même pas encore eu la chance de rencontrer les autres élèves et de leur montrer qui elle était vraiment. Lorsque les murmures de la gare lui parvinrent enfin et que la roulotte commença à freiner, la petite fille voulut mourir immédiatement plutôt que de sortir de là à visage découvert. Autant accrocher directement une cible en plein milieu de son front avec un panneau « tirez ! » au-dessus de sa tête. Mais en voyant que ses frères ne semblaient pas plus perturbés que ça par l’idée de devoir se montrer en public, elle dut se résoudre à descendre, en prenant garde à ne regarder que le sol et rien que le sol pour éviter de croiser le regard d’un passant. Ce n’était pas pour autant qu’elle perdait le nord, elle attendit bien sagement en bas de la roulotte que les garçons et leur père descende les bagages pour se tourner vers Snow en battant des cils.

« Dis, tu veux bien porter ma valise Snow ? » Demanda-t-elle en se dandinant sur place. « Elle est bien trop lourde pour moi. »

Elle voyait d’ici Noel lever les yeux au ciel, mais elle s’en fichait complètement, tout ce qu’elle voulait, c’était pouvoir montrer au monde entier qu’elle avait une personne à son entière disposition pour faire rouler sa valise à sa place et qu’en tant que future princesse, duchesse, reine ou aristocrate, elle n’avait pas besoin de se salir les mains. Bon, certes, en l’occurrence elle ne parlait pas d’un vulgaire larbin mais de son frère qu’elle adorait, mais elle n’avait pas les moyens de se payer un porteur donc il jouerait temporairement ce rôle. Evidemment, comme elle s’y attendait Snow rechigna un peu pour la forme, c’était toujours comme ça avec lui mais il finissait très souvent par capituler, voire même toujours.

" Et moi qui va me porter la mienne si je dois me coltiner la tienne ?"

Tout de suite, il fallait qu’il ait l’esprit pratique, il pouvait en porter deux valises, quand même, il n’était pas en sucre. January se demandait bien à quoi pouvait servir toutes ces heures de sport s’il n’était même pas fichu de porter deux pauvres sac… Bon, d’accord, la sienne devait presque faire le poids de la roulotte mais quand même ! Heureusement, Noel lui sauva la mise en faisant un retour triomphant accompagné d’un chariot à bagage sur lequel il posa rapidement sa valise avant de s’asseoir dessus sans lever le petit doigt pour lui filer un coup de main, comme d’habitude. January ne prit même pas la peine de lever les yeux aux ciels tant elle était occupée à convaincre son sauveur de lui venir en aide encore une fois.

« Tu peux le faire, t’as pleins de muscles ! » Lui répondit-elle comme si c’était une évidence. « Et puis, tu peux prendre un chariot comme celui de Noel ça sera plus facile. » Dit-elle avant de se tourner vers son deuxième frangin. « Tu veux pas aller chercher un deuxième truc au lieu de faire l’enfant ? »

Il fallait vraiment qu’elle fasse tout elle-même dans cette famille, comme d’habitude ses parents semblaient trop occupés à jouer les touristes de base sans se préoccuper le moins du monde de l’avenir scolaire de leur enfant. La plupart des parents devaient être particulièrement stressés en ce jour de rentrée où ils allaient devoir quitter leurs petits et ne pas avoir de nouvelles pendant un long moment, mais pas les siens ou alors ils le cachaient bien. January savait que de ses deux géniteurs, c’était sûrement son père qui vivait le plus mal la situation, il voulait absolument que ses enfants restent au cirque et était en train de voir ses rêves s’envoler. Sauf que de son côté, January voulait absolument vivre cette expérience unique, il était donc plus que temps que tout le monde s’active un peu.

« Y'a encore de la place, hein. »

Bon, très bien parfait, dans ce cas, ils n’avaient plus qu’à se mettre à deux pour pousser les valises, et ils parviendraient très rapidement à destination, il fallait vraiment qu’ils se bougent s’ils devaient encore rester une minute de plus devant cette roulotte, elle craignait de se transformer pour de vrai en clown à force de voir les gens passer et les montrer du doigt en souriant. Fort heureusement pour elle, Snow prit les choses en main et entreprit dans un premier temps de caser les deux autres valises sur le chariot de Noel avant de se rendre compte que ça ne passerait pas et d’aller en chercher un autre. Il semblait passablement énervé par leurs comportements et January sentit que ce n’était pas vraiment le moment de faire la mauvaise tête.

" J'vous préviens tout de suite, j'en pousse qu'un, le second, vous vous débrouillez, vous avez voulu faire les gosses, vous assumez !"

La petite fille hocha la tête avec un grand sourire et vint se placer tout naturellement à côté de Snow, laissant Noel se débrouiller avec l’autre chariot puisque c’était ce qu’il avait voulu. Il était maintenant grand temps d’y aller. Elle dut repérer ses parents qui s’étaient éloignés et tenter de les appeler pour qu’ils daignent venir avec eux, mais seul un « maman ! » hurlé de toutes ses forces parvint à faire tourner vers elle ses parents, heureusement qu’elle n’était pas en danger de mort, elle aurait eu au moins dix fois le temps d’y passer. Enfin, la petite famille fut prête à partir et marcha vers l’intérieur de la gare pour rejoindre la voie 9 ¾, le train n’allait pas les attendre et ils feraient mieux de ne pas être en retard. Un coup d’œil en arrière lui apprit que Noel aussi avait obtenu ce qu’il voulait puisque leur père était désormais en train de pousser son chariot, cette vision la fit sourire, il avait beau dire que c’était elle la petite peste autoritaire, il lui prouvait dans des moments comme celui-ci qu’il n’était pas beaucoup mieux. Pour son plus grand bonheur, le trajet se déroula sans encombre et ils arrivèrent enfin à bon port.

" Et ... on fait quoi maintenant ? Il est où votre quai 9 ¾ ?"

Avait-elle été la seule à se renseigner à ce sujet ? January détestait l’idée de ne pas savoir ce qui l’attendait et elle avait harcelé sa mère pendant des jours pour comprendre ce qui allait se passer, elle était donc toute contente de pouvoir apprendre quelque chose à son frère qui était depuis leur descente de roulotte le plus sage et réfléchi des trois, ce dont elle n’avait pas l’habitude. A dire vrai, elle aimait se dire que c’était elle l’enfant modèle mais elle avait été trop occupée à bouder et à râler pour tenir ce rôle jusqu’à présent et elle comptait bien le reprendre.

« On va traverser le mur, là. » Répondit-elle tout naturellement en le pointant du doigt sans prendre la peine de faire preuve de discrétion, de toute façon, avec des parents comme les siens, passer inaperçu était hautement improbable.

Elle avait beau avoir prononcé ces quelques mots avec assurance, elle n’en menait pas large et n’était pas certaine d’avoir très envie de vivre cette expérience. Mais c’est Noel qui s’y colla en premier puisque leur père trouva judicieux d’avancer sans prévenir sans ralentir le pas à l’approche du mur, la petite fille plongea la tête dans ses mains pour ne pas voir ce massacre et fut très étonnée de voir que son frère avait disparu lorsqu’elle rouvrit les yeux. Il n’avait pas disparu depuis dix secondes qu’elle ressentait déjà le vide causé par son absence, ils étaient dans cette galère à trois et devaient rester soudés, aussi lorsque Snow avança à son tour vers la barrière, elle le suivit d’un pas décidé, sa mère sur les talons. Elle ferma tout de même les yeux en arrivant au niveau du passage pour ne les rouvrir que sur le quai devant un train qui avait l’air particulièrement vieux tout en était très impressionnant à la fois. « Waow » souffla-t-elle subjuguée, mais le sifflement strident de la locomotive ne lui laissa pas le temps de trop s’émerveiller, sa mère la poussait déjà vers la porte la plus proche. Les adieux se passèrent tellement rapidement qu’elle n’eut pas vraiment le temps de réaliser ce qui lui arrivait, en moins de temps qu’il ne faut pour le dire elle se retrouva assise sur une banquette dans un compartiment qu’ils occupaient à trois, sa valise perchée dans le compartiment bagage. Lorsque le train se mit en marche, elle se pencha à la fenêtre pour tenter d’apercevoir ses parents, sans grand succès, elle se laissa donc tomber sur la banquette, le voyage venait enfin de commencer.

Le trajet se déroula sans encombre, il fut même plus court que ce que la jeune fille avait envisagé malgré l’inconfort de la banquette que laquelle elle était assise. Lorsqu’ils arrivèrent à proximité de l’école, elle sortit de son sac sa robe de sorcier pour se fondre dans le décor et attendit bien sagement l’arrêt complet du train pour se lever et passer sa tête par la porte. Toutefois, elle n’était pas la fille la plus téméraire au monde et elle préféra laisser ses frères avancer devant pour être plus sûre de ce qu’elle devait faire ou dire. Les couloirs du train étaient noirs d’élèves tous habillés de la même façon. Les autres enfants de son âge étaient facilement repérables de par leur taille légèrement plus petite que celle des autres mais surtout leur air complètement perdu et elle se doutait bien qu’elle devait avoir le même. Heureusement, elle avait la chance d’avoir à ses côtés les deux personnes qui comptaient le plus pour elle et January savait qu’elle pouvait avoir pleinement confiance et qu’ils la mèneraient à bon port. Devant elle, Noel trouva pertinent de faire remarquer à son frère qu’il allait enfin être débarrassé d’elle ce à quoi la petite fille répondit presque automatiquement en lui collant une claque gentillette à l’arrière du crâne.

« J’ai des oreilles, idiot ! » Lui rappela-t-elle.

La descente du train se fit sans encombre et ils parvinrent à ne pas se perdre parmi la foule d’élève ce qui représentait déjà en grand exploit. Ils marchèrent le long du train jusqu’à se retrouver devant les barques dont leurs parents leur avaient déjà parlé. January n’était pas très rassurée à l’idée de monter là-dedans, mais elle l’était encore davantage à l’idée d’être séparée de Noel et Snow aussi se hâta-t-elle de monter dans la même barque qu’eux. La traversée put enfin commencer et la petite fille ouvrit des yeux grands comme des soucoupes en découvrant petit à petit le château qui apparaissait sous ses yeux. Il était incroyable ! Encore mieux que dans ses rêves les plus fous et à cet instant, l’idée de devoir partager son rôle de princesse avec tous les autres élèves ne lui paraissaient plus aussi aberrante que ça. Si elle avait trouvé le trajet en train moins long que prévu, elle trouva la traversée en barque beaucoup trop rapide puisqu’en moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire, elle se retrouva obligée de se mettre debout dans un équilibre instable pour regagner la terre ferme. Tous regroupés sur la rive, ils n’attendaient qu’une chose, découvrir enfin l’école et savoir où ils allaient bien pouvoir atterrir.

« Vous croyez que c'est vrai qu'ils disaient quand on attendait la barque ? Que cette année c'est plus le Choixpeau mais un truc genre une bataille contre un dragon et tout, pour savoir notre maison ? »

January n’était pas très rassurée et cette nouvelle n’était pas excellente, loin de là… Si vraiment il leur fallait se battre pour démontrer leurs aptitudes, ils ne risquaient pas de se retrouver ensemble, elle n’était qu’une fille et elle se sentait bien incapable de venir à bout d’une telle créature alors que Snow de son côté allait sûrement faire des merveilles. Quoi que… Son pessimisme laissa penser qu’il avait également très peur de ce qui pouvait arriver s’il devait y être confronté. Mais c’était quand même celui qui s’en sortirait le mieux dans un cas comme celui-ci, à moins qu’ils parviennent à truquer le jeu en adoptant un comportement identique pour rester à trois.

« J’ai aucune chance si c’est ça… » Répondit-elle finalement. « Et si jamais on est pas ensemble ? »

C’était la première fois depuis la réception de la fameuse lettre d’admission qu’elle osait prononcer à haute voix les craintes qui l’envahissaient. Et il était temps, le groupe d’élève commençait justement à prendre la direction de l’école et donc de leur fameuse cérémonie. Heureusement, ses frères n’avaient pas l’air de paniquer autant qu’elle et l’un comme l’autre tenta de la rassurer à leur manière, cependant, elle les connaissait assez bien pour percevoir leurs doutes et leur inquiétude ce qui ne l’empêchait pas d’être reconnaissante. Au moins ils essayaient et quoi qu’il arrive, ils seraient fixés dans quelques minutes seulement, maintenant. Ils se trouvaient désormais aux portes de la Grande Salle, en tout cas, c’était comme ça que l’avait appelée sa mère dans sa description et elle savait que derrière cette porte allait avoir lieu la fameuse cérémonie qui déterminerait où elle passerait les sept prochaines années. Elle s’en fichait au fond, du moment qu’elle restait avec ses frères.

« Ensemble, envers et contre tous. »

La petite fille acquiesça silencieusement juste au moment où on vint les chercher et que les portes s’ouvrirent pour leur permettre de pénétrer dans la pièce, elle se plaça tout naturellement entre les deux garçons avant d’avancer dans le long couloir bordé d’élèves qui les séparaient de ce qui semblait être la table des professeurs. La salle était magnifique et January aurait sûrement bien profité du décor qui l’entourait si elle n’avait pas été si impatiente. Lorsqu’elle s’arrêta enfin devant un tabouret sur lequel un vieux chapeau était posé, elle attrapa instinctivement les mains de Snow et de Noel. Ces secondes étaient les plus longues de toute sa vie.

« Ça va être qui en premier ? » Chuchota-t-elle.

Elle savait pertinemment que ce serait elle, January pouvait tourner et retourner inlassablement l’alphabet dans sa tête, il ne changeait jamais et elle était obligée d’arriver à la conclusion que lorsque le nom des Shiver serait prononcé, ce serait d’abord à elle de se hisser sur le tabouret et d’attendre de savoir où elle irait. D’un côté, c’était plutôt positif puisqu’elle ne serait pas fixée déjà sur une seule et même maison dans laquelle se trouvaient ses frangins, mais d’un autre côté, personne ne l’attendrait à la table où elle irait s’asseoir et elle avait quand même vraiment peur de ce qui allait leur arriver. La liste commença et le stress monta encore d’un cran, Noel sembla le comprendre puisqu’il trouva judicieux de rappeler à ce moment précis qu’ils étaient unis quoi qu’il arrive dans un « je vous aime très très fort », toujours en chuchotant la jeune fille répondit tout naturellement, comme elle le faisait depuis toute petite leur de leurs brefs moments d’affection.

« Je vous aime aussi. »

Pour le moment, les noms défilaient et elle continuait à serrer fort les mains de ses frères pour être bien sûr qu’ils n’allaient pas la laisser tomber, toutefois à la lettre « M » son attention fut détournée lorsqu’elle entendit un « MULLIGAN Callie » prononcé distinctement. Elle retint de justesse un cri de surprise en voyant la chevelure rousse de son unique amie d’enfance loin devant elle. Elle tenta de lui sourire mais, et c’était compréhensible, Callie était sûrement trop nerveuse pour prêter attention à sa présence. Elle fut rapidement envoyée à Poufsouffle et January la suivit du regard alors qu’elle allait prendre place à la table des jaune et noir sous un tonnerre d’applaudissements. L’interrogation de son frère qui se demandait si elle connaissait cette fille la ramena à sa réalité.

« Oui ! Et toi aussi tu la connais ! » Lui répondit-elle. « Elle est venue au cirque quand on était petit, on a sympathisé et depuis on s’envoie des lettres quasiment toute les semaines… Je ne pensais pas qu’elle serait là, on a jamais parlé de Poudlard toutes les deux… »

Que la seule fillette avec laquelle elle ait tissé de réels liens durant son enfance l’ait suivie jusqu’à l’école était complètement dingue, et la petite fille ne s’en remettait pas du tout. Ça avait eu au moins le mérite de lui faire penser à autre chose pendant quelques minutes, et elle avait presque laissé de côté l’alphabet qui continuait à défiler s’approchant toujours plus de la lettre « S ».

"Nope, désolé, elle ne me dit rien du tout. Je ne m'en souviens pas !"

January haussa les épaules, persuadée qu’elle aurait tout le temps de leur expliquer plus tard lorsque la cérémonie serait enfin terminée. Elle venait d’entendre appeler un élève dont le nom commençait par la même lettre que son propre nom ce qui annonçait son propre passage, le stress avait donc automatiquement reprit le dessus sur la surprise mais elle dut se résoudre à libérer les mains de ses frères. Les siennes étaient devenues moites mais elle tentait de garder un minimum de contenance, elle allait faire ses premiers pas en tant que princesse et ne pouvait pas commencer par un raté, une humiliation d’une telle ampleur mettrait fin immédiatement à ses rêves.

« SHIVER, January Holly ! »

Voilà, son tour était arrivé, elle jeta un regard légèrement anxieux à chacun de ses frères avant de s’avancer vers le tabouret dans une démarche qu’elle voulut gracieuse, la tête bien droite comme une ballerine faisant son entrée sur scène. Rapidement, elle se retrouva assise sur le tabouret, le dos bien droit, les jambes croisées et les mains délicatement posées sur son genou. January était bien loin de la petite fille qui partageait les jeux et les secrets des deux enfants Shiver à l’heure actuelle et la crainte du verdict était encore accrue avec l’augmentation de la distance qui les séparait. Mais dans quelques secondes, enfin, elle allait savoir…