L'année touchait déjà à sa fin. Il restait encore quelques semaines de cours, mais déjà, on pouvait sentir l'excitation des élèves à l'idée de quitter l'école pendant deux mois. Quitter Poudlard n'était pas, en soi, ce qui provoquait cette intense joie. Parce qu'au fond, tout le monde se sentait bien dans l'enceinte du vieux château. Ses murs de pierre étaient rassurants, l'atmosphère y était douce. Non, c'était plutôt la fin des cours, qui était synonyme de libération, qui mettait les élèves en joie. Comme à chaque fois, Jagger adorait cette ambiance. On sentait effectivement les vacances qui se rapprochaient : les journées s'allongeaient, les températures augmentaient... De plus en plus d'élèves passaient leur temps libre dans le parc ; les plus hardis osaient parfois tremper leurs jambes dans le Lac Noir. Dans le dortoir des Poufsouffle, certaines filles essayaient désespérer de retrouver leurs affaires. Vainement, songeait Jagger. Mais qui disait fin d'année, disait également examen. Par chance, Jagger n'en avait aucun cette année. Mais la tension et le stress qui animaient les cinquième et septième années étaient palpables. Ils galopaient à moitié dans les couloirs, de peur d'arriver en retard en cours, trimballant moult parchemins froissés ; des cernes noirâtres encadraient leurs yeux. Le soir, c'était encore eux qui veillaient jusque tard afin de finir un devoir important ou de parfaire leurs révisions. Bizarrement, Jagger aimait bien la période des examens. C'était, certes, stressant, mais elle trouvait qu'au final, c'était assez amusant de partager cette anxiété avec tout le monde. L'année dernière, quand elle avait passé ses BUSEs, elle se souvenait des regards pleins de compassion qu'elle échangeait avec ses camarades de galère dans les couloirs. Elle passait ses soirées à réviser, ayant commencer beaucoup trop tard, et s'endormait généralement dans la salle commune. Elle se réveillait exténuée et tentait tant bien que mal de suivre les cours de la journée. Dit comme cela, je vous accorde que ce n'est pas très attrayant. Mais Jagger aimait cette période. Elle l'appréciait d'autant plus que cette année, elle n'était que simple spectatrice de ce stress.

La jeune Poufsouffle, en cette fin d'après-midi, avait décidé de venir dans le parc. De nombreux groupes d'élèves s'étaient formés ; certains révisaient, plus ou moins sérieusement, d'autres profitaient juste du beau temps. Le ciel était d'un bleu limpide, sans nuage. Le soleil commençait à descendre lentement à l'horizon, dessinant de bizarres ombres sur l'herbe grasse. Jagger, vêtue de sa robe de sorcière aux armoiries de la maison Poufsouffle, était assise sur le versant d'une petite colline, à l'écart des autres élèves. De là, elle avait une vue imprenable sur les rivières et bois qui entouraient l'école. C'était à couper le souffle. L'Écosse était un endroit magnifique. Jagger n'y était jamais venue avant d'arriver à Poudlard ; c'était une fille du Sud, s'il était possible de dire ça en Angleterre. Elle avait vécu pratiquement toute sa vie à Southampton, une petite ville portuaire au bord de la Manche. Tout était très différent de l'humide Écosse. Jagger avait posé sur ses genoux son devoir de potions, qu'elle comptait faire ici. Mais tout son esprit était concentré sur la beauté du paysage. Elle qui d'habitude ne s'émouvait pas facilement, était littéralement bouleversée par la grandeur de l'endroit. Son devoir n'avançait pas beaucoup. En regardant ces collines boisées, serpentés par des ruisseaux aux eaux claires, elle pensait, nostalgique d'une époque future. Elle se disait que l'année prochaine, ce serait elle qui passerait ses ASPICs. Elle retrouverait cette anxiété. Ce serait sa dernière fin d'année à Poudlard. Lorsqu'elle monterait dans le Poudlard Express qui la ramènerait à la gare de King's Cross, elle ferait son dernier au revoir à l'école de Sorcellerie. Elle n'y remettrait plus jamais les pieds. Cette pensée la rendait vaguement triste. Elle se sentait si bien, ici.

Jagger jeta un rapide regard à sa montre, puis ramassa ses affaires et se leva. La jeune fille se mit rapidement en marche, puisqu'elle avait une sorte de cours de soutien en Sortilèges, et elle n'était franchement pas en avance. Pas qu'elle était pressée d'y aller, loin de là. Elle aurait préféré être n'importe où plutôt que là-bas. Déjà, elle était douée en sortilèges, et ne comprenait donc pas pourquoi on s'acharnait à lui donner des cours supplémentaires. Elle avait quand même obtenu un E dans ses matières, lors de ses BUSEs ! Ce qui la dérangeait le plus, en vérité, était que ces cours de soutien étaient dispensés par Wilhelmina. La dernière personne que Jagger souhaitait voir. Les deux jeunes filles s'étaient rencontrés l'année précédentes, et le courant n'avait jamais pu coller entre elles. Wilhelmina était hautaine, snobinarde, bref, foncièrement insupportable. La Serpentarde avait pris un malin plaisir à rabaisser sans cesse Jagger, à cause de sa maison et de son année ; ce que la Poufsouffle ne comprenait absolument pas. Quel mal y avait-il d'être dans la maison noire et or ? Bien évidemment, la blondinette était loin d'être naïve et elle connaissait bien quelle était la réputation de sa maison. C'était tellement dommage d'avoir des préjugés sur cela... Jagger entra doucement dans la pièce. Wilhelmina l'attendait, assise à une table. Ses cheveux blonds tombaient sur sa poitrine. Jagger posa son sac et la foudroya du regard. La jeune fille n'était pas du genre tendre, quand elle n'aimait pas quelqu'un. « Ma très, très chère Wilhelmina. Je suis ravie que tu m'enseignes l'art des sortilèges » la saluai-je d'un ton calme mais dégoulinant de sarcasme. Je sortis ma baguette de mon sac. « Alors, tu vas m'apprendre quoi ? Wingardium Leviosa ? ».

Jagger avait à peine mis un pied dans la salle qu'elle se demandait déjà pourquoi elle était ici, et plus particulièrement, pourquoi elle était venue au rendez-vous. Après tout, rien ne l'avait empêchée de prétendre une quelconque maladie. Mais la jeune Poufsouffle n'aimait pas mentir, c'était dans sa nature. Cela était paradoxal, car elle savait parfaitement mentir ; seulement, elle ne supportait pas le mensonge. À son avis, si les gens ne mentaient, beaucoup de malheurs ne seraient pas arrivés. À commencer par toute cette série d'évènements étranges qui s'étaient produits depuis la rentrée. D'abord l'assassinat du garde du corps du Ministre de la Magie et cette cagoule de Mangemort retrouvé dans les cachots des Serpentards, puis l'incendie à l'Université qui avait coûté la vie d'une élève, et enfin cette lettre de menace à l'intention de McGonagall… Les choses ne semblaient pas vraiment s'arranger et Jagger ignorait ce qui allait se produire cet été. Les malfaiteurs ne semblaient pas prêt de s'arrêter, même s'ils semblaient avoir calmer le jeu ces derniers-temps. Jagger était persuadée que certaines personnes, à Poudlard, savaient des choses sur ces évènements, mais refusaient de dire la vérité. Non, vraiment, elle détestait mentir, ne fut-ce que pour éviter de passer une heure en tête à tête avec Wilhelmina Fawlne. Pour elle, c'était comme la cigarette : vous commencez juste pour essayer, puis vous finissez par fumer trois paquets par jour sans vous en rendre compte. Le mensonge était additif, car il permettait beaucoup de choses. Vous pouviez facilement vous inventer une nouvelle vie, avec le mensonge, bien loin de votre triste réalité. C'était donc en traînant des pieds et sans aucune trace d'enthousiasme que Jagger s'était installée dans la salle du quatrième étage.

Wilhelmina entra peu de temps après Jagger, et parut déçue de la présence de la jeune Poufsouffle. Ce fut réciproque, car Jagger avait également espéré que la Serpentarde ne vienne pas. Après tout, elles ne s'aimaient pas, alors pourquoi n'avaient-elles pas refusé, ou posé un lapin à l'autre ? Jagger n'en avait aucune idée. Peut-être qu'elles étaient toutes deux trop honnêtes pour cela. Ce rendez-vous avait été fixé par le professeur de sortilèges. La jeune femme en avait d'ailleurs été très surprise et s'était plaint à son professeur. Elle ne voulait pas faire la capricieuse, mais elle ne comprenait tout simplement pas pourquoi elle avait besoin d'un cours. Elle avait un bon niveau, comme dans approximativement toutes les matières qu'elle suivait. En tout ça, s'il elle avait eu besoin d'aide dans un matière, ça n'aurait pas été en sortilèges. Jagger, assise, contempla celle qui serait sa prof le temps d'une heure. Cela se voyait qu'elle prenait sur elle et qu'elle tentait de paraître calme, mais la Poufsouffle n'était pas dupe. Elle imaginait très bien ce que la jeune Fawlne devait penser. Un an qu'elles ne s'étaient pas réellement parlées, mais Jagger n'oublierait pas de sitôt leur rencontre. C'est pour cette raison que la jeune fille lui fit un accueil aussi chaleureux qu'une porte de prison. Elles ne s'aimaient pas, et par conséquent, elle n'allait tout de même pas de perdre en politesses. Ce n'était pas vraiment son genre, pourtant, d'être impolie. Jagger essayait toujours d'être bien sous tous les plans, même si parfois, sa franchise pouvait passer pour de la froideur. En effet, elle n'était pas quelqu'un de particulièrement chaleureux, mais elle était toujours polie, courtoise et amicale avec les gens, même ceux qu'elle n'appréciait pas. Mais Wilhelmina était, comme on dit, l'expression qui confirme la règle. On ne peut pas contrôler ses nerfs avec tout le monde. « Bonjour Jagger, ou plutôt bonsoir. Je me doutes particulièrement que tu n'avais pas spécialement envie de venir faire ce cours d'autant plus avec moi. Crois moi, vu que je suis en pleine période d'examen j'avais pas particulièrement envie de venir, et ce n'est pas parce que c'est toi. C'est simplement que je suis exténuée. Donc... Je doutes fortement que le sort de Wingardium Leviosa te serve à quelque chose et quand bien même, tu dois savoir t'en servir à la perfection. » répondit la verte et argent d'un ton calme. Jagger fut très étonnée de sa réponse, et sa surprise put se lire sur son visage pendant un bref instant. Elle s'attendait à une remarque cinglante de la part de la blondinette ; l'année dernière, elle avait agressé Jagger sans raisons valables, et maintenant qu'elle en avait, elle ne disait rien ? Que s'était-il passé pour qu'elle réagisse de la sorte ? Ce fut certes une surprise, mais plutôt une agréable surprise pour Jagger. Néanmoins, elle ne baissa pas sa garde. Elle avait bien compris que Wilhelmina était du genre stratège, et peut-être que cette gentillesse apparente n'était qu'une feinte pour mieux attaquer plus tard. Elle ne répondit donc pas, mais prit note du compliment.

« Donc.. est ce que tu as une idée de pourquoi on t'as donné des cours en plus ? Parce que j'ai vu ta note et tu semble quand même bien douée. Tu as une idée du travail que tu veux faire par la suite ? » Ok, alors là, ça devenait franchement bizarre. À quoi jouait-elle ? Elle cherchait vraiment à camoufler sa méchanceté, ou quoi ? Jagger ne croyait pas une seconde à sa sincérité. Elle ne pouvait pas avoir changer en une année. Peut-être ne se sentait-elle pas d'humeur à se disputer, aujourd'hui. Car Jagger avait une sacrée répartie, et la Serpentarde en avait eu la preuve l'année précédente. En temps normal, la Poufsouffle n'était déjà pas du genre à passer par quatre chemins quand elle avait quelque chose à dire, alors quand elle était énervée (ce qu'il fallait arriver à faire, car c'était une fille calme de nature), elle ne mâchait pas ses mots et ne craignait pas de blesser la personne. Elle n'irait pas jusqu'à dire qu'elle avait blessé Wilhelmina, car elle semblait être forte, mais elle espérait l'avoir au moins surprise. Car oui, tous les Poufsouffle n'étaient pas que de niais rêveurs, losers sur les bords. Poufsouffle était une maison noble et Jagger ne supportait pas les préjugés sur sa maison. Néanmoins, la jeune fille calma ses ardeurs et tenta de répondre sur le ton le moins sarcastique possible. Si Wilhelmina voulait se la jouer calme, alors Jagger allait jouer. « Je n'en sais pas plus que toi. J'imagine que c'est un passage obligatoire, cette histoire de tutorat. Peut-être pour créer des liens entre les maisons… » déclara-t-elle d'un ton plein de sous-entendus. Ouais, bon, elle ne pouvait pas vraiment se la jouer fille docile avec elle. Elle éprouvait encore trop de rancoeur. « Plus tard ? Tu me poses une colle, là. J'imaginerais bien quelque chose dans la justice magique mais je ne me suis pas encore trop documentée sur le sujet. Ou alors Auror, mais encore une fois, je ne sais pas grand chose sur les études qu'il faut faire, etc » continua la jeune femme d'un ton calme. Elle avait posé ses yeux sur sa rivale. « Tant de sympathie de ta part me perturbe, Wilhelmina. Je ne dis pas que tu n'es pas sympathique, bien au contraire, mais tu m'avais semblé un peu plus.. agressive, la dernière fois. Tu sais, si tu te retiens pour mieux m'attaquer plus tard sur des choses aussi futiles que ma maison ou mes origines, n'attends pas. Je suis pressée de voir ce que tu as dans le ventre ».

Jagger ignorait tout de la façon dont allait se dérouler leur petite réunion. Elle ne savait pas à quoi s'attendre, et étant naturellement calculatrice, cela la troublait. Tout d'abord, elle ne s'attendait pas à ce que Wilhelmina réponde présente ; et vu l'expression de la Serpentarde en entrant, ce sentiment était réciproque. Évidemment, cela ne mit pas tout de suite une très bonne ambiance. Les deux adolescentes n'avaient clairement pas envie d'être là, mais elles avaient mis leurs rancunes de côté. Jagger ne savait pas comment interpréter cela. Est-ce que la jeune femme venait de faire un pas vers elle, ou était-ce simplement parce qu'elle avait été obligée de venir ? La Poufsouffle avait du mal à cerner la jeune Fawlne, mais ça ne datait pas vraiment d'hier. Déjà, lors de leur première rencontre, elle n'avait trop su que penser d'elle. C'était une jolie fille, intelligente par dessus le marché, mais beaucoup trop ambitieuse et cupide à son goût. L'ambition n'était pas forcément un défaut, mais dans le cas de Wilhelmina, il en était un énorme. Elle semblait prête à tout pour réussir, autant dans le travail que dans ses relations sociales, quitte à écraser les autres élèves. Cela relevait de l'égoïsme le plus total aux yeux de Jagger. Mais bon, pour le moment, les hostilités n'étaient pas lancées, alors elle préféra garder le silence et répondre docilement aux questions de sa rivale. Elle attendait de voir, curieuse, ce qui allait se passer ensuite. « Ce passage obligatoire devrait se faire en début d'année, pas pendant les examens, des fois j'aurais vraiment du mal à comprendre la logique de nos professeurs. » Pour le coup, Jagger fut plutôt surprise de la réaction de Wilhelmina. Elle s'attendait à un soupir, une remarque désagréable, mais sûrement pas à cela. Était-elle en train de vouloir créer une sorte de complicité ? En tout cas, ça y ressemblait bien. Mais la Poufsouffle n'était ni dupe ni naïve ; elle savait qu'il fallait se méfier d'elle. Aussi répondit-elle par un simple : « Oui, c'est sûr ».

Jagger lui parla ensuite de ce qu'elle envisageait de faire comme études. La jeune fille allait bientôt rentrer en septième année —déjà !— et il était temps pour elle de songer sérieusement à ce qu'elle désirait faire plus tard. Elle savait qu'elle allait faire des études, car même si elle n'aimait pas beaucoup cela, elle avait des facilités non-négligeables. Il aurait été vraiment dommage qu'elle ne les exploite pas. Malgré tout, Jagger restait un peu indécise sur la question, ne sachant pas que choisir entre ces deux choix. D'un côté, la justice l'avait toujours attirée, même lorsque, jeune moldue, elle ignorait l'existence des sorciers. C'était donc presque un choix naturel que le domaine de la justice magique. La Poufsouffle aimait les valeurs et le respect de celles-ci ; ce n'était pas tant faire respecter les lois qui l'attirait, mais plutôt le fait de pouvoir rendre justice à tous et de montrer aux autres quel était le bon chemin à prendre. Ce qui ne signifiait pas forcément suivre la loi. Cependant, elle craignait que ce soit un travail rébarbatif et l'idée qu'elle puisse passer le restant de ses jours à s'ennuyer dans un petit bureau du Ministère la déprimait. Auror était un métier où, au moins, il était sûr qu'elle ne s'ennuierait pas. Toujours beaucoup d'action… Et chaque mission était différente. De plus, cela lui permettait aussi que justice soit rendue. Et de ses propres mains. Beaucoup plus concrète, cette carrière l'intéressait de plus en plus, mais en tant qu'adolescente réfléchie, elle n'avait pas encore fait de choix. Elle avait encore toute une année pour y penser, de toute manière. « En as tu déjà parlé de tes choix à ton professeur ? Parce que si c'est le cas, c'est la raison qui nous amène ici aujourd'hui. Peut être que ce n'est pas un cours en pratique que tu dois avoir, après si tu veux en faire pas de soucis, mais plus des réponses. Tu as dit que tu voulais peut être partir dans la justice ? Saches que dans le droit tu n'auras pas vraiment besoin de gros sortilèges, à par les sorts pour l'occlumencie et la legilimencie. En outre, en Auror, un choix très ambitieux et judicieux, les Sortilèges se sera un peu ton points le plus fort, alors ton professeur à peut être envie que tu t'avances légèrement sur le programme ? » Alors là, oui, tout devenait bizarre. Trop étrange pour être vrai. Wilhelmina qui semblait vouloir… aider Jagger ? Mais que se passait-il ? Ce ne pouvait pas être la même fille qui, quelques mois plus tôt, l'avait traitée de tous les noms ? Un peu abasourdie, Jagger mit quelques secondes avant de répondre. Elle réfléchissait rapidement, mais à vrai dire, elle s'intéressait peu à ce que disait la Serpentarde. Elle voulait juste savoir ce qui lui prenait d'être aussi sympathique. « Eh bien, oui, il me semble que j'avais demandé au prof de sortilèges si j'avais le niveau requis pour éventuellement m'orienter vers une carrière d'Auror. Ceci explique peut-être cela… J'ai toujours eu un bon niveau dans cette matière, mais je t'avoue que mes connaissances en légilimancie et occlumancie sont assez vagues. On ne les étudie pas beaucoup en classe, j'imagine que tu devines pourquoi ». Il s'agissait en effet de deux pouvoirs difficiles à maîtriser, et qui pouvait, de plus, être utilisé à mauvais escient par un élève un peu trop immature. La Poufsouffle les aurait bien classer au même rang que les Sortilèges Impardonnables. Jagger était curieuse de savoir si Wilhemina parviendrait à l'éclairer sur le sujet.

Cependant, ce calme apparent ne dura pas longtemps. Jagger ne put s'empêcher de lancer une grosse pique à la Serpentarde. Elle n'en pouvait plus d'attendre que celle-ci sorte son dard empoisonné… ou non. La Poufsouffle détestait ne pas savoir ; dans ce genre de situation, elle se sentait incroyablement stupide et dépassé. Elle aimait avoir le contrôle, et là, elle devait admettre qu'elle ne l'avait pas vraiment. Comme elle ne savait pas quel comportement Wilhelmina allait adopter, elle se trouvait dans l'incapacité de prévoir le déroulement du rendez-vous, et cela la mettait mal à l'aise. Alors Jagger préféra en finir tout de suite, histoire d'avoir le coeur net sur les véritables intentions de la Serpentarde. « Je ne suis pas quelqu'un de sympathique, mais pas non plus quelqu'un d'agressive. J'avoue j'ai des humeurs, je sais me montrer lunatique, froide, méchante quand l'envie me prend, et très solitaire. J'ai des défauts et je les assumes pleinement. En outre, je ne suis pas quelqu'un qui joue avec les autres pour ensuite leur casser du sucre dessus juste par plaisir. Je le conçoit, l'année dernière j'ai agis méchamment, et je n'aurais pas du te dire tout cela, j'étais dans une très mauvaise passe, j'en ai voulu au monde entier . Je ne vais pas te dire ce qui m'est arrivé, honnêtement, je pense que tu t'en fiches complètement de ma vie, mais disons que je suis une personne qui déteste le mensonge et la trahison, et après ce que j'ai vécu tout ceux qui me faisait penser à cela ont prit. J'ai pris sur moi, j'ai disons murit et j'ai ouvert les yeux. Alors tu peux me détester Jagger, je m'en fiches, je part bientôt et on aura plus besoin de se côtoyer, mais ne t'attends pas à ce que aujourd'hui je vienne te critiquer sur quoi que se soit. Je n'ai rien à dire sur ta maison ou tes origines, on est tous différents, on a tous des qualités et des défauts et on est comme en est. C'est tout. » Décidément, Jagger allait de surprises en surprises. Elle avait bien compris que Wilhelmina était intelligente, mais elle ne se serait jamais doutée qu'elle pouvait faire preuve d'autant de maturité et de recul sur soi-même. « Si tout ce que tu me dis est sincère… J'admire ton honnêteté. Au moins, c'est dit. Je suis contente que tu admettes que ton comportement l'année dernière était, excuse-moi du terme, digne d'une pétasse de première catégorie. Je pense que j'ai eu mes torts aussi, dans cette dispute, j'aurais éventuellement pu me montrer plus calme. Mais comme tu dis, on a tous nos qualités et nos défauts, n'est-ce pas ? » Si elle jouait la carte de l'honnêteté, alors il n'y avait pas de raison que Jagger ne le fasse pas à son tour. Néanmoins, elle restait toujours sur ses gardes. « Nous disputer ne servirait pas à grand chose, effectivement. On a grandi, mûri, alors on devrait enterrer la hache de guerre, du moins pour cette fois ». La Poufsouffle se sentait également assez fière de la maturité dont elle faisait preuve. Elle se sentait aussi un peu bête d'avoir voulu chercher des poux à Wilhelmina. « Alors… peux-tu m'apprendre quelque chose à propos de l'occlumancie, ou de la légilimancie ? Car je t'avoue que malgré ces belles paroles, je n'ai qu'une envie, c'est de dégager d'ici. Autant en finir rapidement ».

En effet, Jagger songeait de plus en plus sérieusement à s'orienter vers une carrière d'auror. Peut-être était-ce un projet trop ambitieux qui n'aboutirait jamais, mais elle pensait que ce métier lui permettrait de s'épanouir sûrement plus qu'une carrière dans le droit magique. Il s'agissait en effet de deux domaines diamétralement opposé : le premier requérait courage, vigueur et détermination tandis que l'autre demandant patience, sang froid et analyse. Toutes ces qualités, Jagger les possédait, aussi ne savait-elle pas vraiment que choisir. Peut-être que Wilhelmina serait en capacité de l'aider, après tout. Elle semblait avoir mis sa rancune et sa mauvaise humeur de la dernière fois de côté ; et faisant preuve d'une maturité que la Poufsouffle ne lui connaissait pas... Elle pourrait s'avérer utile, finalement, et peut-être que cet entretien ne serait pas si terrible que prévu. Après tout, la Serpentarde avait un an de plus qu'elle et elle devait donc savoir plus de choses en général que Jagger, concernant les cours et l'orientation. Il aurait été idiot que miss Hawthorne prétende que cet entretien était inutile ; elle avait, en tout honnêteté, beaucoup à apprendre de Wilhelmina. D'un point de vue scolaire, bien entendu. Pour le reste, question manières, elle aimait à penser que c'était l'inverse ; Wilhelmina avait à apprendre. Mais elle semblait avoir changé depuis la dernière fois, alors Jagger n'était plus trop sûre.

« Je dois t'avouer que ce n'est pas la matière qui prime pour moi aussi vu qu'on ne l'a pas encore étudié. Je ne pourrais pas te donner des cours de pratique ou quoi que se soit dessus. De la théorie, si tu veux, mais autant que je te fasse passer mes livres, j'ai tout appris dedans. Malheureusement, je n'ai pas eu la chance d'avoir des parents en soif de connaissance pour leur enfants, donc contrairement à beaucoup de famille de Sorciers, je n'ai pas eu la chance qu'on me l'apprenne. » Répondit Wilhelmina en haussant les épaules. La sympathie dont elle faisait preuve laissait Jagger bouche bée. Elle venait quand même de lui parler de sa famille, c'est-à-dire de sa vie privée, celle qu'elle menait en dehors de l'école. Étrange, quand même. Mais la Poufsouffle devait admettre qu'elle préférait ce dialogue calme, bien qu'un peu froid, aux insultes et aux cris qu'elles s'étaient échangés l'année précédente. Pour ses tympans et aussi parce qu'il était beaucoup plus confortable de discuter que de hurler. Jagger comprenait parfaitement ce que Wilhelmina voulait dire par « apprendre seule ». Elle-même menait une paisible existence de moldue avec son père quand un homme du Ministère était apparu en plein milieu de son salon. Elle avait du tout apprendre du monde magique et de Poudlard. Alors oui, elle savait ce que c'était que de devoir tout apprendre dans des livres. La petite Jagger âgée de onze ans avait fait travailler son imagination. Et il lui en avait fallu beaucoup pour arriver à croire que les baguettes magiques et les sorciers volant sur des balais n'étaient pas que des balivernes. Elle se contenta d'hocher la tête. Même si elles avaient franchi un cap toutes les deux, elles n'étaient pas non plus les meilleures amies et après tout, Jagger ne connaissait pas l'opinion de Wilhelmina sur les nés moldus. La jeune femme sortit ensuite de son sac un livre énorme, le genre de livre que l'on peut qualifier de brique et utiliser pour caler un meuble bancal. « L'occlumencie et la légilimencie à travers les âges » était écrit en grosses lettres sur la couverture cartonnée. Jagger appréciait sincèrement le geste de la blondinette.

Mais elle était quand même préoccupée par l'étrange gentillesse de Wilhelmina, aussi l'asséna-t-elle assez directement de questions tranchantes. Pourquoi faisait-elle semblait d'être gentille ? Était-ce pour mieux l'attaquer ensuite ? Dans ce cas, pas la peine, elle pouvait y aller maintenant. C'était en résumé ce que Jagger lui avait dit, mais sur le ton froid et désagréable qu'elle adoptait lorsqu'elle était agacée. Le moins que l'on pouvait dire, c'était que Jagger n'avait pas sa langue dans sa poche et qu'elle n'hésitait pas à l'ouvrir quand bon lui semblait. Les Poufsouffles étaient réputés pour leur faiblesse et leur niaiserie, mais cela ne s'appliquait définitivement pas à Jagger. Bien au contraire ! Plus jeune, elle s'était demandé pourquoi le Choixpeau l'avait envoyé chez les or et noirs. Mais elle avait compris par la suite qu'elle était là en raison de son sens ultra-développé de la justice et son honnêteté, deux caractéristiques clés des Blaireaux. En fait, Jagger aurait pu être envoyée chez les Gryffondors, elle en avait l'intime conviction, mais elle n'était pas assez impulsive. Wilhelmina lui expliqua très calmement qu'elle avait changée depuis l'année précédente, sans trop s'attarder sur les détails de ce changement, et Jagger, éberluée, avait trouvé bon de s'excuser. Elle aussi s'était mal comportée ce jour-là, elle en avait conscience, même si la Serpentarde l'avait bien cherchée. « Je suis sincère, je hais le mensonge, la malhonnêteté et la trahison. Je suis une adepte de son contraire, donc tu peux être sur que je suis sincère. Tout le monde te le diras, c'est pas pour rien qu'on me dit que j'ai pas de coeur, juste parce que je suis trop franche et que je dis la vérité même quand on ne veut pas l'entendre. Enfin bref, comme je te l'ai dit, c'était une mauvaise période et je suis désolé. » Wow. Jagger était surprise, mais très agréablement, elle devait l'admettre. Elle n'aurait jamais pensé pouvoir dire cela, mais... Elle se retrouvait à plus ou moins apprécier la jeune fille. La Serpentarde avait des qualités que sa camarade Poufsouffle appréciait énormément. « Je suppose que nous sommes parties sur de mauvaises bases... Peut-être que dans d'autres circonstances, nous aurions pu nous apprécier davantage. J'en suis même sûre, en fait ». Jagger se rendait compte que les deux jeunes femmes se ressemblaient énormément. Cette obsession de l'honnêteté et de sa sœur la sincérité, ainsi que cette franchise parfois cruelle... C'était comme ça que l'on pouvait aussi bien décrire Wilhelmina que Jagger. Bizarre comme la vie peut parfois prendre des tournants à 360°. Si elles s'étaient rencontrées différemment, peut-être seraient-elles amies désormais. Qui pouvait savoir ?

« Je pense qu'il sera plus en capacité de t'apprendre des choses que moi. Gardes le autant de temps que tu veux et au pire tu me le renverra par hiboux ? » dit-elle en désignant le livre. Jagger sentait que sa voix s'était légèrement adoucie. Elle était loin d'être chaleureuse mais elle avait un peu perdue de sa froideur, ce qui était bon signe. « Merci beaucoup. Vraiment, j'apprécie » fit Jagger doucement en soulevant le livre. Elle n'allait pas s'ennuyer cet été ! Elle comptait lire ce bouquin en entier et travailler un peu la légilimencie et l'occlumencie ; enfin, autant que possible. Et puis il y avait ce voyage à la ferme auquel elle s'était inscrite. Elle ne savait pas vraiment ce que ça donnerait, mais bon. Elle reposa brusquement le livre, qui était beaucoup plus livre qu'elle ne l'aurait imaginé. « Je ne sais même pas si mon hibou pourra le soulever » dit-elle en souriant. Ce bouquin était vraiment énorme. Elle le cala sur ses genoux et posa ses yeux noirs sur Wilhelmina. Elle était assez jolie, mais c'était comme si son caractère était inscrit sur son front : on la sentait froide, calme et distante rien qu'en observant sa physionomie. « Tu rentres à l'Université en Septembre, n'est-ce pas ? Que vas-tu étudier ? » demanda-t-elle. « Non, laisse moi deviner. Vu ta personnalité, je te verrais bien dans le domaine du droit magique. Quelque chose dans ce goût-là. Je me trompe ? ».