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Destiny avait donc donné rendez-vous à Fabian dans une vieille salle peu utilisée, afin qu'il lui montre comment réaliser cette fameuse potion d'Amnésie, mixture qu'elle devait absolument maîtriser si elle voulait valider cette matière. Et ce n'était pas chose aisée. Alors, avant de rejoindre Fabian, elle avait fait un petit détour dans son dortoir, afin de récupérer quelques affaires. Sa chambre étant parfaitement ordonnée, elle n'eut aucune difficulté à mettre la main sur ce dont elle avait besoin. Chaudron quasiment neuf, en très bon état - vu qu'elle ne lésinait pas sur son entretien, ingrédients rangés impeccablement dans une mallette qu'elle avait déposée sous son lit, à l'abri des regards. Ses affaires en main, Destiny sortit ensuite de sa salle commune. Au détour d'un couloir, elle croisa deux Gryffondor, reconnaissables à leur insigne agrafé sur leur robe de sorcier. Elle se rapprocha du mur opposé, et serra ses affaires contre elle. Ils la regardèrent d'un drôle d'air, mais elle n'en avait que faire. Non, tout ce qu'elle voulait, c'était les éviter. Car elle savait qu'ils étaient tous les deux enfants d'une famille Moldue. Et il était hors de question qu'elle s'en approche, de près ou de loin. C'est ce que ses parents lui avaient toujours dit. Et ce que sa famille avait toujours dit. Cela n'allait pas être aujourd'hui qu'elle allait déroger à la règle. Il fallait qu'ils soient fiers d'elle. Alors, elle était prête à tout pour les satisfaire.

Pressant le pas, elle entreprit de gravir les escaliers qui la mèneraient au 3ème étage. Elle parvint à s'y frayer un chemin, malgré leur acharnement à tenter de la faire changer de direction et de la diriger vers un mauvais endroit. Mais on était au mois de Mai, et Destiny commençait à bien connaître le château, et en particulier le mécanisme de ces fameux escaliers qui n'en faisaient qu'à leur tête. Elle arriva finalement devant la fameuse salle. Fabian n'était pas là. Pourtant, elle ne s'était pas précipitée. Peut-être allait-il bientôt arriver. Elle posa ses affaires au sol, remit ses vêtements correctement, défroissant le moindre pli qu'elle put rencontrer. Elle arrangea également ses cheveux, qui en faisaient souvent à leur tête.

Les minutes défilaient, et Fabian ne se montrait toujours pas. Destiny commençait à avoir des doutes. Elle se remémora les indications qu'elle lui avait données afin de trouver la salle. Vieille salle peu utilisée, tableau dans lequel un homme agite sa baguette, 3ème étage... C'est alors qu'elle se rendit compte de son erreur. Il lui semblait... non, elle était quasiment certaine de lui avoir dit 4ème étage... Pour une fois, c'était involontaire. C'était peut-être la raison de son retard, après tout. Un sourire malsain se dessina sur son visage. Elle l'imaginait courir, un étage au dessus d'elle, cherchant ce fameux tableau, sans jamais mettre la main dessus. Mais il n'était pas si stupide, il lui suffisait de demander son chemin. Mais cette fois, elle eut du mal à l'imaginer. A vrai dire, elle ne se souvenait pas l'avoir déjà vu parler à quelqu'un. Ou alors, il s'y était vraiment mal pris, et son interlocuteur avait fini par trouver une excuse pour pouvoir lui fausser compagnie. Cette pensée la fit une nouvelle fois sourire. C'était sûr et certain, elle était tombée sur un sacré cas.

Les minutes passèrent, encore et encore, et toujours aucun signe du jeune Serdaigle. Mais cette fois, Destiny s'impatientait. Son état de stress s'exprimait physiquement, son pied commençait à taper nerveusement contre le sol. Lui avait-il fait faux bond, maintenant qu'il avait obtenu ce qu'il voulait, c'est à dire, un devoir de Métamorphose assuré d'obtenir une bonne note ? Non, il n'en était pas capable... Mais la jeune fille n'en était pas sûr. Après tout, et elle se le répétait depuis un moment maintenant, elle ne le connaissait pas tant que ça. Il n'avait pas l'air mesquin... Elle le trouvait plutôt niais. Mais peut-être cachait-il bien son jeu... Peu importe. Il était en retard, peut-être n'allait-il jamais venir, mais elle n'allait pas se laisser faire. Tôt ou tard, il le paierai. De sa propre vie, s'il le fallait.

Elle attrapa ses affaires posées au sol, et tourna la poignée de la porte qui se situait juste à côté d'elle. Celle-ci grinça, comme si elle n'avait pas été ouverte depuis un très long moment. Elle s'installa à une table, dont elle dépoussiéra le dessus, en soufflant dessus. Un amas de saleté s'entassa, et s'envola, pour enfin se déposer sur le sol. Elle mit tout son matériel sur la table, et sortit un mouchoir de sa poche, avec lequel elle essuya soigneusement ses petites mains. Comme le lui avait appris sa mère. Elle le secoua légèrement, et le rangea. Elle s'installa ensuite sur le petit tabouret qui se trouvait en face d'elle, se mit droite, comme à son habitude, et fixa son chaudron. Si Fabian n'arrivait pas dans les cinq minutes, tant pis, elle se débrouillerait. Et lui ferait payer ensuite.

Cinq minutes passèrent, pendant lesquelles elle avait fixé la porte d'entrée toujours ouverte, et surtout, pendant lesquelles elle avait imaginé toutes sortes de plan pour anéantir Fabian. Car pour elle, il était clair à présent qu'il n'avait jamais eu l'intention de venir. Un retard aussi important n'était pas envisageable. Son regard exprimait la haine. Mais elle ne bougeait pas. En la voyant ainsi, on pouvait même se demander si elle était vivante.

C'est lorsqu'elle fut sur le point de bouger sa main pour attraper sa mallette qu'elle entendit des pas dans le couloir. Intriguée, elle haussa un sourcil. Puis, apparut un Fabian rouge, dégoulinant de sueur, et visiblement essoufflé. Elle était énervée. Mais elle ne lui montrerait pas. Au contraire, elle se força à sourire, comme pour lui faire comprendre que ce manque de considération allait lui coûter très cher, et qu'il ne fallait jamais, JAMAIS, faire attendre Destiny Lewis. Le destin du jeune Serdaigle était maintenant scellé, elle en était certaine. Mais ce qu'il inventa comme excuse eut le don de l'agacer davantage.

- Désolé, j'ai croisé notre professeur de Sortilèges en chemin, et je devais lui demander un truc...

Elle se mit à tapoter nerveusement sur la table avec ses doigts.

- Tout le monde sait que les vendredi, et en particulier lorsqu'il fait beau, le professeur passe ses après-midi à Pré-au-Lard. dit-elle en le fixant.

Encore une chose qu'elle se promit de lui faire payer. Décidément, soit il le faisait exprès... soit il était vraiment stupide. Elle prit à nouveau sur elle, consciente qu'elle avait besoin de lui, et que l'envoyer paître maintenant sera une mauvaise idée. Ainsi, lorsqu'il lui proposa de se mettre au travail, elle prit une inspiration, et acquiesça. Il déballa ses affaires tandis qu'elle ouvrait son manuel à la page de la recette, et qu'elle sortait tous les ingrédients nécessaires. Elle les disposa devant elle, en une rangée, tous bien alignés les uns avec les autres. Elle parcourut à nouveau la recette du bout de son doigt. A côté de cette rangée, elle déposa tous les ustensiles dont elle aurait besoin : son mortier et son pilon, ainsi que sa baguette. Qu'elle garda tout de même près d'elle. Sait-on jamais. Son père lui avait toujours dit d'être méfiante. Puis, elle relut à nouveau la recette, et en suivit les premières instructions.

- 2 gouttes d'eau du fleuve Léthé... Les faire chauffer à feu doux pendant 20 secondes.

Elle se pencha au dessus de son chaudron. Comment pouvait-on faire chauffer deux gouttes d'eau ? Elles s'évaporeraient, sans doute... Elle suivit néanmoins les instructions, se rappelant des conseils de Fabian.

- 2 brins de valériane...

Elle s'interrompit brusquement, fixant la ligne qu'elle venait de lire. Ces brins... elle en avait déjà marre. Elle soupira et, à contre coeur, posa son regard sur le jeune homme, qui l'observait jusque là. Avait-elle besoin de parler pour comprendre qu'elle lui quémandait de l'aide ? Une nouvelle fois ?

Lorsqu'elle l'interrogea du regard, lui faisant comprendre qu'elle rencontrait un autre problème avec ses ingrédients, elle ne s'était vraiment pas attendue à ce qu'il vienne près d'elle, et encore moins à ce qu'il lui prenne la main pour lui montrer le geste. Néanmoins, elle se laissa faire. Pour l'heure, son objectif était de réussir sa potion, rien d'autre n'importait. Elle porta alors toute son attention sur la démonstration de Fabian, observant l'emplacement de sa propre main, et le mouvement de poignet qu'elle devait effectuer pour couper parfaitement le brin. Elle repéra également l'endroit exact où entailler sa tige pour n'en garder que le strict nécessaire. Puis, aussi vite qu'il fut arrivé, il repartit à sa place. Elle l'avait suivi du regard tout le long, sans rien dire, sans aucune remarque. Elle dût quand même avouer qu'elle avait affaire à quelqu'un de très patient. Ou de très malin. Qui préparait sa future vengeance. Cette pensée la fit sourire intérieurement, et elle reporta son attention sur son chaudron. Elle exécuta les tâches suivantes, observant du coin de l'oeil Fabian afin de vérifier qu'elle faisait les bons gestes. Et maintenant, elle devait attendre. Cinquante-et-une minutes, exactement. Heureusement, étant prévoyante, elle avait ramené de quoi s'occuper.

Elle sortit un parchemin, une plume, ainsi qu'un livre de Botanique. Elle avait décidé de revoir les cours étudiés dernièrement, ce n'était pas perdu. Pendant qu'elle écrivait, elle jetait de temps en temps des regards vers le jeune homme, qui lui, avait décidé de rester près de la fenêtre. Il semblait pensif. Elle aurait aimé avoir le don de lire dans les pensées, pour savoir à quoi il songeait en ce moment même. Elle imagina toutes sortes de situations, sans qu'elles soient réellement crédibles.

C'est alors qu'un sentiment étrange envahit la jeune fille. Elle le revit assis dans le parc, en train d'écrire, concentré et sérieux. Puis, l'image de Fabian focalisé sur sa potion lui apparut à nouveau. Elle se surprit à constater que peut-être n'étaient-ils pas si différents que ça... Il était aussi acharné de travail qu'elle. Prêt à tout et n'importe quoi pour être le meilleur. Comme... elle. Exactement comme elle. Elle posa alors brusquement sa plume, revenant à la réalité. Etait-ce de la sympathie qu'elle venait de ressentir envers lui ? Non non, c'était impossible. Un seul après-midi ne pouvait pas changer ce qu'elle pensait de lui. Leur regard se croisa. Elle détourna le sien, tentant de dissimuler son émotion et de se reconcenter sur son devoir. Elle attrapa à nouveau sa plume, et se remit à écrire. Mais elle ne parvint pas à noter grand chose. Il y avait de quoi se poser des questions. Fabian était l'une des premières personnes avec qui elle avait passé autant de temps depuis le début de l'année, et il ne faisait pas partie des personnes qu'elle fréquentait habituellement. Alors oui, c'était étrange. Elle risqua un autre regard vers lui. Heureusement, il regardait ailleurs. Elle lâcha un soupir, et se remit droite. Non, elle ne devait pas se laisser aller. Il était hors de question qu'un garçon, peu importe qu'il lui ressemble ou non, porte atteinte à la réputation qu'elle s'était forgée jusque là, et au respect qu'on lui portait.

- Reprends toi Destiny. N'oublie pas qui tu es, se dit-elle intérieurement.

Elle se remit alors à gratter hâtivement son parchemin, espérant balayer au plus vite les pensées étranges qui s'étaient invitées dans son esprit.

Finalement, l'attente fut moins longue que prévu. Le minuteur se mit à sonner, résonnant dans la salle vide. Elle posa sa plume sur son parchemin, qu'elle mit de côté, afin de ne pas risquer de les tâcher. Elle jeta un coup d'oeil à Fabian. Il était retourné à sa place, et avait déjà entrepris de continuer sa recette. Elle l'imita. Du bout de son index, elle parcourut les instructions, et les suivit méticuleusement.

Elle devait maintenant écraser 4 baies en une poudre très fine. Elle suivit le conseil de Fabian et fit du mieux qu'elle put pour rendre la poudre extrêmement fine. Elle observa son résultat quelques instants, toucha du bout des doigts cet ingrédient qu'elle venait de réduire en poussière, et en fut finalement satisfaite. Elle ne demanda pas l'avis du jeune homme, et ajouta le mélange directement dans le chaudron. Comme demandé, elle attrapa sa louche, et remua la mixture cinq fois, dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. Enfin, elle agita sa baguette, de la même manière qu'elle l'avait fait précédemment, et surtout, de la même manière que lui avait enseignée Fabian quelques heures plus tôt.

- Je crois que c'est terminé...

Elle avait presque chuchoté. Comme si elle se parlait à elle-même. Elle se pencha vers le chaudron, méfiante. Puis soudain, une fumée s'en échappa.

Elle resta là, à fixer son chaudron, d'où cette étrange fumée s'échappait. Etait-ce bon signe ? Fallait-il que la fumée soit d'une couleur spéciale pour qu'elle soit réussie ? Ou est-ce que son épaisseur avait une quelconque importance ? Elle avait suivi la recette à la lettre, était persuadée de n'avoir commis aucune erreur, que ce soit de pesée ou d'ingrédients. Elle était quasiment sûre de l'avoir réussi. Mais pour cela, il lui fallait la confirmation du jeune Serdaigle, qui était toujours assis en face d'elle. Lui regardait son propre chaudron, et semblait satisfait du résultat. Il releva ensuite la tête vers elle, et lui demanda s'il pouvait jeter un coup d'oeil à la sienne. Elle ne répondit rien. Après tout, c'était lui l'expert en potions... Le reconnaître lui faisait mal au coeur, mais c'était la réalité. Mais Destiny n'était pas du genre à se laisser abattre, et elle se promit de donner son maximum pour rattraper le niveau du jeune homme.

Celui-ci d'ailleurs s'était levé, et approché d'elle. Il observait son chaudron, d'un oeil avisé. C'est alors qu'un sourire apparut sur son visage. Elle comprit alors qu'elle n'avait fait aucune erreur. Et que sa recette était tout simplement une réussite. Intérieurement, elle bouillonnait de joie. Mais elle se retint de lui montrer. A la place, elle afficha simplement une expression de satisfaction, accompagné d'un léger sourire. Elle était fière d'elle et, une fois qu'elle serait partie, elle s'empresserait d'écrire à ses parents pour le leur raconter.

Sous les conseils de Fabian, elle éteignit son chaudron, et versa la mixture dans une petite fiole, qu'elle posa sur la table, en face d'elle.

- Bon, et maintenant, plus qu'à goûter !

Elle releva la tête et le fixa. Elle arqua un sourcil, ne comprenant pas vraiment si elle devait rire à ce qui ressemblait de très loin à une tentative de blague. Certes, l'atmosphère semblait beaucoup moins pesante qu'au parc, mais de là à se permettre des familiarités... Il se mit même à rire. Elle, ne cilla pas une seule fois, tentant de lui faire comprendre que non, ce n'était pas drôle, et que non, ils n'étaient pas amis, et ils ne le seraient jamais.

- Si tu pouvais éviter ce genre de familiarités, nous n'avons pas élevé les hippogriffes ensemble.

Son ton était sec et tranchant, et c'était tout à fait volontaire. Elle voulait lui faire comprendre qu'aucun rapprochement n'était possible entre eux, et que ce n'était pas parce qu'ils avaient passé un après-midi ensemble que cela se reproduirait d'autres fois, et que cela lui donnait un quelconque droit de s'adresser à elle comme s'ils étaient proches. Néanmoins, ses parents lui avaient toujours appris à être reconnaissante lorsqu'on lui rendait un service. Pendant qu'elle rangeait ses ustensiles, ainsi que ses ingrédients en trop dans sa mallette, elle s'adressa à lui, sans le regarder.

- Je tenais tout de même à te remercier de m'avoir aidée.

Elle était sincère, lorsqu'elle disait ce genre de choses. Les cours étaient quelque chose de primordial pour elle, et elle ne pouvait se permettre aucun écart, aucune note en dessous de la moyenne, c'était inconcevable. Elle finit de nettoyer son plan de travail, et se releva de son tabouret. Fabian était resté planté là, devant elle, sans rien ajouter. Un peu comme à son habitude d'ailleurs. Mais elle fut soulagée. Elle n'avait pas la tête à une énième confrontation. Elle se dirigea vers lui, s'arrêtant à environ un mètre d'écart. Elle l'observa quelques instants, son propre visage n'affichant aucune expression. Puis elle tendit la main vers lui, comme pour lui témoigner de sa reconnaissance.