Au contraire des élèves qui revenaient dans leur salle commune, une fois les cours terminés pour se préparer à aller déjeuner, Astride s'apprêtait à en sortir. Après un cours de potions auquel elle n'avait absolument rien compris et n'espérait pas comprendre quoi que ce soit un jour, elle devait se changer les idées et quoi de mieux pour cela que de faire un tour dans les serres ? Elle s'y était toujours sentie à l'aise, dans son élément et c'était le genre d'évasion qui lui permettait aussi d'accumuler de nouvelles connaissances et donc de se détendre sans pour autant laisser tomber les devoirs qui étaient déjà beaucoup trop nombreux. Aujourd'hui, elle avait donc décidé de commencer à travailler un peu sur son lys. Elle n'avait aucune idée de ce qu'elle allait pouvoir en faire c'est pourquoi passer par une phase d'information et d'observation lui paraissait plus que nécessaire. Certains élèves diraient probablement qu'elle était folle, mais elle avait bien l'intention de planter un lys tout bête sans aucune particularité et de tenir le journal intime du premier mois de sa vie. Elle avait déjà prévu tout un tas d'expérience visant à voir s'il s'adaptait mieux à la lumière ou à l'obscurité, à l'humidité ou à un temps sec, à la chaleur ou au froid. En plus, elle n'aurait même pas à passer toutes ses journées en compagnie de sa plante, il lui suffirait de venir la voir tous les jours pour rédiger son journal et comprendre comment elle devait s'en occuper. Il était plus difficile de créer une plante magique à partir d'une plante banale si elle n'en connaissait pas ses particularités et c'était le cas actuellement. Bien sûr, elle allait aussi plonger sa tête dans des livres et emmagasiner le maximum d'informations qu'elle pourrait trouver, mais il valait tout de même mieux qu'elle parvienne par elle-même à des résultats concluants si elle voulait réussir du mieux qu'elle le pouvait par la suite. En plus, l'avantage de ce genre de devoir était qu'elle n'était pas pressée par le temps. Certains élèves s'en occupaient au dernier moment mais pas elle, il était hors de question qu'elle se laisse dépasser par les événements. Certes, elle avait beaucoup de choses à faire mais elle pouvait très bien y arriver et ajouter ce devoir en plus des autres. Pour elle c'était plus un plaisir qu'un devoir et elle était humaine, cette petite excursion quotidienne lui permettrait de se détendre un peu et elle en avait bien besoin. C'est donc ses livres sous le bras que la jeune fille traversa l'école pour rejoindre le parc. Sauf qu'en parvenant dans le hall, elle eut le malheur d'apercevoir sa meilleure amie. D'un seul coup, son objectif premier lui sorti de la tête. Ça faisait des jours et des jours qu'elle voulait voir Hecate et elle n'y était pas encore parvenue. Cette fois-ci serait la bonne, elles allaient enfin pouvoir discuter un peu.

" Salut, comment est-ce que tu vas ? Ta matinée s'est bien déroulée ? "

L'enthousiasme d'Astride était tout de même un peu effacé par la tête étrange qu'affichait sa meilleure amie. Elle avait déjà vu cette tête à de trop nombreuses reprises et n'était pas du tout sûre d'adorer la suite de la conversation. Lorsqu'elle était venue la voir à l'infirmerie, Hecate affichait la même expression angoissée. Bon, la suite des événements lui avait appris qu'elle angoissait un peu pour rien puisqu'elle avait juste voulu protéger son meilleur ami et que ce n'était certainement pas de sa faute si son sortilège avait ricoché sur un autre élève. Mais quand même, c'était une tête de coupable ce qui voulait dire qu'elle avait fait quelque chose dont elle n'était pas fière. La poufsouffle s'était promis dès la fin de l'année dernière de réussir à mettre tous les problèmes de côté pour passer enfin une année agréable et sans aucun faux pas. Ça paraissait sans doute un peu idyllique comme tableau, elle ne vivait pas dans un monde de poneys roses et son année connaitrait très certainement des hauts et des bas, mais jamais elle ne pourrait se retrouver au fond du trou comme durant sa cinquième année si elle faisait un minimum attention à ses faits et gestes. Sauf qu'elle avait évidemment prévu que sa meilleure amie fasse de même et qu'elle apprenne de ses erreurs. Astride avait vaguement entendu parler d'une certaine retenue que lui avait donné le professeur Londubat à la suite de quoi la serdaigle avait mis les voiles et était revenue à la civilisation que plusieurs jours plus tard avec exactement la même expression que celle qu'elle affichait actuellement. Donc, ça voulait dire qu'elle avait un aveu à faire ou en tout cas que quelque chose lui faisait honte et qu'elle n'osait plus se regarder en face ou regarder sa meilleure amie en face. Une chose était sûre, ça ne promettait rien de bon pour cette conversation. Astride allait certainement mettre de longues minutes à lui extirper des informations même si elle était presque sûre d'y parvenir. La poufsouffle se demandait si c'était parce qu'elle connaissait Hecate depuis des années ou pas, mais elle avait toujours l'étrange impression que sa meilleure amie était la pire menteuse de la terre. Elle arrivait en général à savoir si elle lui dissimulait quelque chose ou non, simplement grâce à ses expressions de visage et en l'occurrence il faudrait vraiment qu'elle retravaille celle-là parce que ça sentait le mauvais secret à des kilomètres à la ronde. Après, la sixième année ne pensait pas encore avoir la science infuse, elle était peut-être simplement victime d'une grosse crise de paranoïa qui lui faisait croire complètement n'importe quoi. La serdaigle lui dirait qu'il ne se passait rien que sa rentrée avait été merveilleuse et qu'elle sentait bien qu'elle aurait ses ASPICs sans aucun problème. Enfin, c'était presque impossible sachant qu'Hecate n'aurait jamais autant confiance en elle mais Astride préférait nettement se rapprocher de son second scénario que du premier qu'elle avait pu envisager. Le meilleur moyen pour en avoir le cœur net était très certainement de poser la question, chose que la poufsouffle n'allait pas se priver de faire.

« Oh ! La meilleure des préfètes ! Ça fait longtemps que je ne t'ai pas vue, tu m'as manquée. Je vais bien, je pense que j'aurais dû choisir un peu de moins de cours pour ma sixième année mais c'est pas grave, je gère. Et toi, ça va ? T'as une tête bizarre, je te connais, t'as un truc à me dire, t'as la tête de la nouvelle « Tyler » de l'infirmerie. »

La nouvelle Tyler n'aurait pourtant pas dû l'affecter autant. A seize ans, il n'était pas anormal qu'Hecate chercher à s'intéresser un peu plus aux garçons d'autant plus qu'il ne lui faisait manifestement pas lâcher ses bouquins de cours. Tant qu'elle restait la même élève assidue et appliquée qu'elle avait été pendant toute sa scolarité, il n'y avait aucune raison pour qu'elle ne s’octroie pas le droit de vivre un peu comme toutes les filles de son âge et qu'elle tombe amoureuse d'un garçon par exemple. Sauf que franchement, avec le choix qu'elle avait à l'intérieur de l'école, il avait fallu qu'elle choisisse le pire serpentard possible. Il n'y avait pas pire que Tyler, il avait voulu lui faire des misères alors qu'ils étaient aux Trois-Balais et qu'il ne la connaissait même pas. Si encore elle lui avait dit des choses à ne pas dire, pourquoi pas, mais elle avait été simplement son petit jouet l'espace d'une soirée et ça l'avait probablement beaucoup amusé. Et ensuite, toujours par amusement mais aussi par vengeance, il avait tenté de la tuer pendant le bal d'Halloween et pour le coup, c'était quand même beaucoup moins drôle. Certes, Hecate n'avait rien eu à se reprocher là-dedans, elle ne savait probablement pas ce que préparait son nouvel amoureux et si elle l'avait su, elle aurait probablement catégoriquement refusé d'être sa cavalière, tout du moins Astride l'espérait fortement. Mais ça avait dû lui prouver qu'il ne fallait surtout pas trainer avec ce genre de personnes. La poufsouffle lui avait d'ailleurs fait promettre de ne plus chercher à le revoir après leur conversation à l'infirmerie et même si elle ne savait pas encore si elle avait tenue sa promesse, elle ne doutait pas un seul instant que sa meilleure amie ait écouté ses sages conseils sur ce coup-là. En plus, Tyler s'était fait virer de l'école peu de temps après ce qui avait quand même du être un réel soulagement pour la serdaigle. A moins que.... Etait-il possible que Tyler ait cherché à la revoir quand même ? Après tout, elles avaient peut-être passé un mois de vacances ensemble, mais elles n'avaient presque pas été en contact durant le deuxième, et Hecate et elle ne s'étaient pas revues depuis la rentrée. Libéré de ses obligations scolaires l'ancien serpentard avait peut-être essayé de la retrouver et il y avait fort à parier qu'il y serait parvenu, c'était un jeune homme dangereux capable de beaucoup de choses pour parvenir à ses fins. Mais dans ce cas, la serdaigle l'avait probablement viré sans même écouter ce qu'il avait à lui dire, elle n'avait donc rien à se reprocher. Si elle s'en voulait ça ne pouvait être que parce qu'elle n'avait pas encore osé en parler à Astride, c'était seulement ça, il n'y avait absolument rien d'autre. La jeune fille n'était pas vraiment convaincue et elle commençait légèrement à craindre ce qu'Hecate allait bien pouvoir répondre à sa question, il fallait simplement espérer que rien de grave ne lui était arrivé pendant ces fameuses vacances et dire qu'elle ne lui avait même pas envoyé un hibou pour le savoir ! Elle avait trop l'habitude qu'elles passent le trajet en train ensemble à se raconter leurs vacances pour y penser. Mais maintenant que sa meilleure amie était préfète, elle ne pouvait plus rester dans le train avec elle, malheureusement. Tant pis, il n'était jamais trop tard pour bien faire, Hecate allait certainement bien vouloir lui faire part de ce qui la tracassait à l'heure actuelle.

" J'ai un peu de temps libre, je pensais qu'on pourrait déjeuner ensemble... enfin, si tu n'es pas trop surchargée. "

Surchargée ? Elle ? C'était malheureusement un doux euphémisme. Astride croulait sous les devoirs et avait la nette impression de ne jamais en voir la bout. Déjà, en cinquième année elle trouvait que le rythme était assez compliqué à tenir d'autant plus que les BUSEs se rapprochaient encore et toujours plus vite, sauf que maintenant c'était encore pire que tout ce qu'elle avait pu imaginer. Les élèves choisissaient en général un peu plus de la moitié des matières qu'ils avaient étudié pendant leur année scolaire précédente ce qui leur permettait aisément d'augmenter leur charge de travail dans celles qui restaient. Sauf que ce n'était pas du tout ce qu'avait fait la poufsouffle. Les devoirs à faire en quidditch ne lui avait jamais pris trop de temps, simplement une journée complète par semaine puisqu'elle faisait souvent une demi-journée d'entrainement le week-end et que la partie théorique ne lui prenait en général pas trop de temps, mais elle se rendait compte maintenant que gagner une journée n'était pas du tout suffisant. Depuis le début de l'année, elle s'était endormie un nombre incalculable de fois à la bibliothèque et avait vraiment beaucoup de mal à trouver un vrai rythme pour ses cours. Elle devait aller de l'un à l'autre au pas de course et elle sautait bien souvent la pause déjeuner ce qui ne lui arrivait jamais en général. C'était d'ailleurs ce qu'elle s'était apprêtée à faire encore aujourd'hui ce qui rendait délicat le choix qu'elle devait faire maintenant. Soit elle acceptait de manger avec sa meilleure amie ce qui impliquait qu'elle prolonge sa soirée de travail d'une heure ou deux et donc que sa nuit serait beaucoup trop courte qu'elle l'espérait soit elle refusait et partait se noyer dans le boulot pour reprendre les cours le ventre vide. Les deux solutions avaient leurs avantages et leurs inconvénients. Astride avait un peu plus de mal à se concentrer le ventre vide et devoir ingurgiter tout un tas de nouvelles informations balancées par les professeurs alors qu'elle n'avait rien mangé depuis le matin n'était pas facile, pas du tout même. Du coup, elle avait plus de travail personnel à effectuer après puisqu'elle n'avait pas pu faire fonctionner sa concentration aussi bien qu'elle ne l'aurait souhaité. Elle était donc prise dans un véritable cercle vicieux dont elle n'espérait pas sortir si facilement. Cependant, pour le coup, sa meilleure amie lui avait fait une proposition intéressante. C'était l'occasion pour elle de s'arrêter un peu, de souffler, de penser totalement à autre chose et elle savait qu'elle en avait bien besoin. Cette proposition tombait donc juste au bon moment et même si sa conscience et la tonne de travail qui l'attendait lui hurlaient en cœur de ne pas se laisser tenter, elle avait bien envie de le faire quand même.

« Oui, si tu veux. Je suis un peu débordée et je pense pas pouvoir trop trainer mais ça fait longtemps qu'on a pas discuté alors ça serait avec plaisir. »

Ne pas accorder ne serait-ce que sa pause déjeuner à sa meilleure amie sous prétexte que sa quantité de travail ne lui permettait pas, était absolument hors de question. La poufsouffle n'avait jamais eu une vie sociale particulièrement développée, alors si en plus elle mettait ses rares amis de côté, elle se retrouverait très vite toute seule, bien trop vite même.

" Oh... C'est... le marc de café. Il indiquait un signe étrange ce matin, du coup j'ai perçu ça comme un mauvais présage... je sais, je suis un peu superstitieuse, mais ne t'en fais pas, ça n'a rien de bien grave, on s'en fiche. Tu as du mal ? Ça devrait aller mieux ensuite, le début de la sixième année n'a rien d'amusant, d'autant plus avec autant de cours... "

Du café ? C'était pour cette raison qu'elle faisait cette tête de trois pieds de long ? Eh bah, elle devait être drôlement superstitieuse alors. Astride ne s'en formalisa pas plus que ça. Sa meilleure amis avait toujours été un peu étrange tout comme elle de toute façon, il n'y avait rien de mal à ça. Petite, elle avait pris l'habitude de consulter l'horoscope à chaque fois que sa mère ramenait le journal et le prenait toujours en compte dans la façon dont elle organisait sa journée. C'était sans doute un peu étrange, elle le reconnaissait sans aucun problème, mais elle se fichait éperdument de ce que tout le monde pouvait penser d'elle du moment qu'elle était sûre et certaine de ne prendre aucun risque. La poufsouffle avait toujours eu peur d'un tas de trucs et qu'un journal pas très fiable lui donne en quelque sorte une sécurité ne pouvait que l'aider à faire taire les angoisses qui l'envahissaient quasiment en permanence. Au moins, elle savait que si l'horoscope lui déconseillait de sortir de chez elle, il faudrait qu'elle ouvre un de ses nombreux bouquins et s'apprête à passer la journée entière dans la maison familiale. Pareil lorsqu'on lui disait qu'il valait mieux éviter une longue conversation avec un des membres de sa famille pour éviter de provoquer une dispute. Elle n'hésitait pas une seule seconde à faire croire à ses parents qu'elle était malade pour éviter de devoir partager les repas en famille et ainsi respecter des indications dont elle ne savait pratiquement rien. Maintenant qu'elle savait qu'elle était une sorcière, les choses avaient un petit peu changé. Les cours de divination lui avaient ouvert les yeux sur tout un tas de superstitions qu'elle avait juste là crues réelles, et même si lorsqu'elle voyait une échelle, elle ne pouvait jamais s'empêcher d'en faire le tour de peur qu'il lui arrive quelque chose d'horrible, elle arrivait plus ou moins bien à gérer ses angoisses sans avoir besoin de se référer à ce que lui conseillait un bout de papier. Ce n'était pas toujours facile et quand Astride était confrontée à une mauvaise journée, elle avait toujours tendance à se dire que ça ne serait pas arrivé si elle avait pris la peine de lire le journal le matin-même. Cependant, elle résistait assez bien à la tentation d'autant plus qu'elle n'avait jamais d'horoscope sous la main, ce qui l'aidait à tenir le coup. Mais lorsqu'elle passait des vacances chez elle et qu'elle en profitait pour se rattraper au niveau des nouvelles moldues, elle avait beaucoup de mal à s'empêcher de retomber dans ses anciens travers. Alors forcément, elle ne pouvait que comprendre Hecate, mais elle trouvait quand même qu'elle avait l'air un peu trop angoissée pour quelqu'un qui craignait qu'une petite bricole lui tombe sur la tête. La poufsouffle avait tendance à s'inquiéter pour sa meilleure amie à chaque fois qu'elle attrapait un minuscule petit rhume, alors savoir qu'elle était tracassé par quelque chose ne lui plaisait pas du tout.

« Le café ? Tu fais cette tête d'enterrement rien que pour ça ? T'es vraiment bizarre parfois. C'était quoi comme signe ? » Demanda la jeune fille sans se départir de son sourire. « Non, t'inquiètes pas, je m'en sors. Ça ne me dérange pas de travailler beaucoup, j'ai dû délaisser les livres que j'avais apporté pour m'amuser, rien de grave. »

Et puis même si elle avait dû arrêter de manger et de dormir rien que pour pouvoir travailler, elle l'aurait fait sans aucune hésitation. Pour l'instant, elle n'avait dû sacrifier que quelques minutes de sa pause et elle espérait très fortement ne pas avoir à faire plus que ça. De toute façon, comme lui disaient si justement ses parents, même si ça la réussite était importante, il n'y avait pas que ça qui comptait dans sa vie et il était normal qu'elle cherche à consacrer du temps à ses amis et à sa famille. Enfin, dans son cas, elle parvenait assez bien à combiner les deux. Ses parents ainsi que ses frères et sœurs ne vivaient pas avec elle ce qui lui assurait de ne pas à être dérangé dans ses devoirs. Elle n'avait qu'à leur consacrer quelques minutes par semaine pour qu'ils soient contents de recevoir de ses nouvelles, c'était on ne pouvait plus parfait. Pour ce qui était de ses amis, elle avait la chance de toujours tomber sur des élèves aussi studieux qu'elle ou presque, ce qui lui permettait d'organiser de longues journées de travail. Elle ne négligeait donc que très rarement, voire jamais ses études et ne s'en portait que mieux. Des heures passées à faire autre chose que travailler correspondait souvent à du temps perdu pour la jeune fille même si elle s'accordait forcément des pauses pour ne pas craquer. Contrairement à ce que beaucoup pourraient croire, elle restait un être humain comme les autres et elle avait des limites qu'elle ne dépassait que très rarement. En période d'examen par exemple, il lui arrivait souvent de se mettre à pleurer sur ses bouquins parce qu'elle avait passé de trop longues heures à travailler et que sa tête était totalement incapable d'intégrer la moindre information supplémentaire. Dans ces moments-là, elle savait pertinemment qu'il n'était pas très intelligent de continuer à bosser, mais elle ne pouvait s'empêcher de croire que ses notes dépendaient des dernières minutes qu'elle aurait passées à relire ses cours encore et encore jusqu'à les connaître par cœur. Elle les connaissait déjà, évidemment, vu le nombre d'heures qu'elle passait dans ses bouquins, mais elle avait toujours l'impression qu'elle pouvait les oublier juste avant de passer devant ses examinateurs. C'était sans doute son pire cauchemar, d'ailleurs. Se retrouver devant un enseignant, qu'il lui pose une question et qu'elle soit totalement incapable de lui répondre. La jeune fille appréhendait en permanence d'être confrontée à ce mauvais rêve, mais fort heureusement ça ne lui était encore jamais arrivé. Malheureusement, il lui restait encore de longues années d'études devant elle, et il y avait de fortes chances pour que ça lui arrive au moins une fois dans sa vie. Cependant, Astride espérait peut-être pouvoir changer en grandissant. Elle avait beau être assez mature pour son âge, elle avait bien souvent l'impression de redevenir un gamine flippant parce qu'elle pouvait potentiellement être grondée. Alors que quand elle grandirait, elle n'aurait plus trop l'occasion de s'entendre dire ce qu'elle devait dire ou faire par une tierce personne, ce serait à elle de choisir ce qu'elle devait faire quand elle devait le faire, et elle avait hâte d'atteindre cette période. Les punitions l'avaient toujours motivé à travailler plus, mais elle était convaincue de pouvoir bosser quand même sans que cette menace plane au-dessus de sa tête. La poufsouffle se trouvait quand même plutôt zen en ce début d'année, elle avait peut-être un peu l'impression de se noyer, mais elle le prenait plutôt bien et se surprenait à ne pas paniquer totalement. Enfin, ce n'était peut-être que passager. La discussion qu'elle s'apprêtait à avoir avec sa meilleure amie la ferait peut-être changer d'avis sur la question, même si elle espérait que ça ne serait pas le cas.

" Génial. Avec tout ce qu'on a à faire, je comprends que ce soit difficile à gérer... Tu as cours cet après-midi ? "

Si elle avait cours... Astride avait l'impression de passer sa vie dans des salles de classes. Tous les cours s’enchaînaient à une vitesse folle, et elle peinait à trouver du temps pour se poser tranquillement à la bibliothèque. A bien y réfléchir, ça faisait un bout de temps qu'elle n'avait pas vu Hecate en dehors des cours. La jeune fille ne l'avait pas encore vraiment réalisé jusqu'ici. Elle était assez occupée en règle générale et peinait à trouver un peu de temps pour elle, alors elle ne pensait que très rarement à la dernière fois elle avait vu ses amis que ce soit en cours, en dehors des cours, ou pendant qu'elle dormait. Elle savait pertinemment que beaucoup des personnes qu'elle avait l'habitude de côtoyer finiraient pas lui en vouloir de se montrer si peu présente dans leur vie, mais pour le moment, elle était bien loin de s'en soucier. Et dire que dans le train pour revenir à Poudlard, elle était déjà en train d'échafauder de nouveaux plans pour rendre sa vie sociale un peu plus mouvementée que d'habitude. Elle voulait passer du temps avec Gabriel, Hecate et Bonnie, et peut-être même rencontrer de nouvelles personnes si elle en avait l'occasion. Mais pour le moment, elle avait à peine le temps de voir ses trois meilleurs amis, ce n'était pas pour en plus tenter de faire connaissance avec les personnes qui se trouvaient dans la même maison qu'elle. Pourtant, en revoyant Anabela dans le train, elle avait fini par se dire qu'elle avait été idiote de ne jamais tenter de connaître la jeune fille. D'accord, c'était quelqu'un de particulièrement renfermé et elle aurait probablement eu du mal à en faire son amie, mais ce n'était pas pour autant qu'elles devaient rester de simple connaissances jusqu'à la fin de leur scolarité, si ? La poufsouffle n'avait pas l'impression d'être en bonne voie pour se lier d'amitié avec ses colocataires. A croire qu'avec les Maddox, elle n'aurait jamais de bonnes relations. Pourtant, elle avait tenté un début de réconciliation avec Alexander, mais elle n'était pas sûre et certaine d'avoir bien réussi son entreprise. En vérité, elle s'était tout simplement dit que ça ferait plaisir à Hecate de savoir ses deux meilleurs amis en bons termes, mais maintenant, elle n'en était plus tout à fait sûre. Que se passerait-il si elle réussissait à reprendre contact avec Alex mais qu'il n'y avait que des disputes entre eux ? La serdaigle se retrouverait toujours entre eux deux sans pouvoir se résoudre à avoir sa propre opinion sur le sujet. Dans ce cas-là, il aurait sans doute mieux valu qu'elle ne tente pas d'arranger les choses, ça aurait au moins évité tout un tas de conflit. Mais pour le moment, ils n'avaient même pas encore tenté de se revoir, ils avaient donc tout le temps de voir si leur amitié était réparable ou non. Et puis, au pire, ils étaient assez intelligents pour décider de tout simplement tout arrêter s'ils n'arrivaient définitivement pas à s'entendre, et ils pourraient au moins se vanter d'avoir essayé.

« Oui, je suis sûre que si les professeurs pouvaient nous rajouter des heures de cours pendant la nuit, ils le feraient. Quelle bande de tyrans ! D'ailleurs, la nouvelle en Étude des runes est carrément flippante, je travaille ses cours plus que les autres tellement j'ai peur qu'elle me passe un savon. »

En vérité, Astride travaillait tous ses cours plus que n'importe quel élève lambda, mais elle ne semblait même pas s'en rendre compte tant elle avait l'impression de se noyer en permanence dans ses devoirs. Jusqu'ici, elle ne s'en sortait pas trop mal même si elle avait l'impression que ce n'était pas du tout le cas. Si elle continuait dans cette voie-là pendant toute l'année, il y avait de fortes chances pour qu'elle s'en sorte merveilleusement bien, mais ça ne faisait que commençait et malheureusement rien ne lui disait que ça allait durer.

" Un... un accident, je crois bien. Comme quoi, je devrais peut-être éviter les entraînements cette semaine. Mais c'est vrai que nous avons du travail en abondance... l'année dernière je me suis aussi demandée si j'avais réellement bien fait de garder tous ces cours optionnels, mais finalement on finit par s'y faire. "

La jeune fille dut se retenir de ricaner pour ne pas vexer sa meilleure amie. Elle trouvait trop étrange de voir Hecate dans cet état simplement à cause d'un signe qui lui annonçait apparemment un accident. Son amie avait l'air d'hésiter en parlant de celui-ci, peut-être parce que c'était quelque chose de plus grave et qu'elle ne voulait pas l'inquiéter. Est-ce qu'il était possible qu'un simple signe lui annonce sa propre mort ? La poufsouffle en doutait fortement, ça paraissait tellement invraisemblable, mais elle ne pouvait s'empêcher de se demander ce qui pouvait mettre son amie dans un état pareil. Elle était persuadée que rien n'allait lui arriver, mais elle ne pouvait pas s'empêcher de s'inquiéter quand même. Comme quoi, on avait beau avoir très envie de savoir ce que l'avenir pouvait bien nous réserver, il était un peu effrayant de l'apprendre. Encore, si on apprenait qu'on allait se marier, avoir des enfants et un métier qu'on aimerait, ça allait. Mais Astride n'aurait pas aimé savoir qu'il ne lui restait que dix années à vivre parce qu'elle allait tomber gravement malade et qu'elle n'en guérirait jamais. Pourtant, savoir ou pas de quoi son avenir serait fait ne changerait rien à la façon dont sa vie allait se dérouler, mais elle ferait probablement moins d'efforts pour parvenir à ses objectifs si elle savait déjà qu'elle allait forcément les remplir plus tard. Et puis, la jeune fille refusait de croire que son avenir était déjà inscrit plus tard, c'était sans doute un peu ridicule et un peu trop cliché, mais elle aurait aimé savoir qu'elle était la seule à pouvoir choisir son destin. Si elle travaillait bien, elle attendrait son objectif professionnel, si elle draguait des garçons en permanence, elle aurait certainement la joie de ne pas finir seule jusqu'à la fin de ses jours. C'était parce qu'elle faisait des choix qu'elle parviendrait à devenir la fille qu'elle aurait aimé être, tout simplement. Si on pouvait être sûr de ce qui allait nous arriver par la suite, il aurait suffi de s'asseoir dans un fauteuil et d'attendre tranquillement que ce qu'on avait pas planifié se réalise quand même d'une façon ou d'une autre. Alors finalement, Hecate avait peut-être raison lorsqu'elle parlait de laisser tomber les entrainement de quidditch cette semaine. Elle aurait au moins la chance de ne rien laisser aux hasards, sauf qu'il y avait des tonnes de façon de se blesser, elle pouvait tomber dans les escaliers et se faire une entorse, avoir séché les entrainements ne lui aurait servi strictement à rien. Astride commençait à croire que sa meilleure amie était un peu trop douée pour se prendre la tête pour rien. Ou alors, c'était elle qui s'imaginait bêtement que sa meilleure amie était plus angoissée qu'elle en avait l'air. De toute façon, ça n'avait aucune importance, elle était trop contente de voir Hecate pour chercher midi à quatorze heure. Elles allaient enfin pouvoir profiter d'une conversation des plus amicales et ça allait lui faire beaucoup de bien, elle en était tout à fait convaincue.

« Oh, voyons Hecate ! » Déclara-t-elle théâtralement en levant les yeux au ciel. « Tu sais très bien que ça ne veut rien dire du tout. Tu as pu te tromper, ce n'est qu'un simple signe, tu ne vas pas modifier ton emploi du temps rien qu'à cause de ça ! »

Et dire qu'elle se permettait de trouver Hecate trop angoissée, c'était un peu l'hôpital qui se moquait de la charité. Astride avait toujours eu peur de tout et n'importe quoi. Lorsqu'elle partait de chez elle, elle craignait qu'il arrive quelque chose à ses frères et sœurs, alors que pourtant, ils avaient la chance de rester avec ses parents et restaient relativement en sécurité. Lorsqu'elle était en vacance chez elle, elle avait l'impression de perdre de précieuses heures de travail et de négliger ses études. Évidemment, elle ne pensait pas trop à ça pendant les vacances d'été puisqu'elle savait pertinemment que tous les élèves étaient rentrés chez eux et profitaient d'un repos bien mérité, mais c'était toujours le cas lorsqu'elle se permettait de passer Noël en famille. Pourtant,l'année dernière, elle avait regretté amèrement son choix de rester à l'école, simplement parce qu'elle n'avait jamais voulu que sa famille pense être négligée et qu'elle détestait restait neuf mois entiers sans avoir de braies nouvelles. Elle savait que c'était sans doute stupide, que sa famille comprenait certainement qu'elle ait envie de privilégier ses études et qu'elle ne les oubliait pas pour autant, mais c'était plus fort qu'elle, elle se faisait du souci pour tout et n'importe quoi sans pouvoir s'arrêter d'imaginer que ses erreurs étaient toujours dues uniquement à sa négligence et son manque de discernement. Tout le monde passait le plus clair de son temps à essayer de la rassurer, et ça marchait pendant quelques minutes. Après une conversation avec un ami ou une amie, elle parvenait à se dire qu'elle faisait les bons choix, qu'elle réussissait parce qu'elle avait étudié et qu'elle avait raison d'agir de cette façon, mis peu de temps après, elle était bien obligée de se laisser à nouveau envahir par le doute, c'était presque une évidence pour la jeune fille. A croire que tout était source d'angoisse pour la poufsouffle, elle n'avait jamais eu aucune envie de voir tout comme une source de problèmes, mais c'était pourtant le cas. Il n'y avait pas une seule journée dans sa vie ou quelque chose ne venait pas la mettre dans tous ses états, ça en devenait complètement ridicule. Seulement, à force de stresser pour tout et n'importe quoi, la poufsouffle finissait par être sur les nerfs en permanence, elle n'avait aucune envie de devenir une personne complètement angoissée, tellement qu'il lui semblait avoir presque quarante ans, même si elle avait seize ans. Sa meilleure amie s'en accommodait peut-être parce qu'elle la connaissait depuis longtemps, mais elle ne voulait pas donner une mauvaise image d'elle à toutes les personnes qu'elle risquait de rencontrer durant le reste de sa scolarité. L'année prochaine, Hecate ne serait plus là pour la supporter lorsque personne n'y arriverait, il lui fallait donc réussir dès maintenant à se comporter comme une adolescente de son âge. Astride ne savait pas si c'était possible, mais elle se devait d'essayer. Elle avait peut-être la chance d'avoir des amis pour le moment, mais rien ne lui disait que ce serait encore le cas plus tard, et elle ne pouvait pas se permettre de perdre ce qu'elle avait enfin réussi à avoir. La jeune fille avait toujours détesté la solitude, elle n'avait aucune envie de la retrouver, ni maintenant, ni jamais.

" Oh oui, c'est certain, elle fait froid dans le dos. Rien à voir avec son mari... il y a aussi ce travail sur les plantes en botanique, j'ai commencé à m'y mettre mais j'ai l'impression de ne pas avancer, je ne sais vraiment pas ce que je pourrais faire d'une ronce... "

Astride craignait elle aussi de rater son devoir de botanique. Comme chaque année, leur professeur leur donnait un devoir qu'ils avaient à faire tout au long de leur scolarité et qu'ils devaient réussir puisque la note comptait énormément dans son cursus et donc dans son avenir. Jusqu'ici, la poufsouffle n'avait jamais eu aucun problème pour lé réussir, elle parvenait à s'investir autant que possible et réussissait en général à obtenir les résultats escomptés, mais chaque année, elle trouvait un peu plus stressant de devoir réussir ce fameux devoir. Comme d'habitude, elle avait commencé à faire des recherches dès qu'elle avait su sur quoi allait porter l'exercice elle s'y était attelée sans perdre une minute, désireuse de faire ses preuves encore une fois. Le professer Londubat semblait l'avoir pris sous son aile à présent, mais Astride refusait d'imaginer que c'était un du. Rien ne l'obligeait à faire ça pour elle, il voulait qu'elle réussisse et il s'investissait à fond dans un cursus qu'il n'avait pas besoin de suivre. Son professeur avait déjà très bien réussi sa vie, il n'avait rien à prouver à personne et n'avait pas à angoisser pour ses élèves. Ils devaient être tous capables de s'en sortir dans la vie, il pouvait se contenter de leur donner de bon cours avant de les lâcher complètement sans chercher à savoir ce qu'ils pourraient bien devenir. Sauf que manifestement, il pensait que son rôle ne s'arrêtait pas à celui de simple enseignant. Il avait visiblement envie d'être là pour la jeune fille et elle lui en était infiniment reconnaissante. Personne n'avait jamais fait quelque chose d'aussi gentil pour elle. Ses maitresses d'école avaient simplement voulu qu'elle arrête de venir en cours quand elles avaient constaté ses problèmes d'intégration. La petite fille avait eu de la chance de tomber un jour sur un si bon enseignant, elle n'avait aucune envie de le décevoir et ses bonnes notes étaient censé prouver au professeur Londubat qu'elle le remerciait pour ses efforts et qu'elle voulait continuer dans la voie qu'elle avait choisi quel que soit le prix que ça lui coûte. Elle avait également la chance d'être entourée par toute sa famille, ce n'était pas donné à tout le monde. Astride savait qu'elle devait en profiter un maximum. Mais cette année, la botanique n'était probablement pas la matière qu'elle allait le plus étudier. Son professeur d’Étude des runes lui faisait bien trop peur pour qu'elle se permette de négliger ses cours. D'habitude, les runes ne la passionnaient pas forcément. Elle adorait cette matière, comme tout ce qu'il y avait dans ses études, en général, mais elle savait aussi qu'elle pouvait avoir des préférences et que sa quantité de travail en dépendait toujours très fortement. Jusqu'ici, elle avait essayé d'être à peu près équilibrée par rapport à sa charge de travail, mais en rencontrant son nouveau professeur, elle avait tout de suite su qu'elle allait mettre le paquet dans cette matière. Elle ne devait surtout pas se laisser dépasser et avoir ne serait-ce qu'une seule mauvaise note. Elle préférait être liquéfiée sur place immédiatement plutôt que d'avoir à affronter la colère de la nouvelle enseignante. Au moins, Hecate semblait penser comme elle, elle n'était pas seulement paranoïaque. C'était déjà bon à savoir.

« C'est sûr, au moins, je sais déjà que je vais beaucoup travailler mes runes cette année, je suis sûre qu'elle a des poupées miniatures de nous dans son bureau et qu'elle plantera des épingles dedans à chaque mauvaise note. » Plaisanta la jeune fille. « J'ai le même problème que toi avec ce devoir, mais j'essaie d'y consacrer un peu de temps à chaque fois que je prends une pause dans mon travail. On pourrait faire ça ensemble, j'ai déjà commencé mon journal, je pourrais te montrer, si ça peut t'aider. »

Astride était vraiment ravie de retrouver sa meilleure amie. Malgré le fait qu'elles partagent un nombre incalculable de cours cette année, elle avait l'impression de ne pas avoir le temps de lui accorder un moment et elle n'aimait pas ça du tout. Les deux jeunes filles avaient toujours eu l'habitude de prendre quelques minutes pour papoter dans une journée alors que là, c'était tout juste si elles parvenaient à prendre le temps de s'accorder un regard en sortant d'un cours. Une chose était sûre, il fallait à tout prix que ça change. Sa masse de travail attendrait, elle avait envie de rester avec sa meilleure amie un peu plus longtemps que d'habitude et ce n'était pas sa culpabilité qui l'en empêcherait. Au pire, elle se rattraperait dans la nuit, elle ne faisait rien de mal, vraiment rien. A force de se le répéter, la poufsouffle parvenait presque à s'en convaincre.

" Je sais bien, mais mieux vaut être trop prudent que pas assez, non ? Imagine que dans une seconde vie j'ai choisi de ne pas les écouter et que je suis tombée de mon balai de plusieurs dizaines de mètres de hauteur et brisé les côtes... au moins, de cette manière, j'évite les regrets. "

La poufsouffle restait légèrement sceptique face à cette réaction qu'elle jugeait un peu disproportionnée et plutôt étrange chez son amie de toujours. Bien sûr, qu'Hecate soit légèrement, voire même très, superstitieuse n'était pas une nouveauté pour Astride qui s'y était fort bien accommodée, mais son amie venait de dépasser une limite jamais franchie auparavant. Alors quoi ? Elle allait organiser toute sa vie en fonction des dangers qui pourraient potentiellement se retrouver sur son chemin ? C'était complètement absurde. Tout le monde bravait des dangers au jour le jour, que ce soit en traversant la rue, en descendant les escaliers, en mangeant simplement un repas. Il y avait des risques de chûtes, d'étouffement. Sans parler des risques que l'on courrait sans même bouger de son lit, comme une crise cardiaque ou une rupture d'anévrisme. Ça ne ressemblait vraiment pas à la serdaigle de sembler si tendu pour si peu de chose. Que ça la préoccupe un peu, elle pouvait encore le comprendre, un mauvais présage arrivait à tout le monde et ce n'était pas un moment très agréable à passer, mais au point d'en être totalement obnubilée, ça elle avait beaucoup de mal à le concevoir. Et puis, elle s'était moquée gentiment d'elle, croyant réussir à dérider la jeune fille et à la faire rire un peu et au lieu de ça, la nouvelle préfète avait pris un air encore plus penaud, comme si elle venait de la terrasser à coups d'injures. Bon, d'accord, elle exagérait peut-être, mais elle s'étonnait de ne pas avoir réussi à prévoir la réaction d'une jeune fille pourtant si carré et prévisible qu'Hecate. Dans la tête de la poufsouffle, cette caractéristique n'était absolument pas perçue comme un défaut, bien au contraire. Elle associait beaucoup ce trait de personnalité à un sens point de l'organisation et une façon de se dépatouiller des situations les plus inextricables de façon logique, rapide et efficace. L'avantage de ce genre de personne était de pouvoir tout planifié à l'avance sans qu'aucun imprévu ne vienne se mettre en travers de leur route. Certains pourraient dire que ça rendait le quotidien beaucoup trop monotone et qu'il devait être agaçant de ne jamais laisser placer à un minimum de folie dans sa vie de tous les jours. Mais Astride avait toujours eu l'impression qu'imprévu rimait avec désillusion, et même si ce n'était absolument pas le cas, elle en était toujours restée persuadée, refusant tout net de modifier son programme même devant les supplications d'un groupe d'amis ou de sa famille au grand complet. Elle n'était pas formatée pour changer son programme en deux temps trois mouvements. Bien sûr, il pouvait lui arriver de modifier légèrement son organisation, mais il fallait qu'elle soit prévenue plusieurs jours à l'avance, histoire de tout transformer correctement et de pouvoir se plier à cet imprévu le cœur léger. La jeune fille avait toujours eu l'impression que sa meilleure amie était un peu comme ça elle aussi et c'était bien pour ça qu'elle arrivait bien souvent à prévoir ses réactions et à savoir exactement quand elle allait bien et quand ça allait moins bien pour la serdaigle. Sauf que là, elle s'était visiblement trompée. Soit cette histoire était un peu louche et elle l'avait seulement vaguement évoquée sans rentrer dans de sordides détails pour ne pas l'effrayer, soit elle se faisait des idées. Après tout, c'était totalement possible, elle avait toujours eu le don de se prendre la tête pour un rien. La meilleure façon de le savoir était sans nul doute de poser la question.

« Tu as sans doute raison. » Capitula Astride qui restait légèrement dubitative. « Tu es sûre que ça ira quand même ? Je te trouve bien tendue pour une histoire de signes. »

Et puis après tout, comme elles avaient toutes les deux leur carte de membres pour le club des superstitions en tout genre, la jeune fille ne pouvait que comprendre Hecate. Elle ne regrettait pas sa question, même si elle se trouvait de plus en plus bête au fur et à mesure que le temps passait, mais elle avait l'impression de l'avoir posée pour rien et que la réponse était déjà presque écrite sur le front de sa meilleure amie. Tant pis, ça ne changerait pas beaucoup de d'habitude. La poufsouffle posait en permanence des tonnes de questions, s'inquiétant pour un rien, même pour des choses qui ne la concernaient absolument pas. Il lui arrivait de piquer de vraies colères quand tout le monde semblait se désintéresser de l'objet de son inquiétude bien qu'elle soit à l'origine une fille plutôt calme et que les esclandres ne fassent absolument pas partie de son quotidien. Même bébé Astride ne se faisait pas beaucoup remarquer. Elle pleurait peu, n'avertissant ses parents qu'en cas de nécessité absolue et tout le monde savait que lorsqu'elle versait quelques larmes, c'était forcément qu'il y avait quelque chose qui n'allait vraiment, vraiment, vraiment pas, tant il était inhabituel d'entendre le son de sa voix. En grandissant, la jeune fille ne s'était pas arrangée. Elle restait plutôt effacée, laissant le privilège à son grand frère et à son cadet de mettre le bazar, rendant totalement folle sa maman. Au moins, sur les trois zouaves qu'elle devait élever, l'une d'entre eux ne lui donnait pas de fil à retordre. Elle pouvait coller sa fille chérie devant une feuille de papier et l'abandonner dans une pièce, sans avoir à constater les dégâts lorsqu'elle revenait une demi-heure plus tard. Ce n'était pas du tout le cas d'Arthur. Le papier peint des escaliers était tapissé par ses œuvres d'art et sa mère avait dû bien vite mettre les feutres hors de portée de ses petites mains pour limiter ses élans de créateur. Bien souvent, quand ses deux garçons lui rendait la vie dure, elle prenait Astride comme exemple et leur demandait d'imiter leur sœur. Ça avait le mérite de rendre la poufsouffle extrêmement fière d'elle et de son comportement, ce qui n'était pas rien. Mais évidemment, ça pouvait avoir de sacrés inconvénients. Elle recevait beaucoup moins d'attention puisqu'elle n'avait pas besoin d'une surveillance constante, elle avait de gros problèmes lorsqu'il s'agissait de s'imposer un peu, ce qui lui avait joué des tours un certain nombre de fois et avait une répartie au ras du sol. C'était sans doute le plus agaçant, surtout pour une jeune fille de seize ans confrontée en permanence à des tas d'autres adolescents. Elle restait bien souvent la bouche grande ouverte, sans savoir quoi répondre devant les moqueries, les railleries, ou les agressions répétées de ses petits camarades. Elle y avait eu droit lorsqu'elle s'était mis à dos la moitié des serpentards et s'était contenté de marcher la tête basse, rangeant sa fierté bien au chaud dans ses chaussettes. Tant pis, elle préférait de toute façon être invisible que de se frotter aux autres élèves, de peur que ça finisse très mal pour elle. Ses parents ne cessaient de lui dire que ça lui jouerait des tours pour son avenir professionnel, mais la poufsouffle n'en avait rien à faire. C'était un trait de sa personnalité qu'elle ne pouvait pas modifier, ou au prix de douloureux efforts qu'elle n'était pas encore prête à fournir.

" Oh, ne t'inquiète pas, je devrais m'en sortir. Mais on peut toujours travailler ensemble, on comparera nos résultats comme ça, puis on pourra se faire part de nos idées respectives. Quelle plante est-ce que tu as choisie, déjà ? "

En toute honnêteté, la poufsouffle fut un peu déçue du refus de sa meilleure amie. Elle voyait là l'occasion de s'amuser un peu, de profiter de la présence de la serdaigle à ses côtés et surtout de lui faire profiter des cours particuliers que le professeur Londubat lui donnait histoire de la remercier pour toute l'aide qu'elle lui avait apporté au fil des années. Bien sûr, elle savait que ce petit coup de pouce ne servirait pas à grand-chose si elle devait le comparer avec tout ce qu'Hecate avait pu faire pour elle et à quel point elle avait été présente durant sa scolarité. Mais quand même, pour une fois qu'elle pouvait faire de même, c'était plutôt positif et ça chance venait de lui passer sous le nez sans qu'elle ne puisse faire quoi que ce soit pour tenter de la retenir. De toute façon, elle n'avait pas vraiment à être déçue pour ça, sa meilleure amie semblait quand même partante pour qu'elles travaillent ensemble et ça promettait d'être particulièrement amusant de faire ce devoir ensemble. Heureusement que personne ne pouvait voir ce qu'il y avait dans sa tête, la plupart des élèves auraient été choquées de la voir se projeter avec autant d'enthousiasme dans un devoir de botanique fastidieux. Ce genre de travail réalisé sur une année entière prenait du temps et de l'énergie. En plus, Astride avait une nette tendance à choisir totalement au pif son objet d'étude, c'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle eut un peu de mal à le retrouver lorsque son amie lui posa la question. En vérité, elle se fichait éperdument sur quoi elle pouvait bien travailler, tout était aussi intéressant à l'observation et elle adorait trouver chaque fois de nouveaux moyens d'impressionner son professeur avec sa passion pour la botanique et des petites astuces attrapées au hasard dans les bouquins qu'elle avait lus. Il était toujours amusant de prendre une plante qu'elle n'avait jamais étudié et de partir de zéro pour réaliser un devoir dont elle pourrait être fière. Là encore, ses camarades ne comprendraient certainement pas qu'elle passe à la serre une fois par jour pour rendre visite à ses bébés, noter quelques observations dans son carnet et repartir vers sa salle commune le cœur léger. C'était sans doute un peu stupide. D'autant plus que sa plante n'évoluait pas de façon significative en l'espace d'une journée, mais c'était un moyen pour elle de se rassurer quant à l'avancement des opérations et elle n'aurait loupé ce court moment pour rien au monde. En plus, ça lui permettrait de rendre au professeur un journal de bord très complet et très détailler qui, elle l'espérait fortement, lui permettrait de comprendre clairement ce qu'elle voulait faire et avec un peu de chance de lui attribuer la note maximale. D'accord, les enjeux n'étaient pas aussi conséquents que ceux de l'année précédente, mais avoir une mauvaise note en botanique était pour Astride un désastre à mettre sur le même plan qu'un séisme, un ouragan ou un tsunami dévastateur. C'était une matière qu'elle adorait et dans laquelle elle ne pouvait pas se permettre le moindre échec, c'était vital pour la jeune fille. Maintenant, il restait à attendre la fin de l'année et le verdict du professeur Londubat. Seul son opinion comptait vraiment.

« Ça me ferait vraiment plaisir de donner un coup de main à mon modèle pour une fois. » Avoua la jeune fille, les joues légèrement rosissantes. « J'ai choisi le lys, un peu au pif en vérité, je me fiche de mon objet d'étude, tout m'amuse. Ce devoir est vraiment génial ! »

Et elle le pensait vraiment. Hecate avait toujours représenté la personne à laquelle elle voulait ressembler. Elle tentait de copier ses moindres faits et gestes, lui demandaient des conseils sur les devoirs, les notes qu'elle avait eu l'année passée. Si un de ses résultats était en-dessous de celui de la serdaigle, elle entrait dans une phase intense de dépression et ne cachait pas sa fierté lorsqu'elle réussissait à l'égaler. La botanique devait être la seule matière dans laquelle elle pouvait se prétendre assez à l'aise pour proposer un coup de main en cas de besoin, dans tous les autres domaines, elle devait bien avouer que sa meilleure amie était bien plus douée qu'elle et elle en était absolument ravie. Elle avait trouvé la perle rare, personne ne pouvait rêver avoir une fille aussi formidable qu'elle comme amie, c'était incontestable.

" Tu... tu as raison, je me prends probablement trop la tête pour rien. Sinon... raconte-moi, tu as pu parler avec Bonnie ? Elle paraissait pour le moins assez occupée l'année dernière, et j'imagine que la sixième année ne doit pas arranger les choses... Et tu as eu l'occasion de revoir Gabriel ? "

Hecate, se prendre la tête pour rien ? Oui, c'était bien son genre, elle était très douée pour créer des problèmes là où il n'y en avait pas forcément. La jeune fille craignait en permanence de mal faire, et elle pesait le pour et le contre, à chaque fois qu'elle devait faire un pas en avant, de peur de ne pas choisir la bonne voie. C'était tout à son honneur, au moins elle était presque sûre de toujours agir de la meilleure des façons, et contrairement à la poufsouffle, elle pouvait se vanter de ne pas avoir fait de mauvais choix dans sa vie, puisqu'elle agissait en permanence avec beaucoup de sagesse. C'était un exemple que la jeune fille aurait dû suivre, elle en avait bien conscience., mais elle semblait en être malheureusement incapable. Elle n'était pas douée pour être quelqu'un de raisonnable. Pourtant, elle avait cru pendant un moment qu'elle pouvait être en permanence une fille sage, capable de faire les bons choix et d'établir un ordre parfait dans ses priorités. Mais elle devait bien reconnaître que ce n'était pas tout à fait le cas. Elle avait été bien incapable de se remettre à ses devoirs après ce qu'il lui étai arrivé avec Enzo, alors qu'elle était proche de sa période d'examens. Elle n'avait pas non plus été capable de se remettre de la punition donnée par Alexander alors qu'elle était totalement méritée. Il l'avait surpris en train de sortir des bouches d'aération des toilettes des filles, ça méritait une sérieuse réprimande. Mais elle n'avait pas été capable de ne pas lui en vouloir, elle avait préféré se dire qu'il était le seul responsable des malheurs qui s'étaient abattus sur elle alors qu'en réalité, elle était maîtresse de ses propres actes, et si jamais ça venait à déraper c'était entièrement de sa faute. D'accord, elle ne pouvait pas savoir comment se finirait toute cette histoire lorsqu'elle avait décidé de raconter à Flynn ce qu'elle savait. Mais en vérité, elle l'avait fait pour lui prouver qu'elle avait des connaissances, qu'elle était une fille intelligente et qu'elle était tout à fait capable de retenir le contenu des énormes livres qu'elle lisait. Elle avait voulu l'influencer, le faire devenir comme elle parce qu'elle pensait que sa façon de voir les choses était la meilleure, qu'un élève qui ne se montrait pas aussi studieux qu'elle avait complètement gâché son existence. C'était très égocentrique et prétentieux de sa part, de prétendre être au-dessus de tout le monde. Au lieu de se vanter comme elle l'avait fait, elle aurait sans doute dû essayer de comprendre le jeune garçon, sa façon de voir les choses et pourquoi il avait choisi ce mode de vie. Peut-être qu'elle ne parviendrait jamais à se dire qu'il agissait d'une bonne façon, tout simplement parce que ça ne lui convenait pas, à elle, mais elle pouvait au moins faire preuve de tolérance et arrêter de penser que son cerveau lui permettait de se placer au-dessus de tout le monde. Autrefois, elle n'était pas comme ça et Astride commençait à penser que ses bonnes notes lui montaient à la tête. Il était hors de question qu'elle devienne une de ces personnes infâmes qui croyaient tout savoir mieux que tout le monde. Le point positif dans tout ça était qu'elle restait consciente de ses erreurs. Elle n'avait plus qu'à les réparer maintenant. C'était sans doute plus facile à dire qu'à faire, mais ça valait le coup d'essayer.

« Comme d'habitude. » Déclara Astride en souriant. « Non, j'ai pas encore eu l'occasion de les voir, ni l'un, ni l'autre, mais j'espère que je pourrais. Je les aime bien tous les deux, ça serait dommage que je ne puisse pas passer du temps avec eux. »

Et elle disait vrai, elle avait toujours beaucoup aimé Bonnie, il aurait été dommage qu'elles soient obligées de couper définitivement les ponts simplement parce qu'elles n'avaient pas été fichues de trouver un moment pour se voir. Une chose chagrinait encore Astride, elle avait l'impression de se donner du mal pour revoir ses amis, alors qu'eux, de leur côté, se fichait éperdument qu'elle soit là ou pas. C'était sans doute stupide de sa part, elle n'était pas dans leur tête, et s'ils avaient autant de travail qu'elle, ça pouvait leur passer par la tête sans qu'ils ne trouvent le temps de mettre leur idée en application. Après tout, c'était la même chose pour la jeune fille. Elle avait essayé de voir ses amis, mais elle était la seule à le savoir, dès qu'elle avait essayé de les croiser à un endroit ou à un autre, elle avait lamentablement échoué, se rendant compte un peu trop tard que Bonnie avait sans doute cours et qu'elle ne risquait pas de la croiser aujourd'hui à la bibliothèque. Pourtant avec tous les cours qu'elles avaient en commun, elles auraient sûrement dû connaître leurs emplois du temps respectifs par cœur, mais ce n'était visiblement pas le cas. Il était absolument hors de question pour Astride de camper devant la salle commune des serpentards. Elle n'avait rien contre eux en règle générale, mais elle avait eu trop de mauvaises expériences pour vouloir tenter le diable une nouvelle fois, il était absolument hors de question qu'elle tende le bâton pour se faire battre, pas cette année alors qu'elle voulait prendre un maximum d'avance pour réussir à passer en septième année avec un niveau scolaire exceptionnel. D'accord, ce n'était pas une bonne raison pour négliger ses amis, mais si ça devait lui permettre d'éviter les ennuis, ça ne la dérangeait pas tant que ça en fin de compte. Elle était sûre que Bonnie comprendrait. Elle était du genre à prendre peur à la moindre petite difficulté et elle fuyait les ennuis comme la peste. Mais ça aurait été quand même plus simple que ce soit son amie qui vienne faire le pied de grue devant la porte de sa salle commune qui avait en plus le mérite de ne pas être très loin de la bibliothèque. C'était exactement le même problème pour Gabriel, à ceci près qu'elle n'était même pas sûre qu'il ait envie de la voir. Après tout, ils avaient discuté seulement pendant quelques minutes ça ne voulait pas dire qu'ils allaient devenir les meilleurs amis du monde. Elle avait un peu tendance à mettre la charrue avant les bœufs, elle pensait bien faire, elle voulait faire avancer les choses entre eux, simplement parce qu'elle avait vu que leurs caractères collaient plutôt bien ensemble. La jeune fille n'avait pas envie de trop s'emballer et d'être déçue par la suite, mais c'était plus fort qu'elle. Elle voulait revoir le gryffondor et elle espérait fortement qu'il pense la même chose qu'elle. C'était tout à fait possible, elle n'était pas une horrible garce, il n'y avait donc aucune raison pour qu'il souhaite la fuir à tout prix. Enfin, ça s'était ce qu'elle se disait, la réalité était peut-être toute autre. Mais évidemment Astride préférait reléguer cette option dans une zone peu explorée de son cerveau.

" D'accord, pourquoi ne pas accepter ton aide dans ce cas-là. Mais tu sais, je suis bien loin de la mériter... C'est formidable de te voir aussi emballée par la perspective d'un devoir, je suis sûre que nous allons bien nous amuser, ça nous donnera l'occasion de se voir un peu en dehors des cours. "

La jeune fille n'était pas sûre du tout de pouvoir approuver son amie. Bien sûr qu'elle méritait d'avoir un peu d'aide vu toute celle qu'elle lui apportait en permanence, c'était même une évidence pour la poufsouffle qui commençait à se dire qu'elle profitait beaucoup trop de son amitié avec la préfète. Elle avait une meilleure amie incroyablement gentille qui ne refusait jamais de lui donner un cours de rattrapage quand elle le lui en demandait un. La plupart du temps, Astride n'avait même pas besoin de ces explications, elle les utilisait plus pour se rassurer que pour progresser, mais Hecate ne lui avait fait aucune remarque à ce sujet. Elle aurait pu lui dire qu'elle n'avait pas besoin de cette sécurité supplémentaire, qu'elle devait se contenter d'écouter les professeurs et de réviser ses propres cours. Qu'Astride soit un peu moins flippée lui aurait épargné des heures de travail supplémentaires, et elle n'avait jamais rien fait pour s'en débarrasser. C'était sans doute un peu stupide de la part de la poufsouffle de vouloir à tout prix aider la jeune fille alors que celle-ci ne lui avait rien demandé. Mais bon, la botanique restait son domaine de prédilection, et elle était presque sûre de pouvoir répondre à toutes les questions qu'Hecate était susceptible de lui poser. Avec un peu de chance, elle parviendrait vraiment à l'aider pour son devoir et sa meilleure amie lui en serait reconnaissante. Enfin ça, c'était la version fantasme de son projet. Il lui paraissait nettement plus réelle qu'Hecate n'ait finalement rien à lui demander, qu'elle parvienne toute seule comme une grande à réaliser son projet et qu'au final, ce soit elle qui vienne lui poser des questions. Il ne fallait pourtant pas qu'elle s'abaisse à ça. En botanique, Astride avait toujours eu de bons résultats, elle avait confiance en elle et en ses capacités. Elle ne s'était jamais dit qu'elle pouvait être plus mauvaise dans cette matière, elle s'éclatait toujours autant à chaque cours, restait pendue aux lèvres de son professeur comme s'il était en train de lui lire la Bible. Pourtant, elle n'était pas spécialement croyante, ses parents l'étaient et ils lui avaient transmis une partie de ses croyances, mais elle n'était pas une illuminée qui passait ses journées plongées dans les paroles divines dans l'espoir de trouver un sens nouveau à sa vie. Alors il était hors de question qu'elle perde toute cette belle confiance en se rendant compte que sa meilleure amie était encore une fois plus brillante qu'elle dans une matière. Elle savait pertinemment qu'Hecate était plus brillante qu'elle et ça ne l'avait jamais dérangé puisque ça n'influençait pas pour autant sa réussite scolaire. Au contraire, elle avait toujours été fière de se rendre compte que la serdaigle était une fille extrêmement intelligente et elle n'hésitait pas à crier sur tous les toits à quel point elle admirait Hecate, mais elle n'était pas sûre de ne pas se retrouver déstabilisée s'il s'avérait que même dans une matière où elle excellait, elle avait de bons conseils à lui donner. Même sans avoir l'esprit de compétition, il était bon de se sentir supérieur parfois.

« Bien sûr que si tu la mérites ! Tu es toujours là quand j'ai besoin d'aide ! » S'exclama-t-elle. « C'est vrai qu'on a de la chance d'avoir plein de cours en commun cette année, ça va nous permettre de passer un peu plus de temps ensemble, et comme c'est la dernière fois qu'on est ensemble à Poudlard, c'est plutôt bien de pouvoir profiter pleinement de nos derniers moments. »

Astride ne voulait pas paraître trop négative, elle n'avait pas envie de rappeler que bientôt, des kilomètres les sépareraient, seulement, elle ne parvenait pas à sortir cette idée de la tête. Chaque fois qu'elle planifiait quelque chose à faire en compagnie de sa meilleure amie, elle ne pouvait s'empêcher de se dire que c'était peut-être les derniers moments qu'elles passaient ensemble. C'était un peu bête de sa part, d'autant plus qu'il leur restait encore plusieurs mois à passer ensemble. Elles n'allaient pas être obligées de se quitter demain, il ne servait à rien de se faire du souci à ce sujet dès maintenant. D'autant plus que ça ne changerait absolument rien à l'issue de cette année. Quoi qu'il arrive, elles seraient obligées de se séparer, mieux valait profiter au maximum des instants qu'il leur restait.

« Oh, lorsque tu auras moins de travail tu pourras toujours essayer de renouer avec eux, on pourrait même leur proposer de se joindre à nous pour une prochaine sortie à Pré-au-Lard si tu veux. »

Hecate avait particulièrement hâte qu'elle retrouve ses amis, c'était plutôt étrange. En avait-elle juste assez qu'elle se repose sur elle en permanence ? Il était vrai qu'elle était assez souvent dans ses pattes. Elle n'avait absolument aucune envie de devenir un pot de colle, elle préférait très franchement voir Hecate un peu moins souvent et réussir à vivre loin d'elle si elle voulait qu'elle reste son amie, mais ce n'était certainement pas pour ça que la serdaigle se montrait aussi pressante. Il devait bien y avoir une autre raison. Peut-être voulait-elle qu'elle se décoince un peu ? Pourtant Astride avait l'habitude d'avoir bien évolué depuis qu'elle était entrée à Poudlard. Durant son enfance, comme elle n'allait pas à l'école, elle n'avait pratiquement aucun ami et elle passait ses journées à travailler, lire ou jouer avec ses deux grands frères. Lorsque Ariane était née, elle avait passé des heures à regarder comment sa mère s'en occupait. Elle aimait particulièrement lui donner un biberon ou tout simplement la regarder gigoter dans tous les sens alors qu'elle essayait d'attraper les jouets qu'elle lui tendait. Alors forcément, ce n'était pas avec ça qu'elle développait une vie sociale particulièrement enthousiasmante. D'autant plus que ses grands-frères ne pouvaient pas toujours l'aider. Eux, en revanche vivaient leur vie de gamins comme ils le devaient. Ils allaient à l'école tous les matins où ils retrouvaient leurs petits camarades. Ils ne rentraient pas toujours à la maison directement après les cours puisqu'ils avaient bien souvent des activités extérieures comme le football, les échecs pour son frère ainé ou ce genre de choses. La plupart du temps, elle se retrouvait donc seule chez elle à attendre que tout ce petit monde veuille bien rentrer à la maison. Ça ne la dérangeait pas plus que ça, elle en avait pris l'habitude et elle préférait très nettement se cacher des autres enfants plutôt que d'affronter leurs moqueries blessantes. Mais en recevant sa lettre pour Poudlard, Astride avait bien pris conscience qu'elle devait se bouger un peu pour réussir à s'intégrer. Ne pas être acceptée par les autres élèves signifieraient très certainement sept années d'intense solitude et elle ne voulait pas que ça arrive. Fort heureusement, la jeune fille avait eu de la chance. Dès son arrivée à la table des poufsouffles, elle avait reçu un accueil enthousiaste et chaleureux, tous ses doutes s'étaient évanouis. Très rapidement, elle avait développé une belle amitié avec Hecate et elle s'était demandé comment elle avait fait pour vivre si longtemps sans véritables amis. C'était pourtant une chose très importante dans sa vie. Elle avait conscience que sa famille serait toujours là pour la soutenir, mais qu'elle ne lui faisait pas pour s'épanouir pleinement dans sa vie d'adolescente. Maintenant, elle avait tout ce qu'elle avait toujours voulu avoir et elle se demandait vraiment pourquoi Hecate voulait la pousser à avoir toujours plus. Mais après tout, elle était sa meilleure amie et elle la connaissait mieux que personne, la poufsouffle avait toujours pris ses conseils très au sérieux et si elle pensait qu'elle devait renouer au plus vite avec ses deux amis, c'était sans doute ce qu'elle allait faire. De toute façon, ça ne la forçait à rien, elle en avait vraiment envie et elle espérait avoir l'occasion de les retrouver tous les deux.

« Oui... C'est peut-être une idée, mais je suis sûre que si je me laisse un peu de temps, je finirais par les recroiser de toute façon. » Dit-elle, vaguement convaincue par ses paroles. « Et puis si c'est pas le cas, c'est pas très grave. Je m'en sors très bien sans eux. »

Ce n'était pas complètement faux. Certes, elle avait très envie de les revoir, elle avait plus que hâte de les retrouver, de leur demander comment s'étaient passé leurs vacances d'été et ce qu'ils attendaient de l'année présente. Ils pourraient discuter, peut-être travailler ensemble et échanger leurs impressions sur les résultats des BUSEs et les professeurs qu'ils avaient cette année. Certes, c'était quelque chose qu'elle pouvait faire avec Hecate, elle n'était pas sa meilleure amie uniquement lorsqu'il fallait parler de ses problèmes et de ses heures de colles, mais elle aimait se dire qu'elle pouvait parler à plusieurs personnes dans Poudlard et non pas à une seule. Elle n'avait pas énormément d'amis, mais elle ne tenait pas à devenir celle de toute l'école, elle n'aimait pas tout le monde de toute façon, tous les élèves étaient très différents les uns des autres. Seulement, elle avait été enfermée pendant onze ans chez elle alors elle avait envie de s'ouvrir un peu aux autres, même si elle savait que baisser sa garde pouvait lui apporter autant de bonheur que de déceptions. Au moins, elle aurait été sûre et certaine d'avoir testé plus de choses qu'elle ne l'avait jamais fait durant son enfance. Cependant, elle devait bien admettre qu'elle n'avait pas forcément besoin d'avoir autant d'amis derrière elle. Elle avait démarré l'année sans chercher à voir personne parce qu'elle avait beaucoup trop de travail et qu'elle ne pouvait pas se le permettre. Lorsqu'elle avait un instant de libre, elle en profitait pour monter son balai et décompresser. Dans les nuages, elle ne pensait à aucune autre chose qu'à voler. Et pourtant, elle avait toujours détesté être loin au-dessus du sol si ce n'était pas pour prendre l'avion. Son vertige était particulièrement handicapant et elle préférait de loin rester bien au chaud sous ses couvertures avec une couette. Astride savait pertinemment qu'elle n'était pas vraiment faite pour être très entourée, et elle s'en fichait un peu. La jeune fille voulait être ce qu'elle aimait être et non pas ce que les autres voulaient qu'elle soit. Sarah était la première à se moquer d'elle parce qu'elle était une personne assez renfermée, qu'elle n'évoluait pas dans les couloirs en espérant que tous les regards se posent sur elle et que tous les élèves lui disent bonjour avec un grand sourire. Elle se fichait éperdument des vêtements qu'elle portait, elle n'avait pas envie de devenir une grande championne de mode, elle n'avait aucune envie qu'on la regarde fixement lorsqu'elle arrivait quelque part. C'était affreux d'être la cible de tous les regards, elle ne savait franchement pas comment Sarah pouvait le supporter. Elle était sûre qu'on la traitait de ringarde et que la plupart des personnes populaires du château détournaient les yeux lorsqu'elle arrivait dans une pièce de peur qu'elle vienne leur parler et leur fasse perdre plusieurs échelons de popularité d'un seul coup. Pas étonnant que Sarah ne veuille pas être vue en sa compagnie. Elle avait bien raison, elle risquait de ternir sa réputation de poufsouffle et même Astride craignait la réaction de ses propres amis s'ils apprenaient quel genre de fréquentations elle avait. Mais bon, elle n'avait pas à s'en soucier, elle n'avait pas revu la préfète non plus, alors forcément, personne ne risquait de les surprendre ensemble.

« Oui, tu as raison. Tu sais, tu vas me manquer, toi. J'espère qu'on aura l'opportunité de se revoir quand je ne serais plus là, même si forcément ça ne sera plus aussi régulier qu'avant. »

La conversation ne partait pas dans la bonne direction. Elle ne voulait absolument pas parler d'un potentiel départ de son amie, c'était beaucoup trop dur à envisager pour le moment. Bien sûr, elles seraient obligées de se quitter un jour ou l'autre et Astride ne souhaitait absolument pas avoir à l'envisager maintenant. Elle ne pouvait pas se permettre de prier pour qu'Hecate rate ses examens et continue sa scolarité à Poudlard en même temps qu'elle. Elle avait juste envie qu'elle réussisse et qu'elle soit heureuse dans sa vie professionnelle comme dans sa vie sentimentale ou dans sa vie de tous les jours, plus généralement. En plus, ça ne servirait qu'à leur donner une année de plus pour être ensemble, elles seraient de toute façon obligées de se séparer pour leurs études supérieures. Et puis, la séparation aurait forcément quelque chose de positif. Enfin, la jeune fille avait du mal à l'envisager pour le moment, elle ne se rendait compte que du vide immense que créerait certainement l'absence de la serdaigle dans sa vie, mais en y réfléchissant un peu, elle trouverait peut-être une bonne raison. D'ailleurs, elle en voyait une assez évidente. Jusqu'ici, elle s'était toujours dit que la présence de la jeune fille dans sa vie lui suffisait qu'elle n'avait pas besoin de voir beaucoup plus loin, qu'elle était heureuse comme ça et qu'elle ne voulait absolument rien d'autre pour être heureuse. Sauf qu'en l'absence d'Hecate et avec le vide que ça représenterait, elle voulait absolument pouvoir retomber sur ses pattes. Là pour le coup, il deviendrait impératif qu'elle fasse de nouvelles connaissance qu'elle se rapproche de ses anciens amis pour réussir à supporter l'absence de la serdaigle. Mais elle ne voulait surtout pas se servir de ses autres amis comme de bouche-trou parce qu'elle se sentait un peu seule, c'était bien pour cette raison qu'elle voulait réussir à renouer avec la plupart d'entre eux dès la rentrée scolaire. Elle n'était pas assez affreuse pour simplement chercher à revoir Bonnie juste parce qu'elle avait besoin de ne pas être seule, la vipère ne méritait pas ça. En plus, elle avait déjà ses propres amis, il paraissait évident qu'elle prendrait mal ce rapprochement totalement intéressé. Elle se souvenait bien de la dispute qu'elles avaient eu au début de l'année précédente, et elle n'était pas pressée de revivre la même chose. La jeune fille avait été légèrement traumatisée par cette altercation, elle n'avait pas imaginé que Bonnie aurait pu lui parler sur ce ton, et maintenant qu'elle le savait, elle prendrait des gants avant de parler. Ce n'était pas pour autant qu'elle lui cacherait ce qu'elle pensait ou ce qu'elle avait fait, mais elle aurait sûrement un peu plus de tact lorsqu'elle lui parlerait.

« Bien sûr qu'on l'aura ! On se verra forcément de temps à autres, nos virées à Honeydukes seront toujours les mêmes, n'est-ce pas ? »

La jeune fille avait besoin d'être rassurée à ce sujet, et elle n'était pas sûre qu'Hecate puisse le faire. Après tout, elle avait été assez proche d'Elliott lorsqu'il était à Poudlard et depuis le début de l'année scolaire, elle n'avait plu aucune nouvelles de lui. Ils avaient échangé deux ou trois lettres en début de l'année et elle ne pouvait même pas dire si elle avait été ou non celle qui avait mis fin à leur correspondance. Une chose était sûre, elle n'avait pas de nouvelles du jeune homme depuis un bout de temps et étrangement, ça ne lui manquait pas autant qu'elle l'aurait imaginé. Évidemment, elle aurait aimé qu'il reste à ses côtés, mais elle ne vivait pas aussi mal que ça le fait qu'il ne soit pas. Il fallait espérer que ce ne serait pas la même chose pour Hecate. Elle ne pouvait pas perdre sa meilleure amie.

" Je vois, de toute manière avec le boulot que tu as en ce moment... Au fait, tu as eu des nouvelles des anciens septièmes années récemment ? "

La jeune fille se sentit automatiquement démasquée suite à cette question. Sur ses gardes, elle hésita longuement avant de prendre la parole. Pourquoi voulait-elle savoir un truc pareil ? Avait-elle entendu parler d’Enzo ? Evidemment, le poufsouffle était la première personne à laquelle elle avait pu penser. Elle avait passé une bonne partie de l’été à craindre qu’il révèle leur petit secret à la terre entière. Certes, il avait avoué ne vouloir le dire qu’à Elliott, mais elle n’avait pas du tout confiance en ce garçon. Après tout, qui était assez bête pour se balader dans l’école avec un filtre d’amour à la main, c’était complètement stupide et même si elle n’avait pas été franchement intelligente en buvant dans cette petite bouteille sans savoir ce qu’il y avait à l’intérieur, elle était convaincue que tôt ou tard quelqu’un d’autre se serait fait à voir. Enzo n’était qu’un odieux pervers qui voulait se faire passer pour quelqu’un de gentil. Elle avait totalement raison de ne pas lui accorder ne serait-ce qu’une once de crédibilité, il ne la méritait absolument pas. Alors forcément, ça ne pouvait être que lui, il avait parlé et Hecate essayait maintenant de lui faire comprendre sans la brusquer qu’elle savait tout et qu’elle voulait lui en parler. Quelle honte ! La poufsouffle ne savait plus quoi dire, quoi penser, comment réagir… Elle aurait voulu s’enterrer dans un trou immédiatement pour ne pas avoir à écouter ce que la serdaigle avait envie de lui dire à ce sujet. Cependant, elle tâcha de reprendre son souffle et se racla la gorge, priant pour que le ton de sa voix ne trahisse pas ses émotions.

« Non, aucune, pourquoi ? » Demanda-t-elle en fronçant légèrement les sourcils.

Vraiment, elle ne comprenait pas pourquoi Hecate prenait un chemin détourné pour lui faire entendre qu’elle savait. Le mieux était d’arracher le pansement d’un coup sec, ça faisait mal, mais au moins, elle en était débarrassée. Sauf que… Peut-être avait-elle eu une conclusion un peu trop hâtive sur ce coup-là, enfin, elle n’en était pas sûre, mais maintenant qu’elle y réfléchissait un peu plus posément, elle se rendait compte qu’elle était totalement à côté de la plaque. Déjà, elle avait dit n’importe quoi, elle avait en effet eu des nouvelles d’Elliott depuis qu’il était parti de Poudlard, elle avait appris ce qu’il faisait de ses vacances et à quel dilemme il était confronté. Pourquoi s’était-elle empressée de démentir aussi sèchement ? La jeune fille s’en voulait affreusement de s’être montrée si stupide, mais tant pis, Hecate ne savait sans doute pas pourquoi elle réagissait ainsi, et avec un peu de chance, elle ne chercherait pas à comprendre. Rassurée par ce raisonnement, Astride se mit à chercher de quel septième année sa meilleure amie pouvait bien parler. Il y avait Elliott, certes, mais elle n’avait jamais eu l’impression qu’ils étaient spécialement proches, de vagues connaissances tout simplement, il était fort peu probable qu’elle cherche à le contacter. La seule personne probable là-dedans restait Alexander, vu qu’il était le seul septième année dont elle pourrait potentiellement avoir des nouvelles, mais Hecate était bien mieux placée qu’elle pour avoir entendu parler de lui, franchement, elle avait beaucoup de mal à comprendre.

« Attends un peu, quand tu parles de septièmes années, tu veux dire Alex ? Je vois pas pourquoi j’aurais de ses nouvelles et pas toi, c’est ton meilleur ami, je te rappelle et tu devais pas le voir à notre retour de New-York ? »

Astride avait l’impression de patauger dans la semoule. Il n’y avait aucune raison pour que la serdaigle lui demande des nouvelles de son meilleur ami, elle devait avoir totalement tort et elle se demandait déjà pourquoi elle avait pu formuler à haute voix une idée pareille. D’un autre côté, c’était plutôt pas mal, ça lui permettrait de noyer le poisson, histoire que sa remarque spontanée et très étrange passe le plus inaperçu possible. Toutefois, la poufsouffle ne voyait pas du tout ce qui aurait pu pousser Hecate à poser une telle question si ce n’était pas pour Alexander. Non, vraiment, il y avait baleine sous gravillon et elle était bien décidée à trouver ce qui clochait dans toute cette histoire. Les deux amis s’étaient-ils disputés ? Si oui, à quel sujet ? Ils étaient tous les deux particulièrement adorable, elle ne voyait pas franchement comment ils auraient pu trouver un sujet de discorde ou alors ils avaient presque dû le chercher volontairement. Enfin, elle n’était pas non plus dans la tête des deux jeunes gens et ne connaissait rien de leur amitié si ce n’était qu’ils tenaient beaucoup l’un à l’autre. Elle en était toujours un peu jalouse d’ailleurs, comme si le fait qu’Hecate apprécie une autre personne qu’elle pouvait supprimer un peu l’affection qu’elle pouvait avoir à son égard. Ce n’était pas pour autant qu’elle se réjouirait d’une potentielle dispute, loin de là, même, elle voulait voir son amie heureuse et elle serait forcément désolée d’apprendre que quelque chose n’allait pas, il ne restait plus qu’à savoir si c’était vraiment le cas.

" Je l'espère. Sincèrement.  J'ose espérer que la préparation de tes ASPICs ne t'empêchera pas de me retrouver à Pré-au-Lard lorsque j'y passerais. "

La préparation des ASPICs… Ca semblait étrangement loin pour le moment, alors qu’elle préparait ces examens depuis sa première année à Poudlard. Tout ce qu’elle faisait était dans le seul et unique but d’obtenir des résultats brillants afin de quitter l’école avec un dossier scolaire irréprochable. Cependant, elle s’était toujours dit que même s’il était utile de préparer sa sortie à l’avance, elle avait encore le temps de voir les choses venir. Mais maintenant, elle n’avait plus tant de temps que ça. Il lui restait moins de deux ans avant d’être catapultée dans la cour des grands et à son excitation se mêlait une certaine appréhension. Des milliers d’élèves étaient passés par là avant elle, ils avaient obtenus leurs examens et pris des chemins différents, certains devaient être particulièrement heureux à présent, d’autres peut-être un peu moins, mais tous s’étaient assis à un moment donné sur les bancs de l’école, à écouter des professeurs comme ceux qu’elle avait en ce moment. Il était rassurant de savoir que tous avaient survécus à cette épreuve, en tout cas, elle n’avait jamais rien lu à ce sujet. Il n’y avait pas de raison pour que tout ne se passe pas très bien pour elle à l’extérieur de l’université, qui plus était, elle retrouverait une bonne partie de ses amis, et même si elle quittait le château et la sécurité qu’il lui avait apporté, elle savait qu’elle aurait du soutien où qu’elle puisse aller que ce soit de la part de ses amis ou de sa famille qui l’avait toujours épaulée dans ses projets. Elle grandissait, elle en avait pleinement conscience à présent, il faudrait bien qu’un jour elle s’émancipe un peu.

« Oh non, certainement pas, je vais prendre un peu d’avance pendant l’été et tout se passera très bien, je te le promets. De toute façon, je pense que mes parents vont vouloir que je reste avec eux puisque je les ai abandonnés tout un mois… Enfin, on verra bien… Mais j’y crois vraiment. »

En tout cas, elle essayait de s’en convaincre tellement fort qu’elle finissait par entrevoir une lueur d’espoir qui devenait de plus en plus importante au fur et à mesure que le temps passait. Peu importait les obstacles auxquels elles se retrouveraient confrontés, elle les franchirait un à un sans aucune difficulté, elles étaient meilleures amies depuis six ans, ce n’était pas un peu de distance qui les arrêterait. C’était sans doute un peu trop utopique pour être vrai, mais pour le moment, Astride s’en contentait admirablement bien.

" Ah, mais non, pas du tout ! Je ne faisais pas du tout allusion à lui, rien à voir. Il y a beaucoup d'autres anciens septièmes années si je ne m'abuse, dont certains que tu connaissais beaucoup mieux que moi. Je voulais savoir si tu avais repris contact avec certains d'entre eux, c'est tout. Tout va très bien avec Alex. "

Certains qu'elle connaissait beaucoup mieux qu'Hecate ? Elle ne savait pas trop où la serdaigle avait pu pêcher une information pareille, mais elle n'avait pas du tout l'impression qu'elle ait vu juste pour le coup. Astride n'était qu'en cinquième année lorsque ses camarades de septième avaient mis les voiles, elle avait beaucoup moins de chance de se lier avec eux que sa meilleure amie qui avait quand même un an de plus qu'elle. Mais bon, peut-être faisait-elle simplement référence à Elliott, puisque à part lui, elle ne voyait pas de qui d'autre elle aurait pu vouloir parler. De toute façon, Hecate était vraiment très bizarre aujourd'hui, la jeune fille ne savait pas trop pour quelle raison et elle savait qu'il était souvent imprudent de mettre la serdaigle dos au mur lorsqu'elle tentait de garder son sang-froid ou en tout cas de faire croire qu'elle parvenait à le garder. Astride n'avait pas envie d'insister lourdement, elle connaissait trop bien Hecate et savait que sa curiosité mal placée pourrait lui faire plus de mal que de bien sur ce coup-là. Même si elle ne comprenait pas vraiment ce que pouvait bien avoir la jeune fille, elle n'avait pas l'intention de s'attarder sur le sujet. Elle voulait des nouvelles de l'ancien poufsouffle ? Eh bien elle allait lui en donner, même si elle doutait fortement que ça puisse vraiment l'intéresser.

« Elliott tu veux dire ? Il va bien, je crois qu'il hésite encore à délaisser la sorcellerie pour retourner à sa vie d'avant, mais s'il le fait, je crois qu'on ne perdra pas contact pour autant, je pourrais lui écrire, à moins qu'il me demande de sortir de sa vie, on verra. » Expliqua-t-elle à la jeune fille. « T'es vraiment bizarre aujourd'hui, je crois que tu stresses trop, tu devrais faire un peu plus attention à la pression que tu te mets sur les épaules. »

Hecate avait tendance à se mettre la pression pour tout et n'importe quoi, elle était bien placée pour le savoir. En plus, après avoir galéré, travaillé et fait tout son possible pour réussir, si un tout petit quelque chose venait contrarier ses plans, qu'elle en soit responsable ou pas, elle se mettait inévitablement à culpabiliser. Pauvre Hecate... Elle n'avait pas une vie facile en vérité, mais elle était la seule responsable du fardeau qu'elle s'obligeait à porter. Ça lui rappelait bizarrement le bal d'Halloween. Certes, sa meilleure amie y était allé avec Tyler en sachant pertinemment que le jeune homme n'était pas digne de confiance, mais elle n'aurait pas pu prévoir ce qu'il allait faire pendant ce fameux bal et elle n'avait pas à culpabiliser pour ce qu'il s'était passé. D'autant plus qu'Astride savait que c'était de sa faute, elle l'avait provoqué, humilié, elle savait que se rendre à ce bal était dangereux, mais elle l'avait fait quand même... La seule raison pour laquelle elle en avait voulu à sa meilleure amie était parce qu'elle n'avait pas eu le courage de venir la voir à l'infirmerie, mais c'était seulement ça, rien d'autre, elle n'était pas responsable des actes de ce crétin de Tyler, qui s'était d'ailleurs fait expulser pour son grand plaisir. Toutefois, elle savait aussi qu'il était inutile de tenter de la déculpabiliser, quand Hecate se reprochait quelque chose, elle était convaincue d'être en tort et il fallait se lever de bonne heure pour la faire changer d'avis.

« Bah du coup, puisqu'on en parle, elles étaient comment vos vacances ensemble ? Moins bien que notre mois à New-York, j'espère, je serais trop jalouse si tu as préféré ton été avec lui. » Plaisanta la poufsouffle. « Enfin, j'imagine que ça a dû lui faire plaisir de découvrir la Grèce, à moins qu'il y ait déjà été... ? Je m'en souviens même plus. »

Elle n'arrivait pas à croire qu'elles n'aient pas vraiment parlé du reste de leurs vacances. Bon, d'accord, c'était sans doute parce que les siennes avaient été d'une platitude absolue, elle était restée dans sa famille, à travailler quand elle arrivait à trouver la motivation, passant du temps avec ses frères et sœurs quand celle-ci refusait de faire son apparition. Ça avait été des vacances parfaites, mais elle doutait qu'Hecate se passionne pour le récit de bataille de tomates cerises pendant des pique-niques ou pour toute autre aventure palpitante qu'elle avait pu vivre dans le monde des moldus. La jaune et noir avait été heureuse de retrouver pendant le reste des vacances, la simplicité de sa vie d'avant. Elle ne se prenait pas la tête en essayant de jongler avec deux mondes, ne pratiquait pas la magie, elle redevait juste Astride Whitby, la petite moldue un peu trop timide qui avait du mal à se détacher de sa famille pour essayer de rencontrer d'autres gens. De toute façon, maintenant, elle ne voyait pas l'intérêt de se faire des amis en dehors du monde des sorciers. Elle devrait forcément leur mentir, et en plus, elle serait obligée de les quitter au début de l'année suivante pour retourner à Poudlard en trouvant une excuse bidon pour expliquer son départ. Le mieux était encore qu'elle reste en retrait par rapport à tout ça, mais quand elle serait étudiante, ça serait différent, elle avait hâte de voir si elle était capable de jongler avec adresse entre ses deux vies différentes.

" Oh, je comprends. Mais il n'y a pas de raison que ça ne puisse pas rester comme avant, on sera juste… un peu plus loin. Au moins tu pourras travailler sans problème, mais essaie tout de même de vivre un peu à côté. "

Un peu plus loin... Beaucoup trop loin, en vérité. Certes, Hecate pourrait certainement transplaner jusqu'à Pré-au-Lard où elles se retrouveraient de temps en temps, mais ce n'était pas comme si elles allaient réussir à se voir au moins une fois par semaine comme elles le faisaient en temps normal. Astride n'avait aucunement l'intention de se détacher de sa meilleure amie, loin de là, mais elle avait conscience que leurs entrevues seraient brèves et qu'il serait difficile de tenir la serdaigle au courant de tout ce qu'il se passerait dans sa vie. Ce n'était pas pour autant qu'elles ne resteraient pas de bonnes amies, loin de là, mais il leur faudrait prendre leur mal en patience en attendant de se retrouver pour que tout redevienne comme avant entre elles. Même si Elliott avait une moins grande place que la serdaigle dans sa vie, elle faisait déjà l'expérience avec lui de ce qu'était l'éloignement. Ils s'écrivaient, certes et ils avaient juré de se revoir, mais ce jour n'était pas encore arrivé alors que les cours avaient repris depuis un bout de temps tout de même. Astride commençait à douter qu'ils puissent se retrouver avant les vacances et encore, elle ne savait même pas s'il aurait du temps à lui consacrer pendant la période des fêtes. Après tout, c'était plus des fêtes familiales qu'autre chose et elle avait conscience de lui en demander beaucoup. Le jeune homme était très attaché à sa famille, ou en tout cas à ce qu'il considérait comme sa famille. Elle n'avait aucunement l'intention de le mettre face à un dilemme.

« Un peu... On va dire ça comme ça. Je ne voudrais pas être pessimiste, mais l'éloignement est quand même de taille, permis de transplanage ou non. Je vais devoir attendre les sorties à Pré-au-Lard pour pouvoir te voir, alors que là, je pouvais venir à la bibliothèque dès que j'avais envie de te parler. J'aimerais croire que rien ne changera entre nous, mais ce n'est pas vraiment le cas... On le sait. Mais je ferais tout mon possible pour te donner des nouvelles régulièrement et j'espère que tu feras pareil, je ne suis pas prête à perdre ma meilleure amie. »

Astride en avait tout simplement assez d'essayer de se persuader qu'elles se verraient aussi souvent que maintenant et qu'elles pourraient toujours être aussi proches qu'en étant toutes les deux à Poudlard. Ce n'était pas vrai, leur relation souffrirait forcément de l'éloignement même si elles essayaient de s'écrire le plus souvent possible. Hecate était la plus merveilleuse des meilleures amies et la jaune et noir savait qu'elle remuerait ciel et terre pour ne pas la perdre, mais l'année prochaine, ça ne serait plus pareil entre elles et il fallait qu'elle se fasse à l'idée avant d'y être confrontée.

" Elliott, c'est ça, son nom m'avait échappé. Oui, ça doit être ça… je me prends vraiment trop la tête pour ces ASPICs de malheur. "

Alors ça, c’était certain. Déjà qu’Hecate était une jeune fille très angoissée de nature, lorsqu’elle commençait à voir qu’une échéance d’examen se rapprochait à la vitesse de la lumière, elle était tout simplement intenable. Pour le coup, elle s’était bien trouvées toutes les deux, Astride comprenait parfaitement l’angoisse croissante de sa meilleure amie, même si vu de sa fenêtre, elle semblait totalement irréaliste, la serdaigle étant la fille la plus douée et la plus travailleuse qu’elle connaissait. Bon, évidemment, elle ne voyait pas les choses de cette façon, considérant certainement qu’une heure passée en dehors de ses bouquins était une heure perdue, mais après tout, c’était bien normal, si elle s’était simplement reposée sur ses lauriers, elle n’aurait jamais eu un niveau aussi excellent que celui dont elle pouvait se vanter maintenant et il aurait fallu qu’elle soit stupide pour ne pas se rendre compte. Astride était donc bien décidée à marcher sur les traces de la jeune fille et réussir brillamment ses examens de dernière année.

« Tu veux des nouvelles de gens dont tu ne connais même pas le nom ? T’es vraiment bizarre, toi. » Plaisanta la jeune fille. « Je te comprends tu sais, je panique déjà alors que j’ai encore un an devant moi. »

De toute façon, elle s’était habituée au côté étrange de la jeune fille. La plupart du temps, lorsqu’elle lui posait une question, qui, pour Astride, semblait totalement banale, elle regardait autour d’elle, prenant un air affolé, comme si elle avait l’impression qu’un piège était tendu droit devant elle sans qu’elle puisse l’éviter. La poufsouffle s’y était habituée depuis le temps, elle savait pertinemment qu’Hecate réfléchissait toujours trop et analysait les moindres mots qui sortaient de sa bouche, elle ne s’en formalisait pas plus que ça, essayant tout de même, dans la mesure du possible, d’éviter de la faire paniquer en se montrant mystérieuse ou quoi que ce soit du même genre. L’avantage de connaitre Hecate sur le bout des doigts était qu’elle avait l’impression de pouvoir tout savoir sur la jeune fille avant même qu’elle prononce un mot. C’était une relation privilégiée qu’elle n’avait avec personne d’autre et qu’elle était ravie de connaitre. Jamais elle n’avait imaginé pouvoir un jour compter autant sur quelqu’un, mais visiblement, elle avait eu tort et c’était bien la première fois qu’elle était heureuse d’avoir commis une erreur.

" Oh, c'était… sympa. C'était la première fois qu'il venait. Mais ne t'en fais pas, je t'assure que notre voyage est le meilleur que j'ai pu faire de toute ma vie selon mon bon souvenir ! "

La première fois, seulement ? Astride aurait juré que ce n’était pas le cas, mais étrangement, l’apprendre la faisait jubiler, bien malgré elle. Alors comme ça, ils étaient tout de même un peu moins proches qu’elle avait pu l’être de sa meilleure amie pendant toutes ces années. De leur côté, elles étaient déjà allées chez l’une, ou chez l’autre, et même en voyage ensemble à l’autre bout du monde. D’accord, c’était probablement très mal de sa part de vouloir se comparer à Alex, c’était deux amitiés bien différentes et elle n’avait pas à se comparer au jeune homme. Mais elle l’avait tellement détesté à un moment donné qu’il était bien difficile pour elle de réussir à ne pas le voir pour une potentielle menace pour son amitié avec la serdaigle. Cependant, elle mettait un point d’honneur à ne rien laisser paraitre, se contentant de plaisanter de temps à autres sur le sujet et soutenant sa meilleure amie lorsqu’elle en avait besoin. Certains pourraient dire qu’elle était simplement une grosse hypocrite, mais Astride ne le voyait pas du tout comme ça. Elle voulait simplement être une bonne amie, voilà tout et elle faisait juste passer ses sentiments après.

« Ah, je préfère ça. J’ai hâte qu’on puisse refaire pareil, mais je ne crois pas que je pourrais cette année, mes parents voudront passer du temps avec moi avant la dernière ligne droite. »

Et elle les comprenait parfaitement. Elle était loin d’eux pendant toute l’année scolaire, ne revenant pas systématiquement auprès de sa famille pendant les vacances scolaires, afin de pouvoir travailler encore et toujours plus. Les vacances d’été de deux mois paraissaient donc bien courtes pour la jeune fille qui repartait bien souvent avec une grosse boule dans l’estomac et le sentiment d’avoir loupé un tas de choses importantes. Bien sûr, ça ne durait jamais longtemps et elle était toujours heureuse de retrouver sa deuxième maison, ses amis, et l’ambiance du château qu’elle aimait tellement. Cependant, avec l’été dernier où elle s’était octroyé un mois à New-York en compagnie de la serdaigle, elle avait négligé sa vie de famille et à seize ans, elle ne trouvait pas normal de couper le cordon, elle n’y était absolument pas préparée. Ces vacances avaient été les meilleures de sa vie, elle avait voyagé pour la première fois très loin de chez elle et en avait vraiment bien profit. Malgré ça, elle avait détesté voir son dernier mois de vacances passer à la vitesse de la lumière et bien qu’elle ait hâte de repartir une nouvelle fois, elle savait qu’une pause s’imposait.

" Je l'espère bien, je ne suis pas prête à te perdre non plus, tu sais. J'aime à croire que ce ne sera que pour un temps, quand on tu seras aussi à l'université on se verra bien plus souvent ! Il va être temps d'aller déjeuner, tu ne crois pas ? "

Suivant le regard de son amie, Astride aperçut de nombreux élèves qui prenaient tous la direction de la grande salle. Elles parlaient, elles parlaient, mais le temps continuait à filer et elles devaient bien revenir à la réalité. Elles allaient devoir manger en quatrième vitesse, discutant de tout et de rien entre deux bouchées avant de s’empresser de rejoindre leur salle de cours pour commencer une après-midi bien rempli. Ce petit train-train ne déplaisait pas à la jeune fille, bien au contraire. Elle avait trouvé son équilibre et ne voulait absolument pas le perdre, son quotidien était rythmé par une organisation quasi militaire, elle faisait tout pour ne pas perdre une seule seconde de sa journée et ne supportait pas un changement de programme de dernière minute. Certes, sa conversation avec Hecate n’avait pas forcément été prévue, mais elle ne regrettait rien. Quoi qu’il arrive, elle pourrait toujours trouver du temps pour sa meilleure amie et cette constatation la rassurait. Même loin d’elle, il n’y avait aucune raison pour que ça change.

« On ne sera sûrement pas dans la même branche, mais j’espère bien que tu me réserveras une place dans ta chambre, j’ai déjà prévu tout ce que l’on pourrait faire en tant que colocataires. » Expliqua-t-elle avec enthousiasme. « Oh oui, si on n’y va pas maintenant, on ne pourra même pas s’asseoir l’une à côté de l’autre. Je meurs de faim, en plus. »

Sur ces bonnes paroles, la poufsouffle prit la direction de la grande salle, souriant à sa meilleure amie qui la suivait de près. Cette conversation avait été un peu bizarre au départ, mais ça n’avait pas la moindre importance. Son secret était toujours bien gardé, et elle avait retrouvé sa Hecate, tout allait bien, dans le meilleur des mondes, donc.