Avoir un petit frère c’est être constamment inquiet, d’être en alerte à chaque signe alarmant. Quel que soit la situation, d’où que l’on vienne, tous les grands frères et grandes sœurs de ce monde ont connu cette préoccupation naturelle pour le bien-être de son cadet. Lena est une grande sœur très, et peut-être trop, protectrice. Même si elle-même a parfaitement survécu à sa première année à Poudlard, elle ne pouvait s’empêcher de penser que Justin vivait très mal ce changement brutal dans le monde de la magie. D’autant plus que des lettres anonyme menaçant les nés-moldus et toutes ces étrangetés avaient fait leurs apparitions, sans parler de la soirée de Saint-Valentin qui avait mystérieusement déplacée pour le lendemain. Si la soirée n’avait pas été décalée, tous les élèves seraient en ce moment même en train de boire des cocktails dans la Grande Salle décorée pour l’occasion. Ça avait légèrement dissuadé Lena d’y participer, mais lorsqu’elle a su que Justin y irait, elle s’était décidée à y faire un tour afin de garder un œil sur lui. C’est parce qu’elle avait connu la faim, le froid et l’humiliation à à peine treize ans que Lena était autant sur ses gardes. Elle refusait que Justin subisse le même sort, surtout du haut de ses onze ans. Poudlard est censé être l’endroit le plus sûr au monde, mais ces dernières années, la réputation de l’école avait légèrement flanchée.
Justin avait confié à sa grande sœur ses inquiétudes et il lui avait proposé de passer un petit moment ensemble, loin de tout le tumulte des étages inférieurs. Lena avait cru comprendre que le Gryffondor passait régulièrement à la Tour d’Astronomie, surtout en compagnie de Phoebe. Elle se réjouissait que son frère s’était fait une meilleure amie dès son arrivée à Poudlard, elle qui n’avait jamais eu cette chance. Il fallait dire que la Serdaigle a son caractère à elle et qu’elle préfère la solitude afin de garder les idées claires. Lena avait donné rendez-vous à Justin au crépuscule, le dimanche, peu avant le dîner. Le lendemain, les deux Chasemane retourneraient en cours, comme toutes les semaines auparavant et toute les semaines qui suivraient. Mais pour l’instant, le frère et la sœur s’autoriseraient un moment de tranquillité et de liberté de penser que tout cela n’est pas réel. Malheureusement, lorsqu’ils redescendraient les marches de la tour pour s’engouffrer dans leurs lits respectifs, la réalité les rattrapera.
Lena tenta de chasser ces pensées de son esprit en franchissant les dernières marches de la tour. L’exercice était difficile lorsque l’on n’y était pas habitué. Elle prit quelques minutes à retrouver un souffle normal en s’appuyant contre la rambarde glacée. Elle contemplait le soleil qui allait bientôt disparaître sous les collines Écossaises. En hiver, les journées sont beaucoup plus courtes mais le printemps n’allait plus tarder à arriver. Le temps était relativement doux pour un mois de février, et la buée qui sortait de la bouche de la Serdaigle n’était que très peu épaisse. Progressivement, le silence qui régnait au sommet de la Tour d’Astronomie s'estompait et Lena entendit les pas de son frère s’emparer de la pièce. Elle se retourna vers l’escalier et aperçut son visage.
- Coucou Justin, souffla Lena d’une voix paisible. Alors, comment vas-tu depuis quelques jours ?
La Serdaigle s’assit sur un des bancs de cours et invita son frère à prendre place à côté d’elle. Elle alluma une flamme avec sa baguette pour leur tenir un minimum chaud. La température n’était pas glacial mais c’était le 14 Février tout de même.

Justin était arrivé peu de temps après Lena. En réalité, elle ne saurait dire combien de temps elle était restée-là toute seule, mais cela lui avait semblé une éternité. À l’inverse, une heure passée à observer le paysage d’où qu’elle soit pouvait passer comme cinq minutes, mais ce soir-là c’était différent. Elle était impatiente de voir enfin son petit frère après qu’il lui ait confié tous ses tracas. Il avait tout de même écrit sur papier qu’il voyait en rêve Tom et elle mourir. En ces termes-là. Noir sur blanc. Lorsque la Serdaigle avait lu ces quelques lignes où la trace de larmes était visible, elle avait tout de suite compris que son petit frère avait besoin d’elle.
Habituellement d'humeur plus enjouée, Justin avait un regard vide, mélancolique. N'importe quel être humain aurait pu deviner que le garçon n'était pas dans son assiette. Sa voix était faible et sa respiration lente. Lui, qui avait l'habitude de monter au sommet de la Tour d'Astronomie, avait récupéré plus rapidement son souffle que sa grande sœur. Il s'assit auprès de Lena sans répondre avec détails à sa question. Il évitait visiblement les confessions. Mais Lena ne lâcherait pas le morceau pour autant. Il avait eu l'air d'être enchanté par une rencontre, dans sa lettre. Il lui fallait sûrement un peu de temps avant de vider son sac. La Serdaigle n'avait pas l'habitude de prendre les choses avec des pincettes. Mais elle avait comprit que son petit frère était dans une mauvaise posture et si elle voulait le réconforter elle devait faire preuve de délicatesse, ce qui allait être difficile.
– Oui, c'est vrai c'es une jolie vue.
Elle prit une pause, observant Justin qui contemplait le soleil couchant sans dire un mot. La lumière s'éteignait peu à peu et ne parvenait pas à réchauffer le visage du garçon malgré ses reflets dorés. Justin avait toujours l'air maussade. Cette vision attrista la Serdaigle qui ne savait pas vraiment comment s'y prendre pour réconforter son petit frère. C'était son rôle de le protéger, de le rassurer, mais elle n'avait aucune idée de la manière dont s'y prendre. Ces longues années passées loin de Justin, quand il n'était pas encore à Poudlard, l'avaient aliéné de ses instincts naturels pour une grande sœur. Lena se pinça la lèvre, réfléchissant à ce qu'elle pouvait bien dire pour tirer les vers du nez à son frère. Elle pouvait tenter une blague, mais elle n'était pas franchement inspirée. Elle pouvait également lui parler de Phoebe, pour éviter de rentrer trop brusquement dans le vif du sujet, et elle pouvait deviner qu'il n'allait pas tergiverser longtemps sur le sujet. Il avait vraiment l'air renfermé sur lui-même.
– Et Phoebe va bien ? Elle s'en sort dans ses cours ?
En réalité, Lena s'en fichait pas mal des cours de la première année. Tout ce qui lui importait, c'était le bien-être de son petit frère. C'était tout ce qui lui importait au monde en ce moment même.
– Moi ça va. C'est surtout à toi qu'il faudrait demander ça... Justin, fit-elle en posant une main sur l'épaule de son frère, tu peux tout me dire, parle-moi, je t'en prie. Parle-moi de ces rêves que tu fais. Ça fait longtemps que tu les as ?
Mettre ainsi ce sujet sur le tapis ne pouvait que bousculer Justin, mais il fallait qu'elle sache. Et elle n'allait pas y aller par quatre chemins.

Impossible pour Lena de capter le regard de son frère. Il avait les yeux dans le vide, regardait mélancoliquement le soleil couchant. Elle se demandait à quoi il pouvait bien penser. Au sujet de leur rencontre sans aucun doute. Peut-être avait-il les images des ses rêves en ce moment même dans la tête. Lena senait que Justin était torturé, qu’il était piégé avec des pensées morbides qu’il ne pouvait se retirer de l’esprit et qui le tourmentaient. Lena avait été dans la même position pendant et après la période des cachots. Elle remerciait le sort d’avoir épargné Justin d’une telle expérience. Tom et elle avaient surmonté le choc plutôt facilement, mais un première année ne pouvait pas vivre ce genre de violences de la même manière.
La Serdaigle était heureuse de savoir que son petit frère s’était fait une meilleure amie. Il lui fallait un soutien de la part d’un camarade de son âge pour l’aider à conserver son courage et sa ténacité. Or, à la mention de Phoebe, Justin baissa la tête, fronça les sourcils, comme si il était vexé de quelque chose. S’étaient-ils disputés ? N’aimait-il pas parler d’elle ? Tout cela devenait trop compliqué pour Lena qui ne savait pas comment s’y prendre pour réconforter un petit frère apeuré. Elle hésita puis s’exprima avec ses propres mots, comme si elle parlait à Prudence ou à Ariel. Il était inutile de jouer un rôle, de mettre un masque. C’était d’une grande sœur dont Justin avait besoin et qui plus est, de Lena elle-même.
– Ah oui, l’Histoire de la magie… Tout le monde est paumé en première année, même les sorciers qui connaissait le monde magique depuis longtemps, fais-moi confiance. Mais tu verras, plus tard les leçons vont se spécifier et tu aborderas des sujets beaucoup plus intéressants. Pour l’instant, vous êtes dans la généralité et dans l'apprentissage basique et sans saveur de l’histoire.
Lena se pût s’empêcher de repenser à cette discussion fort intéressante qu’elle avait eu avec sa professeure préférée, la professeure Jones. Elle avait vécu ce qui paraissait mille vies par rapport au jeune âge de Lena. Elle adorait l’écouter raconter ses différentes aventures en tant qu’archéomage, à la manière d’Indiana Jones.
– Moi je l’adore la prof d’Histoire, Jones. Je te l’avais raconté, elle était archéomage avant. Elle est passionnante quand elle raconte ses aventures. Tu devrais lui laisser une chance de t’en raconter quelques unes. Elle est vraiment incroyable cette femme.
Les yeux pleins d’admiration, elle observait les étoiles doucement commencer à apparaître haut dans le ciel. Puis, elle posa à nouveau son regard en direction du Gryffondor. Bien sûr, comme par hasard, Phoebe s’en sortait mieux en cours. Cela n’était absolument pas dû à leur différence de statut sanguin. Peut-être était-ce pour cela qu’il semblait vexé. Lena ne connaissait pas tant que cela Phoebe, elle avait peut-être baigné depuis toute petite dans cette culture sorcière, elle connaissait déjà les bases de chaque matière, mais cela ne devait en aucun cas décourager Justin. Il fallait qu’il reprenne confiance en lui et surmonter cette difficulté que tous les nés-moldus ont connu. D’un ton ferme, elle tenta de rassurer son frère, sans le lâcher des yeux.
– Moi aussi j’avais eu du mal à démarrer en première année, et Tom aussi. Mais tu ne dois absolument pas perdre confiance en toi, tu as autant ta place que les autres élèves dans cette école. Les professeurs le savent que certains viennent de découvrir la magie. Il y a même des nés-moldus plus doués que des sang-purs parfois, ça ne veut rien dire…
Lorsque Justin lui confia ses rêves avec une précision inquiétante, le sourire de Lena s’estompa. Il était en larmes et elle passa maternellement ses bras autour de ses petites épaules. Ses larmes étouffèrent progressivement son récit et il s’effondra sur les épaules de sa grande sœur. Lena ne dit rien en attendant que son frère se calme et le serra contre elle du mieux qu’elle pût. En voyant ce spectacle, elle aussi avait fait coulé une larme. Les deux Chasemane restèrent un moment sans rien dire, Justin dans les bras de sa sœur. Puis, Lena redressa son petit frère, les mains lui soutenant les bras, et le regardait dans les yeux et prononça lentement pour peser chacun de ses mots, mais fermement:
– Écoute-moi bien, Justin. Il faut que tu comprennes que ce ne sont que des rêves. Rien de plus.
Même si elle avait appris en cours de divination que certains rêves étaient prémonitoires et qu’ils étaient reliés à une sorte de réalité, elle refusait catégoriquement de croire qu’un jour, elle serait tuée par sa faute, cela n’avait aucun sens.
– Il faut que tu comprennes que jamais cela se produira, et que jamais tu ne serais pour quoi que ce soit. Tu vois, tu faisais les mêmes cauchemars il y a deux ans et on est rentrés sains et sauf avec Tom. Si c’est quelqu’un qui t’as enchanté pour que tu fasses ce genre de rêves…
Lena se tût, laissant sa phrase en suspens. Il était tout à fait possible qu’on l’ait enchanté. Pour quelle raison, elle l’ignorait. Deux années auparavant, Tom et elle avaient prit soin de mettre sous silence les réels événements qu’ils avaient vécus. Leurs parents avaient été informés des grandes lignes de cette année-là: les cachots, Blackman. Mais les deux Chasemane ne leur avaient pas confié la réalité de ces durs mois. Il avait été beaucoup trop difficile de replonger si tôt dans de pareils souvenirs, et s’ils avaient été honnêtes, ils n’auraient jamais remis les pieds à Poudlard.
Maintenant c’était au tour de Justin de subir les injustices contre les nés-moldus. D’un côté Lena s’en voulait de ne pas l’avoir préservé de ce monde qui pouvait se montrer cruel malgré son merveilleux attrait, mais d’un autre côté, elle se disait qu’ils avaient autant le droit que les autres sorciers d’en faire partie et que c’était trop injuste de laisser gagner les pro-sang-purs. Or, dans ce dilemme, c’était la sécurité de son petit frère qu’elle mettait en jeu.

Visiblement, Justin n’avait plus envie de parler de banalités comme les cours d’Histoire de la Magie ou de sa première année. Les deux Chasemane étaient rentrés dans le vif du sujet: les cauchemars du petit frère. Comment Lena devait-elle se comporter pour être la plus rassurante possible, pour alléger son frère de ses tourments ? Elle ignorait tout de ce qu’était d’être une grande sœur. Elle avait été séparée de Justin lorsqu’il avait six ans, elle n’avait jamais été confrontée à une situation aussi délicate. Tom savait naturellement faire ce genre de choses, et avec n’importe qui en plus. Pourquoi Lena n’était-elle pas aussi douée que son grand frère pour remonter le moral des gens ?
La curiosité et la ténacité des Chasemane était bel et bien perpétuée en la personne de Justin. Lena savait qu’il était inutile de lui cacher plus longtemps le secret qu’ils avaient cousus avec Tom. Justin était à Poudlard et non seulement il n’était pas aussi dupe qu’il l’était il y a un an, mais il en allait désormais de sa sécurité. Il devait savoir ce que sa fratrie avait enduré en son absence afin qu’il sache ce que peut-être il l’attend.
– C’est vrai Justin, tu dois savoir.
Mais était-il seulement prêt à entendre ça ? Bien sûr, il y avait des première années dans les cachots cette année-là, et ils s’en sont plus ou moins sortis psychologiquement. Confronter son petit frère à ce genre de récits le terrifiera sans doute, mais il ne sera que mieux préparé à ce qui l’attend dans le monde des sorciers. Une discrimination des nés-moldus. Lena redressa Justin et se mit en face de lui. Elle voulait le regarder dans les yeux pour lui avouer ce secret si difficile à encaisser.
– Comme tu le sais, il y a deux ans, le 31 octobre, des néo-mangemorts sont arrivés dans l’école et ont capturé les nés-moldus et ont confisqués leur baguettes. Ils nous ont mis dans les cachots de l’école jusqu’à juin. Ce que tu ne sais pas, c’est que certains néo-mangemorts se sont… amusés à nous lancer des sortilèges doloris lorsque nous voulions nous révolter. Nous étions considérés comme des moins que riens, traités comme de la vermine.
La Serdaigle déglutit difficilement. Mettre des mots sur les atrocités qu’elle a vécu rendait la chose réelle une fois de plus. Et il était si douloureux de replonger dans ses souvenirs après avoir difficilement fait le deuil de cette période. Mais elle le faisait pour son frère, pour qu’il sache. Lena essayait de chasser de son esprit la possibilité que quelque chose de similaire arrive à son petit frère. Les badges rouges, les lettres, la bibliothèque. Tous les éléments étaient rassemblés pour que le sort se réitère. Mais avec la patrouille des Aurors, ce n’était d’un autre côté pas concevable. Ce qui était certain, c’était que c’était le brouillard dans les esprits de tous. Enfin, peut-être pas des porteurs du badge rouge…
À la mention de Phoebe, Lena tira une légère grimace. À première vue, cette Serdaigle était une petite fille adorable, mais cela pouvait aussi cacher quelque chose. La voir porter le badge rouge et traîner avec un né-moldu était très suspicieux. Si au début de l’année, Lena était ravie de compter Phoebe parmi les amis de son frère, aujourd’hui, elle se méfiait de plus en plus d’elle. Justin semblait lui accorder sa plus grande confiance. Mais on fait des choses dangereuses lorsqu’on est amoureux. Car visiblement, c’était le sentiment qu’il éprouvait pour cette jeune Serdaigle. Lena ne croyait pas à un âge minimum pour ce genre de choses. Cela témoignait d’une certaine maturité de son frère et elle en était très fière. Elle posa une main sur l’épaule du petit Gryffondor.
– Oui, c’est vrai, tous les sang-purs ne pensent pas comme ça. Je dirais même que les pro-sang-purs ne sont qu’une minorité. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut sous estimer leur rage. En général, ces personnes feraient absolument tout pour voir les sang-mêlés et plus particulièrement les nés-moldus disparaître du monde magique… Tu peux également avoir confiance en Prudence. Elle est dans ta maison et ta préfète en plus de cela. N’hésite pas à aller la voir si tu as un souci. Elle est très gentille et elle sait que tu est mon frère. Mais pour ce qui est de Phoebe… tu devrais attendre un peu avant de lui accorder autant de confiance. Il n’y a que le temps qui peut construire ce genre de choses, crois-moi. Tu sais pourquoi elle porte ce badge ?
Lena était un peu brutale avec son frère. Balayer ainsi d'un revers de main les étoiles dans les yeux d'un jeune amoureux. Mais tout ce qui lui importait, était sa sécurité avant tout. Rien d'autre. Et si Phoebe s'avérait dangereuse, elle n'hésiterait pas à tenter de résonner Justin.

Maintenant que la vérité avait été entièrement révélée à Justin, Lena ne pouvait plus faire marche arrière. Ces informations aussi terrifiantes que vraies lui trotteraient probablement dans la tête pendant des semaines voire des mois. Lena n’avait toutefois pas eu le choix. Justin n’est pas dupe et il aurait appris la réalité de cette année-là d’une manière ou d’une autre. Il était désormais prêt à affronter quelque malheur qui pourrait s'abattre à nouveau sur le château. Peut-être que les néo-mangemorts se décideraient à attaquer une fois de plus Poudlard, mais il était aussi possible que désormais ils renoncent à toute attaque au nom d’un sang soit disant plus pur — du moins, tant que Justin resterait à Poudlard. Cette dernière possibilité avait de minces chances de devenir réalité, et même si Lena n’y croyait pas une seconde, elle se disait que cette chance existait tout de même.
La Serdaigle sourit à son frère. Elle ne doutait pas de sa témérité et savait qu’il pouvait même se montrer imprudent face au danger. À son âge, Lena n’était pas aussi courageuse que lui, préférant la théorie à la pratique et passant toujours en dernier en classe de duel. Lors de l’offensive menée en fin d’année par la résistance lors de l’année Blackman, Lena avait prit soin de se cacher sous une table jusqu’à ce que quelqu’un l’aide à se tirer de la Salle de Bal. Mais elle savait très bien que personne ne lui en voudrait, elle qui n’était qu’en troisième année, affamée, épuisée, et sans baguette. Les pulsions d’imprudence de Justin semblaient venir de là: il se considérait comme un poids pour les autres et il était convaincu qu’il ne servait à rien si il n’avait pas le niveau d’un septième année. Or, il venait d’entrer à Poudlard. Il était évident qu’il n’ait pas les compétences pour se battre au même titre qu’un professeur par exemple. Il se sent également obligé de protéger toute sa famille et ses amis du haut de ses onze ans.
– Je n’en doute pas, lui confia-t-elle avec un sourire. On ne peut jamais savoir si quelque chose du genre va se reproduire... Mais vu la raclé qu’on leur a mise, ça m’étonnerait qu’ils remettent les pieds ici, dit-elle le ton rieur pour le rassurer.
Alors que Lena n’avait nullement insinué quoi que ce soit concernant l’amie de son frère, Justin sortit les crocs et répondit du tac-au-tac, une point de rage dans sa voix. Lena avait essayé de prendre le sujet par des pincettes et de ne pas accuser à tort Phoebe qui, aussi bien qu’elle pouvait être douteuse, pouvait avoir de bonnes intentions envers son frère. Alors oui, elle se méfiait beaucoup d’elle et peut-être que Justin s’en rendait compte. Mais le fait est que Lena se reçut une belle tirade excessivement féroce de la part de son petit frère, alors qu’elle avait essayé de rester diplomate, ce qui la contraria profondément. Elle fronça les sourcils en direction de son frère, et lui lança un regard mécontent. Il n’y avait pas que sur le champ de bataille que Justin était farouche. Il ne supportait visiblement pas qu’on s’en prenne à sa Phoebe…
– Justin calme-toi maintenant. Je ne pouvais pas savoir et je ne l’ai accusé de rien, lui lança-t-elle fermement.
Lena essayait de ne pas se montrer aussi furieuse qu’il avait bien pu l’être quelques secondes auparavant et se contenait comme elle pouvait. Elle ne voulait surtout pas gâcher ce moment entre frère et soeur qu’ils s’étaient offerts, mais si il manquait encore à ce point de tact elle n'hésiterait pas à le recadrer.
– Tu comprends bien que je suis alerte parce que je m’inquiète pour toi. Comme je m’inquiète pour Tom soit dit en passant. J’en ai déjà fait l’expérience, on ne peut faire confiance à n’importe qui. Si tu me dit que Phoebe a de bonnes intentions, je veux bien te croire. Fais tout de même attention à ne pas accorder ta confiance aussi rapidement. Même si Phoebe te veux du bien et tente de comprendre ce qu’il se passe au sein de ce club, elle prend le risque d’être manipulée, jeune qu’elle est.
Justin prendrait probablement ces avertissements mal, mais peut importait à Lena. Il serait prévenu. Justin s’était hâtivement emporté lorsque Lena lui avait confié ses doutes, et à présent, c’était clair. Les sentiments qu’il éprouvait pour Phoebe ne pouvaient être que de l’amour. Lena avait évité le sujet jusqu’à présent, mais elle n’avait plus le choix, elle était dans une impasse.
– On peut faire de dangereuses choses quand on est amoureux, tu sais, suggéra-t-elle.
Lena n’avait encore jamais eu ce genre d’expériences mais c’était ce que tout le monde répétait tout le temps. Les contes et récits anciens gardaient les lecteurs de ce sentiment si puissant qu’il peut à la fois combler de joie et anéantir à la fois. Tristan et Iseult, Lancelot et Guenièvre. Tous sont damnés à aimer l’autre. Mais Justin était loin d’appartenir à un roman de chevalerie et son destin serait sans doute moins sombre que ces héros.